Crise du canal de Suez

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Modèle:Infobox Conflit militaire

La crise du canal de Suez, parfois appelée expédition de Suez, guerre de Suez, campagne de Suez ou opération Kadesh, est une guerre qui éclata en 1956 en territoire égyptien. Le conflit opposa l'Égypte à une alliance secrète actée par le protocole de Sèvres, dont les entretiens se sont tenus du 21 au Modèle:Date-, formée par la France, le Royaume-Uni et l'État d'Israël à la suite de la nationalisation du canal de Suez par l'Égypte le Modèle:Date-. Cette alliance entre deux États européens et Israël répondait à des intérêts communs : les nations européennes avaient des intérêts politiques, économiques (actionnaires majoritaires) et commerciaux (principalement pour le transport de pétrole) dans le canal de Suez. Israël avait besoin de l'ouverture du canal pour assurer son transport maritime, mais utilisait comme prétexte à son intervention militaire une réponse aux attaques de fedayins qu'il subissait sur son territoire. Le renversement de Nasser était également prévu.

Le 29 octobre 1956, conformément aux accords secrets, Israël envahit l'Est du canal, suivi rapidement par les Français et les Britanniques qui bombardent à partir du Modèle:Date-, parachutent et débarquent leurs troupes le Modèle:Date-, officiellement comme des troupes de maintien de la paix. Finalement, alors que les Égyptiens sont battus militairement (cessez-le-feu le Modèle:Date-), les coalisés, en échange de certaines concessions d'ordre économique, sont obligés de battre en retraite sous la pression des États-Unis et de l'Union soviétique. La Force d'urgence des Nations unies débarque le Modèle:Date-, les coalisés finissent de rembarquer le Modèle:Date-.

La crise est principalement retenue pour les leçons qu'elle apporte sur le nouvel équilibre des forces pendant le contexte de guerre froide. L'impératif d'une relative stabilité de l'ordre mondial entre les deux « géants » ne peut être remis en cause, même par d'anciennes grandes puissances comme la France et le Royaume-Uni, pourtant alliées des États-Unis. En outre, la crise conduit à un renforcement des relations entre l'Union soviétique et l'Égypte, entre la France et Israël, entre le Royaume-Uni et les États-Unis, ainsi qu'à l'accélération dans la mise en place de la force de dissuasion nucléaire française. Elle entraîne également la démission du Premier ministre britannique Anthony Eden et l'attribution du prix Nobel de la paix au ministre des Affaires étrangères canadien Lester Pearson pour son rôle diplomatique dans le règlement de la crise.

Si l'échec de la France et du Royaume-Uni à l'issue de la crise est apparent, celui d'Israël, qui a démontré sa supériorité militaire sur l'Égypte et sa capacité de mobilisation, est moins évident. Le déploiement de la première force d'urgence des Nations unies permet à Israël de garantir la sécurité de sa frontière avec l'Égypte, bien que le stationnement des Casques bleus dans le Sinaï puisse être sujet à révocation sur demande égyptienne. De ce fait, Israël ne parvient toujours pas à stabiliser ses frontières après le conflit. Nasser émerge donc comme le grand vainqueur de la crise, parvenant à transformer une déroute militaire imminente en un triomphe politique retentissant qui accroît considérablement son prestige et sa popularité dans le monde arabe.

Origines du conflit

Le canal de Suez, qui forme un raccourci entre la mer Rouge et la mer Méditerranée, est ouvert en 1869. Il a été financé par la France et le gouvernement égyptien. Le Royaume-Uni racheta ensuite au Roi Farouk, endetté, la part de l'Égypte dans le canal. À l'indépendance de l'Inde, le poids stratégique du canal change : il n'est plus le point de passage capital entre le Royaume-Uni et son Empire. En revanche, le canal devient un point de passage stratégique pour le pétrole.

Les origines de ce conflit remontent à 1952, lors du renversement de la monarchie de [[Farouk (roi d'Égypte)|Farouk {{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | Ier{{#if:|  }} }}]] par les officiers libres de l'armée égyptienne. Cette « révolution » à la fois sociale et nationale abolit la monarchie en Égypte, d'abord sous la conduite du général Naguib puis du lieutenant-colonel Nasser et s'efforce de lutter contre l'impérialisme étranger. Le nouveau gouvernement abandonne les clauses de coopération avec les forces européennes et adopte une tendance nationaliste et autoritaire. Ce changement de position entraîne un conflit avec la France et le Royaume-Uni à propos du canal de Suez, jusqu'alors aux mains de capitaux franco-britanniques. Des troupes britanniques demeurent d'ailleurs stationnées dans la zone du canal jusqu'en février 1956, alors que le protectorat britannique sur l'Égypte est fini depuis l'indépendance du pays, acquise en 1936.

Prémices de la crise

La conclusion du Pacte de Bagdad, en février 1955, pousse l’Égypte à se tourner vers l’URSS et obtenir des ventes d’armes par la Tchécoslovaquie<ref name="oud">Article de Anne-Lucie Chaigne-Oudin, sur LES CLÉS DU MOYEN-ORIENT, le 9 mars 2010 [1]</ref>. L’Égypte renforce aussi son dispositif par la signature d’un pacte militaire en octobre 1955 avec la Syrie et l’Arabie Saoudite, rejointes en avril 1956 par le Yémen<ref name=oud/>.

Nasser souhaite construire un barrage sur le Nil à Assouan, afin de répondre aux besoins de l’agriculture et de produire de l’électricité<ref name=oud/>. Pour sa construction, il sollicite l’aide financière et technique des États-Unis, qui refusent en raison de l’orientation pro soviétique de l’Égypte et des ventes d’armes. En représailles, Nasser menace de nationaliser la compagnie du canal de Suez<ref name=oud/>.

Durant l'année 1956, la tension s'accroît aussi entre Israël et l'Égypte avec les raids menés par les combattants palestiniens (fedayin) sur le territoire israélien. L'Égypte, dirigée par Gamal Abdel Nasser, bloque le golfe d'Aqaba et ferme le canal de Suez aux navires israéliens. Lorsque Nasser décide de reconnaître la Chine communiste, les États-Unis se retirent, le 19 juillet<ref name="Laurens29nov06">Henry Laurens, La question de la Palestine, cours au Collège de France, 29 novembre 2006.</ref>, du financement du haut barrage d'Assouan. En réponse à ce retrait, l'Égypte, unilatéralement, décide de nationaliser le canal de Suez, voie commerciale vitale alors détenue à 44 % par l'économie franco-britannique. La compagnie riposte par le retrait de ses techniciens britanniques et français. Ils sont remplacés par d'autres fournis par les pays non-alignés, l'Inde en particulier.

Fichier:Statue of de Lesseps.jpg
Une statue de Ferdinand de Lesseps, qui a construit le canal de Suez, est enlevée après la nationalisation du canal de Suez en 1956.

Le Premier ministre britannique, Anthony Eden, convaincu par ses services du MI6 que Nasser veut se rapprocher de Moscou, tente alors de convaincre l'opinion publique de la nécessité d'une guerre contre l'Égypte. Il fait pour cela appel au patriotisme hérité de la Seconde Guerre mondiale en comparant la nationalisation du canal par Nasser au nationalisme de Mussolini et d'Hitler vingt ans auparavant. Eden déclare qu'une démonstration de force est nécessaire afin de dissuader Nasser de faire de l'Égypte une nouvelle menace militaire et le fait passer pour le « Mussolini du Nil ».

Vue de France la ligne anti-impérialiste, socialiste et panarabe de Nasser apparaît comme une menace. Le FLN algérien, en lutte armée contre la France, a son siège au Caire et reçoit de l'Égypte une importante aide matérielle (notamment des armes) et morale (les représentants du FLN peuvent par exemple s'exprimer à la radio égyptienne). La propagande française présente régulièrement les indépendantistes algériens comme de simples marionnettes de l’Égypte. Guy Mollet, chef du gouvernement français, est acquis à la cause de l'Algérie française et du soutien à Israël. Les agents du SDECE tentent de manipuler les Frères musulmans pour éliminer Nasser ou le faire empoisonner par un officier égyptien et informateur du SDECE. Des projets d'assassinat sont également élaborés du côté britannique mais tous échouent, notamment à cause de l'aide du KGB aux services de renseignement égyptiens lorsque Nasser se rapproche de l'Union soviétique<ref>Denis Lefebvre, Les secrets de l'expédition de Suez.1956, éd. Perrin, 2010.</ref>.

Le 26 juillet 1956, Nasser opère la nationalisation du canal et la mise sous séquestre des biens de la compagnie universelle du canal de Suez, lors d'un discours radiodiffusé à Alexandrie<ref>L'opération est déclenchée lorsqu'il prononce le mot clé « Lesseps ».</ref> : Modèle:Début citationLa pauvreté n'est pas une honte, mais c'est l'exploitation des peuples qui l'est. Nous reprendrons tous nos droits, car tous ces fonds sont les nôtres, et ce canal est la propriété de l'Égypte (…) J'assigne aujourd'hui l'accord du gouvernement sur l'établissement de la Compagnie du Canal.Modèle:Fin citation De plus, depuis plusieurs années il est question pour l'Égypte de se doter d'un barrage à Assouan, afin de protéger les terres agricoles des crues du Nil et de produire de l'électricité. Or des fonds ont d'abord été demandés à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, puis à l'Union soviétique et aux États occidentaux, mais ces derniers ont suspendu leurs fonds pour plusieurs raisons, notamment la réception d'armes par l'Égypte en provenance du bloc de l'Est.

Les premières rétorsions de la Grande-Bretagne, réticente d'abord au conflit militaire pour ne pas compromettre ses liens privilégiés avec le monde arabe, sont le gel de certains avoirs égyptiens à l'étranger puis le départ des pilotes européens expérimentés du canal. Par ailleurs, dès le Modèle:Date-, une radio clandestine se met à émettre en arabe sur une fréquence très proche de la Voix des Arabes et produit une critique en règle de Nasser présenté comme une marionnette des Soviétiques trahissant la nation arabe et faisant le jeu du sionisme. Le repérage goniométrique montrera qu'elle émet depuis la région parisienne<ref name="Laurens29nov06" />.

Accords de Sèvres

Modèle:Article détaillé Du 21 au 24 octobre 1956, un accord secret est signé entre la France (Christian Pineau), le Royaume-Uni (Modèle:Lien) et Israël (David Ben Gourion) à Sèvres, dans un pavillon appartenant à un ami du ministre de la Défense, Bourgès-Maunoury<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Ce pavillon fut auparavant la maison d'édition des livres de Jules Vernes. Leur objectif est alors de renverser Nasser et de récupérer le canal. Les protocoles de Sèvres stipulent :

Modèle:Début citationL'État hébreu attaquera l'Égypte le 29 octobre 1956 dans la soirée et foncera vers le canal de Suez. Profitant de cette agression « surprise », Londres et Paris lanceront le lendemain un ultimatum aux deux belligérants pour qu'ils se retirent de la zone du canal. Si l'Égypte ne se plie pas aux injonctions, les troupes franco-britanniques entreront en action le Modèle:Date-.Modèle:Fin citation

Cet accord, qui devait rester secret, établit le rôle de chaque partie. Les alliés s'accordent pour qu'Israël s'engage militairement contre l'Égypte, laissant le soin à la France et au Royaume-Uni d'intervenir ensuite, en demandant aux deux belligérants de retirer leurs troupes des rives du canal, puis en menant une intervention militaire franco-britannique sur Port-Saïd, connue depuis sous le nom d'« opération Mousquetaire »<ref>Voir le plan sur Philippe Rekacewicz, « L’occupation du Sinaï en 1956 », Le Monde diplomatique.</ref>.

Déroulement du conflit

Modèle:Article détaillé

Préparatifs

Parmi les plans élaborés par les Britanniques, l'un d'entre eux consistait à couper le flux des eaux du Nil vers l'Égypte, depuis le barrage des chutes Owen en Ouganda, de manière à endommager le secteur agricole et couper les communications<ref>Les Britanniques avaient planifié de couper le Nil : source de la BBC sur base de documents déclassifiés par les archives nationales britanniques.</ref>. Les militaires exposèrent ce plan au Premier ministre Anthony Eden six semaines avant l'invasion. Il fut abandonné par crainte qu'il ne provoque de violentes émeutes parmi la population égyptienne, parce qu'il aurait pris des mois à mettre en place et qu'il aurait aussi mis à mal d'autres pays comme le Kenya et l'Ouganda.

Il fut décidé dans un premier temps par le général Modèle:Lien de débarquer à Alexandrie et de prendre Le Caire le plus rapidement possible afin de renverser Nasser, mettant ainsi l'opinion internationale devant le fait accompli. Mais ce fut finalement le projet de débarquement à Port-Saïd - Port-Fouad qui fut arrêté, notamment pour des raisons politiques : le but était avant tout de reprendre le contrôle du canal<ref>Général Beauffre, L'expédition de Suez, 1967.</ref>.

Au niveau des forces alliées, 155 bâtiments de guerre dont 5 porte-avions sont engagés : 103 de la Royal Navy, 52 de la Marine nationale française, auxquels s’ajoutent une centaine de bâtiments réquisitionnés, dont 53 français<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Invasion

Fichier:1956 Suez war - conquest of Sinai.jpg
Conquête du Sinaï en 1956.

Le Modèle:Date, Israël envahit la bande de Gaza et le Sinaï et atteint rapidement la zone du canal. Comme convenu lors de l'accord de Sèvres, le Royaume-Uni et la France lancent un ultimatum aux belligérants leur enjoignant de se retirer chacun à plus de Modèle:Unité du canal. Nasser, dont la décision de nationalisation du canal avait été accueillie avec enthousiasme par la population égyptienne, rejette l'ultimatum et donne ainsi un prétexte aux forces européennes de s'allier à Israël pour reprendre le contrôle du canal et renverser le régime en place. Le Modèle:Date-, la France et le Royaume-Uni entament une vague de bombardements sur l'Égypte afin de forcer la réouverture du canal. Bombardant les aérodromes militaires, ils détruisent notamment au sol plus de 260 avions égyptiens. La Jordanie, qui a un accord avec la Grande-Bretagne, interdit par ailleurs le Modèle:Date- l'utilisation de son sol par les avions de la Modèle:Lang<ref>Modèle:Lien brisé.</ref>.

Les avions de la base 102 de Dijon participent à des raids sur l'Égypte depuis la base aérienne de Ramat-David, près de Haïfa, sous déguisement de l'étoile de David surchargeant la cocarde française. Les aviateurs français porteraient même sur eux de fausses cartes d'identité israéliennes<ref>Philippe Vial, historien au service historique de la Défense, interrogé dans le document 1956, quelques jours en novembre (diffusé sur la chaîne Toute l'histoire en Modèle:Date-).</ref>. Les Mystère IV sont assistés par une trentaine de soldats français (arrivés par avions Noratlas après escale à Brindisi en Italie et à Chypre), dont la majorité maintenus sous les drapeaux ; ils sont aussi à Ramat-David et logés sous des tentes près des pistes, sous les ordres du capitaine Julien. Après la guerre, Modèle:Nobr resteront jusqu'en décembre et reviendront par le cargo L'Aquitaine.

Le soir du Modèle:Date-, une partie du [[2e régiment de parachutistes d'infanterie de marine|Modèle:2e régiment de parachutistes d'infanterie de marine]] français appuyé par des commandos de la [[11e régiment parachutiste de choc#La 11e demi-brigade parachutiste de choc|Modèle:11e demi-brigade parachutiste de choc]] saute près de la ligne de chemin de fer bordant le canal au sud de Port-Saïd, est envoyé sur l'aéroport Al-Gamil, prend le contrôle de la zone et établit un point sécurisé afin d'assurer l'arrivée des renforts aériens. Au matin du Modèle:Date-, les Modèle:40e et Modèle:42e de commandos des Royal Marines britanniques investissent les plages en utilisant les barges de débarquement de la Seconde Guerre mondiale. Leur assaut est soutenu par les salves des navires de la Royal Navy et de la Marine nationale française postés au large et causant d'énormes dommages aux batteries de défense égyptiennes. La ville de Port-Saïd est touchée par de nombreux incendies et connaît à cette occasion d'importants dégâts surtout matériels. Le bombardement d'une raffinerie à Port-Fouad cause un incendie important et un nuage noir qui recouvre en partie la ville pendant plusieurs jours.

Fichier:Suez Sea Venom.jpg
Un Sea Venom de la Royal Navy, touché par la DCA, après son appontage.

Le Modèle:45e progresse dans les terres et marque une innovation dans le domaine militaire en faisant usage d'hélicoptères lors des assauts. Cependant, une partie d'entre eux est abattue par les batteries égyptiennes. D'autre part, le commando ainsi que les quartiers généraux subissent des pertes dues à un « tir ami » de la Royal Air Force. Les combats urbains menés lors de cette opération voient les forces alliées freinées par des tireurs embusqués égyptiens.

Les habitants égyptiens, équipés d'armes automatiques et convaincus de l'arrivée de renforts russes, opposent une résistance aux forces européennes. Cependant, devant la rapidité de l'invasion et la suprématie aérienne des commandos, l'armée égyptienne est forcée de capituler. Les commandos prennent alors le contrôle du canal et se dirigent au sud vers Le Caire.

L'action des armées françaises et anglaises

Contre l’avis de l’opinion internationale, la France et la Grande-Bretagne préparent une opération militaire d’envergure, baptisée « Musketeer » (Mousquetaire), pour les Anglais et « opération 700 » pour les Français. La mission est de reprendre le contrôle du canal. Le plan (nom de code « Terrapin ») prévoit également une offensive israélienne contre l’Égypte qui débute le 29 octobre. Les États-Unis, en période électorale ne tiennent pas à voir éclater un nouveau conflit. Ils hésitent à respecter un de leurs traités du Pacte atlantique. Le commandement de l’opération est britannique, les Français ne conservant que le commandement de leurs unités, sans pouvoir de décision. Le général Keightley, secondé par l’amiral Barjot, en est le commandant en chef. Le 26 août 1956, une force navale d’intervention est mise en œuvre. La force terrestre est forte de Modèle:Nombre, mais seulement 15 000 sont employés. Les Français, commandés par le général de corps d'armée André Beaufre, forment la force « A ».

Les opérations

Fichier:Egyptian archer tank destroyer knocked out by Israeli tanks at Abu Ageila - 1956.jpg
Chasseur de chars Archer de l'armée égyptienne mis hors de combat par les blindés israéliens.

La Modèle:1re commence le 31 octobre 1956 par des bombardements d’aviation à partir de Malte et de Chypre puis des forces navales en Méditerranéenne. Le Modèle:Date-, les alliés repoussent la résolution de l’ONU. Malgré la mise en garde de l’ONU, des États-Unis et de l’URSS, la Modèle:2e suit à partir du Modèle:Date-, par une opération aéroportée, baptisée « Amilcar » pour les Français ou « Hamilcar », pour les Britanniques. Cette opération aéroportée est composée de quatre bataillons britanniques, qui sautent sur le terrain de Gamil, à Modèle:Unité à l’ouest de Port-Saïd, du [[2e régiment de parachutistes d'infanterie de marine|Modèle:2e de parachutistes coloniaux]] (Modèle:2e RPC) commandé par le colonel Chateau-Jobert, dit Conan, largué avec une section de la Modèle:60e du génie aéroporté (Modèle:60e CGAP) sur l’usine des eaux à l’entrée de Port-Saïd et au sud de Port-Fouad. La Modèle:3e termine le dispositif par les principaux débarquements qui ont lieu les 6 et Modèle:Date-. Le Royaume-Uni est fort de la Modèle:3e de commandos des « Royal Marines », d’un régiment de blindés, d’un escadron du génie, de deux bataillons de la Modèle:16e parachutiste. La France aligne le [[1er régiment étranger de parachutistes|Modèle:1er régiment étranger de parachutistes]], trois commandos de marine, deux escadrons de chars AMX, un escadron de chars Patton et trois sections de la Modèle:60e du génie aéroporté. La progression des troupes est freinée par les négociations politiques qui se passent à l’insu des Français

La Légion étrangère est au sein du dispositif : un escadron du [[2e régiment étranger de cavalerie|Modèle:2e étranger de cavalerie]], commandé par le capitaine Abraham avec l’adjudant Degueldre comme adjudant d’unité, est intégré au Modèle:1er à Zeralda, avant de rejoindre la base de départ à Chypre. Avec les autres unités françaises, il a pour mission de s’emparer dans la zone de Port-Fouad des points sensibles et de faire la liaison avec les éléments du Modèle:2e RPC parachutés au sud. Le groupement est commandé par le lieutenant-colonel Brothier, chef de corps du Modèle:1er. Tous les objectifs sont atteints par les compagnies. Le Modèle:Date- à 8 h, toutes les unités se rassemblent, prêtes à marcher vers El Qantara. Une demi-heure plus tard, le cessez-le-feu est ordonné et les troupes doivent rester sur leurs positions et n’ouvrir le feu que si elles sont attaquées. La section du lieutenant Ysquierdo du Modèle:1er, représente l’avant-garde française d’El Qantara et maintient jour et nuit un poste de surveillance, au PK 37,5, à Modèle:Unité des lignes égyptiennesModèle:Référence nécessaire.

Fichier:1956 British tanks.jpg
Char Centurion de la Modèle:Lang débarquant du Modèle:Lang HMS Puncher (L3036) à Port-Said.

Sous la pression du monde entier, le Royaume-Uni puis la France sont contraints d’accepter un cessez-le-feu. Les troupes de l’ONU débarquent le Modèle:Date-. Le Modèle:Date- ,la force d’intervention quitte l’Égypte. Elle déplore 11 tués et Modèle:Nobr.

Finalement, 11 Français et 22 Britanniques sont tués<ref name="laurens1"/>, 130 soldats sont blessés dont 33 Français. On estime que les pertes égyptiennes, essentiellement civiles, s’établissent entre Modèle:Unité dans la zone du canal. Les Israéliens, de leur côté, ont eu 176 tués et un prisonnier<ref name="laurens1"/>.

Réactions politiques au conflit

En France, le gouvernement Mollet obtient un vote de confiance quasi unanime le 30 octobre, moins l'abstention des communistes et des poujadistes. En revanche, le synchronisme de cette crise avec l’écrasement de l'insurrection de Budapest débouche sur la création d'une nouvelle gauche, qui s'incarne dans le Parti socialiste unifié (PSU), rejetant à la fois le communisme et le socialisme dans sa version SFIO<ref name="laurens1"/>.

En Grande-Bretagne, au contraire, l'opposition se déchaîne. Les travaillistes, et même une partie des conservateurs, dénoncent le caractère anachronique de cette politique coloniale, et le risque de rupture avec les pays du Commonwealth. Anthony Eden est hué à la Chambre des communes, où les députés lui reprochent de les mettre devant le fait accompli, sans avoir consulté, comme le voulait l'usage, le chef de l'opposition. Il s’attire les sarcasmes lorsqu’il déclare à la Chambre des communes le Modèle:1er novembre : « Nous [ne sommes pas] actuellement en guerre contre l’Égypte. […] Il n’y a eu de notre part aucune déclaration de guerre. Nous sommes en conflit armé »<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Les manifestations Modèle:Citation (« le droit et non la guerre ») se multiplient, la plus importante ayant lieu le 4 novembre, juste avant le débarquement. L'inquiétude grandit quand l'interruption du trafic du canal menace les approvisionnements pétroliers.

Pressions de l'Union soviétique et des États-Unis

Au moment où l'armée israélienne s'empare de la presqu'île du Sinaï et atteint le canal de Suez, une mise en garde très ferme de l'Union soviétique stoppe l'offensive ; Israël doit se replier sur ses frontières de 1949. L'URSS menace la France, le Royaume-Uni et Israël d'une riposte nucléaire<ref>http://www.cesa.air.defense.gouv.fr/IMG/pdf/La_crise_de_Suez-2.pdf.</ref>. L'OTAN rappelle à l'URSS qu'elle riposterait en ce cas.

Les États-Unis, passifs jusque-là, exigent le retrait des forces occidentales pour désamorcer la crise. Ce pays fait monter la pression contre le gouvernement britannique en lançant une attaque monétaire contre la livre sterling. La Banque d'Angleterre ayant perdu Modèle:Nobr de dollars entre le Modèle:Date- et le Modèle:Date- et l'approvisionnement en pétrole de la Grande-Bretagne ayant été restreint par la fermeture du canal de Suez, les Britanniques demandent immédiatement l'aide du Fonds monétaire international, mais celle-ci est refusée par les États-Unis. Eisenhower ordonne en effet à son secrétaire au Trésor, George Humphrey, de se préparer à vendre une partie des obligations en livres sterling détenues par le Trésor américain. Le gouvernement britannique envisageait d'envahir le Koweït et le Qatar si des sanctions pétrolières étaient mises en place par les États-Unis<ref>{{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Charles Williams, Harold Macmillan, W&N, 2009, Modèle:P.</ref>.

Le chancelier de l'Échiquier, Harold Macmillan, avertit son Premier ministre que les réserves de change de la Grande-Bretagne ne peuvent tout simplement pas soutenir la dévaluation de la livre qui suivrait les actions des États-Unis, et que dans les semaines qui suivraient une telle décision, le pays ne serait pas en mesure d'importer les vivres et l'énergie nécessaires pour subvenir aux besoins de la population des îles. Cependant, le Cabinet soupçonne Macmillan d'exagérer délibérément la situation financière afin de forcer Eden à partir<ref>{{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Keith Kyle, Suez: Britain's End of Empire in the Middle East, I.B. Tauris, 2003 Modèle:ISBN, Modèle:P..</ref>.

Le gouvernement américain envoie ses forces navales et aériennes interférer dans le dispositif franco-britannique et interdit l'usage de matériel militaire français financé par des fonds américains<ref>Une commission américaine arrive ainsi à Suez avec une liste des AMX 13 payés par les Modèle:Lang et interdit l'usage de ces blindés Modèle:Lang. Voir Stéphane Ferrard, 1951-1960, « Une vue d'avenir, 67-73 », dans « Les engins blindés de combat français. Des origines à nos jours », Histoire & Stratégie no 1, juin-Modèle:Date-.</ref>.

Parallèlement aux actions américaines, l'Arabie saoudite lance un embargo pétrolier contre la Grande-Bretagne et la France. Les États-Unis refusent de combler le vide jusqu'à ce que la Grande-Bretagne et la France acceptent un retrait rapide. D'autres membres de l'OTAN refusent également de vendre le pétrole qu'ils ont reçu des pays arabes à la Grande-Bretagne ou à la France<ref>{{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Kenneth Love, Suez The Twice Fought War, McGraw-Hill, 1969, Modèle:P..</ref>.

Cessez-le-feu et retrait des armées

L'Assemblée générale des Nations unies, réunie en session extraordinaire d'urgence du 2 au Modèle:Date-, adopte des résolutions<ref>http://daccessdds.un.org/doc/UNDOC/GEN/NR0/752/20/IMG/NR075220.pdf?OpenElement Résolutions 996 à 1003 des Nations unies concernant le cessez-le-feu et l'envoi de Casques bleus.</ref> prévoyant l'intervention de la Force d'urgence des Nations unies (FUNU), dont le but est de remplacer les forces franco-britanniques à partir du Modèle:Date- afin de restaurer la paix ; c'est la première opération multilatérale des Nations unies, qualifiée de « première génération ». Dès lors, les « Casques bleus » sont nés. Le ministre canadien des Affaires extérieures de l'époque, Lester B. Pearson, reçoit d'ailleurs le prix Nobel de la paix en 1957 pour le rôle qu'il a joué dans l'apaisement de la crise de Suez ainsi que pour son initiative de déployer une force onusienne neutre entre les parties belligérantes.

Conséquences

Exode des Juifs d'Égypte

Après la guerre, la communauté juive d'Égypte (soit environ Modèle:Nombre), présente depuis plus de vingt-cinq siècles, doit quitter ce pays. En effet, le Modèle:Date-, une proclamation du ministère des Affaires religieuses lue dans toutes les mosquées affirme : Modèle:Citation et promet leur expulsion prochaine<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Des milliers de Juifs se voient forcés à quitter le pays avec une seule valise après avoir « fait don » de leurs biens au gouvernement égyptien. Ces Juifs se réfugient en Israël (35 000) ou en France (10 000), une grande partie d’entre eux étant francophones, au Brésil (15 000), aux États-Unis (9 000) ou en Argentine (9 000)<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Pénuries d'essence

Fichier:Bon-ess-1956.jpg
Bon d'essence.

À la suite du blocage du canal de Suez par les Égyptiens et de la coupure de l'oléoduc de l'Modèle:Lang par les Syriens, l'essentiel de l'approvisionnement en pétrole de l'Europe est coupé<ref name="laurens1">Henry Laurens, La question de la Palestine à partir de 1949, cours au Collège de France, 6 décembre 2006 (lire en ligne).</ref>. La France n'est plus ravitaillée en carburant et met en place le Modèle:Date- un système de rationnement. On ne peut obtenir du carburant qu'en présentant des bons d'essence. Ces restrictions se terminent en Modèle:Date-.

L'économie française pénalisée

En France, la situation se retourne brutalement en 1956 et 1957, la croissance entre en crise<ref name=suriou>Jean-Pierre Rioux, France de la Quatrième République. L'Expansion et l'Impuissance (1952-1958), Éditions Points, 2014.</ref>. Le pays ne peut pas financer à la fois la guerre d'Algérie et les conséquences de l'expédition, anticipées sur les marchés de l'énergie.

Au même moment, au printemps 1956 , les hostilités en Algérie se développent et entraînent le rappel de disponibles. Les 400 000 puis Modèle:Unité servant sous uniforme font cruellement défaut à un système productif qui souffrait déjà d'une rareté de la main-d'œuvre<ref name=suriou/>. Des tensions sur le marché du travail augmentent les coûts salariaux<ref name=suriou/>, ce qui est accru par la politique sociale du gouvernement Mollet, aboutissant à une hausse de 12 % en 1956 puis à nouveau de 12,5 % en 1957 des charges et salaires des entreprises<ref name=suriou/>.

La crise de Suez prive le pays de 90 % de ses approvisionnements énergétiques, vide les stocks et contraint à importer à prix fort des produits raffinés, le prix moyen des importations grimpant de 50 % en 1956<ref name=suriou/>. Les industriels ayant anticipé à la hausse pour faire des économies d'énergie en sollicitant davantage le charbon et l'électricité<ref name=suriou/>, les conséquences inflationnistes sont vite apparues<ref name=suriou/>. Moins d'un an après, la Banque de France réagit en relevant le taux d'escompte, de 3 à 5 % en août 1957<ref name=suriou/>.

De plus, les capacités de production de la sidérurgie saturent : l'offre ne parvient plus à suivre la demande en produits métallurgiques de base<ref name=suriou/>. Après les matières plastiques<ref name=suriou/>, consommateurs de pétrole importé, le secteur est en Modèle:2e pour la croissance (indice 163 en 1958 pour 100 en 1952<ref name=suriou/>), où les salaires sont déjà en surchauffe et la semaine de travail à Modèle:Nobr<ref name=suriou/>. L'installation des hauts fourneaux d'Usinor à Dunkerque, pour profiter des dérivés du procédé Ugine-Perrin à la pointe de la technologie des aciers inox, prévue dès 1956, doit attendre, d'autant plus que l'endettement d'Usinor atteint 37 % dès 1958<ref name=suriou/>.

Le gouvernement renonce à la libération promise des échanges extérieurs<ref name=suriou/> et décide de bloquer tous les prix, puis multiplie les subventions budgétaires qui stabilisent artificiellement les prix des Modèle:Nobr inclus dans l'indice général<ref name=suriou/>.

Conséquences géopolitiques

L'URSS gagne en prestige au Moyen-Orient et resserre ainsi son alliance avec l'Égypte. Pour les Soviétiques, la crise de Suez fait aussi diversion aux événements de Hongrie où les chars russes ont écrasé l'insurrection de Budapest le Modèle:Date-.

Le régime égyptien, malgré la défaite militaire, ressort triomphant de cette crise. La défaite politique de la France, malgré sa victoire militaire, et le triomphe de l'Égypte, renforcent le FLN dans sa guerre de libération. L'Irak, hachémite et vassal de l'Occident, passe aux pro-nassériens (amis de l'URSS) par une révolution en juillet 1958. Le Liban, en 1958, est secoué par une « mini-guerre » civile entre les chrétiens tournés vers l'Occident et les musulmans tournés vers le reste du monde arabeModèle:Référence souhaitée.

La preuve est faite que les pays d'Europe ne sont plus les puissances dominantes dans cette région. Les États-Unis et l'URSS ont tenu à montrer que l'ère coloniale était finie et qu'aucune politique au Proche-Orient ne pouvait se faire sans eux. C’est la fin de la politique de la canonnière. De plus, des pays comme la France et le Royaume-Uni peuvent être mis en échec par des représailles purement économiques, comme l'a montré l'attaque sur la livre sterling.

La France et le Royaume-Uni en veulent aux États-Unis à cause de leur refus d'utiliser leur droit de veto au Conseil de sécurité des Nations unies pour les défendre.

Enfin, la France tire une rancune du retrait des Britanniques Modèle:Incise sans avoir averti ses alliés.

La crise déclenche une vague de solidarité venue des pays d'Afrique et d'Asie envers l’Égypte : des Cingalais ont formé des brigades de volontaires pour défendre le canal, les syndicats indonésiens ont demandé à leur gouvernement de boycotter les produits occidentaux en cas de conflit avec l’Égypte, les coolies de Calcutta ont manifesté dans les rues et le gouvernement japonais a offert des devises fortes pour permettre à l’Égypte de surmonter les difficultés qui découlent du blocage des avoirs égyptiens en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis<ref>Modèle:Article.</ref>.

Nouvelles alliances après la crise

La France et le Royaume-Uni tirent des conclusions différentes de ce conflit : le Royaume-Uni s'aligne désormais sur la politique étrangère des États-Unis, devenant son plus proche allié en Europe. La France conclut qu'elle doit se donner plus de moyens dans ses ambitions internationales, d'où une accélération dans la mise au point de la force de dissuasion nucléaire française, dont De Gaulle indique qu'elle est faite pour s'opposer à toute menace potentielle (« dissuasion tous azimuts »), sans adversaire désigné, ce qui n'en exclut aucun, y compris les États-Unis dans une hypothèse extrême<ref>Peter Hercombe et Arnaud Hamelin, Affaire de Suez, Le Pacte Secret, France 5/Sunset Presse/Transparence, 2006.</ref>.

Par ailleurs, Israël se conforte comme puissance militaire, l'opération ayant détruit une partie du potentiel militaire égyptien. Le pays a également renforcé sa coopération militaire avec la France, notamment par la réception des premiers avions à réaction de l'aviation israélienne (Ouragan, Mystère IV, Vautour, Mirage III), de chars AMX-13, et une coopération nucléaire (livraison d'un réacteur nucléaire) conformément au protocole de Sèvres. Cette alliance franco-israélienne sera plus tard brisée par la politique arabe de Charles de Gaulle et la guerre des Six Jours.

Notes et références

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Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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