Voir la source de Langue agglutinante

[[Fichier:Agglueu.png|vignette|Carte des langues agglutinantes en Europe]]
En [[typologie morphologique]], une '''langue agglutinante''' est une [[langue]] dont les [[Trait (linguistique)|traits grammaticaux]] sont marqués par l'assemblage d'éléments basiques appelés [[morphème]]s, un morphème désignant ainsi le plus petit élément porteur d'un trait grammatical précis. Dans une langue agglutinante les mots sont formés par assemblage de ces morphèmes, qui sont hors exception invariables<ref>{{Lien web |langue=fr |auteur=Virginie Chataigner |titre=Le rôle de la typologie linguistique |url=https://fr.babbel.com/fr/magazine/typologie-linguistique-les-familles-de-langues |site=babbel.com |date=30 août 2021 |consulté le=13 novembre 2021}}</ref>.

Les langues agglutinantes forment un sous-groupe des [[langue flexionnelle|langues flexionnelles]]. Le terme de ''langue agglutinante'' a été créé en [[1836]] par le [[linguiste]] allemand [[Wilhelm von Humboldt]]. Il est formé à partir du [[verbe]] [[latin]] {{lang|la|''agglutinare''}}, signifiant « coller ensemble ». L'autre groupe des langues flexionnelles est celui des [[langues synthétiques]].

Comptent parmi les langues agglutinantes les [[langues dravidiennes]] ([[tamoul]], [[kannada]], [[télougou]]), les [[langues austronésiennes]] ([[indonésien]], [[tagalog]]), les [[langues altaïques]] ([[langues turques|turc]], [[langues mongoles|mongol]]), les [[langues ouraliennes]] ([[estonien]], [[finnois]], [[hongrois]]), le [[coréen]], le [[japonais]], le [[basque]], le [[nahuatl]], le [[géorgien]], l'[[abkhaze]], le [[swahili]], le [[somali]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Helena Dubnov|titre=A Grammatical Sketch of Somali|éditeur=Rüdiger Köppe Köln|date=2003}}</ref>, le [[zoulou]], le [[quechua]], l'[[Aymara (langue)|aymara]]<ref>''Les langages de l'Humanité'', Michel Malherbe, {{Éd.}} Robert Laffont, 1995, {{ISBN|2-221-05947-6}}.</ref>. L'[[arménien]] est la seule langue des [[langues indo-européennes]] à être plus agglutinante que [[langue flexionnelle|flexionnelle]]<ref>[https://books.google.fr/books?id=LOZ-MuYnaYoC&pg=PA469&lpg=PA469&dq=arm%C3%A9nien+agglutination&source=bl&ots=JvrGJ5vwWv&sig=7kxqMXjhZaV_MJwD4vrJ2bO9MgA&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiHtqGvpufPAhVLWBoKHZ-pCHEQ6AEIPjAH#v=onepage&q=arm%C3%A9nien%20agglutination&f=false Claire Forel, ''La Linguistique sociologique de Charles Bally : étude des inédits'', Publications du Cercle Ferdinand de Saussure, Droz, Genève, 2008, p. 469. ]</ref>{{,}}<ref>{{lien web |titre=Armenian language resources |url=http://armenianlanguage.org/origins/origins.html |site=armenianlanguage.org |consulté le=21-04-2023}}.</ref>.

L'[[inuktitut]] est aussi une langue agglutinante mais appartient à un type de langue agglutinante particulier : les [[langue polysynthétique|langues polysynthétiques]]. Certaines [[langue construite|langues construites]] à visée internationale, comme l’[[espéranto]] ou le [[pandunia]], possèdent également des mécanismes d'agglutination, bien que très sommaires.

Certaines langues de fiction, comme le [[klingon (langue)|klingon]], le [[noir parler]] et le [[novlangue]], sont fondées sur une syntaxe agglutinante.

== Exemples ==
* En [[finnois]], la forme {{lang|fi|''taloissani''}} (dans mes maisons) se décompose en : {{lang|fi|''talo''}} « maison » + ''i'' marque du pluriel + {{lang|fi|''ssa''}} marque de l'[[inessif]] (« dans ») + {{lang|fi|''ni''}} suffixe indiquant un possesseur de première personne du singulier (« mon, ma, mes »).

* En [[basque]], la forme ''etxeetan'' (« dans les maisons ») se décompose en ''etxe'' « maison » + ''-etan'' marque de l'[[inessif]] pluriel, « dans les ». Aussi, ''izokinaren'' (''izokin'' «saumon » +  -''aren'' marque du [[génitif]] singulier ''-'' « du saumon, qui appartient au saumon »''), hegazkinerantz'' (''hegazkin «'' avion » ''+ -e-'' (voyelle euphonique) + -''rantz,'' marque de l'[[adlatif]] singulier ''-'' « vers l'avion » ''), Frantziatik (Frantzia'' « France » ''+ -tik'' marque de l'[[ablatif]] singulier - « depuis (la) France »).

* En [[tamoul]], la forme {{lang|ta-Latn|வீடுகளில்}}, soit en transcription « vīṭukaḷil » (dans les maisons) se décompose en {{lang|ta-Latn|''vīṭu''}} « maison » + {{lang|ta-Latn|''kaḷ''}} marque du pluriel + {{lang|ta-Latn|''il''}} marque du lieu « dans ».

* Le [[hongrois]] obéit aux mêmes principes<ref>[http://sites.google.com/site/tanuljmagyarul20110121/home/madjaraj_komponantoj/kungluareco L'agglutination dans le hongrois] – Une présentation récapitulative.</ref> : ''ház'' (« la maison ») → ''házam'' (« ma maison ») → ''házaim'' (« mes maisons ») → ''házaimban'' (« dans mes maisons »). Cependant, le pluriel formé à l'aide de la marque ''i'' n'est utilisé que pour la possession. À part celle-ci, il est toujours marqué par un ''k'', que ce soit sur les noms comme dans ''ház'' → ''házak'' (« les maisons ») → ''házakban'' (« dans les maisons »), ou sur les verbes comme dans ''látja'' (« il/ elle le voit ») → ''látják'' (« ils/ elles le voient »)<ref>[http://sites.google.com/site/tanuljmagyarul20110121/home/madjaraj_komponantoj Les éléments agglutinants de la langue hongroise].</ref>.

* En [[turc]], la construction est très similaire : à partir de {{lang|tr|''ev''}} (maison) on forme : {{lang|tr|''evler''}} (les maisons), {{lang|tr|''evlerim''}} (mes maisons), puis {{lang|tr|''evlerimde''}} (dans mes maisons) ou encore {{lang|tr|''evlerimdekiler''}} (ceux qui sont dans mes maisons).

* En [[japonais]], l'agglutination se déroule de manière semblable mais reste très marquée dans la langue moderne par un phénomène de contraction des formes agglutinées entre elles. Ainsi la phrase {{lang|ja|「 寒くなかったでしょうね。」}}, soit en [[transcription et translittération|transcription]] [[méthode Hepburn|Hepburn]] modifiée : « {{lang|ja-Latn|''samukunakatta deshō ne''}} » (« Il ne faisait pas froid, n'est-ce pas ? ») se décompose ainsi : {{lang|ja-Latn|''samuku''}} + {{lang|ja-Latn|''naku''}} + {{lang|ja-Latn|''ari''}} + {{lang|ja-Latn|''ta''}} + {{lang|ja-Latn|''deshô''}} + {{lang|ja-Latn|''ne''}}, plus précisément : {{lang|ja-Latn|''samuku''}} (adjectif signifiant « froid » à la forme suspensive) + {{lang|ja-Latn|''naku''}} (adjectif de négation à la forme suspensive) + {{lang|ja-Latn|''ari''}} (verbe topo-ontologique « être/avoir/il y a » à la forme suspensive, utilisé ici comme auxiliaire adjectival permettant une suffixation temporelle) + {{lang|ja-Latn|''ta''}} (marque du passé dit « explicatif », par opposition au passé narratif) + {{lang|ja-Latn|''deshō''}} (copule marquée d'une sorte de conditionnel adoucissant) + {{lang|ja-Latn|''ne''}} (particule postpositionnelle interrogative, qui implique généralement l'attente d'une réponse ou d'une réaction de la part de la personne interrogée, la plupart du temps une simple approbation, interjection appelée ''[[aizuchi]]''). On passe donc de : {{lang|ja-Latn|''samuku'' + ''naku'' + ''ari'' + ''ta'' + ''deshô'' + ''ne''}} à : {{lang|ja-Latn|''samuku'' + ''nak(u)'' + ''a(ri)'' + '''''t'''ta'' + ''deshô'' + ''ne''}} autrement dit : {{lang|ja-Latn|''samuku'' + ''nak'' + ''a'' + ''tta'' + ''deshô'' + ''ne''}} ou encore : {{lang|ja-Latn|''samuku'' + ''nakatta'' + ''deshô'' + ''ne''}}, ainsi qu'on le présente généralement dans les grammaires modernes simplifiées.
* Le [[géorgien]] présente également une importante capacité à agglutiner de nombreux éléments en plus des désinences flexionnelles. Ainsi ''dans c'est dans les maisons'' se dira ეს სახლებშია (''es sakhlchebchia''), c'est-à-dire ეს (« es » = ce) + სახლ- (« sakhl » radical de სახლი « sakhli » = « maison ») + -ებ- (« eb » = suffixe du pluriel) + le suffixe -ში- (« chi » = postposition signifiant ''dans'') + le suffixe -ა (« a » forme courte suffixée de არის "aris" signifiant « est »). Le système verbal extrêmement complexe du géorgien peut réserver également bien des surprises. À titre d'exemple, sans rentrer dans les détails de formation, დავახატვინებ (''davakhat'vineb'') signifie « je le lui ferai peindre » ou bien დაქალდაო (''dakaldao'') signifie « elle est devenue une femme, disaient-ils ».
* L'[[arménien]], bien que langue flexionnelle, peut présenter le caractère agglutinant dans certaines constructions. Ainsi, la forme flexionnelle {{lang|hy|''im tneri medj''}} (dans mes maisons) se décompose de {{lang|hy|''im''}} (« mes ») + {{lang|hy|''tneri''}} (« maisons » au génitif) + {{lang|hy|''medj''}} (« dans »). On retrouve toutefois bien une agglutination dans la version {{lang|hy|''tnerums''}}, qui assemble {{lang|hy|''tner''}} (« maisons ») + {{lang|hy|''um''}} (suffixe voulant dire « dans ») + {{lang|hy|''s''}} indiquant un possesseur de première personne. Une forme mixte existe également, {{lang|hy|''im tnerum''}}, où l'on retrouve {{lang|hy|''im''}} pour la première personne du singulier et le {{lang|hy|''um''}} à la fin de {{lang|hy|''tnerum''}}. Cependant, l'agglutination est davantage usitée dans les formes familiales et dialectiques de l'arménien.

Il faut noter qu'une langue agglutinante est une langue dont la ''flexion'' est agglutinante (la déclinaison ou/et la conjugaison), mais ce caractère ne doit pas être confondu avec une grande capacité à créer des ''mots composés''. Ainsi, l'[[allemand]], malgré une forte capacité de composition ({{lang|de|''Donaudampfschiffahrtsgesellschaft''}} = Société de navigation à vapeur du Danube), ne fait pas partie des langues agglutinantes. Le principe de la composition (nominale, verbale ou autre) se trouve dans de nombreuses langues qui peuvent avoir un fonctionnement grammatical global très différent.

== Notes et références ==
{{Références}}

== Voir aussi ==
* [[Langue flexionnelle#Distinction entre langues synthétiques et langues agglutinantes|Distinction entre langues synthétiques et langues agglutinantes]]

{{Palette|Typologie des langues}}
{{Portail|langues|linguistique}}

[[Catégorie:Langue agglutinante| ]]
[[Catégorie:Langue flexionnelle]]