Front populaire (France)

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Modèle:Infobox Alliance politique française

Le Front populaire est une coalition de partis de gauche qui gouverne la France de mai 1936 à avril 1938. Il réunit les trois principaux partis de la gauche : la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO), le Parti radical et le Parti communiste (qui soutient les deux premiers sans y participer directement) mais également de nombreux autres mouvements de gauche et antifascistes<ref>Des syndicats, des associations d'anciens combattants de gauche et des mouvements intellectuels (Ligue des droits de l'homme, Mouvement contre la guerre et le fascisme et Comité de vigilance des intellectuels antifascistes), ainsi que des petits partis (l'Union socialiste républicaine de Paul Ramadier, le Parti d'unité prolétarienne, le parti Camille Pelletan, la Jeune République de Marc Sangnier, le Parti frontiste, etc.).</ref>.

L'arrivée au pouvoir du Front populaire constitue un choc pour une grande partie de l'élite française et de la bourgeoisie.

Ce gouvernement instaure des réformes sociales majeures, comme la réduction du temps de travail (40 heures par semaine) l'obtention des congés payés (15 jours), le ministre Léo Lagrange mettant aussi en place « billet populaire de congés annuel », réduisant les tarifs du train, pour que les travailleurs français modestes puissent plus facilement partir en vacances.

Le Front populaire reste encore une des références majeures de la mémoire et de l'histoire de la gauche française.

Le gouvernement Léon Blum, premier gouvernement de coalition issu de la nouvelle majorité, est surtout le premier de la [[IIIe République française|{{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | IIIe{{#if:|  }} }} République]] dirigé par les socialistes. Il est suivi de trois autres (deux dirigés par un radical, Camille Chautemps, et un dernier dirigé à nouveau par Léon Blum).

L'assemblée élue lors des élections de mai 1936 demeure en place jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale, malgré l'arrestation de 49 députés communistes en septembre 1939<ref>Modèle:Article.</ref>, et se sépare le 10 juillet 1940.

Toutefois, la fin du Front populaire arrive en avril 1938 lorsque le radical Édouard Daladier succéde à la présidence du Conseil au socialiste Léon Blum, qui démissionne à la suite de son échec dans l'obtention de moyens lui permettant de mettre en place une politique de grandes réformes financières.

Genèse et formation

La réaction militante au 6 février 1934

Fichier:Manifestation SFIO 1934.jpg
Manifestation de la SFIO en réaction à la crise du 6 février 1934. Une pancarte proclame Modèle:Citation et des banderoles exigent Modèle:Citation et la Modèle:Citation
(agence Meurisse, 1934, Paris, BnF).
Fichier:SFIO.svg
Emblème du parti socialiste SFIO.

C'est en réaction à la journée d'émeutes menée le 6 février 1934 par les ligues (Action française, Jeunesses patriotes, etc.) et d'autres groupes d'anciens combattants que les partis de gauche décident de s'unir contre « le danger fasciste » et les tentatives de l'extrême droite pour établir en France un régime dictatorial équivalent à l'Italie fasciste<ref name="Berstein103">Modèle:Harvsp.</ref>.

Dès le Modèle:Date-, un mouvement en faveur d'une unité d'action se dessine lors des manifestations de rue à Paris et en province<ref>Antoine Prost, « Les manifestations du 12 février 1934 en province », Le Mouvement Social, Modèle:N°, janvier-mars 1966, p. 7-27.</ref>. Durant ces manifestations, les cortèges communistes et socialistes défilent ensemble sous la pression des militants de chaque parti. Le même jour, la CGT et la CGTU appellent à une journée de grève<ref>VERGNON, Gilles. Chapitre II. « Le fascisme ne passera pas. » Février 1934, naissance de l’antifascisme In : L'antifascisme en France : De Mussolini à Le Pen [en ligne]. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2009</ref>.

Les socialistes et les communistes sont authentiquement convaincus qu'ils viennent de connaître une tentative de coup d'État concerté en vue d'établir un régime autoritaire<ref>Sentiment que les historiens ne partagent plus, comme l'indique Danièle Zéraffa-Dray, à la page 71 de son ouvrage D'une République à l'autre, 1918-1958 : Modèle:Citation</ref>. Cependant, ils réagissent d'abord en ordre dispersé. À la fois concurrents et adversaires depuis la scission survenue lors du congrès de Tours de la SFIO, qui a vu la formation de la SFIC qui deviendra plus tard le PCF, les deux partis ouvriers peinent à renouer le dialogue. Pour les communistes, qui suivent les orientations de la Troisième Internationale, le capitalisme est entré dans sa « troisième phase » : il va bientôt connaître une période de crise qui le poussera à agresser l'URSS. Lorsque ce conflit, qu'ils pensent inévitable, surviendra, les communistes auront pour tâche de lutter énergiquement contre leur bourgeoisie nationale, quel que soit son bord politique (de ce point de vue, les radicaux ou les républicains-socialistes sont assimilés à la droite et taxés de fascistes). Fondamentalement révolutionnaire, le PCF considère même que le combat doit s'étendre à la SFIO, coupable de contribuer à faire avorter la Révolution en prônant des politiques réformistes<ref name="Berstein103" />. Cetté défiance contre la SFIO remonte également à l'acceptation de l'Union sacrée en 1914 par la SFIO.

Pour sa part, la SFIO se méfie d'un Parti communiste qui, sous couvert de proposer un front unique, chercherait en réalité à attirer vers lui les militants socialistes en les éloignant de leurs dirigeants<ref>Non sans raison : l'ancien dirigeant communiste Treint dira d'ailleurs : Modèle:Citation, cité dans Modèle:Harvsp.</ref>. Par ailleurs les socialistes, alliés traditionnels des radicaux, sont en froid avec ces derniers. Ces deux partis ont déjà connu ensemble par deux fois l'expérience de la coalition, dans le cadre du Cartel des Gauches, en 1924 et 1932. Des accords de désistements réciproques leur avait alors permis d'investir une majorité absolue de sièges à la Chambre des députés. Or, à chaque fois, socialistes et radicaux finissaient par entrer en conflit sur les questions économiques et sociales : les premiers refusant à terme leur soutien aux gouvernements des seconds, les radicaux finissaient par s'allier à la droite et les socialistes passaient dans l'opposition. Sur la question de la responsabilité de cet échec, les deux partis se renvoient la balle et leurs rapports sont, depuis 1934, bien conflictuels<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Concrètement, les socialistes comme les communistes, attaquent violemment les radicaux, ne leur pardonnant pas leur alliance avec la droite dans le gouvernement Doumergue (février-novembre 1934), tandis que les radicaux reprochent aux socialistes de ne pas les avoir efficacement soutenus lors des deux expériences du Cartel, ce qui en fait à leurs yeux des alliés définitivement peu recommandables.

Pourtant, le 6 février déclenchera une dynamique qui l'emportera peu à peu sur les querelles d'appareil<ref>Modèle:Article</ref>. Au lendemain de cette journée, plusieurs comités antifascistes se forment, comprenant des socialistes, des radicaux et des représentants de divers groupes de gauche, mais jamais de communistes. Les clivages idéologiques persistent. Le 9 février, le PCF et la CGTU organisent un grand rassemblement<ref>La manifestation dégénère rapidement et, au terme d'affrontements violents avec les forces de l'ordre, on compte six morts et plusieurs centaines de blessés.</ref> place de la République, contre le fascisme et les ambiguïtés du gouvernement. De son côté, la SFIO préfère relayer par une manifestation l'appel de la CGT à la grève générale pour le 12 février. Le PCF décide de se joindre à la manifestation, espérant toujours attirer à lui les militants socialistes en plaçant des orateurs tout le long du cortège. C'est pourtant l'inverse qui se produit : Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.

Modèle:Ref nec.

Changement de ligne du Parti communiste

[[Fichier:Maurice Thorez - VIIIe Congrès national du PCF.jpg|vignette|gauche|upright|

Maurice Thorez, photographie parue dans le compte rendu sténographique du [[VIIIe congrès du Parti communiste français|{{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | VIIIe{{#if:|  }} }} Congrès national du PCF]] (Lyon-Villeurbanne, janvier 1936).

]]

Fichier:Hammer and sickle red on transparent.svg
La faucille et le marteau, alors emblème du PCF.

L'évolution vers l'unité n'est pas évidente, la direction du PCF étant dans un premier temps hostile à tout rapprochement avec la SFIO, conformément à la tactique « classe contre classe » élaborée à la fin des années 1920 par la Troisième Internationale. Pourtant, le 26 juin 1934 à Ivry, Maurice Thorez opère un virage en appelant à l'unité d'action avec les socialistes<ref>Modèle:Chapitre</ref>.

Les explications de cette spectaculaire évolution<ref>Jacques Doriot avait été exclu du parti quelques semaines plus tôt parce qu'il réclamait l'unité d'action avec les socialistes.</ref> sont diverses et, pour certaines, sujettes à caution<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Il est certain que c'est avec l'accord de l'Internationale, dirigée depuis Moscou, que Thorez opère ce changement de stratégie, la question restant en suspens de savoir si les communistes français l'avaient préalablement sollicitée ou si l'initiative en revenait exclusivement au Komintern. Des raisons intérieures ont certainement joué, outre la volonté unitaire de la base : la tactique « classe contre classe » avait montré ses limites en isolant le parti et en provoquant un net recul du PC aux élections de 1932. Mais c'est également parce que Staline réévalue le danger fasciste<ref>Modèle:Citation, Danièle Zeraffa-Dray, op. cit., Modèle:P..</ref>, considéré jusqu'ici comme une évolution de la démocratie bourgeoise. Face à l'installation d'Hitler au pouvoir le PC adopte une attitude résolument unitaire.

Il ouvre ainsi la voie à la formation d'un « Front populaire » (l'expression est attribuée à Eugen Fried, représentant de l'Internationale communiste en France), avec comme première étape la signature entre les deux partis marxistes d'un « pacte d’unité d’action antifasciste » le 27 juillet 1934<ref>Modèle:Lien web</ref>, où ils s'engagent à joindre leurs forces dans la lutte contre le fascisme et le gouvernement d'Union nationale de Gaston Doumergue.

Mais Thorez ne souhaite pas en rester là et déborde une SFIO qui, stupéfaite, l'entend à Nantes le Modèle:Date-<ref>Modèle:Lien web</ref> suggérer Modèle:Citation et la constitution d'un rassemblement non seulement ouvrier mais « populaire », ce qui constitue clairement un appel du pied au Parti radical, représentant des classes moyennes. De fait, Thorez considère que les résultats des élections cantonales d'octobre 1934, où l'extrême-droite progresse en attirant à elle d'anciens électeurs radicaux, Modèle:Citation<ref>Michel Margairaz, Danielle Tartakowsky, « L'avenir nous appartient », une histoire du Front populaire, Larousse 2006.</ref>, touchées par le chômage et désorientées politiquement. En intégrant les radicaux à la logique d'union à gauche, Thorez espère créer cette dynamique. Ces derniers, très méfiants vis-à-vis des communistes, refusent d'abord cette proposition d'alliance, position logique dans la mesure où ils participent aux gouvernements d'Union nationale : le Parti radical semble pencher à droite.

Le ralliement des radicaux

Fichier:Édouard-Daladier-bureau-1933.JPG
Édouard Daladier (assis) entouré de deux de ses collaborateurs
(agence Meurisse, 1933, Paris, BnF).
Fichier:Edouard-Herriot-discours1936.jpg
Édouard Herriot, ancien président du Parti radical, se tient en retrait lors du Front populaire
(agence Meurisse, 1936, Paris, BnF).

Pourtant, en juin 1935<ref>Modèle:Ouvrage</ref>, la pression de l'aile gauche du Parti radical, notamment des « Jeunes Turcs » et d'Édouard Daladier (qui cherche à retrouver un espace politique après son échec à la suite du 6 février 1934), amène Édouard Herriot à accepter le rapprochement avec la SFIO et le PC. De fait, de nombreux éléments, outre la volonté de la plupart des militants de base de renouer avec la tradition d'un ancrage à gauche du parti, suggèrent le ralliement au Rassemblement populaire. En effet, le Parti radical, bien qu'allié de la droite dans les gouvernements de trêve, subit de la part de ses partenaires des critiques souvent violentes, allant de l'incompétence à la corruption, alors même que la politique de droite menée par ces gouvernements met mal à l'aise un nombre de plus en plus important de militants.

Dans le même temps, les communistes couvrent d'éloges le Parti radical, héritier selon eux de la Révolution française et représentant d'une classe moyenne désormais solidaire du prolétariat<ref>Dans l'Humanité du 30 juin 1935, Maurice Thorez écrit : Modèle:Citation</ref>. Le dernier verrou tombe lorsque l'Union soviétique se rapproche de la France à la suite de la visite de Pierre Laval à Moscou en mai 1935. Le PCF peut désormais voter les budgets militaires et laisse libre cours à un discours patriotique<ref>Grâce à l'accord franco soviétique, le PCF était en mesure d'Modèle:Citation Modèle:Harvsp.</ref> qui tranche avec ses positions antérieures et ne peut que satisfaire les radicaux.

Comme les élections municipales de mai 1935 se caractérisent par un nouveau recul du Parti radical, sauf là où il s'était allié avec la SFIO, Herriot n'a plus de réel argument pour poursuivre la politique d'alliance avec la droite, et le comité exécutif du parti, Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>, décide le 3 juillet de participer à la grande manifestation unitaire prévue pour le 14 juillet 1935.

La manifestation du 14 juillet 1935

Fichier:Manifestation 14 juillet 1935 place de la Bastille.jpg
Manifestation du 14 juillet 1935, Paris, place de la Bastille
(agence Meurisse, 1935, Paris, BnF).
Fichier:Manifestation 14 juillet 1935 Bastille.jpg
Manifestation du 14 juillet 1935, Paris, place de la Bastille
(agence Meurisse, 1935, Paris, BnF).
Fichier:Marseillaise.jpg
Assises de la Paix et de la Liberté tenues le 14 juillet 1935 au stade Buffalo à Montrouge.

Le choix de la date, à la fois fête révolutionnaire et fête nationale, et du lieu (la manifestation suit le même parcours que celle du 12 février 1934) est significatif. Surtout, pour la première fois, militants et chefs radicaux (notamment Daladier), socialistes et communistes défilent de concert aux côtés d'autres petits partis, syndicats et associations (CGT, CGTU, CVIA, Ligue des droits de l'homme…), dans une manifestation de près de Modèle:Nombre<ref>Modèle:Nombre selon les organisateurs, 100 000 selon la police. Jacques Fauvet, Histoire du parti communiste français, Fayard, 1977.</ref> et Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. La solennité du moment est renforcée par la rédaction d'un serment, écrit par Jean Guéhenno, André Chamson, et Jacques Kayser<ref>Modèle:Article.</ref>, prêté par tous les manifestants, qui réaffirme l'importance de la mobilisation antifasciste et dégage des objectifs pour améliorer la situation du pays<ref>Modèle:Citation</ref>.

La tranquille mobilisation d'un peuple de gauche qui revendique son histoire, y compris nationale (Jeanne d'Arc, La Marseillaise, le Soldat inconnu<ref>Jean Perrin, prix Nobel et membre de l'Institut parle ainsi des ennemis du rassemblement populaire : Modèle:Citation ; cité par Michel Margairaz et Danielle Tartakowski, op. cit., p. 51.</ref>) apparaît irrésistible, et c'est tout naturellement que le comité d'organisation de cette manifestation, dirigé par le président de la Ligue des droits de l'homme Victor Basch, est prolongé en un comité national pour le rassemblement populaire, chargé d'élaborer un programme commun et des accords de désistement dans la perspective des élections du printemps 1936.

Un programme électoral modéré et ambigu

Le programme du Front populaire, censé se structurer autour de son slogan électoral « Pain, Paix, Liberté », est plus concrètement organisé en deux rubriques.

Dans le domaine politique, les revendications sont classiques : défense de la démocratie (désarmement et dissolution des ligues, obligation pour les organes de presse de publier leur bilan financier pour permettre à leurs lecteurs de connaître l'identité de ceux qui les financent, promotion des droits syndicaux et de l'école laïque) et de la paix (désarmement relatif, promotion de la sécurité collective et de la négociation dans le cadre de la SDN). En dehors de la volonté de nationaliser les industries pour soustraire la politique extérieure de la France à l'influence des marchands de canon, Modèle:Citation<ref>D. Zéraffa-Dray, op. cit., p. 83.</ref>, et l'antifascisme reste essentiellement à destination interne, contrairement aux souhaits du PCF, plus belliciste et prêt à internationaliser la lutte contre le fascisme<ref>Modèle:Citation Modèle:Harvsp.</ref>. Ces ambiguïtés en matière de politique extérieure pèseront lourd dans les difficultés ultérieures du gouvernement de Front populaire.

Les mesures préconisées par le Front populaire en matière économique sont plus importantes, bien que tout autant marquées du sceau du compromis. En dehors de la volonté de réformer la Banque de France, Modèle:Citation<ref>M. Margairaz, D. Tartakowsky, op. cit., p. 56.</ref> : « réduction de la semaine de travail sans réduction du salaire hebdomadaire », « plan de grand travaux d'utilité publique », création d'un « fonds national de chômage » et d'un régime de retraite pour les vieux travailleurs. À cela s'ajoute en matière agricole la mise en place d'un Office national des céréales destiné à régulariser le marché et lutter contre les spéculateurs.

En fait, même sur le plan économique, ce programme modéré du Modèle:Citation reste modeste et se contente de prévoir la Modèle:Citation pour résoudre la crise et apporter Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>, comme le souhaiteraient les socialistes. De ce point de vue, il est nettement plus proche des vues du Parti radical<ref>Modèle:Citation Modèle:Harvsp.</ref> que de celui de la SFIO, plus étatiste quand les radicaux restent fondamentalement des libéraux<ref>Les radicaux Modèle:Citation Modèle:Harvsp.</ref>. Cela n'a pas été sans créer des tensions entre le Parti radical et les socialistes, mais ces derniers ont dû s'incliner compte tenu de la farouche volonté du PC de faire preuve de modération pour assurer le ralliement des classes moyennes au Front populaire<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Il ne constitue d'ailleurs qu'une base de désistement pour le second tour, chaque parti défendant au premier tour son propre programme, dont la compatibilité avec le programme de Front populaire n'est pas toujours évidente. Ici comme en politique étrangère, les divergences entre alliés, les ambiguïtés sont nombreuses, même si dans un premier temps l'enthousiasme des militants peut les maintenir sous cloche.

La victoire électorale et la mise en place du gouvernement de Front populaire

Victoire et rapports de forces internes au Front populaire

Modèle:Article détaillé

Fichier:Le-Populaire-4-mai-1936.jpg
Une du journal Le Populaire, Modèle:N°, Modèle:Date.

Profitant de son unité (les désistements entre le premier et le second tour furent quasi-systématiques et de ce fait, les reports de voix, notamment communistes, meilleurs qu'en 1928 et 1932), de la crise économique et de l'absence d'une politique alternative à droite (où l'argument de campagne principal se limita à l'anticommunisme), le Front populaire remporte une nette victoire aux élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936, rassemblant environ 57 % des suffrages exprimés au premier tour et envoyant, au terme du second, un total de 386 députés sur 608 siéger à la Chambre des députés, dont 147 pour la SFIO.

Fichier:France Chambre des deputes 1936.png
Composition politique de la Chambre des députés de 1936

Le caractère spectaculaire Modèle:Incise de ce succès électoral ne doit pas laisser penser que l'opinion française aurait alors nettement glissé à gauche. Comme le souligne l'historien Eric Hobsbawm, le triomphe du Front populaire Modèle:Citation, déjà favorable à la gauche il est vrai, et le succès du Front populaire met surtout Modèle:Citation<ref>Eric Hobsbawm, L'Âge des extrêmes, Complexe, 1994, p. 202.</ref>.

Malgré cette relative stabilité du corps électoral de gauche, les évolutions de la part de chacun des trois partenaires du Front populaire permettent d'éclairer l'évolution de l'opinion de gauche. Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. L'essentiel de ces gains sont réalisés aux dépens des socialistes, qui compensent leur perte dans le milieu ouvrier en mordant sur l'électorat rural du Parti radical.

De fait, les radicaux (Modèle:Nombre), compromis par leur participation aux gouvernements de droite et par leur soutien à la politique de déflation, mais également du fait de la bipolarisation du scrutin, perdent Modèle:Nombre. Cependant, le caractère stratégique de leur place dans la coalition gouvernementale ne doit pas être négligé. Si les radicaux ont perdu de leur superbe, ce sont leurs 106 députés qui permettent au gouvernement d'exister, dans la mesure où aux 219 députés socialistes et communistes correspondent les 219 députés de la droite. De ce fait, les radicaux affaiblis jouent néanmoins un rôle pivot. Il suffit qu'ils fassent le choix de basculer vers la droite comme en 1926 ou 1934, et le gouvernement de Front populaire disparaîtrait. Paradoxalement, bien que Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.

Le gouvernement Blum

Fichier:Gouvernement Léon Blum - juin 1936.jpg
Le gouvernement Blum en Modèle:Date-.
Fichier:Léon-Blum-micro1936.jpg
Léon Blum
(agence Meurisse, 1936, Paris, BnF).
Fichier:Salengro, Roger, bibliothèque numérique Roubaix via BNF Gallica.jpg
Roger Salengro
(Bibliothèque numérique Roubaix).

Bien que la progression du PCF dans son électorat traditionnel soit réelle, la SFIO conserve un électorat stable de près de Modèle:Unité de voix. Premier parti de France, il apparaît dès lors naturel que le chef du nouveau gouvernement soit issu de ses rangs. Léon Blum s'efforce cependant de rester pragmatique : il distingue l'exercice de la conquête du pouvoir. Les Français n'ayant pas donné de majorité aux « prolétariens » (SFIO et PCF seuls), il en déduit qu'il est impossible, dans l'état actuel des choses, de transformer les structures sociales de la France pour aller dans le sens d'une société socialiste<ref name="Berstein117">Modèle:Harvsp.</ref>. Il plaide donc en faveur de l'application la plus stricte du programme du Front populaire : le 31 mai, il déclare devant le Conseil national de la SFIO, que Modèle:Citation<ref name="Berstein118">Modèle:Harvsp.</ref>. L'expérience ne sera donc pas socialiste, mais se limitera à une nouvelle forme de réformisme social. Blum voit également un deuxième avantage à prendre la tête du gouvernement : en « occupant » le pouvoir, les socialistes peuvent directement empêcher les fascistes de s'y installer<ref name="Berstein117" />.

De fait, cette majorité parlementaire inédite investit le premier gouvernement à dominante socialiste de la [[Troisième République (France)|{{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | IIIe{{#if:|  }} }} République]], et Léon Blum est nommé président du Conseil par le président de la République Albert Lebrun, le 4 juin 1936. Contrairement à la tradition de la Troisième République, Blum décide de ne se charger Modèle:Citation, dans le but de renforcer la présidence du Conseil : Modèle:Citation<ref>Mathias Bernard, op. cit., p. 23.</ref>. Blum dispose effectivement d'une réelle autorité sur le gouvernement qu'il préside.

Fichier:Édouard Daladier.jpg
Édouard Daladier.

Léon Blum ne se contente pas de redéfinir le rôle dévolu au président du Conseil : il innove également en créant de nouveaux postes ministériels et en attribuant ces ministères à de nouvelles personnalités (Composition du premier gouvernement), même si certains barons du radicalisme tiennent leur place, comme Camille Chautemps, Yvon Delbos (ministre des Affaires étrangères) ou Édouard Daladier, vice-président du Conseil, ministre de la Défense nationale et de fait numéro deux du gouvernement.

L'équipe réunie par Blum compte de nombreux ministres néophytes<ref>Modèle:Citation, Mathias Bernard, op. cit., p. 22.</ref> parmi lesquels les socialistes Vincent Auriol aux Finances et Georges Monnet à l'Agriculture, ainsi que le jeune (36 ans) Léo Lagrange, nommé sous-secrétaire d'État aux Sports et aux Loisirs, et aussitôt tourné en dérision par la droite et l'extrême-droite comme titulaire du Modèle:Citation<ref>Zéraffa-Dray, op. cit., p. 86.</ref>. Il recrute aussi dans le vivier des Jeunes Turcs, Modèle:Citation<ref>Mathias Bernard, op. cit., p. 22.</ref>, à des postes qu'il juge importants : l'Éducation nationale pour Jean Zay (32 ans), l'Air pour Pierre Cot. En outre, Blum est le premier à faire appel à des femmes (Suzanne Lacore, Irène Joliot-Curie et Cécile Brunschvicg)<ref>Modèle:Harvsp.</ref> pour occuper des secrétariats d'État, alors que celles-ci n'ont toujours pas le droit de vote<ref>Il n'envisage pas alors de proposer le vote des femmes en raison de l'opposition farouche du Sénat conservateur, qui a déjà fait échouer plusieurs projets en ce sens.</ref>.

Le gouvernement est globalement dominé par les socialistes (20 ministres et secrétaires d'État, contre 13 radicaux), les communistes choisissant de le soutenir de l'extérieur. En effet, tout en assurant Blum de son total soutien, le PCF préfère ne pas donner prise aux craintes d'une révolution alimentées dans les classes moyennes par l'opposition, qui Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Cette position a en outre l'avantage de ne pas trop le compromettre avec un pouvoir resté bourgeois et de préserver le cas échéant son image au sein des masses, où son influence grandit<ref>Dans son éditorial de L'Humanité du 12 mai, Paul Vaillant-Couturier définit ainsi le rôle du PCF : exercer Modèle:Citation.</ref>.

Le mouvement de grève de mai-juin 1936

Fichier:Grévistes-métallurgie-usine-banlieue-Paris1936.jpg
Grève de la métallurgie : occupation d'une usine de la banlieue parisienne
(agence Meurisse, 1936, Paris, BnF).

Modèle:Article connexe Avant la formation du nouveau gouvernement, des grèves éclatent dans des usines d’aviation du Havre. Le 11 mai, 600 ouvriers et 250 employés des usines Breguet arrêtent le travail pour demander la réintégration de deux militants licenciés pour avoir fait grève le [[Fête du Travail|Modèle:1er mai]]. L’usine est occupée et les tentatives de la police de déloger les grévistes échouent, les dockers se solidarisant des grévistes<ref>PROST Antoine, « Les grèves de mai-juin 1936 revisitées », Le Mouvement Social, 2002/3 (no 200), p. 33-54. DOI : 10.3917/lms.200.0033. Modèle:Lire en ligne</ref>. En deux jours, ces derniers obtiennent satisfaction. Le 13 mai, c'est au tour des usines Latécoère, à Toulouse, puis le 14 à celles de Bloch, à Courbevoie, d'être occupées. Le mouvement se répand comme une trainée de poudre, atteignant rapidement les entreprises voisines<ref name="Berstein118" />. Des femmes se mobilisent et certaines mènent les grèves (Martha Desrumaux, Madeleine Colliette, Suzanne Gallois…), en particulier dans les usines textiles ou alimentaires<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.

Le 24 mai le rassemblement en souvenir de la Semaine sanglante qui signe la fin de la Commune de Paris rassemble Modèle:Nombre, brandissant des drapeaux rouges et entonnant des chants révolutionnaires. Le lendemain, de nombreuses grèves débutent en région parisienne, qui obtiennent généralement rapidement satisfaction. Le 28, les Modèle:Nombre de Renault à Billancourt entrent dans la grève<ref>Bertrand Badie, Les grèves du Front populaire aux usines Renault, Le Mouvement social, No. 81, Le Monde de l'Automobile (Oct. - Dec., 1972), p. 69-109 (41 pages), Éditions l'Atelier</ref>. Un compromis est trouvé avec la CGT, mais la lame de fond continue, et à partir du 2 juin des corporations entières entrent en grève : la chimie, l’alimentation, le textile, l’ameublement, le pétrole, la métallurgie, quelques mines, etc. À partir du 5, les vendeurs de journaux, les tenanciers de kiosques, les employés des salles de spectacles, les commis, les garçons de café, les coiffeurs, des ouvriers agricoles, etc., font grève, souvent pour la première fois<ref>Modèle:Lien web</ref>.

Pour la première fois également les entreprises sont occupées par les grévistes, qui organisent des comités de grève. Se trouve remis en cause le principe de la propriété privée des moyens de production<ref name="Berstein118" />. Des bals sont donnés dans les usines ou les grands magasins, des compagnies de théâtre (comme le groupe Octobre de Jacques Prévert) jouent des pièces. On compte 12 000 grèves, dont 9 000 avec occupation, entraînant environ 2 millions de grévistes. Malgré les paroles rassurantes de Léon Blum, le climat qui règne alors en France a des connotations clairement révolutionnaires. Peu ou pas encadré par des organisations politiques ou syndicales, le mouvement trouve des causes multiples et fortement localisées, mais a aussi un côté festif. Comme l'a écrit la philosophe Simone Weil dans la revue La Révolution prolétarienne, ce sont de véritables « grèves de la joie » : on fête la victoire électorale de la gauche, la dignité ouvrière retrouvée après une longue période de compression<ref name="Berstein120">Modèle:Harvsp.</ref>. L'aile gauche de la SFIO soutient pleinement la grève générale : dans un article publié dans Le Populaire le 27 mai, Marceau Pivert presse Léon Blum de s'appuyer sur ces mouvements sociaux pour envisager une vraie conquête du pouvoir, clamant que Modèle:Citation.

C'est bien l'opinion du président du Conseil, le radical Albert Sarraut, qui invite Blum à prendre immédiatement sa place pour résoudre la situation. Mais celui-ci refuse, soucieux de respecter scrupuleusement le calendrier fixant l'expiration du mandat de la Chambre élue en 1932 au mois de juin<ref name="Berstein120" />. Le patronat hésite à employer la force pour évacuer les usines et préfère la négociation. Le gouvernement Blum, enfin formé le 4 juin, cherche tout de suite à faire cesser le mouvement de grève : Léon Blum rencontre une délégation du patronat composée de René-Paul Duchemin, Pierre-Ernest Dalbouze, Pierre Richemond et Alfred Lambert-Ribot<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. Les accords Matignon sont signés dans la nuit du 7 au 8 en échange de l’évacuation des usines. Mais la reprise n’est pas immédiate, et bien des délégués des usines en grève souhaitent continuer le mouvement. À partir du 11 juin, le PCF conseille l’arrêt des grèves, Maurice Thorez déclarant qu'Modèle:Citation<ref name="Berstein121">Modèle:Harvsp.</ref>. Le mouvement gréviste reflue peu à peu à Paris, mais continue à se développer en province.

Action du gouvernement

Le succès électoral a donc éveillé chez l'ensemble des travailleurs un immense espoir. Ainsi, un mouvement de grève et d'occupation d'usines se mit en place, gagnant toute la France. Près de deux millions de travailleurs débrayèrent, paralysant le pays. À l'image des électriciens et des gaziers<ref>Modèle:Lien web.</ref>, la plupart des différentes catégories professionnelles ont pris part à ce mouvement largement dominés par les métallurgistes. Les patrons, craignant au plus haut point une révolution bolchevique, s'empressèrent de négocier sous l'égide du gouvernement dans le but d'obtenir la reprise du travail.

Politique économique et sociale

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Léo Lagrange, ministre des Loisirs (1936).
Fichier:Regards - congés payés 1936.jpg
Article exaltant le cyclotourisme, Modèle:Citation, dans le cadre des congés payés (magazine communiste Regards, Modèle:N°, Modèle:Date-).

Ainsi, le Modèle:Date, les accords Matignon furent signés par la CGT et le patronat, à l'initiative du gouvernement. Ces accords mettaient en place, entre autres, le droit syndical, et prévoyaient une hausse des salaires de plus de 7 à 15 % selon les branches professionnelles, soit environ 12 % en moyenne sur toute la France. Quelques jours plus tard, bien que ces mesures ne figurent pas dans le programme du Front populaire, par deux lois votées par le Parlement, les premiers congés payés (2 semaines) furent instaurés, et la semaine de travail passa de 48 à 40 heures. Pour les ouvriers et employés partant en vacances, Léo Lagrange créa des billets de train avec 40 % de réduction, qui existent toujours. Ces accords n'empêchèrent pas les grèves et les occupations de se poursuivre, parfois jusqu'en juillet 1936.

Le 29 juillet fut votée la retraite des mineurs et, le 28 août, une loi sur les allocations chômage. Une politique de nationalisations fut mise sur pied, dans l'industrie aéronautique, d'armement (7 août), puis dans les chemins de fer (naissance de la SNCF en 1937). La Banque de France ne fut pas nationalisée, mais la tutelle de l'État s'accrut et le droit de vote s'étendit à tous les actionnaires (il était jusqu'alors réservé aux 200 plus gros).

Le 28 août fut adopté un budget de 20 milliards de francs pour de grands travaux. Le gouvernement signe le [[1er octobre|Modèle:Abréviation discrète octobre]] un accord monétaire avec la Grande-Bretagne et les États-Unis pour fixer la valeur du franc dans une fourchette de 43 à 49 milligrammes d'or contre 65,5 milligrammes auparavant<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Un Office national interprofessionnel du blé (actuel Office national interprofessionnel des grandes cultures) fut chargé de soutenir les prix payés aux agriculteurs, très durement touchés par la crise. Georges Monnet, ministre de l'Agriculture, ne réussit pas à faire adopter la création d'autres offices pour les autres productions, devant les réticences du Sénat, mais l'Onib servit de modèle aux structures créées après la Libération, voire à celles mises en place par la Politique agricole commune (PAC). La politique d'électrification des communes rurales, très énergique dans les années 1920 sous Henri Queuille, fut reprise.

Politique coloniale

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Maurice Viollette en 1929.

En matière coloniale, les réalisations furent plus difficiles en raison du profond conservatisme des colons, très puissants, et du dynamisme de certains mouvements politiques locaux (principalement en Algérie), qui préfèrent souvent l'indépendance à l'égalité des droits. Ainsi, le projet Blum-Viollette étendant la nationalité française à certains Algériens est-il bloqué par le Sénat, comme le projet d'accorder l'indépendance aux mandats du Liban et de la Syrie. En Tunisie, les colons les plus influents Modèle:Citation (Charles-André Julien, dans Léon Blum, chef de gouvernement) : ils déployèrent donc tous leurs efforts pour saboter la politique menée.

Alors qu'elle avait soutenu le Front populaire<ref>Modèle:Lien web.</ref>, l'Étoile nord-africaine de Messali Hadj est dissoute le Modèle:Date en application du « décret Régnier » qui réprimait les manifestations contre la souveraineté française en Algérie, marquant ainsi la fin de toute évolution de la politique coloniale sous le Front populaire<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Avatar tardif du projet Blum-Viollette, le Code de l'indigénat est vidé de sa substance, puis complètement abrogé par la loi du 7 avril 1946, par Marius Moutet, qui s'efforce d'améliorer le sort des colonisés et de les associer à l'administration de leurs territoiresModèle:Référence nécessaire. La nomination d'une personne noire, Félix Éboué, comme gouverneur de la Guadeloupe, puis du Tchad, est une petite révolution.

Sur le territoire métropolitain, le décret de 1935 contraignant les étrangers à résider dans le département où ils avaient obtenu leur carte d'identité est annulé : le décret du 14 octobre 1936 permet le libre déplacement sur le territoire<ref>Modèle:Article</ref>.

Éducation, sports et loisirs

Une partie du programme du Front populaire touchait l'éducation et loisirs. La scolarité obligatoire fut portée dès 1936 à quatorze ans, les passerelles entre l'enseignement primaire et les lycées furent multipliées Modèle:Incise les collections des grands musées furent enrichies et leurs tarifs réduits pour les gens modestes. Le CNRS est une création du Front populaire. L'ENA fut créé en 1945 par Michel Debré sur un projet de Jean Zay, projet qui n'avait pas pu voir le jour à cause de la guerre.

Modèle:Citation (Léo Lagrange, sous-secrétaire d'État à la jeunesse et aux loisirs, lors d'un discours radiodiffusé, le 10 juin 1936). Des centaines de piscines et de stades publics sont construits à son initiative<ref>Modèle:Article</ref>.

Le ministre Jean Zay est également porteur d'un projet de loi abolissant la propriété littéraire et artistique, faisant du droit d'auteur un droit inaliénable, et du contrat d'édition non pas un contrat de cession des droits, mais un contrat de concession temporaire à l'étendue extrêmement limitée<ref>Modèle:Article.</ref>. L'opposition des éditeurs (Bernard Grasset) et de la droite conservatrice (René Dommange) ralentit l'adoption du texte, qui ne sera jamais voté, la guerre interrompant les débats sur le sujet.

Politique étrangère

Fichier:Counter-Attack before losing Irún to the Rebels, Irún - Google Art Project.jpg
Bataille d'Irun durant la guerre d'Espagne, 1936
(Madrid, musée national centre d'art Reina Sofía).
Fichier:Mussolini a Hitler - Berlín 1937.jpg
Benito Mussolini et Adolf Hitler à Berlin, 1937.

Le contexte international fut également une cause des difficultés du Front populaire. En juillet 1936 la guerre civile en Espagne vient d'éclater. Le Front populaire se divise sur le projet de soutien militaire de la France aux républicains espagnols opposés aux franquistes. Sous la pression du gouvernement conservateur britannique de Stanley Baldwin<ref>La Grande-Bretagne pouvait d'autant plus influer sur la politique française que l'hémorragie de capitaux depuis 1935 avait réduit presque à néant les réserves d'or de la banque de France, mettant le pays sous la dépendance britannique.</ref> et des radicaux, Léon Blum décide la « non-intervention », à un moment où la société française est, à la suite de la Grande Guerre, profondément pacifiste. Cette non-intervention satisfaisait Hitler dont le but est d'isoler la France pour mieux la briser (Modèle:Citation<ref>Mein Kampf, p. 315.</ref> ou encore Modèle:Citation<ref>Mein Kampf, p. 765.</ref>).

Léon Blum souhaite intervenir aux côtés des républicains espagnols mais les radicaux et la droite y sont opposés. Blum sait que s'il tente d'intervenir, son gouvernement sera renversé au profit d'une alliance entre les radicaux et les partis de droite. C'est d'ailleurs une telle alliance qui constituera le troisième gouvernement d'Édouard Daladier (12 avril 1938-11 mai 1939). La mort dans l'âme, Blum se résigne à la non-intervention mais fait en sorte que les autorités françaises ferment les yeux sur le trafic d'armes s'exerçant au profit des républicains espagnols à la frontière entre la France et l'Espagne.

Conscient des menaces sur la paix, le gouvernement de Front populaire entame le réarmement de la France et tente de rattraper le retard provoqué par la politique de réduction des dépenses publiques, y compris en matière militaire, réalisée par Pierre Laval en 1935. La nationalisation partielle des industries d'armement et la politique énergique des nouveaux responsables relancent le potentiel français d'armement : la politique du Front populaire permet une réorganisation de la production dans un sens de massification, qui ne subit pas plusieurs des inconvénients de l'industrie privée tels que les problèmes de trésorerie et l'incertitude des commandes. Ce n'est toutefois que dans un second temps, après la chute du Front populaire, que la production d'armement démarre réellement, lorsque les capitaux reviennent et que le conflit social est tranché au profit du patronat avec notamment la baisse du coût du travail<ref>Modèle:Article ; pour une critique dure de l'impact de la baisse du temps de travail, voir Alfred Sauvy, « Histoire économique de la France entre les deux guerres », Economica, 1984 (critique de l'ouvrage par Philippe le Nail, Politique étrangère, 1984 ; pour une autre critique, se reporter au récit de Robert Marjolin dans ses mémoires.</ref>.

Les rapports avec l'Italie sont beaucoup plus difficiles qu'avec l'AllemagneModèle:Précision nécessaire, en raison de la politique agressive de Mussolini qui envahit l'Éthiopie, seul État africain encore indépendant, dont la chute entraîne le discrédit de la Société des Nations. La clémence française envers l'Italie s'explique par le fait que, jusqu'en 1938, l'Italie est plus proche de la France et du Royaume-Uni que de l'Allemagne. Surtout, Mussolini refuse encore que l'Autriche soit rattachée à l'Allemagne et apparaît donc comme un potentiel allié de circonstance qu'il faut ménager.

Crise et fin de l'alliance

Fichier:Rassemblement-populaire-14-juillet-1936.jpg
Manifestation du Rassemblement populaire, Modèle:Date-. Dans la tribune, de gauche à droite : Thérèse Blum, Léon Blum, Maurice Thorez, Roger Salengro, Maurice Viollette, Pierre Cot.

Mais les difficultés du Front populaire ne furent pas pour autant effacées. En effet, la France était dans une grave crise économique depuis 1931, et la politique économique du Front populaire ne parvint pas à relancer la production, la consommation, ni à réduire le chômage. Ainsi, la hausse des prix annula vite celle des salaires prévue par les accords Matignon. Ce fut une des causes de la chute du Front populaire, très vivement critiqué par la presse dès l'automne 1936.

La priorité accordée à l’alliance britannique conduit le Front populaire à renoncer au contrôle des capitaux, condition pourtant nécessaire à une forte dévaluation. Un expert influent, Emmanuel Monick, présente à Léon Blum l’arbitrage qui lui échoit en ces termes : Modèle:Citation

Sur le plan intérieur, le gouvernement Blum parvint à résoudre la crise sociale. Mais dès l'été 1937, il dut faire face à diverses difficultés économiques qui le poussèrent à dévaluer le franc dès le 17 septembre, cette situation transforma l'inquiétude de la droite en opposition résolue. Le 24 février 1937, il décide également une pause dans les réformes. Des réformes importantes comme celles des retraites sont alors abandonnées<ref>VIGREUX Jean, « 1937-1938, dislocation et chute du front populaire », dans : Jean Vigreux éd., Le front populaire 1934-1938. Paris cedex 14, Presses universitaires de France, Modèle:Coll., 2011, p. 85-97. Modèle:Lire en ligne</ref>. La pause ne rencontre guère la réussite, puisqu'elle déçoit l'aile gauche de la SFIO et le PCF sans apaiser l'opposition de droite, qui la considère comme un aveu de faiblesse du gouvernement.

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Affiche anticommuniste du Centre de propagande des républicains nationaux dépeignant les Soviets manipulant depuis Moscou les dirigeants des partis de la coalition du Front populaire : Édouard Herriot (parti radical), Léon Blum (SFIO) et Marcel Cachin (PCF).

Par ailleurs, les attaques calomnieuses de l'extrême droite affaiblirent plusieurs personnalités du Front populaire, à commencer par Blum lui-même : son arrivée au pouvoir déclencha en effet une vague d'antisémitisme d'une très grande ampleur, visant à remettre en cause sa crédibilité et sa loyauté aux intérêts de la France. De même, une campagne médiatique agressivement diffamatoire menée notamment par L'Action française et par Gringoire<ref>Même si, comme le soulignent Modèle:Harvsp, Modèle:Citation</ref> déstabilisa Roger Salengro, ministre SFIO de l'Intérieur et l'un des principaux artisans des accords Matignon. Accusé, sans aucun fondement<ref>Modèle:Harvsp.</ref>, à partir du 14 juillet 1936, d'avoir été déserteur durant la Première Guerre mondiale, il fut rapidement innocenté, mais ne supporta pas de voir son honneur de patriote sali et se suicida le 17 novembre 1936<ref>ce suicide eut un grand retentissement, comme le soulignent Modèle:Harvsp. : Modèle:Citation</ref>.

Dans la presse française se formèrent de fait deux camps bien distincts, d'une part les partisans du Front populaire (L'Humanité, Le Populaire, L'Œuvre, Vendredi, Marianne), d'autre part les opposants (L'Action française, L'Ami du peuple, Le Jour, Candide, Gringoire, Je suis partout, L'Écho de Paris, Le Temps). Entre ces deux positions, très peu de journaux ou d'hebdomadaires jouèrent la carte de la neutralité. La presse allant dans le sens du Front populaire était largement plus faible que la presse d'opposition et l'une comme l'autre contribuèrent à l'échec du gouvernement du Front populaire. C'est dans la presse étrangère, notamment anglo-saxonne, que parurent les analyses les plus objectivesModèle:Référence souhaitée.

Fichier:Camille Chautemps, Léon Blum, 1937.jpg
Passation de pouvoirs entre Léon Blum (à droite) et Camille Chautemps, nouveau président du Conseil, à l'hôtel Matignon en 1937.

Le 21 juin 1937, le premier gouvernement Blum présenta sa démission. Le radical Camille Chautemps prit sa succession. Il reprit, à un rythme ralenti, les réformes du Front populaire, créant, notamment, la SNCF. L'aggravation de la situation économique (creusement du déficit budgétaire) poussa Chautemps à réclamer les pleins pouvoirs, ce qui lui fut refusé le 9 mars 1938, en partie à cause des votes socialistesModèle:Référence nécessaire. Son ministère prit fin à la suite de ce refus.

Ensuite, en mars-avril 1938, après avoir été rappelé le 13 mars par le président de la République Albert Lebrun, Léon Blum forma un éphémère gouvernement, puis démissionna, n'arrivant pas à obtenir les pleins pouvoirs financiers auprès du Sénat, dans le but d'appliquer de grandes réformes financières pour sortir la France du marasme économique. Le radical Édouard Daladier le remplaça, décidé à Modèle:Citation et revint sur plusieurs réformes du Front populaire. La fin de Modèle:Citation, soit le retour aux 48 heures, généra une forte opposition populaire et syndicale, avec grèves et manifestations. La répression qui s’ensuivit, avec licenciements massifs et nombreuses arrestations, marqua la fin du Front populaire, et affaiblit considérablement les effectifs du parti communisteModèle:Référence souhaitée.

Bilan

Le bilan du Front populaire est Modèle:Citation<ref>Mathias Bernard, op. cit., p. 57.</ref>. Il introduit de nombreuses réformes historiques, notamment en matière économique et sociale : les congés payés, la réduction du temps de travail avec la semaine de quarante heures et l'établissement des conventions collectives.

La question de l'héritage du Front populaire, de l'état dans lequel il laissa la France en 1938, suscita bien des passions. Ainsi, le régime de Vichy lui attribua pour partie la responsabilité de la défaite française face à l'Allemagne nazie, ce que les historiens ne font pas<ref>Serge Berstein et Pierre Milza dans Histoire du vingtième siècle tome 2 (édition de 1987) écrivent p. 67 : Modèle:Citation</ref>. On retient de cette période ces grèves joyeuses et les premiers congés payés qui permirent à des travailleurs de partir en vacances souvent pour la première fois (Léon Blum parle d'Modèle:Citation).

Pour la gauche française le front populaire reste durablement un exemple à suivre et à revendiquer, accusant régulièrement la droite de chercher à détruire les acquis du front populaire.

En 1984, le démographe Alfred Sauvy considérait ce passage aux 40 heures comme une décision Modèle:Citation, une erreur si immense Modèle:Citation<ref>Alfred Sauvy, « Histoire économique de la France entre les deux guerres », Economica, Paris, 1984, 3 volumes, 422 pages, 439 pages, 476 pages.</ref>. Dans le même sens, on trouve les critiques de Raymond Aron et Robert Marjolin : le premier regrette, comme Alfred Sauvy, la supposée ignorance économique de la classe politiqueModèle:Référence nécessaire, tandis que le second insiste sur le caractère néfaste de l'abaissement de la production industrielle de la France au pire moment.

Personnalités du Front populaire

Filmographie

Plusieurs films, dont certains contemporains du mouvement, ont évoqué le Front populaire :

Films documentaires :

Notes et références

Modèle:Références

Annexes

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Bibliographie

Ouvrages et articles généraux

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La France de l'époque

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Élections d'avril-mai 1936

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Grèves

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Mises en perspective

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Politique culturelle

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Politique militaire

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Politique étrangère

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Questions financières et économiques

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Biographies

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Témoignages

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  • Daniel Guérin, avant-propos de Charles Jacquier, préface de Barthélémy Schwartz, Front populaire, révolution manquée, Agone, 2013.
  • Jules Moch, Le Front populaire, grande espérance, Paris, Perrin, 1971.
  • Jules Moch, Une si longue vie, Paris, Robert Laffont, 1976.
  • Serge Bonnet, L'Homme de fer, Presses universitaires de Nancy, 1986.

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Articles connexes

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Liens externes

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