Boues d'épuration
Les boues d'épuration (urbaines ou industrielles) sont le principal déchet produit par une station d'épuration à partir des effluents liquides. Ces sédiments résiduaires sont surtout constitués de matière organique (bactéries mortes) de matière organique animale, végétale et minérale humide. Une installation moyenne de gestion des eaux usées produit environ Modèle:Unité de matière sèche par jour et par habitant<ref>Source : Cemagref (devenu Irstea)</ref>.
D'une manière générales les eaux usées entrant dans une station d'épuration prennent le nom de « boue ». Les boues passent par différents stades et prennent différents noms (boues primaires, boues secondairesModèle:Etc.)<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.
L'expression plus largement peut désigner toutes boues provenant d'un système d'épuration industriel incluant les résidus d'épuration des fumées, du traitement des eaux acidesModèle:Etc.<ref>Modèle:Ouvrage</ref>
Types de boues résiduaires et d'épuration
Parmi les boues faisant l'objet d'une gestion, dans l'Union européenne, depuis 1986 on distingue explicitement<ref>Eur-Lex Directive 86/278/CEE du Conseil du 12 juin 1986 relative à la protection de l'environnement et notamment des sols, lors de l'utilisation des boues d'épuration en agriculture ; Journal officiel n° L 181 du 04/07/1986 p. 0006 - 0012</ref> :
- les boues résiduaires issues de stations d'épuration traitant des eaux usées domestiques ou urbaines (STEP) et d'autres stations d'épuration traitant des eaux usées de composition similaire aux eaux usées domestiques et urbaines ;
- les boues résiduaires de fosses septiques et d'autres installations similaires pour le traitement des eaux usées ;
- les boues résiduaires issues de stations d'épuration autres que celles visées aux points ci-dessus (stations d'épuration industrielles présentant des risques spécifiques).
La notion de « boues traitées » désignant des boues traitées Modèle:Citation.
On distingue différents types de boues selon les moyens pratiqués pour les séparer de l'eau du milieu boueux.
- Les boues primaires : Ce sont les dépôts récupérés par une simple décantation des eaux usées (dans les décanteurs par exemple). Elles présentent des concentrations élevées en matières minérales (sable, terre…) mais aussi en matière organique boueuse physico-chimique.
- Les boues biologiques : Cette expression (qui ne signifie pas que ces boues sont "bio" ) désigne les boues qui résultent d'un traitement dit "biologique" ; par l'oxygénation vigoureuse du milieu par des aérateurs ou surpresseurs (elles sont en grande partie constituées de cadavres de microorganismes aérobies).
- Les boues physico-chimiques : elles ressemblent aux boues primaires sauf que durant le traitement de l'eau usée, il a été rajouté un réactif (sels de fer, d'aluminium, et autres agents floculants) pour agglomérer les fines particules et améliorer la décantation.
On distingue aussi :
- Les boues mixtes constituées d'un mélange de boues primaires et secondaires, elles proviennent de la plupart des stations de traitement complètes.
- Les boues d'aération prolongée, obtenues sans décantation primaire avec des matières polluantes intensivement aérées. Les boues sont peu concentrées, moins organiques et donc moins susceptibles de produire des nuisances.
Aux États-Unis et au Canada quand les boues sont traitées et respectent la réglementation pour leur utilisation sur les sols agricoles elles sont souvent désignées par le terme « biosolid(e)s » <ref>Modèle:Lien web.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>.
Caractéristiques
Une boue est aussi représentée par plusieurs données numériques qui permettent de la caractériser.
- La siccité ou matière sèche : est le pourcentage massique de matière. Ainsi une boue avec une siccité de 10 % présente une humidité de 90 %. La matière sèche des boues est principalement constituée de matières organiques et des matières minérales.
- Le taux de matières volatiles sèches (MVS) : ce taux permet de connaître la part de matière sèche constituée par des matières organiques facilement biodégradables et donc la stabilité d'une boue. Plus le taux de MVS est élevé plus les boues sont susceptibles de fermenter rapidement et donc de produire du biogaz.
- La consistance est un état physique dépendant de la siccité :
- Boues liquides / siccité de 0 à 10 %
- Boues pâteuses / siccité de 10 à 25 %
- Boues solides / siccité de 25 à 85 %
- Boues sèche / siccité supérieure à 85 %
Selon les traitements d'épuration appliqués les boues ont des caractéristiques différentes :
- Lit bactérien : siccité 2 à 5 % ; MVS 60 à 70 % (aucune station est équipée de lit bactérien)
- Lagunage naturel : siccité 5 à 10 % ; MVS 30 à 60 %
- Décanteur-digesteur : siccité 4 à 7 % ; MVS 40 à 60 %
- Boues du bassin d'aération en station à boue activée (le brassage d'aération du bassin tue le processus de méthanisation du milieu) ce qui rend la boue inerte : siccité 0,4 à 0,6 % ; MVS ... %
- Boues du clarificateur en station à boue activée (le brassage d'aération du bassin tue le processus de méthanisation du milieu) : siccité 1 % ; MVS ... %
Traitements
Les boues subissent plusieurs traitements tels que :
- le conditionnement : il permet la stabilisation des boues (des boues stables sont des boues non fermentescibles).
- l'hygiénisation par compostage ou adjonction de chaux, de nitrites, et par séchage<ref>décrite en France à l'article 16 de l'arrêté du 08/01/98. </ref> et parfois par bioséchage.
Ces opérations impliquent des méthodes physiques (thermique) et/ou chimiques (ajout de réactifs minéraux, de polymères de synthèse ou de poly-électrolytes), puis l'épaississement va réduire le volume des boues par tassement naturel ou mécanique (séchage, drainage, etc.).
- déshydratation (par centrifugation, filtre-presse, filtre à bandes presseuses, électro-déshydratation, lit de séchage planté de roseaux<ref>Modèle:Article</ref>…). Elle libérera une grande partie de l'eau constituant l'essentiel du volume des boues. Les boues sont ensuite au vu de leur toxicité ou degré d'innocuité pour l'environnement stockées ou brûlées en incinérateurs ou cimenteries (ce qui réduit légèrement la consommation de clinker et de matière première issue de carrière, des tests ayant été faits avec 5, 10 et 20 % de clincker substitué par des boues<ref name=Naamane2013>Naamane, S., Rais, Z., & Taleb, M. (2013). Influence de l'ajout de la boue obtenue après épuration des eaux usées sur les caractéristiques physico-chimiques des ciments. Matériaux & Techniques, 101(7), 703.</ref>, selon Naamane & al., 2013. Modèle:Citation<ref name=Naamane2013/>).
Principaux débouchés
Les boues peuvent contenir des métaux et traces de produits toxiques, mais contiennent du carbone organique et ont des vertus fertilisantes (en France elles sont à plus de 70% valorisées sur les sols agricoles). Elles peuvent aussi être méthanisées pour produire du biogaz (valorisé en électricité ou chaleur ; le digestat étant souvent ensuite utilisé comme fertilisant, car encore riche en azote et en phosphore). Les boues peuvent aussi être incinérées, seules ou avec des ordures ménagères.
Aux États-Unis, l'épandage de boues liquides a été pratiqué durant plus de 30 ans en forêt, mais a été suspecté d'être à l'origine de certaines pollutions ou zoonoses, voire d'avoir été à l'origine de la maladie à prion (CWD, chronic wasting disease) qui touche un nombre croissant de cervidés dans une dizaine d'États, s'étendant au Canada et depuis peu au nord de l'Europe.
En Europe, l'épandage sur champs domine, mais depuis les années 1970, de nombreuses expérimentations ont eu lieu en forêt, sous le couvert ou avant régénération artificielle.
En France, en 2014, une enquête Irstea-Onema sur les impacts environnementaux des filières de traitement et de valorisation/élimination des boues d’épuration issues du traitement des eaux usées (STEU) a évalué la production de 3 153 filières de traitement de ces boues opérant de manières très variées dans 71 départements français (Modèle:Citation)<ref name="enquêteIrsteaInra2014"/>. Cette étude a estimé que pour 3 678 STEU étudiées représentant Modèle:Citation, correspondant à environ 59 154 430 équivalent-habitants (EH) ont produit et évacué 590 604 tonnes (matière sèche) de boues évacuées<ref name="enquêteIrsteaInra2014">Richard M & Pradel M (2014) Les filières de traitement et de valorisation des boues d’épuration en France. Rapport d’enquête (Doctoral dissertation, Irstea) ; pp.47 |hal-02600921 ; Résumé</ref>.
La plupart des boues étaient autrefois épandues sur champs, sauf en période de gel<reF>« les périodes où le sol est pris en masse par le gel ou abondamment enneigé, exception faite des boues solides » ; article R 211-41 du CE</ref>.
- Des expériences, par exemple conduites par l'ONF et le SIAAP (syndicat interdépartemental pour l'assainissement de l'agglomération parisienne) ont aussi testé l'épandage en forêt (ex : forêt de Chantilly)<ref>Ex : « Essai d'épandage de boues de station d'épuration avant plantation de chêne sessile en forêt de Chantilly en France », Gwenaëlle Gibaud, RDV technique, ONF, n° 19 Hiver 2008.</ref> dès le début des années 1970 (avec constat d'impacts floristiques significatifs). À partir de 1999 le réseau national ERESFOR, fait des tests avec l'INRA (qui a publié en 2006 ses résultats et formulé des recommandations). Le réseau RENECOFOR a expérimenté l'épandage en Franche-Comté. Au moins deux expérimentations associent le Cemagref (aujourd'hui Irstea) sur les sols sableux de la forêt des Landes à Facture. Une expérience a utilisé les boues de Ginestous à Toulouse, mais conclue par un échec. Les taillis à courte rotation ont été supposés intéressant pour l'épandage, mais France nature environnement, dans le cadre du PEFC notamment, a estimé que l'épandage en forêt comporte trop de risque et qu'il est à proscrire, car il est impossible de savoir quels composés chimiques ou à risque biologique ont pu contaminer les eaux usées, ni en quelle quantité.
- Utiliser des boues en « reconstitution de sol »<ref>La reconstitution de sols</ref>, par exemple pour revégétaliser ou paysager d'anciennes carrières, déblais / remblais, talus, pistes de ski…, est interdit par la réglementation, dans l'attente d'un arrêté fixant des prescriptions techniques<ref>Guide Afnor 5 : utilisation en reconstitution de sols (CR 13983)(publié sous l'indice FD X 33 016). + art R 211-45 du CE et § 7 du rapport)</ref>, mais il existe des expériences « clandestines »<ref>Voir Rapport DEB2009, voir p 24/33</ref>.
- Comme dans toute l'Europe, un agriculteur acceptant l'épandage de boues sur ses parcelles, doit justifier d'un accord écrit entre lui et le producteur de boues attestant notamment, de la régularité du plan d'épandage au regard de la réglementation<ref>Obligation stipulée par le régime la conditionnalité des aides de la Politique agricole commune</ref>.
En 2001, selon l'IFEN<ref name="IFEN20004">IFEN (2004) « Les données de l'environnement », n°98, décembre</ref>, 50 % des boues d'épuration en France avaient des usages agricoles (auxquelles s'ajoutent 6 % de valorisation agricole sous forme de compost, 24 % finissant en décharges contrôlées et 17 % incinérées. Au total, ces boues ne comptaient que pour 1 à 2 % des épandages agricoles, 98 % des épandages étant des fumiers et lisiers issus d'élevages nationaux (et parfois dans le nord de la France venant d'élevages belges n'ayant plus assez de place ou d'autorisation d'épandage en Belgique).
En 2002, la mise en décharge de boues est interdite, sauf s'il s'agit de déchets ultimes (les cendres d'incinération de boues y sont aussi acceptées). Dans les années 2000-2009, 20 % des boues produites (classées déchets) étaient envoyées en centre d'enfouissement technique (CET) de classe II, à condition de contenir au moins 30 % de matière sèche<ref>Arrêté du 09/09/97 modifié le 19/01/06 relatif aux installations de stockage de déchets non dangereux</ref>.
En 2019, Modèle:Unité des boues de STEP (soit Modèle:Unité) retournent au sol après co-compostage avec des biodéchets/déchets verts, ce qui est peu comparativement aux effluents d'élevages (plus de Modèle:Unité dont 95% épandus sur sols agricoles). 40 autres pour cent des boues de STEP sont épandues directement (Modèle:Unité) alors que 28% sont incinérées et 2% sont stockées (c'est-à-dire enfouies). Environ Modèle:Unité de la surface agricole utile (SAU) est chaque année amendée par des boues ou compost de boues/déchets verts<ref>Garrigues arnaud (2019) "Boues d'épuration : de nouvelles garanties pour pérenniser le compostage" la Gazette des communes, le 18/10/2019|Lire enligne:https://www.lagazettedescommunes.com/644729/boues-depuration-de-nouvelles-garanties-pour-perenniser-le-compostage/?abo=1 </ref>.
Risques sanitaires (infectieux, toxiniques, écotoxiques) et écologiques
En 1986 une directive<ref>Directive 86/278 relative à la protection de l'environnement et notamment des sols, lors de l'utilisation des boues d'épuration en agriculture</ref> a fixé de premières règles européennes de gestion des boues, mais avant qu'on ne connaisse bien les impacts écologiques des boues.
Depuis cette époque, la science a progressé, et la composition de boues a changé (par exemple elles contiennent moins de mercure ou de plomb, mais beaucoup de nouveaux micropolluants, biocides, adjuvants, micro- et nanoplastiques (MNP), médicaments et résidus médicamenteux (dont nonylphénols, platinoïdes), radionucléides, microbes antibiorésistants…)<ref>Modèle:Article</ref>.
En 1997, la France a créé une Modèle:Citation sur les épandages de boues d'épuration, cofinancée et animée par l'ADEME avec l'École nationale vétérinaire de Lyon. De 1997 à 2009, elle a reçu 51 appels, dont 18 concernant une suspicion de cas d'épandages de boues ayant causé des pathologies animales ; aucun de ces liens n'a pu être démontré<ref>Bilan d'activité de la cellule de veille sanitaire vétérinaire, janvier 2006 à janvier 2008, disponible sur le site de l'ADEME.</ref>. Le manque de traçabilité des filières notamment pour le compost pose aussi problème ; l'engagement n°260 du Grenelle de l'environnement demande de Modèle:Citation. L'Ademe estime que le risque de dépassement de seuils est rare à 10 ans pour les métaux lourds mais qu'il existe à 100 ans car ils s'accumulent dans le sol<ref name=RapportDEB2009/>.
En 2008, année de publication d'une directive déchets<ref>Directive n° 2008/98 parue le 19/11/08</ref> concernant notamment les boues, la DG Environnement a missionné trois bureaux d'études<ref>Milieu Ltd, WRc, et Risk and Policy Analysts Ltd</ref> pour faire le point sur les impacts environnementaux et socioéconomiques de l'épandage de boues. Un premier rapport a synthétisé les connaissances disponibles<ref name=EtudeUE2009> Milieu Ltd, WRc & RPA (2009) Environmental, economic and social impacts of the use of sewage sludge on land</ref>. Un autre a évalué un scénario de base, et les opportunités (« opportunities »). Ces travaux ont été envoyés aux parties prenantes le mi-2009 ; il était question de préparer une Directive boues, une directives biodéchets et une directive sols (finalement bloquée par plusieurs pays). Ce bilan a montré que :
- de 1995 à 2006 la quantité de boue produite en Europe a beaucoup augmenté, atteignant en 2006 Modèle:Unité de boues sèches pour l'UE-15, dont Modèle:Unité (42 %) étaient épandues sur des sols agricoles ;
- l'Allemagne était le pays produisant le plus de boues (Modèle:Unité) mais en épandait peu (29 %), alors que la France, en troisième position derrière le Royaume-Uni avec Modèle:Unité de boues produites, était le pays qui en épandait le plus (70 % environ)<ref name=EtudeUE2009/> ; les régions Bruxelles-capitale et flamande, en Belgique, les Pays-Bas, la Pologne ou la Grèce n'épandaient pas de boues sur sol agricole ou venaient ce cesser cette pratique, alors que le Royaume-Uni augmentait ses épandages<ref name=EtudeUE2009/>. Les boues ne représentaient toutefois que 5 % environ du total des amendements organiques apportés au sol, et moins de 5 % des terres agricoles de l'UE en recevait.
Les principaux risques sont induits par :
- les métaux : ni le compostage ni la méthanisation n'élimine les métalloïdes toxiques ou les métaux lourds (sauf pour une partie, volatile, du mercure). Des polluants organiques ou organométalliques faiblement biodégradables (dioxines, PCB, certains pesticides, etc.) persistent aussi dans le compost ou les digesta de méthanisation (si les matières entrantes étaient polluées ou souillées). Le risque est a priori plus élevé là où des rejets médicaux, artisanaux et industriels ou hospitaliers sont rejetés sans contrôle dans les réseaux d'assainissement collectif et là où le risque d'accident industriel est plus élevé (des bassins-tampon, recueillant par exemple les eaux d'extinction d'incendie limitent le risque, mais il faut en gérer le contenu, et des rejets pirates sont encore difficiles à prévenir voire à détecter. Par exemple en France, la seule collecte des amalgames dentaires, bien qu'encore imparfaite a beaucoup fait diminuer le taux de mercure dans les boues urbaines<ref name=RapportDEB2009/>. La directive de 2008 fixe des règles concernant le risque pathogène. Elle fixe aussi des valeurs limites pour 7 métaux lourds (cadmium, cuivre, nickel, plomb, zinc, mercure et chrome) à ne pas dépasser dans le sol et dans les boues ; Les boues doivent être traitées, ou peuvent à certaines conditions être injectées dans le sol. La plupart des États-membres ont édicté des règles et normes plus exigeantes que la directive, dont pour des paramètres non évoqués par la directive.
- les pathogènes (bactéries, parasites, virus, prions) & allergènes : Les travailleurs mal protégés manipulant des boues peuvent être exposés (inhalation, contact via blessures…) à certains spores de champignons microscopiques (moisissures) et actinomycètes allergènes ou à des pathogènes (parasites ou leurs œufs, bactéries, prions, virus) ou toxines (exemple : Aflatoxines, endotoxines) et allergènes libérés par ces organismes<ref>Fiche STNF Travail en compostage de boues urbaines et risques biologiques</ref>,<ref>Tanner et al (2008), Estimated Occup ational Risk from Bioaerosols Generated during Land Application of Class B Biosolids , J Environ Qual.2008; 37: 2311 - 2321 </ref>,<ref>Gale et al. (2003) Pathogens in biosolids. Microbiological Risk Assessment. UKWIR, London, UK. Modèle:ISBN </ref>,<ref>Smith SC (2008) The implications for human health and the environment of recycling biosolids on agricultural land. Imperial College London Centre for Environmental Control and Waste Management. URL: http:/www3.imperial.ac.uk/ewre </ref>.
À titre d'exemple, en avril 2020, l'ANSES a en France recommandée d'attendre la fin de la pandémie de Covid-19 pour épandre les boues non-traitées (hygiénisées) sur les champs, mais en jugeant le risque de contamination par le SARS-CoV-2 Modèle:Citation pour celles qui ont subi un traitement hygiénisant conforme à la réglementation. L'ANSES ne disposait pas de données permettant de savoir à partir de quelle durée de stockage le virus serait inactivé<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Après qu'en mars une corrélation ait été montrée entre le taux de SARS-CoV-2 dans les eaux usées et l'évolution de la maladie a été démontrée, un Observatoire épidémiologique de la présence du virus SARS-CoV-2 dans les eaux usées (dit Réseau Obépine) a ensuite été lancé (le 5 mars en région parisienne, par le laboratoire Eau de Paris, des universitaires (Sorbonne) et l'Institut de recherche biomédicale des armées, avec une aide financière de 500 000 euros du Comité analyse recherche et expertise, et de 3,5 millions d'euro du MESRI) : au 17 novembre 2020, sur les 158 stations d'épuration nécessaires pour établir en un maillage représentatif pour surveiller le SARS-CoV-2 dans les eaux usées, 82 sites de prélèvements sont déjà recrutés et sept laboratoires agréés<ref name=Obs2020IndTech/>. Ce réseau aidera à évaluer le taux d'asymptomatiques, et à suivre et prévoir l'évolution des foyers épidémiques, parfois avec plusieurs jours ou semaines d'avance. Fin 2020, « Obépine » devrait faire 300 à 600 analyses par semaine, qui renseigneront aussi d'autres maladies épidémiques telles que la gastro-entérite ou la grippe saisonnière<ref name=Obs2020IndTech/>,<ref>Modèle:Lien web</ref>. Une banque d'eaux usées est également prévue car Modèle:Citation note Vincent Maréchal (virologue à Sorbonne Université et cofondateur de cet observatoire)<ref name=Obs2020IndTech>Modèle:Lien web</ref>.
- les produits chimiques toxiques persistants, ou radioactifs : dans les zones d'épandages ou de stocks de boues et à leur aval, certains produits chimiques, organométalliques ou radionucléides présents dans les boues peuvent être concentrés et exportés dans l'environnement par la combinaison de processus naturels de bioturbation et de bioconcentration (par les champignons notamment<ref>Zabowski, D., Zasoski, R.J., Littke, W., Ammirati, J., 1990. Metal content of fungal sporocarps from urban, rural, and sludge-treated sites. J. Environ. Qual. 19, 372–377.</ref>). Les boues sont souvent chaulées, ce qui limite, dans une certaine mesure, et dans un premier temps, la biodisponibilité des métaux (qui circulent mieux dans les substrats acides).
- les Antibiotiques : ceux-ci étant de plus en plus utilisés en médecine humaine et vétérinaire, ainsi que sur des cultures fruitières et végétales ou en pisciculture, leurs résidus sont retrouvés dans les stations d'épuration. Dans les excréments (humain et animal) sont retrouvés un nombre croissant de microbes devenus antibiorésistants, voire extrêmophiles. En sortie de STEP, les boues d'épuration en contiennent (tout comme certains fumiers animaux ou digestats)<ref name=Chen2016/>. Le co-compostage avec des déchets verts ne les éminent pas entièrement, ni la méthanisation (ce sont souvent des organismes anaérobies). On a récemment montré que leur épandage comme amendement et « engrais naturels » affecte les communautés microbiennes du sol, au détriment de leur biodiversité, et en y favorisant l'apparition de souches antibiorésistantes Modèle:Citation. On observe que le nombre de gènes d'antibiorésistance croît dans les zones d'épandage<ref name=Chen2016/>. Et de tels gènes sont maintenant détectés à tous les stades de traitement des eaux usées municipales. C'est devenu un risque sanitaire majeur en Chine Modèle:Citation<ref name=Chen2016/>. Selon une étude récente (2016), sur les sites testés en Chine au-delà de 4,5 tonnes de boues apportée par hectare, l'antibiorésistance s'aggrave chez les microbes du sol. Plus les épandages se répètent plus la situation s'aggrave<ref name=Chen2016>Chen, Q., An, X., Li, H., Su, J., Ma, Y. & Zhu, Y. (2016) Long-term field application of sewage sludge increases the abundance of antibiotic resistance genes in soil. Environment International, 92–93: 1–10. DOI: 10.1016/j.envint.2016.03.026. |URL:http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160412016301064.</ref>. La diffusion rapide et mondiale de ces microbes, s'explique par leur richesse en intégrons, des sous-ensembles génétiques que les bactéries s'échangent très facilement, notamment quand elles sont tressées, et qui codent un grand nombre de protéines sources de résistance aux métaux lourds, à divers polluants, aux antibiotiques et à d'autres biocides, grâce à d'autres éléments du génome (les transposons) ces paquets transmissibles de gènes de résistance, sont maintenant considérés comme les espèces invasives<ref name=Gillings2017>Gillings M.R (2017) Class 1 integrons as invasive species. Current Opinion in Microbiology, 38, 10-15 (résumé).</ref> et comme des polluants (en tant que puissants altéragènes biologiques), on peut les considérer comme agents mutagènes, et en raison de leur abondance croissante et de leur caractère envahissant, le Pr Michael Gillings (Pr. en évolution moléculaire au Département des sciences biologiques de l'Université Macquarie, en Australie) les classe parmi les polluants émergents devenus en quelques décennies préoccupants pour l'homme et pour les écosystèmes, en particulier les intégrons cliniques de classe 1 qui ont permis l'évolution et la dissémination de l'antibiorésistance dans le monde, via plus de 70 espèces bactériennes d'importance médicale<ref name=Gillings2017/>. Parmi ces dernières, il s'agit principalement de bactéries intestinales communes chez l'homme et les animaux domestiques, souvent pathogènes, et qu'on retrouve désormais jusqu'en Antarctique<ref name=Gillings2017/>. Les intégrons agissent en lien avec les transposons et avec les gènes de résistance aux métaux, aux désinfectants, biocides et antibiotiques, contribuant à la diffusion de bactéries extrêmophiles qui risquent d'être de plus en plus difficiles à combattre quand elles sont ou deviendront pathogènes<ref name=Gillings2017/>. Modèle:Citation<ref name=Chen2016/> et la directive européenne de 2018 sur le déchets demande une gestion séparée des boues d'épuration.
- les perturbateurs endocriniens, qui peuvent être actifs à faible dose, avec notamment les résidus de pilules (action féminissante qui peut inhiber la reproduction de nombreuses espèces)
* à gauche : les taux et masse de microparticules de plastiques (MP) entrant avec les eaux usées dans la station d'épuration (PST) de Nash au royaume-Uni, pour environ 300 000 Équivalent-habitant de capacité de traitement ;
* à droite : taux et masse de microplastiques sortant de la station d'épuration ; 1) dans l'eau épurée, 2) dans l'écume (produite en faible quantité) et dans les boues d'épuration (massivement épandues sur des sols agricoles)
(Les pourcentages sont donnés en pour cent de boue sèche)
- les microplastiques : Ils contiennent des colorants, des additifs dont certains sont des perturbateurs endocriniens, parfois non-dégradables et souvent lentement dégradables aux échelles de temps qui sont celles des organismes du sol. Ils peuvent absorber ou adsorber divers polluants dont des pesticides<ref>Modèle:Article</ref>. Les boues d'épuration (tout comme les paillages plastiques abandonné dans les champs<ref>Modèle:Article</ref>, certains composts de déchets ménager ou industriels, ou certains digestats de méthanisation) en sont l'une des principales sources dans les sols cultivés (et en forêt dans certains pays).
Ainsi, les boues d'épuration américaines contiennent au moins Modèle:Nombre particules de plastique par kilogramme de boue sèche, introduisant jusqu'à 70 kilotonnes de MNP par an dans les sols agricoles des seuls États-Unis<ref>Modèle:Article</ref>. Des sols utilisés par l'agriculture industrielle, contiennent jusqu'à 43 000 particules kg−1de divers polymères plastiques<ref>Modèle:Article</ref>, avec des effets négatifs démontrés sur la vie du sol<ref name=collemboleMicroplastique/>, sur le collembole et son microbiote intestinal par exemple<ref name=collemboleMicroplastique/>, ainsi que sur sa capacité reproductive<ref name=collemboleMicroplastique/>, avec donc des effets négatifs secondaires sur le réseau trophique, la formation de l'humus (et donc du puits de carbone du sol)<ref name=collemboleMicroplastique>Zhu, D., Chen, Q. L., An, X. L., Yang, X. R., Christie, P., Ke, X., ... & Zhu, Y. G. (2018). Exposure of soil collembolans to microplastics perturbs their gut microbiota and alters their isotopic composition. Soil Biology and Biochemistry, 116, 302-310. URL : https://www.researchgate.net/profile/Zhu_Dong2/publication/322177859_Exposure_of_soil_collembolans_to_microplastics_perturbs_their_gut_microbiota_and_alters_their_isotopic_composition/links/5a71302e0f7e9ba2e1cb1b93/Exposure-of-soil-collembolans-to-microplastics-perturbs-their-gut-microbiota-and-alters-their-isotopic-composition.pdf </ref>.Modèle:Loupe
Quantités
En Europe
La commission européenne en 2003 avait un objectif de 75 % des boues épandues<ref>Source : Proposition du 30 avril 2003 d'une directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'épandage des boues sur les terres, citée par la DEB)</ref>.
Les statistiques d'Eurostat (2019b) aggrègent celles des Etats de l'UE sur la production et l'élimination des boues d'épuration depuis 2009 et la Commission européenne évalue périodiquement l'application par chaque Etat-membre des directives de 1986, 1991, 1994... sur les boues d'épuration<ref name=statUE/>. Les statistiques remontantes proviennent de questionnaires, de même que les données servant à l'évaluation par la Commission européenne. Des rapports de la Commission européenne (ex : 2015, 2018 pour la période 2010-2015) synthétisent périodiquement les réponses envoyées par les Etats européens. Selon ces données, de 8 à 10 × 106 tonnes de boues d'épuration sèches (Tds) ont été annuellement produites par des stations d'épuration dans l'UE de 2009 à 2018<ref name=statUE>Modèle:Article</ref>.
En France
La réglementation française impose que certaines statistiques soient faites et suivies<ref>communication obligatoire au préfet de la synthèse du registre d'épandage (R 211-34 § II du CE), du programme prévisionnel d'épandage et du bilan agronomique (R 211- 39 du CE)</ref>,<ref>Le décret n° 2009-550 du 18 mai 2009 (art. 2) relatif à l'indemnisation des risques liés à l'épandage des boues d'épuration urbaines ou industrielles impose aux producteurs de boues de transmette des informations statistiques à l'autorité administrative sous format électronique (art. R 211-34 §V du CE). Un arrêté ministériel précisera les données à transmettre et les modalités de transmission. Ces données seront traitées par la police de l'eau</ref>.
Au début des années 2000, le pays comptait environ Modèle:Nombre d'épuration dont plus des 3/4 traitaient une quantité d'eaux usées correspondant à moins de Modèle:Unité. Chaque Français produirait 15 à 20 kg/an de boue (en matière sèche)<ref name=RapportDEB2009>Direction de l'Eau et de la Diversité (DEB), Bilan de dix années d'application de la réglementation relative à l'épandage des boues issues du traitement des eaux usées, rapport n°1771 CGAAER, octobre 2009, PDF, 33 pages, par Jean-Paul LEGROUX (CGAAER), et Claude TRUCHOT (CGEDD)</ref>. Les boues urbaines représentaient environ Modèle:Unité de matières sèches (MS) pour la métropole en 2001, puis Modèle:Unité en 2004 (IFEN), mais M. Adler cite Modèle:Unité de MS/an en 2004<ref name=RapportDEB2009/>. Le statut de déchets (et non de matériau ou matière première) des boues de station d'épuration implique une responsabilité du producteur et permet un contrôle par l'État de la qualité de ces boues et des épandages.
Il faut y ajouter Modèle:Unité de « boues issues d'effluents industriels » venant principalement<ref>Données non vérifiées par le rapport DEB 2009, provenant d'un rapport de mission n° 2369 du CGAAER sur le projet de Fonds de garantie pour l'épandage de boues de stations d'épuration</ref> :
- des papeteries (Modèle:Unité de matières brutes dont environ 60 % (Modèle:Unité) sont épandues (selon ADEME)<ref name=RapportDEB2009/>. Des projets de normes concernent des boues spécifiques dont les boues chaulées, papetières et séchées, considérées comme des MIATE (matières d'intérêt agronomique issues du traitement des eaux)<ref>Projet suivi par la commission U 44 D de l'AFNOR et le bureau de la normalisation des amendements minéraux et des engrais (BNAME)</ref>. D'après l'ADEME (en 2001), ces boues chaulées constituaient environ 30 % du tonnage total des boues produites en France<ref name=RapportDEB2009/>. Plus largement, les Modèle:Unité de boues papetières pourraient bientôt faire l'objet d'une norme<ref name=RapportDEB2009/> ;
- l'industrie alimentaire (branche C10 de la nomenclature françaises) avec Modèle:Unité<ref name=RapportDEB2009/> ;
- la chimie-pharmacie : Modèle:Unité<ref name=RapportDEB2009/> ;
- d'autres secteurs (textile, cuir…) : Modèle:Unité<ref name=RapportDEB2009/>.
Le compostage des boues en France semble avoir fortement augmenté entre 2000 et 2010.
En 2000, seules 3 % des boues épandues l'étaient sous forme de compost (INRA), alors que l'IFEN estimait ce pourcentage à 5 % en 2001 puis à 16 % en 2004. Il était de 28 % en 2008 (selon la DEB). En 2004, 46 % des boues urbaines étaient épandues (sur environ 3 % de la SAU française) et 16 % l'étaient après compostage. L'incinération comptait pour 16 % et la mise en décharge pour 21 %, mais la loi Grenelle 1 vise à diminuer la mise en décharge et l'incinération des déchets (-15 % d'ici à 2012, selon la loi Grenelle I qui prévoit « Un cadre renforcé pour la gestion de proximité de déchets spécifiques : mâchefers, boues de stations d'épuration et de co-incinération, bois traités, sédiments de dragage et curage »). De plus, la future réglementation européenne sur le recyclage du phosphore devrait imposer la mono-incinération des boues (leur incinération avec d'autres matériaux sera interdite)<ref>réunion du 17 juin 2009 du CEN/TC 308 (cf. § 1.2), cité par un rapport de 2009 sur les boues (voir p16/33)</ref>.
Prospective, R&D, filières alternatives
Pour diminuer ou sécuriser ou mieux valoriser la production de boues, diverses alternatives sont testées ou autorisées
Boues comme ressource « minière »
Une autre piste de valorisation est de considérer la boue comme un minerai pour en extraire des métaux précieux, car on y trouve notamment de l'or, de l'argent et d'autres métaux commercialement intéressants. Une récente étude de chercheurs de l'Arizona State University (ASU) quantifié les métaux des boues d'épuration de grandes villes américaines y a trouvé des éléments rares (Y, La, Ce, Pr, Nd, Pm, Sm, Eu, Gd, Tb, Dy, Ho, Er, Tm, Yb, Lu), mais avec un facteur d'enrichissement qui n'est que de 1 (ce qui laisse penser que ces éléments proviennent simplement du sol). Les chercheurs ont aussi trouvé des quantités significatives d'autres éléments, dont des métaux précieux (équivalent à une valeur de 13 millions de dollars par an pour une ville d'un million de personnes, dont 2,6 millions de dollars en or et d'argent<ref name="Westerhoff2015">Paul Westerhoff, Sungyun Lee, Yu Yang, Gwyneth Gordon, Kiril Hristovski, Rolf Halden & Pierre Herckes (2015), Characterization, Recovery Opportunities, and Valuation of Metals in Municipal Sludges from U.S. Wastewater Treatment Plants Nationwide ; Environ. Sci. Technol., DOI: 10.1021/es505329q En ligne : January 12, 2015 (résumé)</ref>. Le platine et les métaux du groupe du platine sont ceux pour lesquels le facteur d'enrichissement est le plus élevé, ce qui signe une source anthropique (ils peuvent notamment provenir des pots catalytiques et des chimiothérapies). Beaucoup de particules colloïdales d'oxydes métalliques y sont trouvés (particules <100-500 nm de diamètre)<ref name="Westerhoff2015" />. Et selon une modélisation incluant des indices de faisabilité et rentabilité technicoéconomiques, les éléments financièrement les plus intéressants à récupérer sont Ag, Cu, Au, P, Fe, Pd, Mn, Zn, Ir, Al, Cd, Ti, Ga et Cr (valeur combinée totale : 280 dollars par tonne de boue, soit 8 millions de dollars pour une ville d'un million de personnes)<ref name="Westerhoff2015" />. Plusieurs millions de tonnes de boues sèches sont produites annuellement en Amérique du Nord. Une tonne de boues contenaient 16,7 grammes d'argent et environ 1/3 de gramme d'or, mais ces métaux précieux y sont cependant présents sous forme dissoute ou en particules microscopiques à ce jour très coûteusement récupérables. Polluer l'environnement avec ces métaux a aussi un coût<ref name="Westerhoff2015" />. Une ville japonaise (Suwa dans la préfecture de Nagano) abritant de nombreuses entreprises produisant des équipements de précision a tenté d'extraire cet or ; elle aurait recueilli presque de 2 kg d'or par tonne de cendre de boues incinérées (avec une teneur en or plus élevée que dans le minerai produit par de nombreuses mines du monde<ref name="Westerhoff2015" />. D'autres voies de valorisation sont à l'étude. Une usine suédoise évalue la faisabilité d'utiliser les boues pour produire des bioplastiques et un modèle d'incinérateur produisant de l'eau potable et de l'électricité a été promu par la Fondation Bill & Melinda Gates qui a cofinancé le projet<ref name="Westerhoff2015" />.
Le phosphore, ressource non renouvelable et présent en grande quantité dans les boues d'épuration, pourrait cependant devenir aussi précieux que l'or et l'argent ! Différents scientifiques et les associations de producteurs estiment la durée de vie des réserves de roches phosphatées de 50 à 270 ans<ref>Modèle:Article</ref>. Mais dès aujourd'hui, l'enjeu de recyclage du phosphore dans les boues d'épuration est important pour plusieurs raisons<ref>Modèle:Lien web</ref> : diminution de la quantité de phosphore dans l'eau rejetée en sortie des stations d'épuration et les risques de pollution associés, réduction des coûts liés à l'épandage des boues<ref>La quantité de boue d'épuration épandue est calculée sur la base de la concentration de phosphore dans les boues. Plus les boues sont concentrées en phosphore, plus l'épandage doit se faire sur une grande superficie.</ref>, création de valeur grâce à la production d'engrais et surtout, autonomie vis-à-vis de la ressource en phosphore permettant de réduire la dépendance vis-à-vis des pays qui en détiennent les gisements<ref>Le Maroc et le Sahara occidental, les États-Unis et la Chine détiennent les deux tiers des réserves mondiales.</ref>… Les recherches s'intensifient pour valoriser les fractions de phosphore présentes dans les boues de station d'épuration (mais aussi dans les effluents d'élevage). À l'issue de plusieurs projets<ref>Travaux menés dans le cadre du projet Metaphos (2013-2015) et du projet Phostep (2016-2018) et financés par l'Onema (devenu AFB).</ref> pilotés par Irstea de 2013 à 2018, de nouveaux procédés d'extraction voient le jour permettant de recycler jusqu'à 75 % du phosphore des boues, contre 20% à l'origine. « Le principe consiste à dissoudre et dissocier le phosphore de la matière organique grâce à un acide, le cristalliser puis le filtrer pour le récupérer sous forme minérale, directement utilisable comme engrais »<ref>Modèle:Article</ref> . Les chercheurs privilégient une acidification biologique, via les bactéries, moins coûteuse que les procédés issus de la chimie.
Statut juridique, législation
Statut : selon les époques ou les pays, ou le type de boues, les boues de station d'épuration sont juridiquement considérées comme des déchets ou comme "des matières premières secondaires".
Dans tous les cas elles font l'objet d'une législation spécifique qui encadre leur devenir : mise en décharge, incinération, épandage sur des sols agricoles comme matière fertilisante (lorsque les boues constituent des amendements organiques, et à certaines conditions).
En Europe :
- Modèle:Citation<ref>Directive européenne n° 91-271 du conseil du 21/05/91 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines, Art 14</ref>.
- Le projet de directive « promotion des énergies produites à partir de sources renouvelables » comprend une définition de la biomasse, incluant la fraction fermentescible des déchets municipaux.
En France :
- l'élimination des boues produites dans les stations d'épuration des eaux usées domestiques fait partie des missions du service public d'assainissement et relève de la responsabilité des communes (Art. L 2224-8 du CGCT) ;
- les communes autorisent ou non le déversement des eaux industrielles dans les réseaux publics, en principe interdit. (Art. L 1331-10 du CSP) ;
- Sont réglementés ;
- L'épandage des boues au regard de la législation sur l'eau
- L'épandage des boues industrielles
- Les boues considérées comme déchets (directives, lois, arrêtés, décrets)
- La mise en décharge de déchets (Directive n° 1999/31 du 26/04/99 sur la mise en décharge des déchets. Loi n° 92-646 du 13/07/92 relative à l'élimination des déchets ainsi qu'aux ICPE (art. L 541-24 du CE) : seuls les déchets ultimes sont admis en CET de classe II à compter du 01/07/02. Arrêté du 09/09/97 modifié le 19/01/06 relatif aux installations de stockage de déchets non-dangereux : catégorie D et annexe II : les boues doivent contenir au moins 30 % de matière sèche)
- Les boues considérées comme produits (plusieurs textes)
- Les installations de compostage (plusieurs arrêtés et décrets)
- Les installations d'incinération (Directive n° 2000/76 du 04/12/00 relative à l'incinération des déchets, Arrêté du 20/09/02 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux. Art. R 511-9 du CE : nomenclature des installations classées rubrique 322-B-4.)
- Les unités de séchage (norme norme ATEX 137 99/92/EG depuis juillet 2003, et études de sécurité HAZOP (HAZard and OPerability), + validation par un organisme agréé par l'INERIS).
En France, les boues urbaines sont classifiées sous le code déchet 19 08 05, alors que les boue industrielles sont classifiées sous le code déchets 19 08 12 (pour les boues issues d'un traitement biologique) ou sous le code 19 08 14 (pour les boues issues d'un traitement non biologique). Elles relèvent notamment aussi des SATEGE et peu à peu des PRPGD et des SRB en émergence.
Fiscalité et boues
En France comme ailleurs, la profession agricole est souvent réticente à l'épandage de certaines boues susceptibles de contenir des polluants métalliques et/ou organiques non biodégradables, des perturbateurs endocriniens, des microbes résistants aux antibiotiques, etc.
La loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 a donc créé un « fonds de garantie boues » permettant aux agriculteurs et propriétaires fonciers d'être indemnisés en cas de dommages agroécologiques imprévus causé par un épandage (si ces dommages ne sont pas pris en charge au titre des contrats d'assurance de responsabilité civile du producteur des boues épandues)<ref name=JournComm2012/>. Une taxe alimente ce fonds. Elle est payée par les collectivités productrices de boues urbaines ou par les entreprises délégataires – et les exploitants du secteur de l'industrie alimentaire ou du papier faisant construire des stations d'épurations (qui produiront des boues industrielles)<ref name=JournComm2012/>.
En 2012 (mars) le Conseil d'État a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité par des acteurs de l'industrie papetière sur l'article L. 425-1 du Code des assurances relatif au fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues d'épuration urbaines ou industrielles<ref name=JournComm2012/>. Le 8 juin (2012) le Conseil constitutionnel a jugé l'article conforme, mais avec une réserve d'interprétation concernant l'assiette de la taxe sur les boues d'épuration (taxe qui alimente ce fonds de garantie mais vise aussi à développer la valorisation agricole comme débouché aux boues).
En 2009, un décret du 18 mai<ref>Décret du 18 mai 2009 (Titre II livre IV nouveau chapitre IV articles R424 1 à 17 du Code des Assurances) </ref> fixe le taux d'imposition sur la base de la quantité de matière sèche des boues produites annuellement (qui n'est pas nécessairement la quantité de boues épandues), système contesté par certains papetiers étant dans l'incapacité juridique et/ou technique d'éliminer par voie d'épandage la totalité de leurs boues. Le Conseil d'État a retenu Modèle:Citation<ref name="JournComm2012">Journal des communes Le Conseil constitutionnel délimite l'assiette de la taxe sur les boues d'épuration, 19 juin 2012</ref>.
En 2015 (juillet), un rapport du CGEDD titré « Les épandages sur terres agricoles des matières fertilisantes d'origine résiduaire » préconisait d'élargir ce fonds de garantie à d'autres matières résiduaires épandables pour sécuriser les agriculteurs<ref>Rapport CGEDD n° 009801-01, CGAAER n° 14074 établi par Bertrand GAILLOT et Patrick LAVARDE (coordonnateur) résumé.</ref>.
En 2016, un rapport parlementaire<ref name="RapportSenat2016">Rapport "Gestion de l'eau : agir avec pragmatisme et discernement", sur le site du Sénat, et sa version pdf (87 p), voir proposition 10 ; URL:https://www.senat.fr/rap/r15-807/r15-807.html</ref> d'information, de Rémy Pointereau (sénateur du Cher) invite à Modèle:Citation<ref>Tubiana, Fabian (2016) Une nouvelle loi sur l'eau ? Dix ans après l'adoption de la loi Lema dont il dresse un bilan mitigé, le sénateur du Cher, Rémy Pointereau, dévoile 28 propositions pour apporter « plus de pragmatisme » dans la gestion de l'eau en France Article publié par Environnement Magazine le 22/07/2016 </ref>. Le rapporteur note que l'une des 90 mesures de simplification administrative retenues pour les entreprises est de supprimer cette taxe (dont le coût de recouvrement par les services du Trésor public est élevé) mais il estime que Modèle:Citation<ref name="RapportSenat2016" />. Le rapport pointe - en cas de suppression de la taxe - un risque d'augmentation du prix de traitement de l'eau et donc des factures, et une remise en cause des plans d'épandage. Ceci priverait certains industriels et les collectivités d'une partie des voies de recyclage final des boues d'épuration<ref name="RapportSenat2016" />.
Voir aussi
Articles connexes
- Liste des produits d'assainissement
- AOX
- Station d'épuration
- Compostage
- Filtre-presse
- Bioséchage
- Danger biologique, risque
- Gestion des boues de vidange
Bibliographie générale
- Adler, E, Le maire et les boues d'épuration : Association des Maires de France, 2007 http://www.amf.asso.fr/document/index.asp?DOC_N_ID=8153&refer=
- Barles, S, La Ville délétère, Seyssel : Champ Vallon, 1999.
- Benevolo, L. Histoire de l'architecture moderne, tome II, Paris, Dunod, 1980.
- Bourdelais, P, Les Hygiénistes : enjeux, modèles, pratiques, Paris : Belin, 2001.
- Bourgeois-Gavardin, J, Les Boues de Paris sous l'Ancien Régime. Contribution à l'histoire du nettoiement urbain au XVIIe et XVIIIe siècles, 2 volumes. Paris : EHESS, 1985.
- Chalot, F, La Commune et les Déchets, Paris : Éditions Sorman, 1990.
- Charvet, M. 2005, Les fortifications de Paris. De l'hygiénisme à l'urbanisme, 1880-1919, Rennes, PUR.
- Chatzis, K, La Pluie, le métro et l'ingénieur : contribution à l'histoire de l'assainissement et des transports urbains, Paris : L'Harmattan, 2000.
- Dupuy, G. Knaebel, G, Assainir la ville hier et aujourd'hui, Paris, Dunod : 1982.
- Foucart, B, 1981, « Au paradis des hygiénistes », Monuments historiques, n° 114, avril-mai.
- Jeudy, H.-P, Le choix public du propre. Une propriété des sociétés modernes. Les Annales de la recherche urbaine, décembre 1991. no 53. Modèle:P.102-107.
- Jugie, J.-H, Poubelle - Paris (1883 - 1896) : la collecte des ordures ménagères à la fin du XIXe siècle, Paris : Larousse, 1993.
- Mory, P, 2001, « Architecture et hygiénisme à Paris au début du 20e siècle. L'architecte entre savoir médical et pouvoir politique » dans Patrice Bourdelais (dir.), Les hygiénistes : enjeux, modèles et pratiques, Belin.
- Ragon, M. Histoire mondiale de l'architecture et de l'urbanisme moderne, tome II, Paris, Casterman, 1972.
- Rasmussen, A, 2001, « L'hygiène en congrès (1852-1912) : circulation et configuration internationale » dans Patrice Bourdelais (dir.), Les hygiénistes : enjeux, modèles et pratiques, Paris, Belin.
- Silguy (de), C, La Saga des ordures du Moyen Âge à nos jours, Montrouge : Instant, 1989.
Guides de bonnes pratiques de l'AFNOR
Les fascicules de documentation (FD) disponibles sont :
- Guide 1 : Terminologie et type de boues (EN 12832 publié)
- Guide 2 : Utilisation ou élimination de boues (CR 13714)(publié sous l'indice FD X 33 011)(en révision en 2009)
- Guide 4 : Valorisation en agriculture (CR 13097)(publié sous l'indice FD X 33-008), (en cours de révision en groupe de travail européen).
- Guide 5 : Utilisation en reconstitution de sols (CR 13983)(publié sous l'indice FD X 33 016).
- Guide 6 : Incinération des boues (CR 13767)(publié sous l'indice FD X 33 014)
- Guide 7 : Co-incinération des boues avec des ordures ménagères (CR 13768) (publié sous l'indice FD X 33 015). Selon le représentant de l'Autriche au CEN/TC 308, la future réglementation européenne ne permettrait plus la co-incinération (cf. § 5.1).
- Guide 8 : Mise en décharge (TR 15126)(publié sous l'indice FD X 33 022)
- Guide 9 : Séchage des boues (TR 15473)(publication prévue sous l'indice FD X 33 047)
- Guide 10 : Hygiénisation, adopté (TR 15809), publication prévue sous l'indice FD X 33-048 (version corrigée par le GT 2 le 01/10/08).
- Guide 11 : Déshydratation
Liens externes
- Des innovations sur les boues d'épuration, Irstea 2017
- Documents relatifs aux boues d'épuration sélectionnés par le groupe de travail sur l'Évaluation des procédés nouveaux d'assainissement des petites et moyennes collectivités (EPNAC)
- La gestion des boues résiduaires : de l'étude de la matière molle à la valorisation de la matière organique, Baudez J.C., 2009, 78 p.