Kitarō Nishida

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Modèle:Infobox Philosophe Modèle:JaponaisModèle:Note est un philosophe japonais, père spirituel du mouvement philosophique baptisé École de Kyōto. Dans le contexte politique de l'Ère Taishô marqué par la recherche d'une nouvelle identité nationale, Nishida a élaboré, avec la rigueur de la philosophie occidentale et à partir des spiritualités orientales une « philosophie japonaise » originale qui s'inscrit dans la sensibilité nippone et reste d'une grande actualité au Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle.

Il laisse une œuvre immense, connue principalement pour sa métaphysique mais abordant bien d'autres domaines, qui restent encore à explorer. Les recherches concernant son œuvre tiennent une place importante au Japon et montrent, à travers la bibliographie des traductions et des commentaires, un intérêt constant en Asie, Europe et Amérique du Nord<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Biographie

Modèle:Exergue Issu d'une vieille famille de l'aristocratie guerrière, Nishida a passé une enfance privilégiée. Sa mère, Tosa, lui a transmis une éducation bouddhiste. Il a demandé à plusieurs reprises à son père Yasunori de fréquenter une école secondaire à Kanazawa, mais le père repoussait sa demande, craignant que cela ne l'éloigne de la charge au bureau de la mairie à laquelle il espérait que son fils lui succède. Lorsqu'il accède finalement aux requêtes du jeune Nishida pour l'école secondaire, sa constitution fragile le contraint finalement à prendre des leçons privées.

Fichier:Nishida Kitarōs Grab in Kamakura.jpg
Tombe de Kitarō Nishida à Kamakura

De 1886 à 1890, Nishida a ensuite fréquenté une autre école, l'Ishikawa Semmongakkō. En réaction au contenu politique de l'enseignement qu'il désapprouve, Nishida pratique une forme de résistance passive qui est sanctionné d'un redoublement pour «mauvais comportement», et le conduit à quitter à nouveau l'école.

En 1891, il commence à étudier la philosophie à l'Université impériale de Tokyo. Il est contraint de suivre un cours de mise à niveau en raison de son manque de diplôme d'études secondaires, ce qu'il vit comme une humiliation et le conduit à se replier de plus en plus sur lui-même. Toutefois, l'arrivée de Raphael von Koeber en 1893 à l'université le conduit à se familiariser avec la philosophie grecque et européenne médiévale ainsi qu'avec les œuvres de Schopenhauer. Dans le cours de littérature allemande de Karl Florenz, il a pour camarade l'écrivain Natsume Sōseki. Il termine ses études peu avant le déclenchement de la première guerre sino-japonaise avec un travail sur David Hume.

En Modèle:Date-, Nishida épouse sa cousine Tokuda Kotomi, avec laquelle il a huit enfants, dont certains meurent toutefois en bas âge. En 1896, il devient enseignant dans son ancienne école de Kanazawa. L'année suivante, il commence à apprendre la méditation zen, probablement inspirée par son camarade de classe et ami D.T. Suzuki. En Modèle:Date-, au cours de son séjour dans le temple Taizo-in à Kyôto, qu'il a visité au cours d'une retraite de méditation zen, son professeur Hôjô Tokiyoshi lui offre un emploi au lycée de Yamaguchi, qu'il accepte sans hésitation.

Remarqué pour son essai Modèle:Harvsp, il lui est proposé en 1910 un poste à l'Université impériale de Kyôto. Nishida y développe sa philosophie qui sera le fondement de l'École de Kyōto. Il prend sa retraite en 1928, mais continue de travailler à développer sa philosophie.

Modèle:Encadré texte L'Ère Taishô (1912-1926) favorise la recherche d'une nouvelle identité japonaise selon le mot d'ordre « âme japonaise, technique occidentale » (Modèle:Langue) et développe le tennôcentrismeModèle:Note impérialiste. Nishida est impliqué dans les débats politiques de cette période, mais se désolidarise des intellectuels populistes qui avaient influencé sa jeunesse lorsqu'ils développent l'« ultranationalisme »<ref name=MD2223/>,<ref>Modèle:Harvsp</ref>. En 1936, Nishida est associé au « Comité pour la réforme de l'éducation » et s'en retire rapidement<ref>Modèle:Harvsp</ref> ; en 1937, à la demande du gouvernement militaire, il écrit un essai pour la Conférence de la Grande Asie de l'Est ; en 1940, il reçoit l'Ordre culturel japonais. Il perd un fils dans le cadre de la guerre avec la Russie et condamne militarisme, totalitarisme et impérialisme<ref name=MD2223>Modèle:Harvsp</ref>.

Nishida décède le Modèle:Date- à Kamakura d'une maladie des reins. Sa tombe est située dans le cimetière du temple Zen Tokei-ji.

À Kyōto, il est encore possible de parcourir le chemin qu'empruntait Kitarō Nishida tous les jours, baptisé « chemin de la philosophie ».

L'intellectuel et l'écrivain

Portrait intellectuel et culturel

Modèle:Exergue Nishida fut tout au long de sa vie un insatiable lecteur, sa bibliothèque personnelle renferme plus de Modèle:Nombre en langues occidentales, 561 en japonais et 886 en chinois (qu'il lit dès l'enfance), ouvrages de philosophie et de sciences. Ses premiers ouvrages contiennent un foisonnement de citations, utilisant différentes langues (français, latin, allemand, grec, chinois), d'auteurs qu'il lit dans leur langue d'origine (sa carrière universitaire commença comme professeur d'allemand à l'université de Tokyo<ref name=MDANFRAC1517>Modèle:Harvsp</ref>). Ses lectures lui fournissent un pré-texte, une idée, dont il se sert ensuite pour démontrer que les oppositions rencontrées chez un auteur, ou entre différents auteurs, ne sont qu'apparentes et qu'une unification est possible<ref>Modèle:Harvsp</ref> Modèle:Encadré texte

C'est la philosophie occidentale qu'il travaille et enseigne ensuite à l'université de Kyôto : principalement l'histoire de la philosophie, la logique, l'épistémologie, la théorie de la connaissance, et dans une moindre mesure, la religion, l'esthétique et la morale (ces derniers domaines n'étant alors que récemment identifiés comme tels au Japon). Il lit Bergson, correspond avec Heinrich Rickert et Husserl (qu'il fait connaître au Japon) et se tient au courant de la recherche philosophie en Allemagne par l'intermédiaire de plusieurs de ses étudiants qui rencontrent en particulier HeideggerModèle:Note,<ref name=MDANFRAC1517/>. Lui-même n'a cependant jamais quitté le Japon.

Il apparaît également comme un « mathématicien manqué »<ref>Modèle:Harvsp</ref> : c'est en effet après avoir envisagé des études universitaires en mathématiques qu'il choisit de s'orienter vers le département de philosophie de Tôkyô où il bénéficie d'un enseignement général en philosophie, lettres et sciences. Il entretint cependant toute sa vie avec le monde scientifique des relations qui nourrissent, avec ses lectures (Bridgman, Cantor, Einstein, Planck, Poincaré...) sa réflexion épistémologique, et Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Interrogé par le gouvernement, il propose ainsi d'inviter au Japon Albert Einstein comme penseur occidental le plus éminent, et participe à sa réception à l'université de Kyôto en décembre 1922 dans une rencontre qui fut très stimulante par ses implications philosophiques<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Nishida pratique la méditation assise (zazen) et il aurait expérimenté l'éveil avec son maître Setsumon Genshô à partir d'un kōan sur le vide ou néant Modèle:Langue<ref name=MDANFRAC1517/>. Le bouddhisme du Grand Véhicule (avec les écoles Kegon, Terre pure, Zen) marque sa pensée avec Dôgen et Nāgārjuna qu'il cite parfois, avec aussi le confucianisme, le taoïsme, le shintô. Nishida est ainsi à la fois l'un des plus éminents philosophes émergents du Japon de cette époque, et l'un des derniers « monuments » de la culture sino-japonaise classique. Ces influences orientales restent pourtant souterraines et les références explicites sont rares, et certains raisonnements nécessitant l'éclairage du Zen ou de l'école Kegon peuvent être difficilement accessibles au lecteur occidental<ref name=ART13>Modèle:Harvsp</ref>.

Pendant l'Ère Meiji, le rejet des religions traditionnelles antérieures est présenté comme l'essence de la modernité. Mais le bouddhisme reste le socle mental de nombreux intellectuels et le bouddhisme connaît malgré tout un vif développement de sa pensée. C'est dans ce contexte que Nishida, comme Natsume Soseki, considère que le bouddhisme est capable de rivaliser avec le christianisme<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Dans le zen, D. T. Suzuki met en avant la recherche d'une « fusion de soi et du cosmos » et l'exaltation du vivant, thèmes que Nishida reprendra<ref name=FS29>Modèle:Harvsp</ref>.

Il éprouve un intérêt réel pour les arts en pratiquant la calligraphie et composant des poèmes, il s'intéresse aux écrits de Konrad Fiedler, mais l'art n'a jamais constitué une véritable discipline philosophique<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Sa pensée politique fut influencée dans sa jeunesse par celles des populistes Tokutomi Sohō et Chōmin Nakae qu'il condamne cependant par la suite, prenant ses distances avec l'ultranationalisme. Un courant dissident se forma au sein de l'École de Kyōto reprochant à Nishida le caractère « bourgeois » de sa pensée philosophique<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

La langue, le style

Modèle:Exergue

Le style de Nishida est intrinsèquement lié à sa pensée et décourage parfois les commentateurs qui le présentent Modèle:Citation, certains évoquant Modèle:Citation<ref name=BSART25>Modèle:Harvsp</ref>... Il procède par circonvolutions, mais reste extrêmement logique, précis et clair. « sa pensée (...) explore tous les possibles sans jamais perdre de vue ses buts »<ref>Modèle:Harvsp</ref>. La remarque générale, plus lyrique, de Bernard Stevens à propos de ces œuvres philosophiques Modèle:Citation est particulièrement représentative de l'écriture de Nishida, qui déclarait Modèle:CitationModèle:Note, surtout pour les essais de sa deuxième période, plus métaphysiques, Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Dans l'enfance de Nishida, seul le chinois classique était enseigné à l'école primaire, et il ne reçut d'enseignement du japonais qu'au lycée. Comme de nombreux japonais ayant reçu cette éducation, mal à l'aise dans leur propre langue écrite, il s'inscrit dès le début de son parcours universitaire dans un mouvement d'unification de la langue parlée et de la langue écrite<ref>Modèle:Harvsp</ref> qui lui permet de transmettre les méandres de sa pensée encore en formation. Nishida fournit dans cinq courts essais concernant « l'accord du style parlé et de la langue écrite » quelques indications sur sa manière de rédiger dans ce Modèle:Langue<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Encadré texte Le système philosophique de Nishida s'appuie sur les caractères propres à la grammaire japonaise, marquée par la spatialité et la « figurabilité », plutôt que sur les grammaires hollandaise et anglaise exprimant les systèmes occidentaux. La grammaire japonaise lui permet par l'usage de particules casuelles d'exprimer le jugement de subsomption dans la « logique du lieu » Modèle:Langue. Le mode de connaissance subsomptif est ainsi situé dans le « lieu » de la conscience : l'accent est par là mis sur la spatialité du prédicat, développant une « logique prédicative » qui n'a pas d'équivalent dans la phrase occidentale<ref>Modèle:Harvsp</ref>,Modèle:Note.

Hideo Kobayashi, critique littéraire, a cependant qualifié les formules de Nishida de « système bizarre » et Yûjirô NakamuraModèle:Note explique ce sentiment par un certain isolement du philosophe, engendrant un « système qui, sans pouvoir être écrit en japonais, ne peut l'être non plus en langue étrangère »Modèle:Note. Une raison plus profonde serait que Nishida tente d'exprimer sur le mode occidental du sujet (noème) une pensée orientale du prédicat (noèse) : ce système serait ainsi né d'une tentative de faire violence à la langue japonaise pour la transcrire dans un langage à l'occidentale<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Nishida commence à élaborer le vocabulaire de sa philosophie dès la première période, mais c'est dans la deuxième qu'il le développe réellement<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Le Modèle:Langue s'oppose au style écrit classique, et permet à Nishida de créer de nombreux néologismesModèle:Note à partir des caractères chinois, allant au-delà de la seule assimilation des concepts de la philosophie occidentale. Ce style moderne atteignit son plein développement dans les années 1920 sous l'influence des théories littéraires occidentales et recèle en effet un potentiel d'expression important qui lui offre ainsi une liberté d'expression plus grande que les styles classiques. Il développa une syntaxe qui lui est propre en déconstruisant la langue classique et en créant de nouvelles structures syntaxiques incorporant des terminaisons verbales aujourd'hui désuètesModèle:Note et la compréhension de ce nouveau vocabulaire nécessite donc aujourd'hui une connaissance approfondie des linguistiques chinoise et japonaise pour interpréter certaines combinaisons de caractèresModèle:Note.

Trois périodes créatrices

Modèle:Exergue Les exégètes de Nishida s'accordent généralement pour distinguer trois périodes dans le développement de sa philosophie, marquées par la publication de ses principaux ouvrages ou recueils d'essais<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Seuls sont mentionnés ici les ouvrages traduits en français, présents dans la bibliographie.

  • 1911 - 1923 : Nishida initie une philosophie originale dans une série d'essais dits « épistémologiques », il explore les concepts d'expérience pure, d'intuition, de réflexion, mais en se démarquant de la simple importation de la philosophie occidentale, et initie la notion d'auto-éveil<ref>Modèle:Harvsp</ref>,<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Les écrits de cette période ont une teneur épistémique, psychologique, dialectique. La lecture d' Essai sur le bien, essai « plein de verve plus que de raison »<ref name=BSART25/>, était quasi-obligatoire pour les lycéens et étudiants littéraires des années 1930<ref>Modèle:Harvsp</ref>.
Publications : Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp
  • 1923 - 1933 : C'est la période d'approfondissement de sa pensée et de l'édification de son propre système philosophique, et les essais restent de nature épistémologique mais également phénoménologique et métaphysique.
Publications : Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp
Autre texte important de cette période, très difficile, souvent cité mais non traduit en français : Intuition et réflexion dans l'auto-éveil Modèle:Langue (1930)
  • 1933 - 1945 : Nishida précise sa position philosophique avec des textes plus spéculatifs, méditatifs, dégageant une originalité propre à la « philosophie japonaise », l'influence de la pensée orientale (bouddhisme, confucianisme, taoïsme, shintoïsme) y reste le plus souvent souterraine. Il aborde également différents domaines annexes : la culture, la politique, les sciences, la religion, le langage.
Publications : Modèle:Harvsp - Modèle:Harvsp

Philosophie

Modèle:Exergue

Les concepts fondamentaux

La pensée de Nishida a évolué dans le sens d'un approfondissement constant, sans ruptures. Cette section retrace les différentes étapes de son évolution dans une perspective linéaire et généalogique, en présentant les principaux concepts successifs.

L'expérience pure

Modèle:Exergue Modèle:AncreLe premier ouvrage majeur de Nishida, Modèle:Harvsp (1911), est un essai philosophique destiné à un large public, par lequel il se propose d'établir qu'il y a un principe identique au fond des choses et au fond de la conscience de l'homme : Modèle:Citation<ref name=BIEN9192>Modèle:Harvsp</ref>. Ce principe trouve ainsi son origine dans la tradition indienne puis chinoise, mais l'approche de Nishida fait intervenir la méthode philosophique occidentale et la culture d'extrême-orient. Il présente sa théorie de l'unification comme phénomène fondamental de la réalité pour introduire la notion d'« expérience pure » Modèle:Langue par l'oubli du soi<ref name=MDANFRAC2931>Modèle:Harvsp</ref>. C'est une notion originale à son époqueModèle:Note, qui désigne la réalité perçue sans différenciation du sujet et de l'objet, dans une fusion parfaite de la volonté et de la connaissance<ref name=BIEN3848>Modèle:Harvsp</ref>, Modèle:Citation. C'est une notion fondamentale qui Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Modèle:Encadré texte

L’œuvre d'artiste est présentée comme exemple de l'expérience pure Modèle:Langue quiModèle:Citation<ref name=BIEN3848/> : Modèle:Citation<ref name=BIEN9192/> et Nishida revient sur l'unité du corps et du mental chez l'artiste dans un ouvrage important de cette première période, Modèle:Harvsp. Dans Essai sur le bien Nishida illustre la théorie de l'unification : Modèle:Citation. Chaque regard que le moi porte sur une chose est l'occasion d'une prise de conscience de la chute, et la nostalgie de l'état unifié est la force qui nous pousse à nous unifier à nouveau, dans un processus dialectique. Nishida illustre ce processus par le cas de l'enfant : la conscience primordiale du nouveau-né a une unité chaotique, désordonnée, confuse<ref name=BIEN1718/> où l'éducation va introduire la pensée analytique, et sa subjectivité unifiante ainsi constituée se développera dialectiquement en opposition à l'objectivité du monde<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Dans cette spéculation de l'absolu d'un « Paradis perdu » Nishida introduit la notion de Dieu en utilisant un terme du shintoïsme Modèle:Langue désignant une divinité. L'unification du sujet et de l'objet, ou du « moi » et de la « chose », correspond alors à celle de Modèle:Langue et du « monde ». L'utilisation de ce terme par un philosophe japonais peut surprendreModèle:Note, mais il correspond à une tradition japonaise de syncrétisme entre les divinités, le Dieu des philosophes et Bouddha : kami désigne ainsi le Modèle:Citation. Nishida évoque Nicolas de Cues pour qui Dieu est la négation totale de tout<ref name=BIEN94/>, formule qu'il complétera dans son dernier ouvrage majeur, son « testament philosophique »<ref>Modèle:Harvsp</ref>, Modèle:Harvsp : comme Bouddha, Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

L'unification

Modèle:Exergue L'expérience pure fait émerger la réalité la plus fondamentale dans la dialectique de l'unification<ref name=MDANFRAC143>Modèle:Harvsp</ref>, et à ce niveau la conscience ne s'oppose pas problématiquement au monde, elle est la réalité même<ref>Modèle:Harvsp</ref> reprise et développée dans Intuition et réflexion dans l'auto-éveil Modèle:LangueModèle:Note le but à ce moment, dans cet ouvrage, est Modèle:Citation<ref name=MDANFRAC143/>.

Michel DalissierModèle:Note souligne que l'unification est en marche dans l’œuvre même de Nishida : elle ne caractérise pas seulement sa pensée, mais également sa démarche, recherchant dans les concepts des philosophes qu'il invoque (Rickert, Bergson, Fichte) une activité unifiante. Plus tard, il tentera de développer cette démarche unificatrice de ses références dans une « philosophie de la philosophie » où se déploierait la pensée philosophique<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Jacynthe TremblayModèle:Note liste les nombreux thèmes dont Nishida estime que ces auteurs occidentaux les ont distingués de façon trop tranchée, et qu'il cherche à unifier, comme Intuition et Réflexion, par l'éveil à soi : sujet et objet, valeur et être, signification et faits, forme et matière, universel et particulier, jugement et concept, qualité et relation, logique et mathématiques, logique et psychologique, connaissance et volonté, mécanisme et vitalisme, esprit et corps, Modèle:Langue et Modèle:Langue, repos et mouvement, passé et futur, être et non-être, soi individuel et vaste soi<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

L'éveil à soi

Sauf exception signalée par une référence explicite, l'essentiel de cette section est une synthèse d'extraits de deux ouvrages, de Jacynthe TremblayModèle:Note,<ref>Modèle:Harvsp</ref> et Michel DalissierModèle:Note,<ref>Modèle:Harvsp</ref>)

La notion d'« éveil à soi » ou « auto-éveil » Modèle:LangueModèle:Note, est le point de départ de Intuition et réflexion dans l'auto-éveilModèle:Note (1917) et marque une orientation de la pensée de Nishida vers l'épistémologie. Cette notion est développée par Nishida à partir d'une synthèse entre la durée pure de Bergson et le logicisme de Rickert sur la base d'un sens nouveau donné à Fichte, et prolonge sans rupture la notion d'expérience pure :Modèle:Citation par une synthèse entre ces deux termes : Réflexion et Intuition.

Nishida introduit ainsi ces deux notions : Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. L'expression « Réflexion faite » Modèle:Langue utilisée par Nishida pour désigner l'acte fondamental de la réflexion correspond à une réflexion achevée, au passé, à la « conscience d'avoir vu cela » en se dressant « hors de la progression » selon encore les termes même de Nishida. Mais connaître est penser, la connaissance est une activité d'unification des contenus de la conscience, et refléter la conscience passée consiste en fait à la construire. Modèle:Encadré texte

La notion d'auto-éveil, où le soi fait de sa propre activité un objet de sa réflexion (Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>), permet d'élucider les relations entre l'intuition et la réflexion : c'est le connaître qui connaît le connaître, l'activité unifiante fondant toute unité consciente. L'auto-éveil n'est cependant pas susceptible d'interprétation psychologique : l'identité du soi qui pense ou se reflète et du soi qui est pensé ou reflété est réelle. L'auto-éveil est la conscience, unifiante, de l'unité transcendantale du soi, sa signification et sa possibilité ne peuvent apparaître qu'au sein d'une philosophie critique. Par cette recherche d'unification, la position de la religion n'est plus la même que dans l' Essai sur le bien : le monde de la religion se trouve unifié, englobé, avec celui de la science, dans le monde de la philosophie dont ils constituent un niveau inférieur<ref name=MDANFRAC312313/>.

Nishida complète sa réflexion avec la notion de « volonté absolue » Modèle:Langue illustrant la réalité concrète comme une fusion de l'idéel et de l'actuel : la réflexion et la pensée sont dans l'auto-éveil des actes, elles sont la volonté, et celle-ci précède la connaissance qui en est le résultat. Mais surtout, la volonté donne naissance au temps tout en le transcendant et tous les objets (passés, présents, futurs) lui sont immanents<ref>Modèle:Harvsp</ref> (encadré). En 1936, il précisera que la position de « volonté absolue » est l'évolution de celle d'« expérience pure »<ref name=EDIT36>Modèle:Harvsp</ref>.

La logique du lieu

Modèle:Exergue Modèle:Citation bloc

Comment la volonté absolue peut-elle correspondre à la réalité ultime dans une unification infinie ? Cette question est à l'origine du concept de « lieu » Modèle:Langue, que Michel DalissierModèle:Note introduit ainsi : dans la hiérarchie des niveaux de réflexion (épistémologie, phénoménologie, métaphysique, herméneutique), comment trouver et justifier celui où l'on existe, où l'on s'exprime ? L'homme n'est-il pas perdu dans cette pluralité de mondes ? Où faut-il se placer, qu'est cette placeModèle:Note? Nishida apporte une réponse à ces questions dans une série d'essais regroupés dans Modèle:Harvsp (1923) en particulier dans celui intitulé Le lieu, relativement clair, et qui peut être considéré comme l'écrit central, fondateur de la période la plus importante de sa pensée<ref name=MDANFRAC312313>Modèle:Harvsp</ref>. Nishida lui-même l'affirmera d'ailleurs en 1936 : Modèle:Citation<ref name=EDIT36/>. Il précise dès le début qu'il ne faut pas assimiler cette notion de lieu avec la khôra du Timée de Platon : Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Citation bloc Dans ses travaux précédents, Nishida avait présenté l'union du sujet et de l'objet comme le résultat d'une unification. Dans Le lieu, cette union est localisée, non pas au sens spatial, mais plutôt dans le sens de l'expression française donner lieu à un événement : l'unification. L'espace lui-même doit se trouver englobé dans un lieu non spatial, le « néant oppositionnel » Modèle:Langue qui n'est cependant ni un champ de forces, ni un champ de conscience et il ne s'agit pas non plus de l'événement irréel, unificateur en sa vacuité, du stoïcisme. L'unification se trouve dans son lieu comme un objet se réfléchit dans un miroir, qui contient l'image mais pas l'objet. Il s'agit d'un événement topologique qui surgit d'une concrétion ontologique au sein de son lieu<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Encadré texte

Nishida utilise pour l'unification une injonction d'« englobement  »Modèle:Langue (il faut que A soit dans B), qu'il généralise dans cette proposition nishidienne fondamentale : Modèle:Citation, sans quoi on ne peut distinguer le fait d'être du fait de ne pas êtreModèle:Note. Il n'y a ainsi plus d'ontologie, entièrement dissoute dans la topologie : la connaissance dépend de l’être, l'être dépend du lieu, le lieu dépend du néant. Il n'y a d'être que dans un lieu, une chose se situe dans un lieu qui l'englobe et révèle sa phénoménalité par cet englobement. À cette étape de la pensée de Nishida, le philosophème privilégié n'est donc plus l'unification, mais le lieu d'unification<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Nishida a ainsi changé progressivement de perspective, dans une démarche elle-même unificatrice : perspective d'abord gnoséologique (question de la connaissance), puis ontologique (avec l'être), puis topologique (définissant le lieu de la relation). L'étape suivante et finale, pour sortir de l'être et aller vers le lieu où l'être est concevable, est la « néontologie »Modèle:Note, qui introduit le concept de « néant absolu » Modèle:Langue dont dépend le « lieu ». Le « néant absolu » ne doit cependant pas être confondu avec le « néant oppositionnel » qui concerne l'opposition entre être et non-être, système auto-conservatif qui s'oppose à l'opposition et accueille par exemple l'ego et le non-ego, l'être et le non-être.

L'auto-identité contradictoire

Modèle:Exergue L'Modèle:Ancreauto-identité contradictoireModèle:Langue est le processus par lequel se réalise l'unification en direction Modèle:Citation. Elle apparaît lorsque, au sein d'un universel, les particuliers se tiennent dans une union contradictoire les uns envers les autres et qu'une unité contradictoire prend forme<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Cette logique dialectique intervient toujours dans le cadre d'un basho qui est son lieu d'émergence en mettant les choses contradictoires en contact pour sortir de la logique abstraite de leur opposition : le présent est un basho pour le passé et le futur, et le monde historique un basho pour le sujet et le milieu. Cette logique correspond à la notion de Modèle:LangueModèle:Note qui exprime ainsi ce rapport entre contradiction et point de contact : Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Nishida refuse de comprendre le soku comme la simple fusion par opposition réciproque, qui serait la suspension de la pensée, et reprend la thèse de Dôgen et la philosophie du sôtô, en présentant le soku comme une perpétuelle renaissance du sens par une unification infinie<ref>Modèle:Harvsp</ref>,<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

L'auto-identité contradictoire est une unification perpétuelle selon une « progression » infinie, alternant deux aspects d'une réalité unique : l'opposition (négation réciproque) et l'unification (l'affirmation réciproque). L'opposition, qui présente l'aspect noématique Modèle:Langue comme une chose, est une conséquence nécessaire de l'unification qui la reconsidère alors comme un fait noétique Modèle:Langue et produit une forme. Le lieu de cette dissolution de la choséité en factualité active est celui du « véritable néant »<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Si la forme de cette loi de l'auto-identité contradictoire est une « pulsion », la conscience est alors ce qui sépare « pulsionné » et « pulsionnant » et Modèle:Citation. Par exemple, la pensée analyse ce qu'un besoin a unifié (le soi et l'autre) pour en abstraire un « je » et une « chose ». La pensée distingue de la même manière « temps » et « espace », « volonté » et « instinct » d'une réalité unificatrice<ref>Modèle:Harvsp</ref> dans un Modèle:Citation<ref name=MD45/>.

Selon Nishida « Dieu » est l'absolue auto-identité contradictoire<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Les principaux développements

Modèle:Exergue

Selon Michel Dalissier, il y aurait deux exposés dans l’œuvre de Nishida. Le premier, propédeutique, simpliste et déroutant, chercherait à paralyser la raison, à l'égarer en mettant en avant la contradiction et l'opposition dans la réalité. Le second intervient alors dans une pensée ainsi régénérée, auto-éveillée, philosophant dans une unification créatrice<ref name=SE196/>,Modèle:Note.

Dieu et la religion

Modèle:Exergue

  • Les sources

La réflexion de Nishida autour de la notion de religion est développée principalementModèle:Note dans deux ouvrages : Modèle:Harvsp (1911) au début de sa réflexion philosophique, et Modèle:Harvsp (1944), son dernier essai écrit. Elle est également approfondie dans Modèle:Harvsp (1939). Les principaux commentateurs de la pensée de Nishida sur ce thème sont Jacynthe TremblayModèle:Note, qui l'étudie principalement sous l'angle de la philosophie des religions, et Michel DalissierModèle:Note sous celui de la métaphysique. Frédéric GirardModèle:Note en fait une analyse dans la perspective du zen dans Modèle:Harvsp, Keiji Nishitani, disciple et continuateur de Nishida, reprend et poursuit cette réflexion dans Modèle:Harvsp avec un appareil conceptuel plus accessible et un discours plus familier aux auditoires européensModèle:Note.

  • Le contexte

La première voie d'approche de la pensée de Nishida par les intellectuels occidentaux fut la religion, dans la perspective des rapports interreligieux, mais il ne faut cependant pas oublier que Nishida réalise un travail de philosophe, comme l'entendent les philosophes japonais de l'École de Kyōto. Il met en œuvre un rationalisme pour analyser la réalité que l'expérience religieuse est le mieux à même de saisir<ref name=GIRARD234/>, et Nishida, qui n'est pas un penseur religieux, utilise des concepts à connotation religieuse (chrétiens et bouddhiques) pour viser ainsi ce qui se trouve à la racine ou au-delà de la connaissance<ref name=JTLIEU284/>. En se situant au niveau philosophique, un travail de religion comparée pourrait alors alimenter la recherche de nouveaux paradigmes théologiques fondés sur sa pensée, et la manière dont il utilise les thèmes de la philosophie chrétienne pour illustrer sa propre pensée pourrait ainsi permettre de renouveler la conceptualité religieuse occidentale<ref name=INTRO3739>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Encadré texte La théologie chrétienne fournit à Nishida une source complémentaire pour l'emprunt de vocabulaireModèle:Note, non pas pour définir ses concepts, mais pour les approfondir et éclairer le lecteur dans la direction de sa propre pensée philosophique<ref name=JTLIEU284>Modèle:Harvsp</ref>. Il faut donc éviter d'établir des correspondances de concepts (Dieu, le diable, l'Amour, la religion...) sur la base d'une traduction de vocabulaire qui ne tiendrait pas compte de multiples couches de significations<ref name=INTRO3739/>. Il faut en particulier éviter d'interpréter le bouddhisme selon les concepts des religions occidentales (encadré).

Contrairement à l'Occident, la culture japonaise ne contient pas de séparation nette entre philosophie et théologie<ref name=INTRO3739/>, et Nishida élabore une anthropologie philosophique plutôt qu'une théologie, avec le concept de « volonté absolue » par laquelle Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Sa pensée ne peut être réduite à l'une des religions orientales pour être ensuite comparée à une religion occidentale<ref name=INTRO3739/>.

  • La pensée de Nishida

Nishida utilise les concepts de « Dieu », de « Religion », d'« Amour » et de « faute originelle » pour évoquer la réalité auto-contradictoire, associant immanence et transcendance, l'un et le multiple. Il s'agit, selon son expression, d'Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>, et Dieu représente alors l'unification ultime, la « volonté absolue »<ref name=AU310>Modèle:Harvsp</ref>. Mais, au-delà de ces concepts de la philosophie occidentale, il précise que Modèle:Citation<ref name=BIEN94>Modèle:Harvsp</ref>, retrouvant alors les philosophies orientales et Dôgen avec Modèle:Citation<ref name=SEES117>Modèle:Harvsp</ref>. Et c'est ainsi que Modèle:Citation.

Modèle:Encadré texte

Notion de religion : la religion n'est guère envisageable par les vues de la logique objective, et il importe de partir de la logique de l'auto-identité contradictoire, autrement dit de la coïncidence dans l'altérité. La pratique de la religion n'a pas lieu grâce à un sujet de l'action qu'on érigerait ; elle ne peut être qu'un processus par lequel on convertit un tel sujet en auto-identité de contraires absolus<ref name=FG229/>

Dans l'Modèle:Harvsp, Nishida présente la religion comme le lieu de la réalisation, au-delà de l'éveil à soi, de l'expérience pure. Le religieux s'y trouve aux côtés de l'artiste et du savant (accomplissement de la volonté de soi), et de l'artiste (intuition intellectuelle par la connaissance dialectique)<ref>Modèle:Harvsp</ref> : Modèle:Citation

Modèle:Citation. C'est ainsi que dans la théologie chrétienne la chute adamique est nécessaire à la rédemption par le Christ, comme la différenciation est nécessaire à l'unification<ref name=AU134/>. Modèle:Encadré texte Notion de Dieu : Nishida refuse la conception d'un Dieu qui serait l'« Être suprême », ou l'explication ultime, ou téléologique, ou le juge moral ultime<ref>Modèle:Harvsp</ref>. D'autre part, un dieu immanent qui représenterait alors la « force unifiante interne de l'univers » serait imparfait, et un Dieu transcendant est en conflit avec notre raison<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Le Dieu des chrétiens pourrait cependant être considéré comme une transcendance immanente, puisque d'absolument transcendant il devint immanent en s'incarnant dans le personnage de Jésus<ref name=LOG87/>. Mais Nishida évoque en fait un Dieu véritablement dialectique, créateur contenant sa propre négation, réalité de ce qui naît et meurt, passage dans la vie selon la loi bouddhique de l'impermanence et de la production conditionnée<ref name=BS3335/>.

Négation totale de toutModèle:Note, Dieu est l'absolument rien<ref name=BIEN94/>, mais il ne faut cependant pas interpréter la notion de néant absolu comme une ontologie qui remplacerait celle de Dieu<ref name=JTLIEU284/>,Modèle:Note. Modèle:Encadré texte

Notion d'amour et de faute originelle : Nishida s'inspire, pour élaborer une notion d'« amour », de l' agapè chrétienne, amour de Dieu immanent par son incarnation en JésusModèle:Note. Le je « s'aime » en se niant soi-même, découvrant son véritable soi en se niant d'instant en instant. Sans cet « amour », le je n'existerait pas, et sans amour de soi, l'amour de l'autre serait impossible<ref>Modèle:Harvsp</ref>. L'amour de soi est recherche d'unité mais l'esprit, infini, reste insatisfait, recherche une unité plus grande et l'amour de l'autre se forme alors comme revendication d'une unité supra-individuelle<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Modèle:Citation bloc.

L'art et la création artistique

Modèle:Exergue Modèle:Encadré texte

Nishida a peu approfondi ces domaines, peu d'essais y sont consacrés, l'essentiel est réuni dans Modèle:Harvsp (1923). Ces questions apparaissent malgré tout sous-jacentes dans sa réflexion philosophique influencée par la lecture de Konrad Fiedler. La création d'une œuvre d'art, mais aussi sa contemplation, sont un processus d'expression du monde ou vers le monde, en le créant ou en recréant l'instant et le mouvement qui ont donné vie à l’œuvre. Pour l'artiste comme pour le spectateur, cela implique la totalité de l'être humain, conformément à la vision bouddhique<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

La création a lieu dans une unité dynamique de l'être et du monde, opérée par la « volonté pure » au sens du flux spontané de la vie. Le mouvement de la création est l'expression de l’œuvre, sans autre critère moral ou esthétique qui resterait extérieur au geste créatif. Ce n'est pas le beau qui est au centre de la création artistique, mais le vrai, lié au spontané du mouvement dans une unité « corps-esprit »Modèle:Langue, notion bouddhique très présente par exemple chez Dôgen<ref name=BS3335>Modèle:Harvsp</ref>. Au Japon, Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Les sciences

Modèle:Exergue

  • Espace et temps

Modèle:Encadré texte L'essentiel des essais de Nishida relatifs aux sciences et disponibles en français ont été traduits et abondamment commentés par Michel Dalissier, physicien et philosophe, dans Modèle:Harvsp.

Nishida aborde les questions relatives au temps principalementModèle:Note dans deux ouvrages : Modèle:Harvsp (1932) et Modèle:Harvsp (1940). Jacynthe TremblayModèle:Note réalise un Modèle:Harvsp sous forme de philosophie comparée à partir des auteurs occidentaux cités par Nishida (Aristote, Kant, Bergson, Heidegger...) alors que Michel DalissierModèle:Note en fait une analyse intrinsèque dans les annexes et notes très abondantes de sa Modèle:Harvsp.

Modèle:Encadré texte L'originalité de Nishida est de penser le temps comme une production, dans une réflexion intrinsèquement liée à celle sur l'espace. Les dimensions du temps sont, en direction de l'avenir, la production de l'auto-formation du monde historique et, en direction du passé, d'où provient la production. Le présent est l'auto-identité contradictoire de ces deux dimensions et constitue ainsi Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Nishida précise : Modèle:Citation

  • Physique et mathématiques

Nishida souligne que la physique reste attachée à la dimension temporelle pour maintenir une simultanéité du passé et du futur dans le présent dans un englobement concret des mondes et des lieux. Au contraire, les mathématiques transcendent le temps, y compris le présent qui s'y trouve englobé de manière abstraite. À partir des concepts de sa « topologie du néant », Nishida analyse ainsi la mathématisation progressive et inéluctable de la science physique<ref name=MD45/> :

  • Les sciences physiques réalisent l'auto-formation du monde socio-corporel par concrétisation, raréfaction, purification. C'est l'essence de l' agir, avant tout autre chose, en direction du néant.
  • Les mathématiques réalisent une opération symbolico-expressive, et la conscience s'exprime par symboles, signes, figures, courbes. Il s'agit d'abord de voir quelque chose, c'est le primat de l' être.

Michel DalissierModèle:Note commente ainsi cette analyse : Modèle:Citation dans la formalisation mathématique.

Le monde est le point d'union de l'expérimentation physique : agir et voir s'unissent de manière auto-identiquement contradictoire, à la manière de l'intuition dans l'action. Nishida citant Bridgman, rappelle qu'une connaissance intuitive dans le langage de l'expérience quotidienne est nécessaire pour établir une correspondance entre le système physique et l'équation mathématique et conclut : Modèle:Citation<ref name=MD45/>,Modèle:Note.

  • Vie et biologie

Modèle:Exergue Au début de son parcours philosophique Nishida choisit la vie Modèle:LangueModèle:Note comme concept-clé. À la fin de sa vie, le dernier essai publié est intitulé seimei, et le dernier essai écrit, Modèle:Harvsp présente la vie et la religion comme indissociables dans la vision du basho<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Encadré texte Nishida s'inspire beaucoup de Haldane, qu'il a lu et qu'il cite à plusieurs reprises, sa théorie physiologique lui paraît correspondre à sa logique du basho : la vie doit être saisie dans un lieu médiateur où l'organisme et le milieu s'entretiennent réciproquement. Il en reprend et développe particulièrement deux idées :

  • Le milieu et l'organisme, interdépendants, sont inséparables. Ce que Nishida exprime ainsi : Modèle:Citation<ref name=SEES51>Modèle:Harvsp</ref>.
  • La vie ne peut être conçue de manière ni vitaliste, ni mécaniste (encadré), l'un et l'autre point de vue ayant le tort de substantialiser ce phénomène sans en saisir la fluidité et la créativité<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Il s'ensuit que le critère de la vie est l'individualité et non la statistique, et qu'elle doit être en même temps comprise comme l'expression illimitée d'un tout<ref name=SEES51/>.

Modèle:Citation bloc Nishida voit la vie comme un acte expressif, une forme Modèle:Langue : c'est Modèle:Citation et voir Modèle:Citation. Ces rapports ou formes Modèle:Citation. Nishida adopte ainsi le concept biologique de forme, l'adapte et l'exprime en rapport avec la notion d'auto-identité contradictoire<ref name=KA258KA>Modèle:Harvsp</ref>.

La culture, la nature, la politique

Modèle:Exergue

  • Le contexte

L'étude des travaux de Nishida dans le domaine de la culture a été reprise en français, au-delà de la polémique autour de son engagement politique, essentiellement par Pierre LavelleModèle:Note traducteur de Modèle:Harvsp, par Augustin Berque, à partir de la notion de « dépassement de la modernité », et par Bernard Stevens dans le cadre général de l'École de Kyōto.

Modèle:Encadré texte Selon une opinion répandue au Japon à cette époque, le centre de l'histoire mondiale s'est déplacé de l'Europe vers le Japon, de ce fait investi d'une mission civilisatrice planétaire, pour sortir l'humanité de l'impasse du matérialisme triomphant<ref name=TOPO5762>Modèle:Harvsp</ref>. Les japonais ont ainsi le sentiment d'être une nation à part, une littérature se développe autour de la notion de l'« homme japonais » et Nishida s'inscrit dans cette vision et cette littérature avec Modèle:Harvsp.

Modèle:Citation c'est à cette interrogation que Nishida souhaite apporter une réponse, car si l'Histoire moderne n'est pas celle du Japon, le Japon est cependant selon lui le seul capable de proposer un nouvel ordre du monde en conciliant les traits modernes, importés de l'Occident, et la tradition de l'Orient : Modèle:Citation<ref name=CULT7377/>. Cette réflexion se développera ensuite sous le terme de « dépassement de la modernité ». Il considère (selon son formalisme philosophique) que l'héritage culturel du Japon s'est développé selon l'identité contradictoire de l'Un (le Japon) et du multiple individué (les japonais), allant de ce qui est créé (la tradition) à ce qui crée (un monde culturel nouveau)<ref name=TOPO5762/>.

  • Culture et Nature

Cette section est une synthèse partielle de Modèle:Harvsp.

La modernité cartésienne avec l'ego transcendantal et son rapport objectifiant avec le monde, ont fait perdre à l'humanité le sentiment de l'appartenance de la conscience à la grande vie de la nature, que la tradition japonaise permet de retrouver en nous et immergeant dans la vérité naturelle de la réalité<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Au contraire, l'esprit japonais se caractérise en particulier par la capacité de « mourir au soi » au sens spirituel du bouddhisme, faisant le vide en soi pour se rendre réceptif à ce qui n'est pas soi, comme dans le geste artistique pratiqué en Orient<ref name=TOPO5762/>, à l'opposé de la posture occidentale : Modèle:Citation<ref name=CULT7377/>. Pour Nishida, culture, politique, philosophie et religion sont indissociables : Modèle:Citation et Modèle:Citation.

Mais le sens religieux doit être compris dans le sens de Nishida, une sorte d'intuition intellectuelle avec la nature : ce Modèle:Citation, et Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Les termes occidentaux tels que le français « nature » ont introduit une notion que la tradition orientale ne connaissait pas : l'existence objective face au sujet humain. Pour conceptualiser sa dialectique tout en évitant la confusion due à la polysémie incertaine de cette notion en japonais, entre « spontanéité orientale » et « objectivité occidentale », Nishida utilise deux notions, proches et liées, la nature Modèle:Langue créatrice, et le milieu Modèle:Langue, réalité historique qui se renouvelle d'instant en instant.

L'intuition japonaise est modelée sur les faits plutôt que les choses physiques et Nishida évoque à ce sujet le haïku Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.

Modèle:Encadré texte

  • Culture et politique

Dans ce contexte de l'« esprit japonais », la politique est fortement teintée de tennôcentrismeModèle:Note : la maison Impériale a, pour le Japon, la même signification que l'Église pour l'Europe, et la morale politique japonaise serait l'équivalent du confucianisme en Chine. L'approfondissement de la pensée bouddhique vers l'intériorité, la « quête du soi », néglige pourtant la dimension sociale de la religion, tout en plaçant la dimension intérieure de l'être comme pendant de la morale étatique, et Nishida s'inscrit dans ce mouvement. Faute d'avoir suffisamment réfléchi les liens entre état et religion, Nishida ne peut formuler une argumentation efficace pour s'opposer aux guerres nationalistes<ref name=FS29/>.

Selon Nishida, la politique ne se réduit pourtant pas à une technique de gouvernement, et doit inclure une dimension morale<ref name=TOPO5762/>, mais en Europe ses positions lui ont valu d'être placé dans une position semblable à Martin Heidegger et Mircea Eliade, alors qu'il s'est toujours opposé sans ambiguïté au totalitarisme et à l'impérialisme : Modèle:Citation bloc

Notes

Notices biographiques

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Commentaires

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Références

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Bibliographie

Essais traduits en français

Les références à la seconde édition (publiée en 1965) des œuvres complètes (19 volumes) de Nishida Kitarō Modèle:Langue sont repérées par le sigle NKZ.

Littérature secondaire en français

Études consacrées à Nishida

Sur les philosophes de l'École de Kyôto

Dans ces études, la philosophie de Nishida, « chef de file » de cette École, occupe naturellement une place prépondérante

Littérature secondaire en anglais

  • Michiko Yusa, Zen & Philosophy: An Intellectual Biography of Nishida Kitarô, Honolulu, University of Hawai'i Press, 2002Modèle:ISBN 520 p.
  • Nishitani Keiji Nishida Kitarô: The Man and his Thought, Berkeley, University of California Press, 1991 Modèle:ISBN XXX + 238 p.
  • Robert J. J. Wargo, The Logic Of Nothingness: A Study Of Nishida Kitarô, Honolulu, University of Hawai’i Press, 2005 Modèle:ISBN 241 p.
  • Robert E. Carter, The Nothingness beyond God: An Introduction to the Philosophy of Nishida Kitarô, New York, Paragon House Publishers, 1989 Modèle:ISBN XXVII + 191 p.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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