Patois
Le terme de patois est utilisé en Belgique, France, Italie et Suisse pour désigner indifféremment toute langue minoritaire ou dialecte local, dans certains contextes et parfois avec une connotation dépréciative. Le mot est rarement utilisé au Canada. Le terme est également utilisé en Jamaïque et au Costa Rica où il s'applique à la langue anglaise des Caraïbes<ref>Modèle:Lien web</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Ce sont généralement des parlers romans, relevant de la langue d'oïl, de la langue d'oc, du francoprovençal ou encore des parlers gallo-italiques. Ce mot de patois est utilisé par les Français, surtout les Parisiens, pour désigner les langues alsacienne, bretonne, catalane, occitane, basque et corse, sans que leurs locuteurs spécifiques emploient ce terme péjoratif. Les Alsaciens utilisent le terme spécifique « dialecte » pour désigner leur langue et les Catalans de France les termes « roussillonnais » ou plus rarement « catalan septentrional » pour désigner le catalan parlé au nord des Pyrénées. L'abbé Grégoire a lutté contre tous les parlers de France autres que le français parisien : Les gouvernements ignorent ou ne sentent pas assez combien l'anéantissement des patois importe à l'expansion des lumières <ref> cité par Régis Meyran (www.fmsh.fr/fr/chercheur/regis-meyran) dans Le mythe de l'identité nationale : voir ici au 2e paragraphe lien</ref>.
Un terme diversement accepté en linguistique
En linguistique (et notamment en sociolinguistique), le mot « patois » est généralement évité, du fait de la connotation dépréciative que ce mot véhicule au nom d'une hiérarchie implicite entre les « langues » (sous-entendu dignes d'être nommées ainsi) et les « parlers locaux et limités » supposés indignes de recevoir la « noble » appellation de « langue ». Certains linguistes préfèrent ainsi parler de « langues » et de leurs variétés locales que sont les « dialectes », les « sous-dialectes » et, à très petite échelle, les « parlers », et d'une manière générale d'idiomes. Néanmoins, il existe des linguistes, souvent spécialisés en dialectologie, qui utilisent le terme « patois » pour désigner un parler local. Ainsi, une des plus grandes entreprises scientifiques de description de dialectes romans, le Glossaire des patois de la Suisse romande, n'hésite pas à afficher ce mot dans son titre. De même, Henriette Walter ne condamne-t-elle pas l'utilisation du terme<ref name="walter">Henriette Walter, Le français dans tous les sens</ref> : Modèle:Citation bloc
La linguiste précise dans quelles conditions sont nés les patois romans<ref name=walter/> : Modèle:Citation blocLe mot patois a d'ailleurs été emprunté par d'autres langues pour désigner une forme locale de langue, mais sans la conception dépréciative que comporte socialement le terme, en France, pour certaines personnes (et selon son étymologie).
Cela dit, le cas de figure évoqué ici, la grande différence de parler entre deux villages voisins, est une représentation répandue, mais est un phénomène rare dans la réalité linguistique.
Dans sa [[Dictionnaire de l'Académie française#La neuvième édition|Modèle:9e, le Dictionnaire de l'Académie française]] donne une nouvelle définition qui diffère de celle des éditions précédentes :
- Modèle:4e<ref>Dictionnaire de l'Académie française, quatrième édition Version informatisée</ref> : Langage rustique, grossier, comme est celui d'un paysan, ou du bas peuple.
- Modèle:8e<ref>Dictionnaire de l'Académie française, huitième édition Version informatisée, sur le site de l'ATILF</ref> : Variété d'un dialecte, idiome propre à une localité rurale ou à un groupe de localités rurales.
- Modèle:9e<ref>Dictionnaire de l'Académie française, neuvième édition Version informatisée, sur le site de l'ATILF</ref> : Variété d’un dialecte qui n’est parlée que dans une contrée de faible étendue, le plus souvent rurale.
La relation entre français et patois
En France, hormis dans certains contextes, le terme « patois » est dévalorisant : bien que souvent utilisé par les locuteurs des langues régionales eux-mêmes, le terme résulte en France d'une lente aliénation culturelle par laquelle les autorités voulurent faire croire aux Français parlant une langue autre que le français que leur langue n'en était pas une, qu'elle n'était qu'une déformation locale de la langue française.
Ainsi, en 1762, le Dictionnaire de l'Académie française le définit ainsi : « Langage rustique, grossier, comme est celui d'un paysan, ou du bas peuple ». Cette présentation est depuis plusieurs décennies dénoncée par la plupart des linguistes et des romanistes. Plusieurs observateurs et chercheurs estiment en effet que la désignation d'un parler en tant que patois relève d'une forme de discrimination (selon le facteur langue) ou de linguicisme (cf. liens externes), et non d'une analyse linguistique. Comme l'écrit Henriette Walter<ref name="walter" /> : Modèle:Citation bloc Cependant, ici, il ne faut pas se tromper sur le sens du mot réussir : une langue « réussit » uniquement avec un pouvoir politique qui la soutient.
Utilisé dans la vie politique et l'éducation pour dévaloriser toutes les langues locales, surtout (mais pas seulement) celles proches du français, ce mot a été un des facteurs qui ont permis au français de devenir la langue de référence sur le territoire de la République française<ref>Ce but est largement atteint, mais beaucoup de Français parlent néanmoins encore quotidiennement une langue autre que la langue officielle, et de nombreuses associations se battent pour la reconnaissance des langues locales.</ref>.
La Révolution française
Le Modèle:Date, l'Assemblée constituante avait elle-même ordonné de traduire ses décrets en « dialectes vulgaires ». Pourtant, rapidement, des patriotes de la Révolution française, tels par exemple Grégoire, veulent unifier le pays en interdisant le patois, comme le montre le Rapport Grégoire, adressé à la Convention nationale et intitulé Instruction publique ; Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française (daté : 16 prairial an II)<ref name=RappGregoire>Voir Wikisource : Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française</ref>. Selon Grégoire et son rapport, en 1789 :
- Modèle:Citation. Il voulait notamment Modèle:Citation, il veut remplacer les Modèle:Citation que sont selon lui les patois au profit du français ; Modèle:Citation<ref name=RappGregoire/>.
De plus ajoute Grégoire,
- Modèle:Citation ; Modèle:Citation, sinon, poursuit-il ; Modèle:Citation Le Français est nécessaire pour Modèle:Citation, de plus, selon lui, Modèle:Citation, ce qui préfigure d'autres changements, Grégoire ajoutant : Modèle:Citation<ref name="RappGregoire" />.''
Probablement, du fait de sa connotation dévalorisante, le terme est aujourd'hui peu employé dans la langue écrite, et l'on trouve plus couramment les termes de « langue régionale » (seulement en France), de « langue minoritaire », de « langue minorisée » ou de « langue subordonnée ».
Étymologie
Le mot « patois » viendrait de l'ancien français patoier signifiant agiter les mains, gesticuler puis se comporter, manigancer, dérivé de patte au moyen du suffixe -oyer<ref>en:Concise Oxford Dictionary</ref>,<ref>Modèle:CNRTL</ref>,<ref>Modèle:9e, le Dictionnaire de l'Académie française.</ref>. Cette étymologie permet de comprendre en partie la connotation péjorative que comporte ce terme : on patoise quand on n'arrive plus à s'exprimer que par geste.
Selon une autre hypothèse<ref>Chambers Dictionary</ref>, il pourrait dériver du latin Modèle:Lang (patrie), faisant ainsi référence à la dispersion locale d'un dialecte.
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
- Claude Duneton, Parler croquant, Paris : éd. Stock, 1973
- Abbé Grégoire, Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française, séance du 16 prairial de l'an deuxième (Modèle:Date-).
- Henriette Walter, Le français dans tous les sens, éd. Robert Laffont, Paris, 1988 Modèle:ISBN.
- Régis Watrinet, Recueil d'expressions, proverbes, dictons, coutumes et traditions en patois roman de la Lorraine, Ed. Régis Watrinet (Courcelles Chaussy).
Articles connexes
- Langues régionales de France
- Choc des patois
- Parler Dolois
- Patois de Canaan
- Patois briard
- Patois marnais
- Patois rasta
- Lorrain
- Expressions ch'ti
- Patois valdôtain
- Linguistique
Liens externes
- En vidéo, un focus sur les patois de Suisse romande : des documents d'archives de la Télévision Suisse Romande
- Les Français et leurs langues : enquêtes sur les patois, dialectes et mots régionaux : Un texte de Brigitte Horiot