Moïse Tshombé
Moïse Tshombé, également retranscrit Tshombe ou Tchombe, né le Modèle:Date et mort le Modèle:Date, est un homme d'État congolais. Il a été président de l'État sécessionniste du Katanga de 1960 à 1963, puis Premier ministre de la république démocratique du Congo de 1964 à 1965.
Biographie
Jeunesse
Fils d'un homme d'affaires, Joseph Kapend Tshombe, premier millionnaire africain de l'époque coloniale belge, aîné de 11 enfants et descendant direct de Mwata Yamvo ou Mwant Yav Mushid Ier, empereur des Lundas (ou Aruund), Moïse Tshombé est né à Musumba au Congo belge. Il fait ses études dans une école des missionnaires américains méthodistes à Mulungwishi dans la province actuelle du Haut-Katanga puis à Kanene dans la province actuelle du Haut-Lomami. L'administration coloniale lui refusa l'autorisation d'aller poursuivre des études supérieures à l'étranger comme l'avait prévu son père. C'est ainsi qu'il fut contraint de poursuivre des études supérieures de comptabilité par correspondance (Canada).
Dans les années 1950, il développa une chaîne de magasins au Katanga, et s'impliqua en politique, fondant le parti CONAKAT, prônant un Katanga indépendant.
Élections de 1960
L'indépendance du Katanga
Aux élections législatives de 1960, la CONAKAT obtint ses meilleurs résultats dans son fief de la province du Katanga. La république démocratique du Congo devint indépendante, et Tshombe et la CONAKAT déclarèrent la sécession de la province du reste du Congo le Modèle:Date-. De graves troubles ethniques éclatèrent alors, les Katangais se mirent à chasser les immigrés kasaïens, de l'ethnie luba, que l’administration coloniale avait fait venir pour travailler dans les mines. Il y eut de nombreux morts.
Chrétien, anti-communiste, pro-occidental, Tshombe fut élu président du Katanga en Modèle:Date-, annonçant : Modèle:Citation (en référence aux troubles apparus dans le pays dès la proclamation de l'indépendance). Certains analystes pensent que Tshombe a fait sécession parce qu'il n'était pas dans le gouvernement de Lumumba.
Souhaitant la continuation des liens privilégiés avec la Belgique et notamment avec l'Union minière du Haut Katanga, Tshombe demanda au gouvernement belge une aide pour constituer et former une armée katangaise, et reçut un soutien important de l'ancienne métropole coloniale, conduisant à une détérioration notable des relations entre le nouvel État indépendant du Congo et le gouvernement belge.
La France voulant profiter elle aussi de minerais katangais, envoie à Moïse Tshombe le renfort du mercenaire Bob Denard et de ses hommes. Il bénéficie en effet du soutien des réseaux de Jacques Foccart, le « monsieur Afrique » de l’Élysée<ref name=":0" />.
Le Premier ministre Patrice Lumumba et son successeur Cyrille Adoula demandèrent de leur côté l'intervention des forces des Nations unies pour préserver l'unité du Congo ; les Nations unies répondirent favorablement à cette demande.
Rôle dans l'assassinat de Patrice Lumumba
Le Premier ministre du Congo, Patrice Lumumba, est arrêté en Modèle:Date- à la suite de ses tensions grandissantes avec le Président Joseph Kasa-Vubu et le chef de l'armée Joseph Mobutu. Il s'évade peu après et tente de gagner Stanleyville pour y organiser un contre-gouvernement. Arrêté à Port-Francqui le Modèle:Date-, il est placé en détention à Thysville.
Les 12 et Modèle:Date-, une mutinerie militaire éclate dans la ville, pour des raisons financières. C'est Modèle:Citation<ref name="commision-enquete-belge-p306">ENQUÊTE PARLEMENTAIRE visant à déterminer les circonstances exactes de l'assassinat de Patrice Lumumba et l'implication éventuelle des responsables politiques belges dans celui-ci, Chambre des représentants de Belgique, 16 novembre 2001, DOC 50 0312/006, pages 306-308.</ref>. L'ambassadeur belge au Congo, Dupret, en informe son gouvernement et conseille Modèle:Citation.
À cette date, le gouvernement congolais et le gouvernement katangais sont encore en négociation<ref name="commision-enquete-belge-p243">ENQUÊTE PARLEMENTAIRE visant à déterminer les circonstances exactes de l'assassinat de Patrice Lumumba et l'implication éventuelle des responsables politiques belges dans celui-ci, Chambre des représentants de Belgique, 16 novembre 2001, DOC 50 0312/006, page 243.</ref> et se sentent tous les deux menacés par Lumumba et ses partisans. Le gouvernement katangais est ainsi à cette date en proie à des attaques de troupes lumumbistes dans le Nord-Katanga<ref name="commision-enquete-belge-p305">ENQUÊTE PARLEMENTAIRE visant à déterminer les circonstances exactes de l'assassinat de Patrice Lumumba et l'implication éventuelle des responsables politiques belges dans celui-ci, Chambre des représentants de Belgique, 16 novembre 2001, DOC 50 0312/006, page 305.</ref>. Une action commune contre Lumumba est donc dans leur intérêt commun.
Le gouvernement congolais livre finalement son prisonnier au gouvernement katangais de Moïse Tshombe le Modèle:Date-. Il meurt le même soir, entre 21 h 40 et 21 h 43 d'après le rapport d'enquête belge.
Tshombe refuse d'assumer le décès de Lumumba affirmant, d'une part qu'il ne savait rien du transfert de Lumumba vers le Katanga, et d'autre part que son prisonnier est mort lors d'une tentative d'évasion.
Concernant la première affirmation, la commission d'enquête belge de 2001 est formelle Modèle:Citation. Pour la commission, Tshombe a bien donné son accord au transfert de Lumumba sur son territoire. Elle cite en particulier une déclaration officielle katangaise confirmant l'accord du gouvernement sécessionniste.
Concernant la seconde affirmation de Moïse Tshombe sur son absence d'implication dans la mort de Lumumba, la commission d'enquête indique d'abord : Modèle:Citation. Mais elle considère que plusieurs faits sont assez précis. À 16 h 50 l'avion de Lumumba atterrit. De 17 h 20 à 20 h 30 Lumumba et ses deux compagnons sont enfermés à la « maison Brouwez », Modèle:Citation. Il est possible Modèle:Citation. La décision de Tshombe de l'exécution de Lumumba est donc certaine pour la commission, mais quatre représentants belges qui soutiennent la sécession katangaise y participent aussi : Modèle:Citation. Modèle:Citation
La fin de l'indépendance
Peu après la mort de Lumumba, les relations sont rompues entre les gouvernements congolais et katangais et la guerre reprend.
Les Nations unies mirent deux ans à reprendre le contrôle du Katanga pour le compte du gouvernement congolais.
En 1963, la prise du Katanga par les forces des Nations unies contraint Moïse Tshombe à l'exil vers la Rhodésie du Nord (actuelle Zambie), et plus tard vers l'Espagne.
Le geste de trop
En Modèle:Date-, il prend contact avec la revue belge Pourquoi pas ? et remet à Pierre Davister<ref>Envoyé spécial à Madrid de cette revue bruxelloise.</ref> à Madrid le récit signé et paraphé à chaque page pour confirmation sur l'assassinat de Lumumba (première partie). La revue (no 2357) paraît le Modèle:Date- mais est immédiatement retirée par l'autorité belge des kiosques et des librairies pour cause d'affront à un président d'un pays ami. Cette revue datée du vendredi Modèle:Date- 64, non expurgée, est devenue rarissime<ref>« Tshombe nous révèle Comment est mort Lumumba », Pourquoi pas ?, article préfacé par Pierre Davister, envoyé spécial à Madrid.</ref>. En couverture, le portrait de Lumumba lié<ref>Lumumba est en chemise blanche ouverte. Seul un bout de corde apparaît.</ref> signé par J. Remy<ref>Troisième vente Millon, Bruxelles, lot 25 de leur troisième vente, deux revues 2357 : l'une interdite et l'autre censurée du 1 février</ref>. Un second article intitulé « Que sont devenus les corps ? » était prévu pour la semaine suivante. Cette brochure ne figure pas dans les collections de la Bibliothèque royale de Belgique.
Il est reçu à Paris par le président de Gaulle en Modèle:Date-<ref name=":0">Modèle:Article</ref>. Le soutien de Paris s’accompagne en France d'une campagne de presse orchestrée par Jean Mauricheau-Beaupré à la demande de Foccart visant à présenter Tshombé comme le seul homme capable de restaurer la stabilité au Congo<ref name=":1" />.
Élections de 1965
Premier ministre du Congo réunifié
En 1964, il retourna au Congo pour prendre part à un nouveau gouvernement de coalition en tant que Premier ministre. Il prit la décision d'expulser de Kinshasa les Congolais de Brazzaville (les 2 capitales sont situées de part et d'autre du fleuve). Il négocia avec la Belgique la question de la répartition entre les deux pays de la charge des dettes publiques et le sort des participations dans les compagnies minières et autres sociétés coloniales<ref>« Les relations belgo-congolaises », Courrier hebdomadaire du CRISP 14/1966 (Modèle:N°321-322), p. 1-44.</ref>. Il fut démis un an plus tard par le président Joseph Kasa-Vubu. En 1966 Joseph Mobutu, qui avait évincé Kasa-Vubu un an plus tôt, accusa Tshombe de trahison ; celui-ci prit de nouveau la fuite pour l'Espagne.
Arrestation et mort
En Modèle:Date-, un tribunal congolais le condamne à mort par contumace lors du procès Tshipola pour : avoir proclamé la sécession du Katanga ; avoir aliéné l’indépendance économique du pays lorsqu'il était Premier ministre en signant les accords réglant le contentieux belgo-congolais ; avoir constitué une armée de mercenaires ; avoir maintenu la subversion dans les unités katangaises de l’Armée nationale congolaise en vue de renverser le nouveau régime.
Le Modèle:Date-, le jet BAe 125 dans lequel il voyageait est détourné vers l'Algérie par une de ses relations d'affaires qui voyageait avec lui, Francis Bodenan, qui travaillait pour le régime de Mobutu et la CIA américaine<ref name=":1">Modèle:Ouvrage</ref>. Modèle:Citation Francis Bodenan, dans une interview dans Jeune Afrique<ref>Jeune Afrique, Modèle:N°772, 24 octobre 1975.</ref> déclare d'ailleurs qu'il a agi sur ordre direct de ce dernier.
Considéré comme le meurtrier de Lumumba, Tshombé est placé en résidence surveillée par le pouvoir algérien de Houari Boumédiène. Le régime de Mobutu demande son extradition, qui aurait selon toute vraisemblance conduit à son exécution, refusée par Boumédiène qui déclare préférer un procès international<ref name=":1" />.
En Modèle:Date-, toujours privé de liberté, il meurt en Algérie, officiellement d'une crise cardiaque<ref>Tshilombo Munyengayi, « Tshombe est enlevé le 30 juin 1967 et meurt mystérieusement le 30 juin 1969 », Le Potentiel, 17 juillet 2006.</ref>.
Moïse Tshombé dans la fiction
Il est incarné par Pascal Nzonzi dans le film Lumumba (2000) de Raoul Peck, puis à nouveau par le même acteur dans Mister Bob (2011), un téléfilm de Thomas Vincent. En 2016, il est joué par Danny Sapani dans Jadotville (The Siege of Jadotville) de Richie Smyth.
Annexes
Bibliographie
- Moise Tshombe, Mémoires, ÉditionsModèle:Lesquelles, 1975.
- Moise Tshombe, Quinze mois de gouvernement au Congo, Éditions Table ronde, 1966.
- Jacques Burlion, Moise Tshombe abandonné.
- Guy Weber, Le Katanga de moise Tshombe ou le drame de la loyauté, Éditions Louis Musin, 1983.
- Jules Chome, Moise Tshombe et l'escroquerie Katangaise.
- Joseph Kayomb Tshombe, Le rapt de Tshombe. La mise à mort du leader congolais, Éditions Quorum, 1997.
- Kayemb Uriel Nawej, Moise Tshombe Visionnaire assassiné, Éditions Booksurge Publishing, 2006.
- Pierre De Vos, Tshombe.
- Ikos Rukal Diyal, Joseph Emmanuel, Moise Tshombe : Sécessioniste ou Nationaliste, Éditions L'Harmattan, 2014.
- Florent sené Tshombe à Alger: Une certaine histoire de la décolonisation africaine, Éditions L'harmattan, 2014.
- Kyoni Kya Mulundu, Moise Kapenda Tshombe. La renaissance du Katanga, Tome 1, Éditions Edilivres, 2015.
- Kyoni Kya Mulundu, Moise Kapenda Tshombe. Premier ministre du Congo-Lépoldville Tome 2, 2e partie, Éditions Edilivres, 2015.
- Jacques Brassine de la Buissière, La sécession du Katanga : Témoignage, Éditions L'Harmattan, 2016.