Selon la légende, la première kora était l’instrument personnel d’une femme-génie qui vivait dans les grottes de Missirikoro au Mali. Impressionné et ému par la musique de l’instrument, un grand chef de guerre, Tiramakhan Traore, décida d’en déposséder la femme-génie. Aidé de ses compagnons de chasse, Waly Kelendjan et Djelimaly Oulé Diabaté, il récupéra l’instrument qui échut à Djelimaly, le griot du groupe. Djelimaly la transmit à son fils Kamba. Et ainsi elle passa de père en fils jusqu’à Tilimaghan Diabaté qui l'introduisit au Mali.
Il ne faut pas confondre la kora avec d’autres instruments à cordes assez similaires tels le n'goni ou le bolon. La première description de la kora, appelée konting (confondue avec le luth ekonting) par les explorateurs des siècles derniers, évoquait un instrument à 10 cordes.
La kora est constituée d'une grosse demi-calebasse de 40 à Modèle:Unité de diamètre, évidée et percée d'un trou de Modèle:Unité de diamètre en guise d'ouïe (dans la partie supérieure droite). Deux autres trous (au-dessus et en dessous) permettent de faire passer le manche à travers la calebasse.
Elle est recouverte d'une peau de vache (ou de chèvre) parcheminée tendue mouillée, qui sert de table d'harmonie et dont dépend l'ampleur du son. Elle est maintenue par des clous de tapissier enfoncés dans la calebasse suivant des motifs variés, puis la peau est découpée. Une « traverse » (appelée barambando) et deux supports de mains (des poignées appelées bulkalamo) en bois servent de « barrages » (comme sur les guitares) et sont glissés sous la peau qui sera percée pour les laisser sortir.
Le manche long d'environ Modèle:Unité à Modèle:Unité assure la liaison entre les principaux éléments vibrants de la kora (cordes et calebasse). Il est fait traditionnellement d'une longue pièce de bois de vène appelée guénou ou guéni (palissandre du Mali) qui sert pour la fabrication des balafons, et est parfois orné de sculptures. Dans sa partie inférieure le manche traverse la calebasse. Dans sa partie supérieure, le manche assure la tension des cordes au moyen d'anneaux ou de clefs (mécaniques de guitare ou chevilles).
Les cordes de la kora reposent sur un grand chevalet en bois, maintenu sur la peau par la seule pression des cordes dont le nombre est généralement de 21. Cependant, on rencontre parfois des koras équipées de 22 à Modèle:Nombre, notamment en Pays Dogon au Mali, et il existe même un modèle spécial de Modèle:Nombre.
La plus grosse des cordes est appelée bajourou, ce qui signifie la mère-corde. Les boyaux d'autrefois ont été aujourd'hui remplacés par du fil de pêche de différents diamètres (de Modèle:Unité à Modèle:Unité - les cordes les plus basses sont parfois des tresses de fils de diamètre inférieur), voire des cordes de harpe chez les koristes professionnels. Les cordes sont traditionnellement accrochées au manche par des anneaux en peau de vache (ou de bœuf), serrés autour de celui-ci. Aujourd'hui, des chevilles en bois à friction ou des clés mécaniques (type guitare) peuvent équiper les koras afin de faciliter leur accordage. À l'autre extrémité, les cordes sont reliées par de la drisse à un cordier en passant par un chevalet en bois qui assure la liaison mécanique entre les vibrations des cordes et la peau<ref>La Kora - Les instruments du monde.</ref>.
Évolution de la fabrication
Dans sa facture traditionnelle, l’instrument se trouve limité par sa modalité fixe. La kora ne connaît pas de mécanique permettant le passage d'une tonalité à une autre : il faut jouer d'un bout à l'autre dans une gamme donnée. Ainsi, des améliorations techniques ont été réalisées par le frère bénédictin Dominique Catta de l’Abbaye de Keur Moussa pour permettre cette évolution de l'instrument.
De 1974 à 1982, le père Dominique Catta a effectué des modifications sur le profil de la hampe. Celle-ci a dû être allongée pour pouvoir disposer les 21 clés nécessaires. Or, lorsqu'une kora est accordée normalement, la hampe subit une pression de l'ordre de 200 à 250 kg, obtenue progressivement par la tension des cordes. Il a fallu prendre un bois plus dur pour éviter que la hampe ne cède.
Après 1982, des mécanismes de guitare sont ajoutés à la hampe pour régler la tension des cordes avec précision. Les clés de violon sont remplacées par des mécaniques de guitare à bain d'huile. Ces ajouts donnent la possibilité d’une kora « chromatique ». Aujourd’hui, un système permet de changer chaque corde d’un demi-ton.
le sila ba (« la grande route ») est le plus courant, et il consiste à alterner les notes de droite à gauche, comme pour la sanza, ce qui offre des successions de tierces de chaque côté du chevalet. C'est le mode le plus ancien qui est à l'origine de tous les autres. En Sénégambie, certains korafola appellent ce mode kéléfa ba en mémoire du grand guerrier Kaabunké (du royaume du Gaabu), défenseur des Korafola ; Kéléfa Saané et d'autres l'appellent tomora ba.Fichier:Kora, instrument de musique en pays Mandingue (appelé Griots) et utilisé aussi par les chasseurs traditionnel appelés Dozo 1.jpgKora, instrument de musique en pays Mandingue, utilisé par les griots et par les chasseurs traditionnels dozo.
si on rapproche l'accordage traditionnel de l'accordage occidental, on obtient les notes suivantes à la main gauche (de haut en bas) :
Cet accordage correspond à une gamme occidentale de fa majeur ;
le tomora est le deuxième mode d'accordage des griots, surtout utilisé en Gambie, parfois appelé tomora mesengo. Au Sénégal oriental il est aussi appelé diaka.
Ce mode comporte plus d'altérations, le la2, la3 et la4 deviennent respectivement lab2 (ou sol#2), lab3 et lab4. Il en est de même pour les trois mi qui se transforment eux aussi en mib. Les autres notes sont les mêmes que celles du sila ba.
Ce mode correspond à une gamme occidentale de mib majeur. L'intérêt principal de ce mode c'est qu'il permet de jouer facilement en mode dorien (fa mineur) ;
le troisième mode est appelé soit ardino, hardino, xardino ou encore sawta ou sauta, surtout utilisé au Mali et en Guinée.
Beaucoup de korafola ne le considèrent pas comme un mode d'accordage, d'autres plus catégoriques encore affirment que sawta est un morceau joué pour les cordonniers.
Les notes de ce mode sont donc celles du sila ba sauf que sib2 et sib3 deviennent respectivement si2 et si3 ce qui nous donne une gamme occidentale de do majeur.
Pour résumer : sila ba (fa majeur) - Tomora (mib majeur) - Sawta (do majeur).
Une nouvelle approche de la kora, qui prend ses racines dans les travaux des moines de l'Abbaye de Keur Moussa (Sénégal), est principalement incarnée par le Frère Dominique Catta, moine de Keur Moussa, et par le compositeur français Jacques Burtin. Le Frère Dominique Catta a introduit la kora dans la liturgie chrétienne à partir des années 1970 ; avec lui, la harpe africaine a dialogué pour la première fois de son histoire avec des instruments occidentaux<ref>Trois pièces pour kora et hautbois (Dédicace, Andante et Lumière d'aurore) furent ainsi enregistrées dans le disque vinyle Koras Concertantes en 1983 (originellement publié par le Monastère de Keur Moussa, cet enregistrement a réédité en CD par Studio SM en 1998).</ref>. Jacques Burtin, tout en prolongeant ces acquis, a également introduit la kora dans le monde de la création artistique contemporaine (dialogue avec les arts plastiques, création interdisciplinaire, musiques de scène).
La musique de la kora relevant de la tradition orale, aucune partition pour kora n’existait jusqu’à la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, à l’exception des transcriptions effectuées par les ethnomusicologues. Ces transcriptions étaient écrites sur deux portées (clefs de Sol et de Fa) afin de couvrir toute l’étendue de la kora.
Dans les années 1970, les moines de l'Abbaye de Keur Moussa (Sénégal) dont un atelier de restauration et de création d'instruments (2022)<ref>Un atelier de fabrication, dirigé par les moines, construit la Kora de Keur Moussa, véritable instrument de lutherie, qui a gardé l'essentiel de la kora traditionnelle, puisque les djélis mandingues n'hésitent pas à interpréter leur répertoire sur les koras sorties de l'atelier des moines. Des méthodes et des partitions ont été publiées par leurs soins.</ref>, mirent au point un système d’écriture sur une seule portée, afin de rendre plus accessible l’étude de l’instrument. Les sept notes graves furent remplacées par des chiffres arabes pour les cinq notes jouées par la main gauche (Fa1, Do2, Ré2, Mi2, Sol2), et des chiffres romains pour les deux notes jouées par la main droite (Fa2, La2).
Ce système de notation, lié à la méthode d’enseignement développée par les moines, ouvrit la pratique de la kora à des musiciens venus d’horizons géographiques et culturels très différents. Des compositeurs se penchèrent sur l’instrument et commencèrent à écrire une littérature spécifique. À l’heure actuelle, plus de deux cents pièces ont été écrites pour la kora : pièces en solo, duos avec des instruments occidentaux, musique d’ensemble pour plusieurs koras<ref>Les principaux compositeurs qui ont écrit pour la kora sont le Frère Dominique Catta, la canadienne Carole Ouellet et le français Jacques Burtin.</ref>.
Bibliographie
Eric Charry, Mande Music : Traditional and Modern Music of the Maninka and Mandinka of Western Africa, University of Chicago Press, 2000. Modèle:ISBN
Ousmane Sow Huchard, La kora : objet-témoin de la civilisation manding : essai d'analyse organologique d'une harpe-luth africaine, Presses universitaires de Dakar, Dakar, 2000, 539 p. Modèle:ISBN
Kora malinké : Sénégal, enregistrements réalisés par Charles Duvelle, Universal Division Mercury, 2003, 1 CD (46 min 63 s) + 1 brochure (23 p.)
Instruments traditionnels du Mali : la Kora, le Djembé, le N'goni, le Tamani, le N'djarka, la flûte peule. Musiques traditionnelles bambaras (CD, K7, VHS), A.T.A AUDIOVISUEL DRAME, 2000.
Mali : "Cordes Anciennes" Camara Production. CK7 (1991)
Gambie : l'art de la kora, par Jali Nyama Suso, instrumentiste, et Roderic Knight, collecteur, Radio-France, Paris ; Harmonia mundi, Arles, 1996, 1 CD (69 min 11 s) + 1 brochure (40 p.)
Mali : Toumani Diabaté et sa Cora : sélection de clips par CAMARA PRODUCTION (CD, K7, VHS, DVD) 1995
Guinée : chant et Kora, par Prince Diabaté, Amara Sanoh "Lamaranaa", interprètes, et Stéphane Larrat, collecteur, Buda musique, Adès, Paris, 1 CD (68 min 29 s) + 1 brochure (20 p.)
Sénégal, Messe & Chants au Monastère de Keur Moussa, par les Moines de Keur Moussa, Arion, 2010
Mali : Musique mandingue en clips ( KALITEX productions ) 2014
Le Jour des Merveilles, par Jacques Burtin, 3 Cd Box Set, Bayard Musique, 2009
Mali : Ballaké Sissoko (F.C.A NDH Productions) 2008