Monnaie de pierre

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Modèle:En-tête label Modèle:Voir homonymes

Photo d'un grand disque de pierre percé en son centre dans un sous-bois
Une grande monnaie de pierre dans le village de Gachpar dans les îles Yap.

La monnaie de pierre, en yap Modèle:Lang, est une monnaie propre aux îles Yap dans les États fédérés de Micronésie prenant la forme d'une pierre ronde et plate, taillée dans de la calcite, de Modèle:Unité de diamètre, avec généralement un trou en son centre. Extraite dans des carrières aux Palaos, car le matériau n'est pas disponible sur les îles Yap, elle est transportée en bateau ou sur radeau sur plusieurs centaines de kilomètres. Modèle:Lang, personnage légendaire, est, dans les récits yapais, à l'origine de la monnaie de pierre et de sa forme rappelant la pleine lune.

La date d'apparition du Modèle:Lang est inconnue. Elle remonte au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle au moins d'après des témoignages de voyageurs occidentaux. Un récit daté de 1843 rapporte que les monnaies de pierre sont prisées en raison de leur rareté. Dans le dernier tiers du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, la production augmente considérablement grâce à la présence du commerçant américain David O'Keefe qui, moyennant la fourniture d'outils en fer et le transport des pierres sur son bateau, reçoit à bon prix coprah et holoturies. La Première Guerre mondiale met fin à l'extraction à grande échelle. La taille de monnaie de pierre serait encore pratiquée épisodiquement au début du Modèle:S mini- pour entretenir les savoir-faire.

Le Modèle:Lang est le principal moyen d'échange traditionnel et n'est utilisable que dans le cadre de transactions traditionnelles. Sa valeur résulte de son histoire depuis la carrière jusqu'au dernier échange effectué. Aux considérations esthétiques ou de dimensions s'ajoutent surtout un capital symbolique et culturel associé aux valeurs de souffrance et de difficulté Modèle:Incise, à celui des noms Modèle:Incise et enfin aux échanges.

Nombre de monnaies de pierre sont établies en bordure de terrains appelés Modèle:Lang, centres de pouvoirs destinés à la pratique de la danse, aux échanges de cadeaux entre les villages et aux réunions de chefs de village.

La monnaie de pierre et les témoignages ethnographiques la concernant ont été largement utilisés par les économistes pour l'identifier comme un exemple de monnaie fiduciaire sans actif (Modèle:Langue) et la considérer comme un analogue de l'étalon-or. Ce n'est qu'en 2005 que Dror Goldberg dénie l'existence de monnaies fiduciaires sans actif et rappelle que les monnaies de pierre ont une valeur pour elles-mêmes. Le système monétaire de la monnaie de pierre a également servi de fondement pour remettre en cause des certitudes établies sur le sujet de la monnaie. Récemment, la monnaie de pierre a été proposée comme un antécédent du Bitcoin.

Dénomination

Les monnaies de pierre ont été nommées Modèle:Lang dans le nord des Îles Yap et Modèle:Lang au sud<ref group="R" name="p159160">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les translittérations Modèle:Lang<ref group="K" name="p238"/>,<ref group="R" name="p156">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref> ou Modèle:Lang<ref group="R" name="p156" /> sont également connues. Aux Palaos, la monnaie est nommée Modèle:Lang<ref group="B" name="p153"/>.

Le mot Modèle:Lang et ses dérivés n'est plus utilisé depuis au moins la seconde moitié du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, ce terme signifiant "face" dans les îles extérieures de Yap d'après Cora Gilliland<ref group="G" name="p8">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. En 1963, Inez de Beauclair rapporte que Modèle:Citation<ref group="B" name="p153">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref> - l'ulithi étant une langue de Micronésie.

Description physique

Pierre circulaire d'un jaune ocre avec une large perforation en son centre
Monnaie de pierre au Musée d'ethnologie de Hambourg.

Les pierres des îles Yap sont approximativement rondes, souvent très ovales pour les plus grandes et plus récentes, plates et semblables à des meules courantes<ref group="M" name="p129-130">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="B" name="p154">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="G" name="pm"/>. Une monnaie bien travaillée diminue d'épaisseur du centre vers la périphérie. Sa surface est lisse ou comporte à partir du centre un ou deux gradins<ref group="M" name="p129-130"/>,<ref group="WF" name="94-96"/>. Un trou en son milieu compte pour environ un sixième du diamètre<ref group="WF" name="94-96"/>. Quelques pierres présentent deux trous de part et d'autre du centre<ref group="M" name="p130">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Lorsqu'une pierre nécessite d'être transportée, le ou les trous permettent le passage d'un tronc ou d'un bambou suffisamment épais pour supporter le poids de la pierre, posé sur les épaules d'hommes<ref group="M" name="p130"/>,<ref group="WF" name="94-96"/>. La taille est mesurée localement, selon le plus grand axe, en brasse, en empan et en doigt (l'index)<ref group="WF" name="p96">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="G" name="p8"/>. Elle varie de Modèle:Unité de diamètre, mais est généralement comprise entre Modèle:Unité<ref group="G" name="pm">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Les pierres ont été extraites de carrières aux Palaos<ref group="FC">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Elles ont été fabriquées dans de la calcite, et non de l'aragonite comme il est souvent avancé<ref name=calcite>Modèle:Article.</ref>. Elles sont généralement de couleur claire, stratifiées ou en bandes, avec un éclat brillant en raison de leur texture cristalline généralement grossière de gros cristaux de calcite<ref name=marble>Modèle:Chapitre.</ref>. Les pierres les plus recherchées et aussi les plus difficiles à travailler comportent des bandes brunes et blanc laiteux<ref group="M" name="p129"/>. Soumises aux intempéries tropicales, elles deviennent d'un gris sale, rugueuses et couvertes de mousse, mais ne perdent pas pour autant leur valeur<ref group="WF" name="94-96">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Histoire

Les origines factuelles de l'argent de pierre ont disparu et ne survivent que sous forme de récits légendaires.

Les légendes des origines

Carte figurant les différentes îles d'Océanie colorées selon le pays auquel elles appartiennent.
Localisation des îles Yap et des Palaos (à l'extrême-gauche de la carte) dans le paysage politique actuel en Océanie.

Plusieurs légendes ont trait à l'origine de la monnaie de pierre. Une histoire yapaise rapporte qu'un homme de Yap, Modèle:Lang, instruit par la divinité Modèle:Lang prend avec lui sept hommes Modèle:Incise et les emmène dans l'île mythique de Modèle:Lang au sud des Palaos où ils trouvent une pierre brillante. Ils la travaillent d'abord sous la forme d'un poisson, puis essayent le croissant de lune et enfin la pleine lune. Cette dernière forme est approuvée par la divinité et les Yapais la jugent parfaite après y avoir pratiqué un trou central. Le symbole de la lune et de ses stades est souvent présent dans les histoires yapaises. Dans d'autres versions, la forme d'un lézard ou d'une tortue est également essayée ou bien la forme est directement obtenue. Selon une variante, les Yapais ont également trouvé sur place en abondance des valves de coquillages nacrés qu’ils adoptent comme un autre moyen d'échange (le [[Monnaies traditionnelles des îles Yap|Modèle:Lang]]), et des valves de coquillages de l'espèce Tridacne géant utilisés pour faire des pilons de cérémonie (le [[Monnaies traditionnelles des îles Yap|Modèle:Lang]])<ref group="G" name="p19"/>,<ref name=lessa>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Un autre récit rapporte que la première expédition aux Palaos, œuvre de Modèle:Lang, originaire de Rull, et de Modèle:Lang, habitant Tomil, a pour objectif de trouver des moyens d'échanges. Ils estiment que la pierre qu'ils ont trouvée sur l'île légendaire de Modèle:Lang, après plusieurs essais de forme, et l'ouverture d'un trou central pour le passage d'un poteau pour la transporter, convient. Modèle:Lang incite Modèle:Lang, qui a fini de tailler ses pierres en premier, à retourner aux îles Yap. Pressentant que Modèle:Lang prépare un mauvais coup, il fait mine de partir et se cache non loin. En effet, quelques jours plus tard, un typhon invoqué grâce à la magie par Modèle:Lang balaie l'océan. Modèle:Lang attend que Modèle:Lang soit en haute mer et invoque lui-même un typhon pour engloutir ou séparer les radeaux transportant les pierres et les canoës véhiculant les hommes. Malgré tout, Modèle:Lang parvient à ramener quelques pierres à bon port. Modèle:Lang rapporte les siennes et récupère en cours de route quelques-unes de celles de son rival retrouvées isolées en mer sur leurs radeaux<ref group="FM">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

D'autres légendes racontent que la découverte des carrières est le fruit du hasard. Un groupe de pêcheurs emporté par une tempête atteint accidentellement les Palaos<ref group="G" name="p21n"/>,<ref group="F" name="p20">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. D'après un premier récit, leur chef Modèle:Lang ordonne à ses hommes de couper la pierre en une forme de poisson, mais celle-ci étant insatisfaisante Modèle:Incise, ils sculptèrent des morceaux en forme de pleine lune et les perforèrent pour y passer un tronc pour l'acheminement, chaque extrémité reposant sur les épaules d'un homme<ref group="F" name="p20"/>. Un autre récit rapporte que les pêcheurs sont originaires de Rull aux Îles Yap et la pierre qu'ils ramènent a la forme d'un poisson. Lorsqu'ils se présentent devant le roi, ils lui donnent la pierre et déclarent qu'ayant presque perdu la vie alors qu'ils attrapaient du poisson pour lui, le poisson de pierre devrait être acceptable pour le roi et considéré comme plus précieux que d'autres trésors yapais<ref group="G" name="p21n">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Le terme Modèle:Lang est un homonyme pour le mot baleine, peut-être en référence à ce récit<ref group="F" name="p20"/>.

Sur la base des récits légendaires, Scott M. Fitzpatrick estime que les premiers voyages vers les Palaos ont eu lieu dans les années 1400 ou 1500<ref group="F" name="p20"/>.

Les premiers témoignages archéologiques, historiques et ethnographiques

Pour Wilhelm Muller et Inez de Beauclair, l'apparition de l'argent de pierre doit pour partie résulter de réminiscences anciennes concernant d'autres types de monnaies<ref group="M">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="B">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

En 1909, l'anthropologue allemand Wilhelm Muller apprend que pour ne pas dépendre des carrières des Palaos, deux sites sur le territoire du village de Talangeth sur l'île de Map dans les îles Yap ont fait l'objet de tentatives pour extraire des monnaies de pierre. Sur place, Muller identifie la pierre comme étant du quartz. Les cinq pierres produites dateraient du chef Modèle:Lang, premier d'une lignée de sept chefs s'achevant avec le chef actuel. Les travaux auraient été arrêtés à peine commencés, un clan ennemi ayant lancé un sort qui a corrompu la pierre. L'extraction remonterait donc aux environs de 1700 d'après le savant allemand<ref group="M" name="p131132">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. L'ethnologue Cora Lee C. Gillilland doute de ce calcul et souligne la présence du chiffre sept, chargé de symbolique chez les Yapais<ref group="G" name="p19">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Le numismate Robert D. Leonard estime toutefois qu'une telle date n'est peut-être pas si fausse<ref name=leonard>Modèle:Article.</ref>. Une tentative non datée de taille d'une monnaie à partir d'un petit affleurement de marbre a pu être mise en évidence au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle. Bosiljka Glumac et Scott M. Fitzpatrick proposent que Modèle:Citation<ref name=marble/>.

Des fouilles réalisées sur les îles Yap ont fourni, de l'avis de Robert D. Leonard et Cora Lee C. Gillilland, de possibles précurseurs des monnaies de pierre<ref group="G">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref name=leonard/>. Des opérations archéologiques menées en 1956 ont fourni un disque en phosphate non perforé de Modèle:Unité de diamètre pour Modèle:Unité d'épaisseur dans un contexte pour lequel une datation par le carbone 14 donne Modèle:Unité ans. Un autre disque plus gros dans une variété de calcite de Modèle:Unité de diamètre, toujours non perforé, est issu d'un niveau pour lequel une datation radiocarbone fournit la date de Modèle:Unité<ref name=giff/>. Cette dernière pièce est pour Robert D. Leonard peut-être le plus ancien exemplaire datable de monnaie de pierre<ref name=leonard/>. Toutefois, pour les fouilleurs, de tels morceaux ne peuvent être qualifiés de monnaie de pierre car ils pourraient résulter de la taille de coquilles, la formation du phosphate et de la calcite se produisant à la fois dans le cadre de processus inorganiques et organiques<ref name=giff>Modèle:Article.</ref>.

Photo en noir et blanc figurant des pierres rondes dans un paysage de forêt
Monnaies de pierre aux îles Yap sur leur tronc, prêtes au transport, 1903.

Quelques documents du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle ou du début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle mentionnent, à travers le brouillage des incompréhensions et confusions, des monnaies de pierre. Dans une lettre écrite par le père jésuite Juan Antonio Cantova le Modèle:Date-, à Guam, celui-ci rapporte qu'un Yapais déclare que son île possède des mines d'Modèle:Citation mais que les habitants n'en extraient que de petites quantités par manque d'outils métalliques. Lorsqu'ils trouvent un morceau, ils tentent de l'arrondir et le donnent au chef des îles Yap, lequel en a assez pour s'en servir pour un trône<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref group="G">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Dans leur voyage dans les mers du Sud en 1815-1818, le russe Otto von Kotzebue et le naturaliste franco-allemand Adelbert von Chamisso mentionnent que les îles Yap produisent des Modèle:Citation, que les Modèle:Citation se procurent. Aux îles Yap, elles sont utilisées pour les trônes des chefs, un bloc formant le siège et un autre le dossier<ref group="G" name="p3">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Le journal du capitaine Andrew Cheyne, capitaine du brick Naiad, à la date du Modèle:Date-, est la première référence claire à de la monnaie de pierre. Le bateau transporte une délégation d'un chef des Palaos, Abba Thule, chargée de transmettre en cadeau diplomatique une monnaie de pierre au Modèle:Citation des îles Yap accompagné des chefs de Tomil. Elle est décrite comme une pierre ronde de deux pieds de diamètre (Modèle:Unité), avec un trou au centre, semblable à une petite meule courante. Andrew Cheyne mentionne que Modèle:Citation (Palaos). Lors de l'échange du cadeau, qui se déroule à bord, la pierre est définie comme un Modèle:Citation<ref group="G" name="p3-4">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="G" name="p19"/>. Bien qu'observateur averti, Andrew Cheyne ne mentionne pas d'autre monnaie de pierre lorsqu'il débarque à terre<ref group="G" name="p3-4"/>. Son agent Alfred Tetens note dans ses mémoires, en 1862-1863, que bien que les îles Yap soient hostiles aux Palaos, les Yapais doivent y venir pour préparer les grandes pierres qui leur servent d'argent et obtenir le consentement du roi Abba Thule pour les emporter<ref group="G" name="p3-4"/>. En 1865, il transporte dix Yapais rentrant chez eux avec les pierres qu'ils ont taillées, vingt gros morceaux et plusieurs de la taille d'un thaler pour servir de petite monnaie<ref group="G">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Les influences européennes

Pierre ovale ocre clair avec une large perforation centrale
Monnaie de pierre extraite en 1904 aux Palaos et conservée au Musée national d'histoire naturelle des États-Unis.

La présence européenne s'intensifie progressivement à partir du milieu du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle dans la région. Elle permet l'acquisition de quelques outils métalliques et de tabac, mais les Yapais restent très attachés aux traditions et ne sont pas de bons clients pour les nouveaux produits qui leur sont proposés<ref name="h263" />,<ref group="G" name="p5-6">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Un tournant majeur est constitué par l'arrivée du commerçant américain David O'Keefe. Seul survivant de l'échouage de son navire sur des récifs à proximité des îles Yap en 1871, il est recueilli et soigné par la population locale. Au début de l'année 1872, il regagne Hong Kong où il se procure un premier navire et revient aux îles Yap<ref name=h263>Modèle:Ouvrage.</ref>. Ayant observé que les Modèle:Citation ne motivent pas les Yapais à travailler, mais qu'ils sont fortement intéressés par les monnaies de pierre, il conclut un arrangement avec eux<ref group="L" name="p211">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Il transporte les insulaires jusqu'aux Palaos et leur fournit des outils en fer Modèle:Incise puis les ramène chez eux avec les pierres, ce qui réduit considérablement les dangers et facilite grandement l'extraction. En échange, David O'Keefe reçoit du coprah, des concombres de mer, ou obtient le service de Yapais qu'il transporte jusqu'aux îles Mapia en Indonésie pour la culture du coprah. Il revend ensuite ces marchandises en Extrême-Orient<ref name=h263/>,<ref group="G" name="p6-7">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Cet arrangement, qui fait le bonheur des deux parties, dure jusqu'en 1901<ref group="R" name="p161"/>,<ref group="G" name="p6-7"/>, lui permet de faire fortune et conduit les Yapais à se tourner vers la production intensive de coprah et la pêche massive de concombres de mer<ref group="F" name="p23"/>,<ref group="L" name="p211"/>. Daniel O'Keefe n'est pas le seul dont les bateaux sont utilisés pour le transport des monnaies de pierre. D'autres navires sont parfois chargés de pierres. En 1883, un bateau anglais récupère ainsi une monnaie de Modèle:Unité pour Modèle:Unité<ref group="G" name="p8-9">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. En 1899, l'année suivant l'acquisition par l'Allemagne des îles Carolines à l’Espagne, le gouvernement allemand interdit aux Yapais les voyages entre îles dans l'espoir, selon l'anthropologue Fran Defngin, de mettre en péril le monopole de Daniel O'Keefe et d'aider les commerçants allemands à réussir leurs activités commerciales sur les îles Yap. Daniel O'Keefe aurait alors initié l'acquisition de pierres à Guam. Les Allemands font de même et ramènent de Guam sur un navire des carriers et leur production sur les îles Yap. La portée de l'interdiction devait être limitée puisque des navires allemands transportent peu de temps après des pierres depuis les Palaos<ref group="G" name="p11">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. L'extraction de pierre à grande échelle cesse avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Un navire allemand envoyé aux îles Yap pour y chercher les carriers n'a pas le temps d'attendre ceux qui se trouvaient dans des carrières dans les hauteurs des îles, ni même la possibilité de transporter la lourde charge de pierres taillées. Au début des années 1960, les Yapais restés aux Palaos y vivent encore et certains y ont fait souche. Des monnaies restées sur place ont servi dans le cadre de transactions monétaires<ref group="B" name="p157">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

L'afflux de monnaies de pierre consécutif aux transports européens aboutit à un pic d'inflation et cause une chute de sa valeur, conséquence d'une perte de confiance dans les attentes de valeur future<ref group="FM" name="p11">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. L'accroissement de la disponibilité et de la fréquence des transports qu'offrait son entreprise ont donné à l'individu yapais une chance de devenir propriétaire, perturbant ainsi le modèle économique traditionnel de diffusion des avoirs du sommet vers la base plus large de la société<ref group="G" name="p6-7"/>. La monnaie de pierre obtenue avec l'aide de O'Keefe vaut moins que celle de petite taille obtenue auparavant avec des moyens traditionnels. C'est encore le cas au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref group="F" name="p23"/>,<ref group="R" name="p161">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="L" name="p211"/>.

Autour de 1900, les autorités allemandes souhaitent améliorer la viabilité des chemins qui parcourent les îles Yap qui, en l'état cependant, conviennent aux Yapais. Pour les y obliger, les principaux chefs yapais sont soumis à une amende et un homme est envoyé pour marquer avec un morceau de bois noir certaines des pierres les plus précieuses pour en montrer la revendication par le gouvernement allemand. Les Yapais se mettent alors aussitôt au travail afin que les marques soient effacées<ref group="WF" name="98-100">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Cette saisie de pierres et des destructions durant l'occupation japonaise ont pu occasionner une perte de confiance dans la valeur du Modèle:Langue et un phénomène d'inflation<ref group="FM" name="p11"/>.

Pierre ovale beige avec des veines ondulées gris sombre
Monnaie de pierre à l'Hibiya Park à Tokyo, ramenée en 1925 au Japon.

En effet, dans les années 1930, durant l'occupation japonaise, Modèle:Nobr sont décomptées, mais la présence militaire et les préparatifs à la défense des îles Yap dans le cadre de la Seconde Guerre mondiale occasionnent de nombreuses pertes, bien plus que les attaques américaines. Des pierres sont cassées et utilisées comme matériau pour faire des routes ou un mur de défense, servent d'ancre, ou sont écrasées et cassées sans motifs par les soldats japonais, en particulier celles appuyées contre les plates-formes des maisons dont l'armature en bois est récupérée pour servir de bois de chauffage<ref group="B" name="p154155">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="R" name="p162">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="F" name="p23"/>. Avec le temps également, des pierres se sont retrouvées enterrées par les cyclones tropicaux<ref group="F" name="p23"/>, le nom de leur propriétaire s'est perdu en raison de la disparition des personnages âgées, mémoire des traditions<ref group="K" name>Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, ou à cause de déplacements forcés de population par les occupants<ref group="FM" name="p12"/>. D'autres pierres ont été données ou vendues à des étrangers, notamment du personnel militaire et civil américain<ref group="G">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Environ Modèle:Nombre exemplaires pourraient être présents sur les îles Yap en 1965<ref group="B" name="p154155"/>.

Extraction et transport des pierres jusqu'aux îles Yap

Nature des expéditions

Pendant longtemps, les expéditions ont été organisées par de jeunes hommes d'un village, au nombre de plusieurs dizaines par voyage, qui avec l'autorisation de leur chef ou sur l'ordre de celui-ci, partaient de Yap extraire des monnaies aux Palaos. Leur absence peut durer plusieurs années et certains y perdent la vie lors des opérations à terre ou du voyage en mer. Au retour d'une expédition, l'argent est acquis, contre des paniers de taro, par la communauté villageoise et le chef, lequel garde pour lui les plus gros morceaux et les deux cinquièmes des plus petits. Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, avec les facilités de transport offertes par les navires européens, l'engouement pour l'extraction de monnaies de pierre s'est accru et de nombreux Yapais sont partis ou ont envoyé quelqu'un pour leur propre compte<ref group="M" name="p131"/>,<ref group="B" name="p155156">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Autorisation d'accès aux carrières

Carte au trait d'un groupe d'îles disposées selon une courbe
Carte des États des Palaos.

Dans le dernier tiers du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, lorsque les Yapais abordent les Palaos, ils n'arrivent pas en terrain conquis. Il devait en être autrement auparavant d'après Cora Lee Gilliland qui interprète le cadeau, en 1843, d'une monnaie de pierre à un grand chef yapais par le chef paluan Abba Thule comme le témoin de relations au statut différent<ref group="G" name="p5"/>. Au début des années 1870, le naturaliste d'origine polonaise Johann Kubary, présent sur place, constate lors de la venue de Yapais qu'ils Modèle:Citation. Autorisés à se rendre dans les carrières, ils sont tenus, pour la nourriture occasionnelle qui leur est offerte, de ramasser du bois de chauffage, de transporter de l'eau, de construire des barrages à poissons et de tenir les emplois de devins, médecins et sorciers<ref group="F" name="p21">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. L'autorisation de travailler dans les carrières peut être obtenue avec des perles en verre, système monétaire alors en vigueur aux Palaos<ref group="B" name="p155156"/>. En 1903, l'allemand Arno Senfft écrit que Modèle:Citation<ref group="G" name="p5">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Arno Senfft constate que les Yapais amènent comme moyen d'échange de la teinture jaune préparée à partir des rhizomes de Curcuma, d'importantes quantités de noix d'arec et de feuilles de poivrier<ref group="B" name="p155156"/>.

Localisation des carrières

Photo en noir et blanc prise d'un bateau montrant une île escarpée et une falaise à nue.
Carrière de monnaie de pierre de l'île de Railmig (1909-1910).

D'après le témoignage d'un Paluan autour de 1900, aux Palaos, les Yapais auraient commencé à extraire la pierre sur une petite île nommée Magaragar et non pas sur la grande île de Peleliu, à proximité, car ils auraient eu peur d'y venir<ref group="M" name="p129">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Magaragar est mentionnée dans une légende sur l'origine de la monnaie de pierre<ref group="G" name="p19"/>,<ref name=lessa/>. Au tout début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, les Yapais travaillent beaucoup plus au nord, sur l'île de Malakal et en face d'Airai, sur de petites îles dont « RailmigModèle:Note » et Orrak<ref group="M" name="p129"/>,<ref group="FC" name="p1322"/>. Les carrières d'extraction de la monnaie de pierre connues par l'archéologie au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle sont localisées dans des îles calcaires entre la frange sud de Babeldaob et le nord de Koror<ref group="FC" name="p1322"/>.

Photo en noir et blanc montrant des habitations sur pilotis au pied d'une falaise.
Habitations des carriers de monnaie de pierre sur l'île de Railmig (1909-1910).

Un témoignage daté de 1882 rapporte la présence simultanée de plus de 460 ouvriers yapais aux Palaos<ref group="F" name="p21"/>. L'année suivante, pas moins d'une centaine sont encore présent<ref name="p8-9" group="G" />. La population des îles Yap est en 1899 de Modèle:Unité<ref name="p21" group="G" />. Plusieurs pierres sont produites chaque semaine à la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle et au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref name="p21" group="G" />. Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, quelques pierres sont de temps à autre extraites pour conserver les compétences des générations passées<ref name=":0">Modèle:Lien web.</ref>.

Quatre carrières paluanes au sud de l’État d'Airai,ont été l'objet d'investigations archéologiques, Chelechol ra Orrak et Omis Cave sur la côte des îles Orrak et Koror, sites occupés antérieurement à la venue des Yapais, Metuker ra Bisech et Upper Orrak, à une altitude plus élevée des îles Garreru et Orrak. Toutes ont livré des déchets d'extraction de la pierre, des monnaies de pierre inachevées ou cassées, plus rarement terminées, des aménagements en pierre et corail et des restes de faune consommée<ref group="FC" name="p1322">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les sites de Omis Cave et Chelechol ra Orrak auraient commencé à être exploités avant l'arrivée des Européens, tandis que celui de Metuker ra Bisech l'aurait été après les premiers contacts, au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref group="FC" name="Fitzpatrick et al. p16">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. La roche exploitée est de la calcite sous forme de spéléothèmes formés dans des abris sous-roche ou des grottes. Le subtrat rocheux calcaire des îles, plus dur, n'a pas été taillé<ref name=calcite/>.

Techniques d'extraction et de transport à terre

Photo en noir et blanc de troncs agencés en un quadrillage contre une paroi
Échafaudage pour tailler la monnaie de pierre, site de Ngadarar, île Orrak, Palaos (1909-1910).
Photo en noir et blanc d'un échafaudage et d'une monnaie de pierre en partie distincte de la paroi
Échafaudage et monnaie de pierre en cours d'extraction, île inconnue, Palaos (1909-1910).

L'accès aux fronts de taille escarpés des carrières peut nécessiter la mise en place d’échafaudages<ref group="B" name="p156"/>. En se fondant sur des observations réalisées sur les sites de taille, Scott Fitzpatrick met en évidence que l'ébauchage des pierres est réalisé sur le rocher, probablement avec des outils lancés tels que des pics, des marteaux ou des marteaux en pierre, des haches et des coins utilisés comme outils lancés pour tailler les bords. Un pic et une hache en fer trouvés sur le site de Metuker ra Bisech conviennent à ces opérations. Ensuite, des gouges et des ciseaux sont employés pour rendre la surface lisse et plate. Il est possible que cela ait été réalisé en œuvrant de haut en bas, ou en faisant des rainures parallèles et en frappant les cannelures ainsi créées avec un ciseau à pointe pour retirer progressivement de petites sections de pierre. Des traces d'outils sur des pierres inachevées à Metuker ra Bisech et à Chelechol ra Orrak indiquent que la pierre n'est qu'ensuite séparée du rocher<ref name=calcite/>. D'après Wilhelm Muller, après que la taille ait bien avancée, la surface est décapée avec du feu<ref group="M" name="p129"/>. Selon Inez de Beauclair, le feu est utilisé pour attendrir la pierre et il est donc recherché un matériau non fissuré et cassant car il éclaterait avec la chaleur<ref group="B" name="p156">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Scott Fitzpatrick ne mentionne pas l'usage du feu. Dans son processus, la surface de la future monnaie est abrasée ou retaillée avec un ciseau en coquillage, en pierre ou en fer, puis la perforation est réalisée<ref name=calcite/>. Celle-ci est exécutée, alors que la pierre est posée contre un muret ou une surface rocheuse<ref name=calcite/>. D'après Inez de Beauclair, il est employé une herminette en coquillage nommée Modèle:Lang et une pierre de récif mise en mouvement de rotation avec un foret à archet. Le feu peut avoir été utilisé pour attendrir la pierre<ref group="B" name="p154" />. L'apparition des outils en fer va faciliter cette étape<ref name=calcite/>. La dernière étape de travail est le polissage avec un abrasif peut-être en conjonction avec de l'eau. Selon une tradition orale, avant les premiers contacts avec les Européens, il s'agit de pierre ponce, mais Scott Fitzpatrick pense que d'autres matériaux comme le sable ont pu servir. Durant les temps historiques, des brosses métalliques, du sable ou de la pierre à aiguiser ont dû être utilisés. Des monnaies trouvées à Metuker ra Bisech montrent que les Yapais ont pu obtenir un rendu très fin malgré une pierre à gros cristaux<ref name=calcite/>.

Régulièrement, des pierres presque finies se brisent au dernier moment. Assez peu d'exemplaires ont pu être produits en utilisant des outils non métalliques, le travail étant extrêmement long et difficile<ref group="M" name="p129"/>,<ref group="B">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les pierres taillées avec des moyens rudimentaires mesurent moins de deux mètres et sont grossièrement taillés<ref group="M" name="p129"/>,<ref group="FC" name="p2023">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Elles sont transportées à dos d'hommes en passant un tronc en bois dans la perforation centrale<ref group="FC" name="p24">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. D'après Inez de Beauclair, les pierres acheminées en canoë, sur lesquels elles étaient attachées par une corde, montrent un trou large aux deux extrémités, se rétrécissant vers le centre, alors que celles fixées sur un radeau au moyen d'un poteau les traversant ont un trou cylindrique<ref group="B" name="p154"/>. Scott Fitzpatrick, en se fondant sur les traditions orales et les récits ethnohistoriques, suppose que les techniques traditionnelles sont remplacées principalement, sinon complètement, dans les années 1700 ou peut-être légèrement plus tôt, par des outils en fer<ref group="FC">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Un prêtre catholique rapporte en 1900 qu'une légende locale décrit qu'en enfer, les Yapais sont condamnés à briser des pierres aux Palaos. C. Gilliland hésite à interpréter ce témoignage comme une croyance locale de la vie après la mort ou comme le résultat d'un discours d'étrangers chrétiens ayant placé les carriers sous cet aspect afin d'illustrer leur point de vue théologique<ref group="G" name="p9">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Photo en noir et blanc d'hommes posant à côte de monnaies de pierres devant un front de taille
Carrière de monnaie de pierre de Tuhur, Palaos (1909-1910).

Des sondages archéologiques dans la carrière de Metuker ra Bisech ont révélé la présence d'outils en fer. L'un d'eux ressemble à une houe et sa forme suggère une utilisation pour fouiller, fendre ou soulever des pierres. Un deuxième, semblable à une hachette, a pu être employé pour attaquer le calcaire et ébaucher la pierre. Le dernier est un pic peut-être utilisé pour une taille plus précise de la pierre<ref group="FC" name="Fitzpatrick et al. p16" />.

L'introduction d'un outillage en fer a permis de produire en plus grande quantité et avec une meilleure précision et qualité de finition. Les pierres sont, en moyenne, devenues de plus grande taille, les plus lourdes ayant été transportées en mer sur des navires de style européen ou chinois<ref group="FC" name="p2224"/>, un seul exemplaire à la fois<ref group="M" name="p129"/>. Les pierres de grandes dimensions et donc d'une masse très élevée ne peuvent plus être transportées à dos d'hommes, mais la perforation centrale des pierres, devenue non fonctionnelle, n'a pas pour autant disparu, par respect d'un processus de fabrication pratiqué pendant des siècles et devenu une convention culturelle. Le trou a été fait plus petit tout en devenant plus régulier et cylindrique en raison de l'emploi d'outils en fer<ref group="FC" name="p2224">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les grandes pierres ont pu être transportées enserrées dans des armatures afin de protéger leurs bords et en les tirant sur des rouleaux<ref group="FC">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Ce trou plus petit permettait le passage d'une chaîne selon Inez de Beauclair<ref group="B" name="p154"/>.

Parmi les sites étudiés, le site d'Omis Cave, d'une superficie de Modèle:Unité, localisé à proximité immédiate de la mer<ref name="omcave"/>, et le site de Metuker ra Bisech, qui devait s'étendre sur Modèle:Unité, probablement caractéristique des carrières ouvertes à l'intérieur des îles grâce aux nouveaux moyens techniques offerts par l'arrivée des Européens<ref group="FC" name="p24"/>, ont fait l'objet d'observations plus avancées. La carrière du premier a, entre autres, livré un petit muret en décombre de corail et de calcaire, structure souvent observée sur d'autres sites. Ces murets ou monticules sont supposées avoir aidé au soulèvement et au déplacement des monnaies de pierre. Un quai en contrebas de la carrière est constitué de murs de gravats de corail et de calcaire retenant un comblement de fragments de calcaire débité et de morceaux de corail<ref name="omcave">Modèle:Article.</ref>. La carrière de Metuker ra Bisech est située dans un environnement karstique dentelé et topographiquement complexe qui rend nécessaire la construction de plate-formes, de murs de soutènement, de monticules de pierre, pour permettre la circulation et le chargement des pierres, des ouvriers et des fournitures. Ces aménagements devaient être complétés d'armatures enserrant les pierres, de rouleaux en bois, d'échafaudages en bois ou en bambou lorsque la pente est trop raide, couplés peut-être avec des outils en fer tels que des chaînes et des leviers<ref group="FC">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Le climat tropical n'en a pas permis la conservation, de même que les maisons, mais des photos prises par la Hamburger Südsee-Expedition de 1908-1910 montrent quelques traces d'échafaudages et de quais<ref group="FC" name="p1315">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Des concentrations de coquillages, de mollusques et de crustacés locaux consommés ont été retrouvés sur les sites mêmes des carrières<ref>Modèle:Article.</ref>.

Transport des pierres en mer

Le retour des pierres aux îles Yap s'effectue soit au moyen d'une embarcation traditionnelle, les pierres sont alors nommées Modèle:Lang (les pierres du papillon), soit sur un navire étranger et sont appelées Modèle:Lang, ou Modèle:Lang. Le mot Modèle:Lang signifie "papillon" et renvoi à d'anciens récits. Pour un premier, la pêche d'un groupe de pêcheurs yapais n'ayant pas satisfait le chef du village, les hommes décident de mettre le cap sur les Palaos. Leur canoë n'est cependant pas adapté à la haute mer et leur pilote ne possède la magie que de la navigation en lagon. Ce dernier utilise tout de même son humble magie sur un papillon qui, brillant dans la nuit, guide l'embarcation jusqu'à sa destination. Après avoir taillé quelques pierres, leur pirogue n'étant pas appropriée, ils construisent un radeau pour les y fixer et retournent chez eux guidés par le papillon. Ces pierres, données à leur chef, sont les premières à être acheminées en radeau<ref group="B" name="p154"/>. En se fondant sur ce récit, Scott M. Fitzpatrick pense pouvoir dater l'apparition de l'usage du radeau de moins d'une centaine d'années après les premières extractions<ref name="p2021" group="F">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Un deuxième récit rapporte qu'après le retour d'Anagumang, une famille attirée par cet argent de pierre, souhaite aller aux Palaos en chercher. Mais, elle ne maîtrise pas la navigation en haute mer. Son chef parvient à charmer un papillon qui dirige le courant et le vent en direction de leur destination qu'ils atteignent après une demi-lune. Les vingt-quatre hommes taillent douze pierres, les chargent sur un radeau, s'étant aperçu que leurs bateaux ne pouvaient pas les supporter et atteignent leur point de départ après dix jours de mer. Ils les échangent ensuite contre sept champs de taro<ref>Modèle:Chapitre.</ref>.

D'après Inez de Beauclair, deux types de canoës de mer ou pirogues, le Modèle:Lang et le Modèle:Lang sont utilisés par les Yapais. L'embarcation est dans un premier temps remplie d'eau pour faciliter le chargement du fret puis l'eau écopée. Le bateau transporte plusieurs petites pierres qui lui sont fixées par des cordes de sennit ou une grosse pierre n'excédant pas Modèle:Unité de diamètre<ref group="B" name="p157"/>. En 1960, l'anthropologue David M. Schneider rapporte qu'une flotte de deux à six canoës est envoyée aux Palaos et qu'au retour, pour les grosses pierres, un radeau est fabriqué autour de chaque monnaie traversée par un poteau de bambou, et disposée verticalement de telle sorte qu'une partie de sa circonférence est immergée et sert de quille<ref name="p20" group="G" />. Scott M. Fitzpatrick avance que les bateaux comptent un équipage de six à huit personnes à l'aller, mais seulement deux lors du retour aux îles Yap<ref group="F" name="p20" />. Dans des conditions météorologiques favorables, le trajet dure cinq jours. Le pilote de chaque bateau fait appel à une puissante magie pour commander le vent, briser les vagues, éloigner les requins et appeler les îles<ref group="B" name="p157"/>.

Dessin en couleur figurant un radeau et un bateau près des côtes yapaises
Évocation du transport de monnaies de pierre autour des îles Yap sur un radeau.

La tradition orale yapaise et les légendes rapportent l'utilisation de radeaux en bambou, un matériau facilement disponible mais sujet aux attaques d'animaux marins foreurs, permettant de porter les pierres les plus grosses. Cette embarcation est cependant peu maniable. Laissés à la dérive sur des courants de direction ouest-est, les radeaux sont récupérés à proximité des îles Yap, lorsque retrouvés, par des pirogues à voile à unique balancier puis remorqués<ref name="leslie" />,<ref name=hazell>Modèle:Article.</ref>. Beaucoup de pierres disparaissent en mer<ref group="M" name="p129" />. Les pirogues ont pu partir depuis le point de départ du radeau, plus lent car très chargé, quelque temps après sa mise à l'eau, à sa poursuite, afin de limiter le temps de voyage et les risques liés à la navigation et notamment la météo. La distance parcourue en tenant compte de la dérive a dû excéder Modèle:Unité alors que les Palaos et les îles Yap sont éloignées de Modèle:Unité en ligne droite<ref name="leslie"/>,<ref name=hazell/>.

En janvier 1960, Robert Halvorsen, administrateur du district de Yap, écrit dans une lettre à destination du directeur du Smithsonian Institution que les pirogues à voile et les radeaux ne peuvent pas transporter de pierres d'un diamètre supérieur à Modèle:Unité et que David O'Keefe n'a pris en charge que des pierres jusqu'à Modèle:Unité. Les pièces d'une dimension supérieure auraient été amenées, après la disparition du commerçant américain, par un navire allemand<ref group="G" name="p20">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Toutefois, en 1883, un bateau anglais transporte une monnaie de Modèle:Unité<ref name="p8-9" group="G" />. En janvier 1960 et dans une missive au même destinataire, l'anthropologue David M. Schneider pense que les pierres supérieures à Modèle:Unité de diamètre ont été apportées par des navires étrangers<ref group="G" name="p20"/>. Les témoignages ethnographiques antérieurs à l'arrivée de Daniel O'Keefe ne mentionnent que des pierres inférieures à Modèle:Unité<ref group="G" name="p10">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Toutefois, selon l'archéologue Scott M. Fitzpatrick, les pierres sont attachées, pour le retour aux îles Yap, sur des pirogues à voile pour celles de moins de six pieds, soit Modèle:Unité de diamètre, sur des radeaux pour les plus grosses<ref group="F" name="p20" />. D'après Leslie C. Hazell, en raison de contraintes techniques, sur un radeau, les pierres ne peuvent pas dépasser Modèle:Unité de diamètre, soit jusqu'à Modèle:Unité<ref name="leslie">Modèle:Chapitre.</ref>, ce qui concorde avec un témoignage ethnographique du tout début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref name="p129" group="M" />. Les pierres les plus grosses ont été ramenées sur des bateaux de commerce en échange de coprah<ref name="p129" group="M" />,<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Lorsqu'un bateau était disponible, les personnages des plus hautes castes avaient la priorité pour faire transporter leurs pierres<ref name="p10" group="G" />.

Valeur et utilisation des monnaies de pierre

Une valeur essentiellement fondée sur l'histoire des pierres

Dessin figurant un homme assis le dos contre une très grande monnaie de pierre ovale
Yapais assis contre une monnaie de pierre ramenée par un bateau européen (1909-1910).

La valeur des pierres résulte de leur histoire depuis leur taille jusqu'au dernier échange effectué<ref group="K" name="p263264">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Lors de l'extraction, les monnaies de pierre les plus recherchées sont blanches et laiteuses avec de petits cristaux et striées d'une couleur brun chocolat. Ce sont celles qui ont été les plus difficiles à travailler. Les autres sont ternes, blanc crème ou brun foncé<ref group="M" name="p129"/>,<ref name=leonard/>. La difficulté d'accès à la carrière, les dimensions des pierres, la qualité de leur sculpture et l'absence de l'emploi d'outils en fer, les facilités de transport, et donc les souffrances nécessaires d'autant plus grandes, ajoutent à leur valeur de même que le nombre de personnes blessées ou tuées pendant l'expédition qui les ont ramenées<ref group="B" name="p153"/>,<ref name=leonard/>,<ref group="F" name="p22">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="K" name="p263264"/>,<ref name=leslie/>,<ref group="FM">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les plus précieuses sont celles associées à la perte d'une vie<ref name=s21/>. Des cinq pierres taillées dans le quartz sur les îles Yap, l'une d'elles est encore conservée au village de Taeb dans la municipalité de Tamil. Elle est appelée Modèle:Lang, c'est-à-dire « la pierre sans larmes », le travail et le transport n'ayant comporté aucun danger. Elle est donc peu appréciée<ref group="B" name="p153"/>,Modèle:Note.

Il est d'usage que des pierres portent des noms individuels. Ces monnaies de premier rang, les Modèle:Lang, se distinguent des Modèle:Lang, les pierres sans nom<ref group="B" name="p154"/>. Le nom peut être celui du fabricant<ref group="B" name="p156"/>, provenir des embarcations sur lesquelles elles ont été transportées, des personnes responsables de leur transport<ref group="B" name="p153"/>. À la fin des années 1880, le naturaliste d'origine polonaise Johann Kubary mentionne une pierre de taille moyenne portant son nom, probablement parce qu'il s'est chargé de son acheminement en bateau jusqu'aux îles Yap<ref group="B" name="p153"/>. D'autres pierres sont nommées d'après des personnes ayant souffert pour elles, notamment celles ayant perdu la vie. Des Yapais les perçoivent alors aussi comme des monuments commémoratifs<ref group="K" name="p263264"/>. Des monnaies ont également été nommées d'après le chef qui a donné l'ordre ou la permission d'une expédition pour se rendre aux Palaos<ref group="B" name="p153"/>. Pour les Yapais, les noms sont intimement liés à la terre, que ce soit ceux des hommes morts pour les rapporter et dont ils sont issus, ou ceux des noms des terres de haut rang qui donnent à leur propriétaire le statut de chef, de « voix » de la terre, et qui régissent les échanges<ref group="K" name="p263264"/>. La valeur d'une pierre croît avec le souvenir de ces noms, émanations de la terre<ref group="K" name="p263264"/>. Inversement, les monnaies de pierre peuvent servir à nommer des personnes dont des enfants<ref group="K" name="p264265">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

La valeur de la monnaie de pierre découle également des relations de connexions, de réciprocité et de résolution des conflits auxquels elle participe en étant échangée<ref name=leonard/>,<ref group="F" name="p22"/>,<ref group="K" name="p263267">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Cette Modèle:Citation, c'est-à-dire les coutumes et les traditions<ref group="K" name="p263264"/>. La charge symbolique de la monnaie de pierre a conduit à l'instauration de quelques tabous. Un livret du Bureau de l'administrateur du district de Yap exerçant dans le cadre du Territoire sous tutelle des îles du Pacifique explique, en 1966, qu'il est interdit de s'asseoir ou de se tenir debout sur les monnaies de pierre encore levées<ref group="F" name="p20"/>.

Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, les plus petites monnaies de pierre, d'environ Modèle:Unité de diamètre, sont en possession du peuple. Elles sont enfilées sur des cordons et ont peu de valeur. De l'avis de Wilhelm Muller la coutume d'aligner les disques de coquille en tant qu'objets de valeur a pu s'étendre aux monnaies de pierre<ref group="M" name="p131">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. À la même époque, il est prohibé aux Yapais de basses castes, soit environ Modèle:Unité de la population, de posséder une pierre de plus de quatre paumes de diamètre, soit environ Modèle:Unité<ref group="M">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="G" name="p8"/>.

Un système monétaire reposant sur la propriété légale et le don

La monnaie de pierre est utilisée concomitamment avec des monnaies de coquillage ou de rares colliers en dents de baleine, mais elle est le moyen d'échange traditionnel le plus important<ref group="K" name="p266267">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. La monnaie de pierre n'est pas divisible, malgré les efforts en ce sens des puissances coloniales et notamment des Allemands au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle. Extraite incomplète, elle perd de sa valeur et c'est pourquoi les pièces brisées en cours de taille ou lors du transport au sortir des carrières paluanes n'ont pas fait l'objet d'un recyclage pour en faire de plus petites<ref group="FM">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Avant l'instauration d'accords entre les Yapais et les Européens pour le transport des pierres, le Modèle:Langue est produit en petites quantités, assurant un Modèle:Citation ainsi que l'écrit Alfred Tetens en 1865<ref group="G" name="p21">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Ce système réapparait après la fin de l'extraction massive des monnaies de pierre au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref group="F" name="p23"/>.

M. L. Berg, en se fondant notamment sur la légende rapportée par Kubary, pense que la monnaie de pierre était extraite par les yapais de Rull et leurs alliés de Tomil, afin de contrer leurs adversaires de Gagil qui se procuraient de la monnaie de coquillage grâce au Modèle:Langue<ref>Modèle:Article.</ref>. Pour Paul Rainbird, cette hypothèse qui verrait les deux communautés majeures des îles Yap s'échanger Modèle:Citation, reste à démontrer<ref group="R" name="p159160"/>.

Photo d'un alignement de monnaies de pierre et d'un muret en pierre sèche délimitant une voie
Modèle:Langue (ou banque) de Yorlap, village de Gal, municipalité de Kanifay, Îles Yap (2014).

Des monnaies de pierre se retrouvent isolées ou en très petits groupes sur toutes les îles Yap. Les plus gros rassemblements sont improprement nommés des banques, dénomination toutefois largement utilisée<ref group="T" name="p79"/>. D'après Adam Thompson, l'emploi du concept de banque est la conséquence d'une interprétation erronée et excessive de la nature de la monnaie de pierre par les occidentaux<ref group="T" name="p79"/>. Dans la culture occidentale, l'argent a un rôle prépondérant dans le sens où il est nécessaire d'effectuer un certain nombre de tâches pour l'acquérir, pour ensuite le dépenser, et que sa valeur réside dans l'argent lui-même. Dans la culture yapaise, la valeur de l'argent de pierre réside dans la propriété non pas matérielle mais légale de la pierre<ref group="T" name="p79"/>,<ref name=macro>Modèle:Ouvrage.</ref>. Nombre de ces pierres ne pouvant être déplacées qu'avec beaucoup de peines ou de risques, elles sont laissées sur place bien que la propriété ait changée<ref group="T" name="p79"/>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref group="K" name="p262">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Au cours du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, une famille fait transporter depuis les Palaos une très grande monnaie de pierre. Alors que le radeau sur lequel elle est posée, tiré par un bateau traditionnel, arrive dans le lagon, une tempête se déclare et les marins pour sauver leur vie coupent les amarres du radeau qui sombre. La faute n'étant pas imputable aux propriétaires et les témoignages faisant état d'une pierre aux proportions magnifiques et d'une qualité extraordinaire, il est considéré par tous que sa valeur marchande n'est pas affectée et est toujours valable<ref group="WF" name="97-98">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Une pierre brisée conserve une valeur liée à son histoire<ref name=":0" />.

La propriété d'une monnaie de pierre ne peut être prise comme pourrait l'être un billet de banque trouvé par terre<ref group="T" name="p79"/>. La propriété peut seulement être donnée et c'est de ce don et des liens sociaux qui sont établis ou réaffirmés à cette occasion que découle la plus grande partie de la valeur de la pierre<ref group="T" name="p79">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="K" name="p266267"/>. Cette valeur est d'autant plus grande qu'elle est Modèle:Citation<ref name=s21>Modèle:Ouvrage.</ref>. Pour John Lanchester, Modèle:Citation<ref>Modèle:Article.</ref>.

L'utilisation locale des monnaies de pierres

Photo d'une clairière avec des dizaines de monnaies de pierre traversées par des troncs
Pierres sur des troncs prêtes à être transportées, peut-être dans le cadre d'une cérémonie (1909-1910).

La monnaie de pierre est utilisée, seule ou accompagnée d'autres biens tels que des monnaies de coquillage, au cours de cérémonies, pour de nombreux usages comme acheter de la nourriture, des produits agricoles, un canoë<ref group="B" name="p158159"/>,<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="K" name="p264265"/>, ou des terres<ref group="T" name="p79"/>, acquérir des informations<ref group="T" name="p79"/>, payer un prêt<ref group="B" name="p158159">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, etc. Elle a été usitée pour racheter le corps d'un proche mort lors d'un combat et récupéré par le village adverse<ref group="B" name="p158159"/>, donnée en compensation à une famille à laquelle a été fait du tort<ref group="B" name="p158159"/>,<ref group="T" name="p79"/> en réparation d'un vol<ref group="K" name="p264265"/>. Elle sert de paiement pour adopter un enfant né ou à naître<ref group="B" name="p158159"/>, est offerte à une famille pour la remercier des services rendus à la communauté<ref group="K">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, est employée pour la rémunération de services apportés par un individu ou les gens d'un village<ref group="G" name="p1617"/>. Ainsi, lors de la construction d'une maison des hommes (Modèle:Lang), le village d'Onean a offert au village voisin d'Amon une rare monnaie de pierre à deux trous pour les services de gens de basse caste (des Modèle:Langue) pour préparer et tisser la toiture en pandanus<ref group="B" name="p157" />. Des pierres sont données en cadeau aux esprits des ancêtres pour s'attirer leurs bonnes grâces<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, à la famille d'un futur époux<ref group="L" name="p7885">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, comme cadeau à un nouveau-né<ref group="T" name="p79"/>, à un enfant adopté pour assurer ses droits à la successions<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, aux enfants du premier lit d'une femme remariée pour leur accorder des terres<ref group="B" name="p158159"/>. Des pièces de très haute valeur, Modèle:Citation, pouvaient être utilisées dans le cadre d'une cérémonie traditionnelle d'excuses lorsqu'un individu a pris la vie d'un autre<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Quelques rares pierres discoïdes ont deux orifices et sont interprétées pour cette raison comme un symbole féminin<ref group="B" name="p156" />. Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, une pierre de ce type, aujourd'hui disparue, est localisée dans le village de Taeb (municipalité de Tamil). Elle comporte coincée dans un des trous, une pierre de forme phallique sur laquelle est posée un morceau de corail hémisphérique représentant l'organe sexuel féminin. Lors d'une certaine lune, un magicien prépare à cet endroit une médecine Modèle:Citation<ref group="M">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Les pierres à deux perforations ont été par le passé offertes par un parti en guerre vaincu demandant la paix, ce qui signifie qu'il ne restait plus que des femmes<ref group="B" name="p156"/>.

Un autre type de monnaie de pierre, dont il n'existe que deux exemplaires, prend la forme de deux disques accolés<ref group="B" name="p157"/>. D'autres monnaies, installées devant la maison des hommes ou la résidence d'un chef, présentent une succession de gradins depuis le centre vers la périphérie. Appelées Modèle:Lang, elles sont réservées aux chefs, ou les villages peuvent les attribuer à la maison des hommes lorsque la pêche a été abondante<ref group="B" name="p157"/>.

Une ou plusieurs monnaies de pierre peuvent également être offertes pour trouver des alliés en période de conflit<ref group="F" name="p2223">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>, lors d'une cérémonie ou d'une fête afin d'exprimer des liens d'amitiés ou manifester des relations de compétition entre villages<ref group="T" name="p79"/>,<ref group="K" name="p312">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Elle peut être rendue lors d'une cérémonie postérieure<ref group="T" name="p79"/>. En effet, selon les circonstances Modèle:Incise, il est attendu que le destinataire rende la pareille, en offrant un cadeau de même valeur Modèle:Incise ou en y ajoutant un supplément<ref group="K" name="p266267"/>,<ref group="L" name="p7885"/>. Ces échanges participent au maintien de l'interdépendance sociale<ref group="K" name="p266267"/>. Sherwood Lingenfelter pense que la compétition dans la recherche du pouvoir entre les chefs les a grandement incités à monter des expéditions pour aller chercher des monnaies de pierre. Ramener et donner de belles et grosses pierres augmente le prestige d'un chef et place le chef en ayant reçues dans une position de redevable<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Selon l'anthropologue Stefan Krause, la monnaie de pierre est un support de pratiques de régénérations symboliques qui produisent le Modèle:Langue, et les échanges traduisent l'ancrage des processus économiques au sein des institutions sociales<ref group="K" name="p266267"/>. Dans la plupart des cas, la monnaie de pierre n'est utilisable que dans le cadre de transactions traditionnelles, mais son capital symbolique et culturel est parfois transférable en capital économique, ce que le chercheur interprète comme une résistance des habitants Modèle:Citation<ref group="K">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, pour les transactions concernant des produits modernes, la monnaie utilisée est le dollar américain auquel n'est pas associé de valeur de souffrance et de difficulté<ref group="F" name="p23">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>,<ref group="K" name="p264265"/>.

La vente des monnaies de pierre aux étrangers

Selon Cora Lee Gilliland, dès lors que des étrangers se sont intéressés puis impliqués dans des échanges de Modèle:Lang avec les Yapais, la taille est devenue une caractéristique dominante de l'évaluation de la monnaie, les étrangers n'ayant pour la plupart aucune connaissance ni aucun souci de la tradition coutumière et tacite. Des questions d'équivalence apparaissent en conséquence. Par exemple, en 1877, le musée national danois reçoit une pierre de Modèle:Unité évaluée dix couronnes danoises. Autour de 1880, une monnaie de Modèle:Unité de diamètre vaut 40 marcs. Dans les années 1880, le consul allemand Hernsheim écrit qu'une petite pierre peut acheter la nourriture d'une famille pendant un mois. En 1889, Johann Kubary établit qu'une pierre de trois paumes de large équivaut à un porc<ref group="G" name="p13">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Lors de sa visite des îles Yap, en 1903, selon William Henry Furness, une monnaie de cette dimension permet d'acheter cinquante paniers de nourriture ou un porc de Modèle:Unité ou Modèle:Nobr noix de coco, ou s'échanger contre un coquillage nacré d'une paume et trois doigts de long. Une hache à manche court s'échange contre une monnaie de Modèle:Unité de diamètre<ref group="WF">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Pour autant, avec les facilités d'acquisition de monnaies et l'augmentation de leur nombre, la monnaie de pierre se déprécie lors des échanges avec les Européens : une pièce d'environ une paume de large est évaluée Modèle:Unité en 1896, à Modèle:Unité en 1908-1910, à Modèle:Unité en 1912. Une monnaie de Modèle:Unité de diamètre est achetée Modèle:Unité par un Japonais dans la même décennie. Pourtant, les Yapais évaluent à Modèle:Unité une pierre de Modèle:Unité de diamètre offerte par un chef au ministre japonais de la Marine<ref group="G">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Les Yapais se sont adaptés à l'économie des étrangers et au concept d'une économie monétaire avec des valeurs fixes. Dans les années 1950 et au début des années 1960, Modèle:Unité est une valeur souvent citée. C'est le tarif, par acre et par an, de la location des terres pour l'administration du Territoire sous tutelle des îles du Pacifique, le prix des dommages et intérêts demandés par les insulaires pour chaque cocotier abattu par les étrangers. D'une manière générale, c'est le prix convenable dans le cadre des relations avec les étrangers. Modèle:Unité par pied de diamètre est par conséquent le coût demandé pour les pierres acquises sur les îles Yap par ceux-ci<ref group="G" name="p1617"/>. En 1960, une monnaie de pierre de Modèle:Unité (Modèle:Unité) est ainsi vendue Modèle:Unité en 1960 par un Yapais à la Banque nationale de Détroit. La propriété de cet objet est cependant revendiquée par un de ses compatriotes qui en demande le retour ou l'argent reçu. L'enquête qui s'ensuit en 1961 permet de retracer la totalité de l'histoire de la monnaie depuis les noms de ceux qui l'ont extraite, peut-être entre 1875 et 1885, jusqu'au dernier des six propriétaires individuels ou collectifs successifs, le contexte et la nature des échanges au sein desquels a pris place la monnaie<ref group="G" name="p1617">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Progressivement, toutefois, les Yapais ont changé d’attitude. Le nombre de pierres quittant les îles Yap a augmenté après la levée des restrictions à l'entrée d'étrangers dans la région en 1963. Les Yapais ont également appris de leurs relations avec les Américains et de leur économie, se sont sensibilisés à la valeur du rai pour les étrangers et au danger de l'exportation massive. En 1962, lorsque la Smithsonian Institution cherche à acquérir des pierres pour le Musée national d'histoire naturelle des États-Unis, dans un premier temps, un conseil de chefs yapais convient d'un prix à Modèle:Unité le pied de diamètre quelles que soient les caractéristiques et l'histoire des pierres. Toutefois, une visite de plusieurs d'entre eux dans un musée à Koror, aux Palaos, où ils voient deux monnaies paluannes étiquetées Modèle:Unité, leur font augmenter leurs prétentions. Il est exigé Modèle:Unité d'une pierre antérieure à l'arrivée des Européens<ref group="G" name="p18">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

À l'automne 1965, le Congrès du district de Yap adopte la résolution n°10-65 qui instaure le prélèvement d'une taxe sur le transfert des fonds traditionnels yapais. Un document de transfert de propriété doit être obtenu si un citoyen du Territoire sous tutelle vend ou donne des sommes traditionnelles yapaises à tout établissement commercial ou à toute personne qui n'est pas citoyen du Territoire sous tutelle. La taxe est de Modèle:Unité pour une vente, de Modèle:Unité sur la valeur estimée pour un cadeau. Une amende de Modèle:Unité est infligée aux contrevenants. Auparavant, selon le code du district, un titre de transfert de propriété seul suffisait. De nombreuses fraudes ont tout de même lieu<ref group="G" name="p18"/>. En avril 1965, le prix est de Modèle:Unité le pouce, équivalent à Modèle:Unité le pied. En 1966, le Congrès fixe un prix de Modèle:Unité le pouce. Il est de Modèle:Unité le pouce en 1975<ref group="G" name="p18"/>.

Avant 2001, l'exportation des monnaies traditionnelles aurait été rendue impossible par la législation de l’État de Yap<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Emplacement des monnaies de pierre

Carte des îles Yap avec des sept étoiles rouges
Emplacements des sept principaux Modèle:Lang sur les îles Yap.
Photo en couleur figurant un bâtiment en matériaux périssables contre lequel est posé des pierres rondes
Maison des hommes âgés de Yorlap (village de Gal', municipalité de Kanifay) avec des monnaies de pierre (1971).
Photo en couleur figurant un bâtiment en matériaux périssables contre lequel est posé des pierres rondes
Maison des hommes de Yorlap (village de Gal', municipalité de Kanifay).

Les plus petites monnaies de pierre sont conservées dans les maisons. Les plus grandes sont adossées aux fondations de bâtiments, flanquent les sentiers des villages ou les plates-formes des maisons communautaires<ref group="M" name="p131"/>. Nombre de monnaies de pierre sont disposées aux extrémités triangulaires des maisons des hommes âgés (Modèle:Lang), maisons communautaires qui parsèment les îles Yap. Les pierres y ont à la fois un rôle décoratif et servent de dossier aux chefs<ref group="L" name="p99100">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Nombre d'entre elles, notamment certaines des plus grandes et avec le plus de valeur, sont établies, devant la maison des hommes âgés, en bordure de terrains appelés Modèle:Lang destinés à la pratique de la danse, aux échanges de cadeaux entre les villages et aux réunions de chefs de village<ref group="T" name="p79"/>,<ref group="K" name="p260"/>,<ref group="L" name="p99100"/>. Selon Adam Thompson, les monnaies de pierres ont été à l'origine ramenées des Palaos pour servir à l'expression de l'honneur dû aux chefs qui viennent sur le Modèle:Lang. En cet endroit, assis contre des dossiers en pierre verticaux attitrés à leur titre, ils reçoivent des cadeaux, assistent à des fêtes ou à des réunions rassemblant les chefs de différents villages et les prêtres dotés de capacités magiques devant donner suite à leurs demandes : déclencher la guerre, lancer des sorts de caste et voir sur de grandes distances. Adam Thompson rapproche sur ce point les dossiers des Modèle:Lang des dossiers des marae de Polynésie orientale, zone sacrée où les chefs s'asseyaient et discutaient des événements du village<ref group="T" name="p79"/>.

Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, plus souvent qu'avant, les plus petites pierres sont retirées du Modèle:Lang et placées devant la maison familiale, ceci afin de contourner l’étiquette complexe en matière d’autorisation qui doit être demandée aux différents chefs qui surveillent le Modèle:Lang<ref group="T" name="p79"/>. Ces pierres sont un signe de prestige<ref group="F" name="p2223"/> et peuvent servir de dossier aux hommes âgés de la famille<ref group="L">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Les sept principaux rassemblements de monnaies de pierre des îles Yap sont inscrits sur la « liste indicative » de l'UNESCO depuis 2004 en vue de devenir un site du patrimoine mondial de l'UNESCO<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Certains, comme Daed et Fanekan, sont situés à côté de la maison des hommes (Modèle:Lang) des villages de Riken (municipalité de Gagil) et Fanekan (municipalité de Tomil) qui paraissent être des villages de statut inférieur. Fanekan semble être le plus récent puisque vraisemblablement construit pendant l'occupation japonaise du Mandat des îles du Pacifique. Le groupe de Falow est éloigné de toute construction du village de Gilfith (municipalité de Fanif), tandis que celui de Guywar est proche à la fois de la maison des hommes et de la maison communautaire du village de Riy (municipalité de Rumung). D'autres rassemblements comme Yorlap, Mangyol et Diyagil, sont adjacents à la maison communautaire des villages de Gal' (municipalité de Kanifay), Makiy (municipalité de Gagil) et Malay (municipalité de Kanifay) et jouissent tous d'un statut élevé<ref group="T" name="p44">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

La plus grande concentration intacte de pierres est la Modèle:Citation, dans le village de Makiy dans la commune de Gagil. Il consiste en un rassemblement de 71 pierres divisées en deux files se croisant en leur milieu, l'une de direction nord-sud traditionnellement appelée Bleyrach, l'autre d'est en ouest nommée Mangyol, dénomination communément utilisée pour désigner l'ensemble. D'après le journaliste Bill Jaynes, Bleyrach serait l'une des sept "banques" originales dont l'aménagement aurait été désigné par les esprits dans les temps préhistoriques. Mangyol aurait été construit avant l'arrivée des espagnols dans la région au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle<ref name=moneybank>Modèle:Lien web.</ref>. Le lieu est un important centre de pouvoir ainsi que l'indique un grand nombre de dossiers témoignant des liens intenses maintenus avec de nombreux villages<ref group="T" name="p44"/>.

Les monnaies de pierre en tant que symbole de la culture yapaise

Photo en noir et blanc figurant des hommes portant sur leurs épaules un tronc passé au travers d'une monnaie de pierre
Présentation d'une monnaie de pierre lors de la déclaration d'indépendance des États fédérés de Micronésie en 1978.

Les monnaies de pierre sont l'un des aspects culturels les plus connus des visiteurs étrangers abordant les îles Yap<ref group="K" name=p260>Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. Sur place, elles sont un symbole culturel fort et sont ainsi représentées sur les plaques d'immatriculation des véhicules<ref group="F" name="p23"/>, sur le sceau de l’État<ref>Modèle:Lien web.</ref> ou bien encore sur le logo des Jeux de la Micronésie de 2018 qui se sont déroulés sur les îles Yap. Des exemplaires sont présentés dans un Modèle:Lang reconstitué au Modèle:Lang à Colonia<ref group="K" name="p238">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>. La manifestation du Yap day est souvent ouverte avec la reconstitution du remorquage par des canoës et des radeaux d'une monnaie de pierre, amenée sur le rivage, puis présentée cérémonieusement à un chef<ref group="K">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

La monnaie de pierre dans les théories économiques

L'exemple de la monnaie de pierre, jugé semblable ou différent de nombre de systèmes monétaires, est utilisé par les économistes dans le cadre de réflexions théoriques et philosophiques sur la monnaie.

La monnaie de pierre : une monnaie ?

L’applicabilité du terme monnaie au Modèle:Langue a été remis en cause par quelques anthropologues. En 1940, Melville Herskovits rejette l’applicabilité de ce terme. En 1976, dans une lettre incendiaire sur les travaux de l'historienne Cora Lee Gilliland, qui vit aux îles Yap, David Schneider fait de même sans argumenter. En 1980, William Lessa partage l'avis de ses deux prédécesseurs et compare la monnaie de pierre au diamant qui n'est pas considéré comme une monnaie. Ce débat a opposé les tenants d'une définition étroite du terme monnaie à ceux l'employant avec une définition plus large tels que Cora Lee Gilliland et Paul Einzig<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref name=lessa/>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. D'une manière générale, le Modèle:Langue est considéré comme une monnaie par les voyageurs et scientifiques l'ayant étudié de la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle.

La monnaie de pierre : un exemple de monnaie fiduciaire sans actif ?

Billet avec une impression grise foncée sur un papier de couleur bistre.
Certificat-or américain de Modèle:Unité émis en 1922 par le Département du Trésor des États-Unis : « Ce billet certifie qu'il a été déposé au Trésor des États-Unis la somme de Modèle:Unité en pièces d'or payable au porteur sur demande. »

En 1910, l'anthropologue William Henry Furness, commentant le fait qu'une monnaie de pierre échangée ne change pas de place et peut donc rester contre la maison de son propriétaire initial, constate que le pouvoir d'achat de la pierre ne varie pas, tout comme celui de l'or inactif amassé par un avare du Moyen Âge ou les métaux précieux empilés dans le Trésor de la banque centrale américaine, mais commercialisés de par la force de certificats imprimés indiquant qu'ils sont détenus<ref group="WF" name="94-96" />, c'est l'étalon-or<ref name=noam>Modèle:Ouvrage.</ref>. Pour l'écrivain et homme politique anglais Norman Angell, l'épisode de la monnaie de pierre engloutie mais toujours valable, peut être perçu comme une parodie de l'étalon-or<ref name=norman>Modèle:Ouvrage.</ref>. En 1930, John Maynard Keynes note que les banques centrales ont cessé de transférer de l'or dans les coffres des autres, préférant plutôt que leur or soit marqué, c'est-dire voir sa propriété changer sans changer le lieu. L'économiste juge que la monnaie passe d'un système fondé sur un support matériel Modèle:Incise à une monnaie dépourvue d'un lien avec des actifs. Il réalise le parallèle avec la monnaie de pierre qu'il pense appartenir à ce dernier système<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,Modèle:Note.

Photo d'un homme âgé de trois-quart face, en buste, avec lunettes et crâne dégarnie, le menton posé sur sa main
Portrait de Milton Friedman.

Au début des années 1990, s'appuyant sur l'épisode de la monnaie de pierre immergée, James Tobin<ref>Modèle:Article.</ref> et Milton Friedman reprennent cette même idée<ref name=fried/>. D'après ce dernier, la croyance en la réalité incontestée de la valeur de l'or qui a prévalu dans les pays occidentaux en l'étalon-or n'est pas différente ni plus rationnelle que celle des Yapais en la monnaie de pierre<ref name=fried>Modèle:Ouvrage.</ref>. Le récit yapais est à nouveau employé par Gregory Mankiw, pour qui, toutefois, la monnaie de pierre se situe entre la monnaie fiduciaire et la monnaie de commodité<ref name=macro/>.

Dans la continuité de la plupart de leurs prédécesseurs, des économistes comme Gary Smith et Willem Buiter ne voient dans la monnaie de pierre qu'une monnaie fiduciaire sans valeur intrinsèque, c'est-à-dire un simple moyen d'échange accepté en tant que tel par la loi ou la tradition, contrairement, par exemple, à l'or ou au bétail qui peuvent s'échanger pour eux-mêmes<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

En 2005, Dror Goldberg dénie l'existence de monnaies fiduciaires sans actif et rappelle que les monnaies de pierre ont une valeur pour elles-mêmes. Elles sont appréciées pour leurs qualités esthétiques, lesquelles sont prises en compte dans leur valeur, les plus petites ont peut-être été utilisées comme bijou, elles ont été utilisées comme "trône" et elles ont une valeur religieuse. Enfin, reprenant l'épisode de la monnaie engloutie, il constate qu'il n'existe aucune preuve que cette monnaie ait été échangée hors du cercle familial de son propriétaire d'origine<ref>Modèle:Article.</ref>.

La monnaie de pierre pour remettre en cause les certitudes

L'économiste Félix Martin interprète la monnaie de pierre comme une preuve démystifiant les théories standards selon lesquelles l'argent a évolué à partir de sociétés frustrées par les limites évidentes du troc. Il eut été en effet plus facile de simplement échanger des biens que de devoir se procurer des monnaies de pierre pour faire ces échanges. Pour Félix Martin, un consensus émerge parmi les anthropologues sur le fait qu'il n'y a guère de preuves qu'une société ait jamais compté que sur le troc, au contraire de ce qui était communément admis. Il soutient que la monnaie de pierre doit faire évoluer la réflexion sur ce qu'est réellement l'argent. Il ne serait finalement pas quelque chose de tangible basé sur des métaux précieux, mais une technologie sociale, un ensemble d'idées et de pratiques pour organiser la société<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Pour les économistes Ian Harris et Michael Mainelli, la monnaie de pierre incite à réfléchir sur la théorie de la valeur du travail<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. Selon Noam Yuran, le rapprochement entre monnaie de pierre et étalon-or réalisé par Milton Friedman permet de comprendre que l'histoire de la monnaie est un objet historique bien plus complexe que ce qui était auparavant perçu, que le système monétaire fiduciaire n'est pas aussi transparent que cru et qu'il contient une dose de non savoir, peut-être de vieilles superstitions. Enfin, la monnaie fiduciaire comporte une forme de matérialité héritière de son histoire<ref name=noam/>.

La monnaie de pierre comme antécédent du Bitcoin

En 2014, l'économiste Dominic Frisby développe l'idée que le Modèle:Lang et le Bitcoin présentent beaucoup de points communs et que le premier est un précurseur du second. La monnaie de pierre reste en place et le Bitcoin reste sur internet, les deux monnaies comportent un système d'enregistrement de propriété, pour l'un dans la mémoire des populations, pour l'autre dans le réseau<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Ce rapprochement entre Bitcoin et monnaie de pierre est considérablement développé par Scott M. Fitzpatrick et Stephen McKeon. Ils proposent que le ou les créateurs de la monnaie électronique, connus sous le nom de Satoshi Nakamoto, ont pu être inspirés par l'exemple de la monnaie de pierre<ref group="FM" name="p12">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Parmi les points communs, ils notent que l'offre de nouvelles monnaies est limitée dans le premier cas numériquement, dans le deuxième cas par les moyens physiques (déplacement nécessaire et travail manuel) et humains (négociations avec les Paluans). Contrairement à une monnaie fiduciaire où une banque centrale gère l'accroissement de la monnaie, l'expansion de ces deux monnaies est uniquement gérée par la contribution du travail, des calculs mathématiques pour le premier, un travail manuel pour le second, et la récompense qui en est retirée. Les « mineurs » de Bitcoins récupèrent une petite quantité de Bitcoin, les Yapais reçoivent une pierre, des biens ou un statut plus élevé dans la société. D'autres rapprochements sont possibles. Les Bitcoins nécessitent d'immenses capacités de calculs, l'approvisionnement en monnaies de pierre des moyens humains considérables. La monnaie électronique est échangée sans intermédiaire et cet échange est enregistré par la totalité du réseau, le Modèle:Lang est également échangé directement, oralement pour la connaissance de tous, et dans le cadre de cérémonies ou d'évènements publics. Par sa structuration, l'historique des transactions des Bitcoins est enregistré par le réseau, fait l'objet de multiples copies et est inviolable. Dans les îles Yap, l'histoire des transactions des monnaies de pierre est connue de la communauté et répété de génération en génération. Enfin, les deux monnaies ne nécessitent pas une possession physique, car l'une est immatérielle, l'autre n'est qu'assez rarement déplaçable, et elles sont également limitées dans leur volume de transaction. En effet, la structure du Bitcoin limite le nombre de transactions pouvant être traité et une augmentation massive de la population yapaise rendrait inopérante, du fait de contraintes cognitives, la capacité orale d'enregistrement des échanges en monnaies de pierre<ref group="FM">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

A contrario, Scott M. Fitzpatrick et Stephen McKeon mettent en avant que le Bitcoin est divisible alors que la monnaie de pierre ne l'est pas et doit rester entière pour conserver sa valeur. De même, la distribution des nouvelles unités monétaires est réalisée différemment : les « mineurs » récupèrent la totalité de l'argent créé alors que les carriers yapais ne perçoivent qu'une partie du résultat de leur travail. Les propriétaires de Bitcoin peuvent rester sous pseudonymat alors que l'identité de ceux de monnaie de pierre est connue de tous et est requise pour maintenir la transparence et la sécurité. Les Bitcoins sont interchangeables car identiques, ce qui n'est pas le cas des monnaies de pierre qui diffèrent entre elles par de nombreux aspects. Enfin, la monnaie de pierre a, par le passé, été soumise à une forte inflation et à des saisies, alors que le Bitcoin ne peut connaître qu'une inflation limitée et est plutôt bien protégé des confiscations<ref group="FM">Modèle:Référence Harvard sans parenthèses.</ref>.

Notes et références

Note

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Références

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  • Autres sources

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Articles connexes

Liens externes

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