Résilience (psychologie)
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La résilience est un phénomène psychologique qui consiste, pour un individu affecté par un traumatisme, à prendre acte de l'événement traumatique de manière à ne pas, ou plus, vivre dans le malheur et à se reconstruire d'une façon socialement acceptable. La résilience serait rendue possible grâce à la structuration précoce de la personnalité, par des expériences constructives de l'enfance (avant la confrontation avec des faits potentiellement traumatisants) et parfois par la réflexion, ou la parole, plus rarement par l'encadrement médical d'une thérapie.
Étymologie
De l'anglais resilience<ref>Modèle:Lien web.</ref> qui vient du verbe latin resilio, ire, littéralement « sauter en arrière », d'où « rebondir, résister » (au choc, à la déformation)<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
Origines du concept
La résilience est, à l'origine, un terme utilisé en physique qui caractérise l'énergie absorbée par un corps lors d'une déformation (« Essai Charpy »)
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, le mot désigne plus rarement une qualité humaine, tel qu'utilisé par André Maurois dans son roman Lélia ou la vie de George Sand : « Dans ce deuil, une fois encore, elle étonna ses amis par son immédiate résilience » (Maurois, 1952, p.469)Modèle:Refnec.
Dans le domaine de la psychologie, Werner et Smith, deux psychologues scolaires américaines à Hawaï, débutent en 1954 une étude longitudinale avec des enfants à risque psychopathologique, condamnés à présenter des troubles. À l'occasion d'un suivi effectué pendant trente ans, elles notent qu'un certain nombre d'entre eux « s'en sortent » grâce à des qualités individuelles ou des opportunités de l’environnement<ref>Werner, E. E. (1971). The children of Kauai : a longitudinal study from the prenatal period to age ten. Honolulu: University of Hawaii Press, Modèle:ISBN.</ref>.
La notion de résilience est apparentée à la notion de « coping »<ref>Modèle:Lien web. Auteur : Isabelle Paulhan (1961-1994) in l'Année Psychologique (p. 545-557).</ref>,<ref>Modèle:Lien web. Auteurs : Isabelle Paulhan (1961-1994) et Marc Louis Bourgeois. Modèle:ISBN).</ref> (en anglais to cope = se débrouiller, s'en sortir, faire face, s'ajuster. En français, on parle de stratégies d'adaptation). La résilience permet de dépasser son état actuel.
Après avoir été théorisé par Modèle:Lien, Michael Rutter, ou encore John Bowlby, qui a introduit le terme dans ses écrits sur l'attachement, en France, c'est Boris Cyrulnik qui, à la fin des années 1990, médiatise le concept de résilience en psychanalyse, à partir de l'observation des survivants des camps de concentration, puis de divers groupes d'individus, dont les enfants des orphelinats roumains et les enfants boliviens de la rue<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. Auparavant, on parlait d'« invulnérabilité ».
Actuellement, des groupes de travail étendent le concept à d'autres situations difficiles comme celles que vivent les aidants des malades d'Alzheimer<ref name="Polydor J-P">Polydor J-P, Alzheimer, mode d'emploi, le livre des aidants, préfacé par Madeleine Chapsal, prix Femina, L'esprit du temps Édition, 2009 Modèle:ISBN.</ref>. Dans la maladie d'Alzheimer, les applications passent par le paradigme que la communication (théâtralisation par les aidants) est source de résilience des aidants et le concept est développé en France depuis le début des années 2000 (Jean-Pierre Polydor)<ref name="Polydor J-P" />.
Dans le domaine de l'assistance aux collectivités en cas de catastrophe (naturelle ou causée par l'homme), on parle également de communautés résilientes. La démarche d'assistance post-immédiate aux personnes touchées par un évènement critique a généralement une dimension psychosociale.
La résilience serait le résultat de multiples processus qui viennent interrompre des trajectoires négatives et contrer la vulnérabilité psychologique liée à l'histoire traumatique de l'individu<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>.
Processus
La résilience est dynamique. À partir de problèmes, qui peuvent relever du quotidien ou de chocs très graves, l'individu va déclencher des mécanismes qui vont l'amener tout d'abord à résister, puis possiblement à s'adapter, et parfois à connaître une croissance post-traumatique<ref>Modèle:Lien web</ref>. Parmi les processus qui contribuent à la résilience, on a pu en repérer huitModèle:Citation nécessaire :
- La défense-protection ;
- l'équilibre face aux tensions ;
- l'engagement-défi ;
- la relance ;
- l'évaluation ;
- la signification-évaluation ;
- la positivité de soi ;
- la création.
- le dépassement de soi
Cette résilience peut être aidée, notamment par des professionnels; on parle alors de résilience assistée<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.
Toutefois, les recherches montrent que les personnes qui ont surmonté un choc manifestent bien souvent à la fois des signes de résilience et d'altération de leur vision de l'avenir ou du monde.
Résilience dans le cadre du couple
Modèle:Source douteuse Dans son ouvrage Parler d'amour au bord du gouffre<ref> Éd. Odile Jacob, Paris, 2004.</ref>, Boris Cyrulnik affirme que le « couple peut panser les blessures de l'enfance ».
Conjugaison affective
À condition de trouver la « conjugaison affective » adéquate, l'amour peut agir comme moyen de gommer des représentations négatives de soi et constituer une thérapie reconstructrice.
Dans cette conjugaison, le hasard aurait moins de place qu'il n'y parait : le fondement du couple se construisant dans la réponse à la question : « Qui suis-je pour me faire aimer ? ».
Ainsi « Monsieur Peurdeperdre aime Madame Jaimelavie : la présence de Madame sécurise Monsieur qui dynamise Madame »<ref>« Le ressort de la Résilience », La Croix, 30 novembre 2012, Modèle:P..</ref>.
Est-ce l'amour qui permet la résilience ou la résilience qui permet l'amour ? Boris Cyrulnik explique que finalement les deux se renforcent mutuellement: « L'humain ne peut vivre et se développer que si un autre met son empreinte sur lui ».
Tuteur de résilience
Le premier amour est important lorsqu'il survient à l'adolescence, lorsque le jeune éprouve sa capacité de sensibilité à de nouvelles informations : ce premier amour peut être pour certains adolescents l'occasion de réparer une représentation négative de soi. Les schémas initiaux ne sont davantage répétés comme une malédiction implacable. Cette première expérience de l'amour pourra constituer une thérapie réparatrice. Plus tard d'autres (la famille, les enfants, les amis) pourront relayer et compléter cette fonction tutorale.
Pour Boris Cyrulnik, l'adulte Modèle:Incise est celui qui aura appris « à aimer dans la gaieté et le respect de l'autre dans un système à poly-attachement : papa, maman, mais aussi les grands-parents, les cousins, les amis des parents. »
Résilience dans l'enseignement
La résilience est au cœur du projet enseignant, en ce qu'elle permet à l'élève de surmonter ses difficultés personnelles pour s'appuyer sur les ressources que lui apporte l'école et s'épanouir. Mais l'école doit de son côté favoriser la résilience pour accomplir sa mission d'émancipation.
Cela suppose que les enseignants s'appuient sur les forces de leurs élèves plutôt que de pointer leurs faiblesses, sans rien renier de leurs exigences, car elles seules montrent la valeur de chaque victoire obtenue par l'élève. L'école peut aussi être un lieu de réinsertion dans une société dans laquelle l'élève pourrait reconstruire sa confiance en les autres. La difficulté est d'impliquer dans ce parcours les autres acteurs de l'entourage de l'élève, notamment sa famille.
Plusieurs dispositifs ont été essayés, mais on en est encore aux débuts de la prise en compte de cette dynamique dans l'enseignement<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Symbolique de la résilience
L'art du kintsugi, l'art traditionnel japonais qui consiste à réparer un objet cassé en soulignant ses cicatrices avec de l'or au lieu de les cacher, est souvent utilisé comme métaphore de la résilience en psychologie et en développement personnel<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
Dans la littérature d'enfance et de jeunesse
Peu d'ouvrages destinés à la jeunesse évoquent ce thème de résilience. En 2018, le Prix Sorcières, décerné par l'Association des librairies spécialisées jeunesse (ALSJ), en partenariat avec l'Association des bibliothécaires de France (ABF) récompense, dans la catégorie Carrément sorcières - Fiction<ref name="sorcieres2018">Lauréats 2018 du Prix Sorcières, site officiel abf.asso.fr..</ref>, l'album de fiction Cœur de bois (éd. Notari, 2016), écrit par Henri Meunier, et illustré par Régis Lejonc. Cet album est leur cinquième collaboration en quinze ans<ref name=coeurboissorcieres/>. Pour Régis Lejonc : Modèle:Citation<ref name=coeurboissorcieres>« Régis Lejonc et Henri Meunier : «Nous avons une confiance totale l'un envers l'autre.» », article du site des Librairies Sorcières, du 29 août 2017.</ref>. L'ouvrage est également « coup de cœur » 2017 du Centre national de la littérature pour la jeunesse - La Joie par les livres, qui écrit dans son avis critique : « Dans un langage subtil à décoder, justement parce qu'ils se jouent des codes, les auteurs nous entraînent sur les terres de l'intime. L'illustration est puissante, sombre »<ref name="coeurboisbnf">Notice de l'ouvrage Cœur de bois, et avis critique (« coup de cœur ») du Centre National de Littérature pour la Jeunesse (CNLJ), sur le site de la BnF.</ref>. Selon l'avis critique du site de référence Ricochet, Modèle:Citation<ref name=coeurdeboisricochet>Emmanuelle Pelot, avis critique de l'ouvrage Cœur de bois, site ricochet.jeunes.org..</ref>.
Critique de la résilience
Au-delà de l'intérêt théorique et clinique de disposer d'une telle notion, la résilience est également l'objet de certaines critiques. L'essentiel de ces critiques porte sur la mésinterprétation profonde du terme, sa sur-utilisation et sa sur-médiatisation.
Le psychiatre Serge Tisseron pointe dans un premier temps un écart linguistique, sémantique et culturel. Pour lui, Modèle:Citation<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Se montrant prudent face à l'« extraordinaire engouement que connaît la France pour ce concept », Tisseron met en garde, dans un second temps, contre l'abus de langage qui consiste à étiqueter sous la houlette de résilience, tout comportement ou réaction adaptative sans distinction aucune.
Un autre type de critique porte sur la sur-médiatisation du terme, qui est par ailleurs largement passé dans le langage courant. Le mot résilience est connu du grand public et peut parfois perdre le sens psychologique profond qu'il revêt. Au-delà, le risque majeur de la sur-médiatisation peut se décliner en une forme de désirabilité sociale, où toute personne atteinte d'un traumatisme devrait nécessairement connaître un parcours résilient. On comprend alors que la notion de résilience peut avoir ce double-tranchant : être à la fois vecteur d'espoir mais aussi comporter un caractère « excluant » et « culpabilisant ». La résilience a parfois un effet néfaste chez des personnes en proie à un traumatisme et qui ne semblent pas manifester de rétablissement ou de changement positif.Modèle:Citation bloc
Le philosophe Ruwen Ogien est plus sévère encore. Il range la résilience dans le champ des concepts vagues, moralisateurs et même nocifs : Modèle:Citation bloc
Dans une autre perspective, on pourrait reprocher à la résilience son manque d'intérêt intégratif pour d'autres notions voisines, comme la croissance post-traumatique. Issue d'un autre champ théorique (psychologie positive), elle intègre pourtant tout un ensemble de processus psychologiques fort intéressants et qui concerne la résilience dans une certaine mesure.
Bibliographie
Modèle:Bibliographie à wikifier
- Céline Santini (2018), Kintsugi, l'art de la résilience, édition First Modèle:ISBN.
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- Hélène Lefebvre, Bernard Michallet, (sous la direction de). (2009-2010), Résilience : pour voir autrement l’intervention de réadaptation. Revue Développement Humain, handicap et changement social, vol. 19, n° 1. 2011, 214 pages Modèle:ISSN
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- Ouvrage collectif, Résilience, vieillissement et maladie d'Alzheimer, Solal, 2007 Modèle:ISBN
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- Boris Cyrulnik :
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- Un merveilleux malheur, Odile Jacob, 1999 Modèle:ISBN
- Parler d'amour au bord du gouffre, Odile Jacob, 2004 Modèle:ISBN
- Le Murmure des fantômes, Odile Jacob, 2005 Modèle:ISBN
- Autobiographie d'un épouvantail, Odile Jacob, 2008 Modèle:ISBN
- Boris Cyrulnik et Claude Seron (dir.), La résilience ou comment renaître de sa souffrance, Fabert, coll. Penser le monde de l'enfant, 2004 Modèle:ISBN
- Bruno Humbeeck. Ed. Mols, coll " Être et conscience / Les outils de la résilience " (livres illustrés par Maxime Berger) :
- L'estime de soi pour aider à grandir, 2010 Modèle:ISBN
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- Jacques Lecomte, Guérir de son enfance, Odile Jacob, 2004.
- Jacques Lecomte et Stefan Vanistendael, Le bonheur est toujours possible. Construire la résilience, Bayard, coll. « Psychologie » Modèle:ISBN
- Evelyne Josse, Le Traumatisme psychique : chez l'adulte Modèle:2e éd., DE BOECK, coll. ouvertures psychologiques, Modèle:ISBN
- Michael Rutter, L'Enfant et la résilience, « Le Journal des psychologues », 162 (1998).
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- Pierre-Yves Brissiaud, La Face cachée de la résilience, Éditions Jouvence 2008 Modèle:ISBN
- Pierre Lemarquis, Sérénade pour un cerveau musicien, Odile Jacob (sur la résilience par la musique, présenté par Boris Cyrulnik)
- Robert Brooks - Sam Goldstein Le pouvoir de la résilience, Les éditions de l'homme 2006 (2-7619-2022-8)
- Jean-Pierre Polydor, Alzheimer, mode d'emploi, le livre des aidants (préfacé par Madeleine Chapsal, prix Femina), L'esprit du temps Édition, 2009 Modèle:ISBN
- Kunthear Laut, Quand se tait le silence, une vie de femme cambodgienne (postface par René Soulayrol, préface Pierre Gazin), Grandvaux, 2013 Modèle:ISBN
- Thierry Ribault, Contre la résilience à Fukushima et ailleurs, Paris, L'échappée, 2021.
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- Maurice et Marianne : Tricotages, documentaire TV avec Boris Cyrulnik, 2008
Littérature jeunesse
- Album de fiction
- Pierre Hédrich, Galou (illustrations), "La tache Rouge", ed Pour Penser, 2009
- Henri Meunier (texte), Régis Lejonc (illustrations), Cœur de bois<ref name=coeurboissorcieres/>,<ref name=coeurdeboisricochet/>, éd. Notari, 2016 Modèle:Commentaire biblio
Notes et références
Voir aussi
Articles connexes
- Réactance
- Résilience écologique
- Résilience communautaire
- Stress post-traumatique
- Trouble de stress post-traumatique
- Kintsugi
- I Survived…
Liens externes
- « Résilience » ou la lutte pour la vie, critique du concept,
- Les pièges de la « résilience »,
- Association Résilience,
- Résilience, dans le Site francophone de psychologie positive.,
- France Inter,
- Europe 1, Kintsugi, l'art de la résilience.,
- Résilience Perspective historique, défis théoriques et enjeux cliniques, par Bernard Michallet, Ph.D., codirecteur du GIRAFE-CRIR,
- Exposé sur la résilience, par Georges Hudine.