Reprise individuelle

La reprise individuelle est une forme d’action directe consistant pour un individu à voler des biens dans le but d’obtenir une redistribution des richesses des riches vers les pauvres. Ce concept a pris une importance particulière au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle à la suite d'actes d’anarchistes illégalistes tels que Ravachol et Clément Duval, pour qui de telles expropriations étaient légitimes à cause de l’exploitation de la société par les capitalistes. Le soutien à cette théorie est particulièrement localisé en France, en Belgique et en Suisse.

Concept

La reprise individuelle consiste à commettre un vol, conçu comme une réappropriation des biens par des personnes qui se considèrent volées par les classes dominantes<ref name=":0">Modèle:Chapitre</ref>. L'idée est soutenue par Sébastien Faure, mais les intellectuels anarchistes s'en éloignent généralement<ref name=":0" />.

Une frange marginale de l’anarchisme individualiste européen en tire le concept de reprise individuelle comme un moyen de mettre fin à ce qu’ils considèrent comme le vol des travailleurs par les capitalistes, les politiciens et l’Église. L’expropriation individuelle est ainsi perçue comme une résistance légitime contre un ordre social injuste et comme un droit éthique à redistribuer les richesses.

Historique

Origines

En 1840, l’anarchiste français Pierre-Joseph Proudhon écrit Qu’est-ce que la propriété ?, question à laquelle il répond par la formule devenue célèbre : « la propriété c'est le vol ». Ainsi, Proudhon considère que la propriété privée ne peut résulter que du travail individuel et que toute autre richesse est volée<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. Cette vision de l’économie est en ligne avec l’idée de propagande par le fait du Russe Mikhaïl Bakounine, lequel considère la violence physique contre les adversaires politiques comme un moyen d’inspirer les masses<ref name=":1">Modèle:Article</ref>.

Gain de popularité

La reprise individuelle prend son nom à la fin des années 1880<ref name=":0" />, notamment par des braquages de banques<ref>Modèle:Ouvrage</ref>, malgré une baisse d'activité depuis la répression de la commune de Paris<ref name=":2">Modèle:Article</ref>. En 1880 à Vevey et en 1881 à Londres, des congrès anarchistes soutiennent l'illégalisme et la pratique du vol comme reprise par le pauvre de ce que le riche lui a volé, ou expropriation à fins de justice sociale<ref name=":3">Modèle:Ouvrage</ref>. En 1885, Jean Grave publie dans Le Révolté une critique du vol, estimant que le voleur est un parasite jouissant de la vie sans travailler, comme le bourgeois<ref name=":3" />, comme Jules Guesde<ref name=":1" />.

En octobre 1886, Clément Duval, membre du gang des Panthères des Batignolles, est arrêté et jugé pour cambriolage. Il se défend en affirmant qu'il n'est pas voleur, mais qu'il s'est contenté de restituer le droit de la propriété<ref name=":0" />. Adolescent, Marius Jacob qualifie le vol de Modèle:Citation<ref>Modèle:Article</ref>; lui-même est plus tard arrêté pour vol, mais a redistribué le fruit de ses cambriolages aux activités anarchistes ou à des personnes pauvres<ref name=":3" />.

Les débats qui naissent de la question de la reprise individuelle poussent à la constitution de l'anarchisme individualiste au début du vingtième siècle. Deux formes d'anarchisme individualisme s'opposent : d'un autre côté, la violence armée et la reprise individuelle, et de l'autre une révolte contre les conventions sociales en faveur de l'expression de soi libre<ref name=":4">Modèle:Article</ref>.

Au Japon, la reprise individuelle est une pratique qui bat son plein dans les années 1920 et 1930, tandis que les antifascistes italiens exportent l'anarcho-banditisme en Argentine dans les années 1920. La Confédération nationale du travail estime que l'illégalisme est toléré s'il est commis au service de l'organisation, mais pas de façon individualiste<ref name=":3" />.

Déclin

La reprise individuelle est vue comme une esthétisation de la politique anarchiste, par exemple par Laurent Tailhade. En 1906, l'anarcho-individualisme recrute dans les milieux artistiques et l'anarchisme tend à devenir une esthétique plus qu'une méthode viable<ref name=":4" />.

En 1910, les membres de la bande à Bonnot manient l'idée de la reprise individuelle pour leur défense. Leur arrestation et leur procès marquent la fin de la popularité du concept en France, en parallèle d'événements similaires à Londres, et la reprise individuelle disparaît presque entièrement des pratiques anarchistes en Europe<ref name=":2" />. Rirette Maîtrejean écrit qu'elle ne voit pas l'intérêt de l'illégalisme après avoir été emprisonnée pour sa participation à la bande à Bonnot, les risques étant bien plus importants que les avantages<ref name=":3" />.

Analyses

Élisée Reclus et Paul Reclus soutiennent les anarchistes illégalistes<ref name=":1" />. Errico Malatesta différencie les voleurs selon leur motivation : Modèle:Citation<ref name=":3" />

La méthode du vol pour la propagande par le fait est critiquée par Malatesta, qui estime qu'elle ouvre la porte à la corruption et à la méfiance entre compagnons, facilitant l'espionnage et les dénonciations<ref name=":3" />. Jean Maitron affirme que la reprise individuelle ne constitue aucun danger pour l'ordre établi, et envoie ceux qui s'y essaient à des sanctions lourdes<ref>Modèle:Article</ref>.

Postérité

Le personnage de Robin des Bois effectue une reprise individuelle<ref name=":3" />.

Voir aussi

Articles connexes

• Anarchisme
• Anarchisme insurrectionnaliste
• Illégalisme
• Jules Bonnot
• Banditisme révolutionnaire
• Yomango

Bibliographie

• Jean Maitron, Le mouvement anarchiste en France, Gallimard, coll. « Tel », 1992 Modèle:ISBN Modèle:Plume
• Jean Maitron, Ravachol et les anarchistes, Gallimard, Modèle:Coll., 1992 Modèle:ISBN Modèle:Plume
• Jean Préposiet, Histoire de l'anarchisme, Tallandier, coll. « APPROCHES », 2005 Modèle:ISBN Modèle:Plume

Radio

• Jean Lebrun, Philippe Pelletier, Les anarchistes : le moment terroriste, et après ?, France Inter, Modèle:Date-, écouter en ligne.