Henri Bergson

{{#ifeq:||Un article de Ziki, l'encyclopédie libre.|Une page de Ziki, l'encyclopédie libre.}}
(Redirigé depuis Bergson)

Modèle:Voir homonymes Modèle:Infobox Biographie2 Henri Bergson, né le Modèle:Date de naissance à Paris, et mort le Modèle:Date de décès dans le 16e arrondissement de Paris<ref>Modèle:Lien web</ref>,<ref>Françoise Schwab, Vladimir Jankélévitch: Le charme irrésistible du je-ne-sais-quoi, Albin Michel, Paris, 2023, p. 81.</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>, est un philosophe français.

Parmi les ouvrages qu'on lui doit, les quatre principaux sont l’Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), Matière et mémoire (1896), L'Évolution créatrice (1907) et Les Deux Sources de la morale et de la religion (1932). Il est également l'auteur du Rire, un essai sur la signification du comique (1900).

Bergson est élu à l'Académie française en 1914 et il reçoit le prix Nobel de littérature en 1927. Il fut à la SDN le premier président de la Commission internationale de coopération intellectuelle, ancêtre de l'UNESCO<ref>Modèle:Lien web</ref>. Ses idées pacifistes ont influencé la rédaction des statuts de la Société des Nations<ref>Modèle:Lien web</ref>.

Biographie

Modèle:Section rédaction à revoir Modèle:Section à sourcer

Jeunesse et formation

Fichier:Henri Bergson 1878.jpg
Henri Bergson en 1878 à l’École normale supérieure.

Henri Bergson naît à Paris, rue Lamartine. Par son père, le pianiste Michał Bergson, il descend d’une famille juive polonaise, dont le nom d'origine était Bereksohn, et par sa mère d’une famille juive anglaise. Sa famille vit à Londres quelques années après sa naissance et il se familiarise très tôt avec l’anglais grâce à sa mère. Avant ses neuf ans, ses parents reviennent s’établir à Paris et il fait sa scolarité au lycée Fontanes<ref>Pierre Albertini, « Les juifs du lycée Condorcet dans la tourmente », Vingtième Siècle : Revue d'histoire, n°92, 2006/4, p. 81-100.</ref>. À 18 ans, Henri choisit la nationalité française, ce que lui permet sa naissance sur le sol français : Étienne Monceaux et Charles Salomon, deux condisciples de l’École normale supérieure, sont ses témoins.

Fichier:ENS promotion 1878 Bergson Jaurès.jpg
Étudiants à l'ENS d'Ulm à Paris, promotion de 1878 avec Bergson et Jaurès.

En 1877 il obtient le premier prix du concours général de mathématiques : sa solution au problème posé est publiée l’année suivante dans les Annales de mathématiques et constitue sa première publication<ref>Modèle:Article</ref>.

Fichier:Copie de Henri Bergson au concours général de mathématiques – Archives nationales – AJ-16-799 page 2.jpg
Copie de Henri Bergson au concours général de mathématiques – Archives nationales.

Après quelques hésitations, balançant entre les sciences et les humanités, il opte finalement pour celles-ci. Il entre à l’École normale supérieure en 1878, dans la promotion d'Émile Durkheim, de Jean Jaurès et de son ami Pierre Janet. Il suit les cours d’Émile Boutroux et obtient une licence en lettres avant d'être reçu deuxième à l’agrégation de philosophie en 1881, derrière Paul Lesbazeilles et devant Jean Jaurès et Gustave Belot<ref>Modèle:Lien web.</ref>.

Le professeur

Fichier:Bergson1889Diss2.jpg
Essai sur les données immédiates de la conscience (thèse, 1889).
Fichier:Bergson1889Diss1.jpg
Quid Aristoteles de loco senserit (thèse complémentaire, 1889).

Cette même année, il est nommé professeur au lycée David-d’Angers d’Angers. Deux ans plus tard, il est muté au lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand<ref>Louis Passelaigue, le philosophe Henri Bergson, professeur à Clermeont de 1883 à 1888, le Gonfanon n°46, Argha</ref>,<ref>G.-P. Dastugue, « Bergson à Clermont (1883-1888) », in Bulletin historique et scientifique de l'Auvergne, Modèle:P., tome XCII, Modèle:N°, avril 1984.</ref>. Il publie en 1884 des morceaux choisis de Lucrèce, accompagnés d’une étude critique du texte et de la philosophie du poète, ouvrage qui sera plusieurs fois réédité. En parallèle à son enseignement, Bergson trouve le temps de mener des travaux personnels. Il rédige l’Essai sur les données immédiates de la conscience qu’il soumet en même temps qu’une courte thèse en latin sur Aristote, Quid Aristoteles de loco senserit (« L'idée de lieu chez Aristote »), pour son diplôme de docteur ès lettres qu’il obtient en 1889. Sa thèse principale est publiée la même année par l'éditeur parisien Félix Alcan dans la série La Bibliothèque de philosophie contemporaine.

Bergson dédicace l'Essai à Jules Lachelier, alors inspecteur général de l’instruction publique, qui était un fervent défenseur de Félix Ravaisson, et l’auteur d’un ouvrage philosophique Du Fondement de l'induction paru en 1871 (Lachelier était né en 1832, Ravaisson en 1813 et ils furent tous deux professeurs à l’École normale supérieure).

Bergson s’installe ensuite de nouveau à Paris, et, après avoir enseigné quelques mois au collège Rollin, il est nommé au lycée Henri-IV, où il reste huit ans. En 1891-1892, il a pour élève Alfred Jarry, puis en 1897, Maurice Halbwachs<ref>Modèle:Article</ref>. En 1892, il épouse Louise Neuburger (1872-1946). Ils auront une fille, Jeanne. En 1896, il publie son second ouvrage majeur, Matière et mémoire. Ce livre relativement difficile mais très riche explore les fonctions du cerveau, entreprend une analyse de la perception et de la mémoire, et propose des considérations sur les problèmes de la relation entre l'esprit et le corps. Bergson a consacré des années de recherches à la préparation de chacun de ses ouvrages principaux. C’est particulièrement évident pour Matière et mémoire, où il fait preuve d'une connaissance pointue des recherches médicales de son temps.

En 1898, Bergson devient maître de conférence à l’École normale supérieure, et obtient ensuite le titre de professeur la même année. En 1900, il est nommé professeur au Collège de France, à la chaire de philosophie grecque, en remplacement de Charles Lévêque.

Le philosophe

Au premier congrès international de philosophie, qui se tient à Paris les cinq premiers jours d’août 1900, Bergson fait une courte mais importante conférence : Sur les origines psychologiques de notre croyance à la loi de causalité. En 1900, Félix Alcan publie Le Rire, une des productions « mineures » de Bergson. Cet essai sur le sens du « comique » est fondé sur un cours qu’il avait donné dans sa jeunesse en Auvergne. En 1901, Bergson est élu à l’Académie des sciences morales et politiques. En 1903, il collabore à la Revue de métaphysique et de morale en publiant un essai intitulé Introduction à la métaphysique, qui peut être lu comme une préface à l’étude de ses livres principaux.Modèle:Référence souhaitée

Le 22 juillet 1902 il est fait Chevalier de la Légion d'honneur.

En 1904, à la mort du sociologue Gabriel Tarde, Bergson lui succède à la chaire de Philosophie moderne. Entre le 4 et le 8 septembre 1904, il participe à Genève au Second congrès international de philosophie où il tient une conférence sur Le Paralogisme psycho-physiologique ou, pour citer son nouveau titre, Le Cerveau et la pensée : une illusion philosophique. Une maladie l’empêche de se rendre en Allemagne pour assister au troisième congrès qui eut lieu à Heidelberg.

Sa troisième œuvre majeure, L'Évolution créatrice, parue en 1907, est son livre le plus connu et le plus étudié. Cet ouvrage constitue l’une des contributions les plus profondes et les plus originales à l’étude philosophique de la théorie de l'évolution. Pierre Imbart de La Tour affirme Modèle:Où qu'un « livre comme L’Évolution créatrice n’est pas seulement une œuvre, mais une date, celle d’une direction nouvelle imprimée à la pensée ». En 1918, l'éditeur de Bergson, Alcan, avait effectué 31 rééditions, avec en moyenne deux éditions par an pendant dix ans. Après la parution de ce livre, la popularité de Bergson augmentera considérablement, non seulement dans les cercles académiques, mais aussi dans le grand public.

Bergson et James

Bergson se rend à Londres en 1908 où il rend visite au philosophe américain William James — de 17 ans son aîné —, qui sera l’un des premiers à attirer l’attention du public anglo-américain sur ses travaux. On retrouve les impressions de James sur cette entrevue dans une Modèle:Référence nécessaire : Modèle:Citation. James, dont il commente, défend et explique les idées notamment dans Sur le pragmatisme de William James (texte repris dans La Pensée et le Mouvant), fit sur Bergson une profonde impression et sa pensée est à l'origine de plusieurs des idées que l'on retrouvera dans Les Deux Sources de la morale et de la religion.

Peu avant sa mort, James assiste le Modèle:Dr Arthur Mitchell dans sa traduction en anglais de L'Évolution créatrice, publiée en 1911. La même année paraît en France la traduction d’un livre de James, Le Pragmatisme<ref>Pragmatisme, traduit par E. Le Brun, Paris, Flammarion, 1911</ref>, dont la préface Vérité et réalité, est de la main de Bergson. Il y exprime sa sympathie pour l'originalité du travail de James et sa « grandeur d'âme », tout en apportant d’importantes réserves. L'édition critique des œuvres de Bergson dirigée par Frédéric Worms a d'ailleurs repris en 2011 Sur le pragmatisme de William James<ref>Sur le pragmatisme de William James, Paris, PUF, 2011</ref> qui, outre cette préface, contient la correspondance entre Bergson et William James, ainsi que d'autres textes qu'il lui a consacrés.

Philosophie et métapsychique

Du 5 au 11 avril 1911, Bergson se rend au quatrième congrès de philosophie à Bologne en Italie, où il fait une contribution remarquée : L’Intuition philosophique. Il est invité plusieurs fois en Angleterre, entre autres à l'université d'Oxford, où il donne deux conférences publiées par Clarendon Press sous le titre La Perception du changement. Dans ce texte, Bergson expose ses idées de façon claire et concise. Oxford rend hommage à son visiteur en lui décernant le titre de Doctor of Science. Deux jours plus tard, Bergson donne une conférence à l'université de Birmingham, intitulée Vie et conscience. Elle sera publiée dans The Hibbert Journal (octobre 1911) et constitue le premier essai du livre L'Énergie spirituelle. En octobre, il retourne en Angleterre où il reçoit un accueil triomphal, et donne au University College London quatre cours sur La Nature de l’âme. En 1913, il visite les États-Unis à l'invitation de l’université Columbia de New York et donne dans plusieurs villes des conférences qui attirent un très large public. En février, à l’université Columbia, il donne des cours en français et en anglais sur le thème Spiritualité et liberté et sur la méthode philosophique. De retour en Angleterre en mai de la même année, il accepte la présidence de la Society for Psychical Research (SPR) et donne dans le cadre de la société la conférence Fantômes de vivants et recherche psychique. Malgré cet engagement public en faveur de la métapsychique, Bergson n'a cessé d'avancer de façon discrète dans un domaine dont il était à la fois un des observateurs avisés (avec les expériences de l'Institut psychologique général sur Eusapia Palladino) et le théoricien caché, selon Bertrand Méheust<ref>« Bergson et la métapsychique » selon Bertrand Méheust</ref>. L'ampleur de cet intérêt de Bergson pour la métapsychique fut assez tardivement mis en lumière par un chercheur américain, Robert Crogin, qui en fait même une clef importante pour comprendre l'œuvre du philosophe<ref>Robert C. Grogin, The Bergsonian Controversy in France, 1900-1914, The University of Calgary Press, 1988 cité par B. Méheust dans Somnambulisme et médiumnité, tome 2, Le Choc des sciences psychiques, Institut Synthélabo, 1998</ref>.

Toujours en 1913, le 30 décembre, Bergson prononce un discours au Collège de France à l'occasion du centenaire de Claude Bernard. Dans ce discours, intitulé « La philosophie de Claude Bernard » (repris dans La Pensée et le Mouvant, VII), Bergson fait l'éloge du « génie » particulier du physiologiste en avançant notamment que Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.

À cette période, la popularité de Bergson augmente, et des traductions de son travail commencent à paraître dans de nombreuses langues : anglais, allemand, italien, danois, suédois, hongrois, polonais et russe. Il est nommé président de l’Académie des sciences morales et politiques et fait officier de la Légion d'honneur le 23 juillet 1912 décoration remise par Jules Lachelier membre de l'Institut.

Son influence est sensible chez certains socialistes, et des mouvements religieux libéraux qualifiés de modernistes ou néo-catholiques. L’Église catholique romaine réagit en mettant les trois ouvrages principaux de Bergson à l’Index (décret du [[1er juin|Modèle:Abréviation discrète juin]] 1914). Jacques Chevalier interviendra auprès du nonce à Paris pour que Les Deux Sources ne soit pas mis à l'index, comme le voulaient certains catholiques intransigeants<ref>Ghislain Waterlot, L'ellipse : une difficulté majeure du troisième chapitre des « Deux Sources de la morale et de la religion » dans Frédéric Worms et Camille Riquier, Lire Bergson, PUF, Paris, 2011, p. 185-200, p. 197.</ref>.

La Première Guerre mondiale

Henri Bergson affirme à l'Académie accomplir un « simple devoir scientifique en signalant dans la brutalité et le cynisme de l'Allemagne, dans son mépris de toute justice et de toute vérité une régression à l'état sauvage »<ref name="Point">Modèle:Article</ref>, participant ainsi à la propagande anti-allemande. Le regret de ces paroles est par ailleurs un des facteurs qui motivera la rédaction, en 1932, des Deux sources de la morale et de la religion où il explorera notamment, du point de vue philosophique, les causes de la guerre et les moyens de les éviter.

Fichier:Henri-Louis Bergson.jpg
Henri Bergson par Henri Manuel.

En 1914, des universités écossaises invitent Bergson à donner une série de cours, les Gifford Lectures. Une première moitié est prévue au printemps et la seconde à l’automne. La première partie, constituée de onze cours, a lieu à l'université d'Édimbourg sous le titre The Problem of Personality. La seconde est annulée à cause de la Première Guerre mondiale. Dès le Modèle:Date, il écrit un article intitulé « La force qui s’use et celle qui ne s’use pas » dans Le Bulletin des armées de la république. Une allocution à l'Académie des sciences morales et politiques en décembre 1914 traite de La Signification de la guerre<ref>Henri Bergson, La Signification de la guerre, Paris: Bloud et Gay, 1915.</ref>. Bergson participe également au tirage du Daily Telegraph en l'honneur du roi des Belges, King Albert’s Book (Noël 1914). En 1915, il cède le siège de président de l’Académie des sciences morales et politiques à Alexandre Ribot et fait un discours sur l’évolution de l'impérialisme allemand. Entre-temps, il trouve le temps de rédiger pour le ministère de l’Instruction publique français un résumé de la philosophie française. Durant la guerre, Bergson multiplie voyages et conférences aux États-Unis. Il est présent quand la mission française dirigée par René Viviani se rend sur place à la suite de l’entrée en guerre des États-Unis<ref name="Point"/>. Le livre de Viviani La Mission française en Amérique (1917) est préfacé par Bergson. En 2008, on a pu déterminer toute l'influence que Bergson aura eue sur les quatorze résolutions proposées par le président Wilson afin de créer une instance gouvernementale internationale pour prévenir les conflits armés.

Élu à l’Académie française le 12 février 1914, Bergson est officiellement reçu le 24 janvier 1918 par René Doumic en tant que successeur d’Émile Ollivier.

De nombreux articles qu’il avait publiés n’étant plus disponibles, il accepte la proposition de ses amis de les réunir en deux volumes sous le titre L'Énergie spirituelle : essais et conférences. Ils contiennent entre autres Vie et Conscience, L'Âme et le Corps, Le Paralogisme psycho-physiologique et des articles sur la fausse reconnaissance, les rêves et l’effort intellectuel.

Les dernières années

Le 19 février 1919 il est fait Commandeur de la Légion d'honneur.

En juin 1920, l'université de Cambridge l’honore du diplôme de Doctor of Letters. Pour lui permettre de se consacrer à ses travaux sur l’éthique, la religion et la sociologie, Bergson est dispensé d’assurer les cours liés à la chaire de philosophie moderne au Collège de France. Il conserve la chaire, mais les cours sont dispensés par Édouard Le Roy.

Fichier:BergsonNitobeIntellectualCooperation.jpg
Télégramme d'Henri Bergson, président de la CICI, à Nitobe Inazō, directeur de la section des bureaux internationaux de la SDN (dans laquelle se trouve la CICI)<ref>Archives de la SDN 1924, Office des Nations Unies à Genève. Photographie issue de cette collection.</ref>.

En 1921, il devient le premier président de la nouvelle Commission internationale de coopération intellectuelle (CICI, la future UNESCO en 1946) qui a pour fonction de promouvoir les conditions favorables à la paix internationale. Elle s'appuie sur l'idée que le développement de l'esprit critique des individus, grâce à l'éducation, leur permet d'agir de manière saine et responsable. La CICI rassemble en son sein des intellectuels du monde entier.

Le 6 avril 1922, il participe à la réunion de la Société française de philosophie qui accueille Albert Einstein de passage en France ; sur la base des arguments de son livre Durée et Simultanéité, il essaie de faire valoir dans un débat avec le physicien la notion de temps universel, rendue caduque par la théorie de la relativité.

Le 7/8/1923 il est élevé à la dignité de Grand Officier de la Légion d'honneur remise par le général de division Dubail chancelier de l'ordre.

En 1925, un rhumatisme déformant se développe, qui le fera souffrir jusqu'à la fin de ses jours. Vivant avec sa femme et sa fille dans une maison modeste située dans une rue calme près de la porte d’Auteuil à Paris, Henri Bergson reçoit le prix Nobel de littérature en 1927. À demi paralysé, il ne peut se rendre à Stockholm pour recevoir son prix.

Le 3 mai 1930, Henri Bergson est élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur par le général Dubail chancelier de l'ordre.

En 1932, il achève son nouvel ouvrage Les Deux Sources de la morale et de la religion, qui étend ses théories philosophiques à la morale, à la religion, à la société et principalement à la mystique. Ce travail est accueilli avec respect par le public et la communauté philosophique, mais Modèle:Référence nécessaire. Certains commentateurs plus récents envisagent les choses autrement. Par exemple Anthony Feneuil écrit à propos de Bergson que Modèle:Citation<ref>Anthony Feneuil, Bergson, mystique et philosophie, PUF, Paris, 2011.</ref>. Ghislain Waterlot estime que les pages 243 à 247 des Deux Sources sont Modèle:Citation et Modèle:Citation<ref>Ghislain Waterlot, L'ellipse, une difficulté majeure du troisième chapitre des Deux Sources, in Frédéric Worms et Camille Riqiuer (directeurs) Lire Bergson, PUF, Paris, 2011, Modèle:P., Modèle:P..</ref>. Le même auteur et Frédéric Keck soulignent que le style simple et accessible de Bergson Modèle:Citation<ref>Ghislain Waterlot et Frédéric Keck, Introduction au dossier critique de l'édition critique dirigée par Frédéric Worms de Les Deux sources de la morale et de la religion volume édité par Ghislain Waterlot et Frédéric Keck, PUF, Paris, 2008, Modèle:P., Modèle:P..</ref>. Enfin, Frédéric Worms parle à propos de ce livre d'une Modèle:Citation<ref>Présentation de l'édition critique dirigée par lui-même de Les Deux Sources de la morale et de la religion, PUF, Paris, 2008, Modèle:P., Modèle:P..</ref>.

À la fin de sa vie, Bergson peut affirmer une dernière fois ses convictions en renonçant à tous ses titres et honneurs plutôt que d’accepter l’exemption des lois antisémites imposées par le régime de Vichy. Bien que désirant se convertir au catholicisme, il y renonce par solidarité avec les autres Juifs. Marques de cette solidarité, plusieurs témoignages indiquent qu'il s'est fait porter par des proches jusqu'au commissariat de Passy, malgré sa maladie, afin de se faire recenser comme « israélite », alors qu'on l'en avait dispensé du fait de sa notoriété et parce qu'il avait rompu avec le judaïsme<ref group="n.">N'eut été cette dispense, il aurait dû le faire, les lois de Vichy et les ordonnances nazies définissant (à Paris, la définition différait par exemple en Belgique) comme juive toute personne ayant au moins trois grands-parents de « race juive », ou ceux n'en ayant que deux mais étant mariés à un Juif ou une Juive.</ref>,<ref>V. Soukhomline, Les Hitlériens à Paris, cité dans Mémoires d'un hérétique de Léon Chertok, Isabelle Stengers et Didier Gille, éd. La Découverte/documents, Modèle:P..</ref>,<ref>Sur cette déclaration de Bergson au commissariat, voir Léon Poliakov, L’Étoile jaune, Paris, Grancher, 1999,Modèle:1re éd. 1949, Modèle:P.; et Le « Fichier juif ». Rapport de la commission présidée par René Rémond au Premier ministre, Paris, Plon, 1996, Modèle:P.</ref>.

Il s'exprime ainsi en 1937 : Modèle:Citation<ref>Extrait du « Testament » écrit le Modèle:Date, cité par Floris Delattre dans son article « Les dernières années de Bergson », Revue philosophique de la France et de l'étranger, Modèle:N° à 8, mai-août 1941, page 136. On trouvera également ce texte en tête du livreModèle:Lequel que consacre à Bergson son disciple, Jacques Chevalier, qui fut ministre de l’Éducation nationale du Maréchal Pétain.</ref>.

Il précisera sa réflexion, un peu plus tard, en 1938, dans un entretien avec Jacques Chevalier : Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.

S'il fallut attendre 25 ans entre les parutions de l'Évolution créatrice et des Deux sources de la morale et de la religion, c'est notamment en raison de son état de santé, qui ne lui accordait que peu de temps pour le travail. En témoigne ainsi les nombreux courriers qu'il adresse à Jacques Chevalier qui écrit notamment : Modèle:Citation. Henri Bergson écrit, par exemple, le Modèle:1er janvier 1924 à Jacques Chevalier qu’il souffre, Modèle:Citation qui le contraint, écrit Jacques Chevalier le 3 février 1925, Modèle:Citation. De 1925 à 1931, il effectue plusieurs séjours successifs en clinique chirurgicale, en Suisse. Les traitements qu’il reçoit lors de ses nombreux séjours à Dax, pour traiter de son état rhumatismal, où Modèle:Citation, des traitements qui sont sans effets. Au cours de leurs Entretiens, le 9 avril 1926, Jacques Chevalier constate qu’il a Modèle:Citation mais que Modèle:Citation. Henri Bergson lui écrira le 25 janvier 1927 à propos d'un article que doit publier Jacques Chevalier et qu'il lui a soumis : Modèle:Citation. Il ne sort plus de son bureau et de sa chambre à coucher, Modèle:Citation. Ou encore, le 26 février 1940 : Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.

Fichier:Plaque Henri Bergson boulevard de Beauséjour.jpg
Plaque 47 boulevard de Beauséjour (Paris).

Fin de vie

Fichier:HC BERGSON H CIM-Garches 2015-09.jpg
Tombe de Henri Bergson au cimetière de Garches.

Il se rend au commissariat de son quartier pour se faire recenser, considérant la démarche comme un acte civique<ref>Modèle:Ouvrage</ref> à la suite de la publication du premier statut des juifs par l'État français, sous la main du Maréchal Philippe Pétain, le 3 octobre 1940<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. Il meurt d'une pneumonie, à 81 ans, le Modèle:Date, non pas à son domicile du 47 boulevard de Beauséjour (Modèle:16e arrondissement de Paris)<ref>Jacques Hillairet, Dictionnaire historique des rues de Paris, Éditions de Minuit, septième édition, 1963, Modèle:T. (« A-K »), « Boulevard de Beauséjour », Modèle:P..</ref>, mais dans sa maison de campagne La Gaudinière à Saint-Cyr-sur-Loire<ref>Cf. Françoise Schwab, Vladimir Jankélévitch: Le charme irrésistible du je-ne-sais-quoi, Albin Michel, Paris, 2023, ch. IV Deux influences philosophiques majeures: Georg Simmel et Henri Bergson, p. 81. L'allocution prononcée à l’occasion de la mort d'Henri Bergson, le 9 janvier 1941, par Paul Valéry, indique aussi cette date (cf. référence suivante avec le lien).</ref> ; une plaque commémorative lui rend hommage. À la cérémonie funéraire organisée à son domicile participent Fernand de Brinon, ambassadeur de Vichy en zone occupée, M. Lavelle, représentant Jacques Chevalier, alors secrétaire d'État à l'Instruction publique et Paul Valéry, représentant l'Académie française. Henri Bergson repose au cimetière de Garches, dans les Hauts-de-Seine.

Au décès d’Henri Bergson, son cabinet de travail fut conservé par sa fille, Jeanne Bergson. Elle léguera ce cabinet ainsi que les archives et manuscrits de son père à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet.

Une inscription à la mémoire d'Henri Bergson est gravée sur un pilier du Panthéon de Paris.

Fichier:Bergson Panthéon.jpg
Inscription sur un mur du Panthéon de Paris.

Philosophie

Influences

Henri Bergson a tout d'abord été influencé par le positiviste anglais Herbert Spencer, avant de s'en éloigner et de le critiquer. Dominique Combe rappelle l'écart entre L'Évolution créatrice et l'évolutionnisme de Spencer : Modèle:Citation<ref>Dominique Combe, « La « gloire » de Bergson », Études, n°10, tome 401, 2004, p. 343-354.</ref>.

Le philosophe irlandais George Berkeley et son immatérialisme ont fortement influencé Bergson, comme le rappelle Jean-Louis Vieillard-Baron<ref>Jean-Louis Vieillard-Baron, Le Secret de Bergson, Paris, Le Félin, 2013, p. 93-113.</ref>. Bergson a donné des cours sur lui au Collège de France. Bergson commente Berkeley dans Matière et mémoire (1896) et dans sa conférence sur « L'intuition philosophique » en 1911, reprise dans La Pensée et le Mouvant. Dans l'« Avant-Propos » de Matière et Mémoire, Bergson loue l'effort de Berkeley pour critiquer le réalisme des objets. Bergson se situe dans la filiation de Berkeley, même s'il critique son subjectivisme.

Bergson est enfin l'héritier de l'orientation de pensée métaphysique qu'il est convenu de nommer spiritualisme français. Il se reconnaît d'ailleurs explicitement une dette intellectuelle envers François Evellin sur point décisif<ref> « Vous renvoyons à l’argumentation de M. Evellin, que nous tenons pour décisive », L’Évolution créatrice, p.311, note</ref>.

La lecture des grands mystiques chrétiens, au premier chef Thérèse d'Avila et Jean de la Croix, est marquante pour son étude de la morale et de la religion dans Les Deux Sources<ref>Jean-Louis Vieillard-Baron, Le Secret de Bergson, p. 175-176.</ref>. Les mystiques sont proposés par Bergson comme exemples de saints ou de héros qui diffusent l'amour de l'humanité. Il les étudie comme des individus qui ont fait l'expérience de Dieu, et c'est cette approche qui retient l'attention de Bergson : non pas théoriser ou conceptualiser les choses divines, mais les expérimenter. Le philosophe néothomiste Jacques Maritain explique que Bergson Modèle:Citation<ref>Jacques Maritain, De Bergson à Thomas d'Aquin, New York, Éditions de la Maison Française, p. 80.</ref>.

La durée

Dans son Essai sur les données immédiates de la conscience (texte de 1889 présenté comme thèse de doctorat), Bergson oppose durée de la conscience et temps scientifique, comme l'explique William Marceau : Modèle:Citation bloc

Pour faire comprendre la différence entre temps et durée, Bergson faisait Modèle:Citation devant les auditeurs du Collège de France un morceau de sucre dans l'eau. Il relate cet exemple du sucre qui fond (nous dirions : qui se dissout) dans L'Évolution créatrice : Modèle:Citation bloc

Le temps est la mesure d'une répétition dans l'espace<ref name="Schumann p89">M. Schumann, Modernité de Bergson in Revue des deux Mondes, Modèle:P., Paris, septembre 1988.</ref>. Par exemple le passage d'une aiguille tournant à vitesse constante par le point le plus haut du cercle de l'horloge permet de mesurer une heure, une minute ou une seconde. Le temps est donc une façon de ramener un phénomène évolutif à des coordonnées spatiales. Ainsi dans le Modèle:Citation sont décrits les états successifs du sucre fondant dans l'eau<ref>M. Schumann, Modernité de Bergson in Revue des deux Mondes, Modèle:P., Paris, septembre 1988.</ref>. La Modèle:Citation est la pensée hors mesures de la continuité du même phénomène évolutif. Elle suppose quelque chose qui assure la continuité entre les états successifs, qui est, pour Bergson, la conscience de l'observateur, qu'il appelle Modèle:Citation parce qu'elle se perçoit non par la projection de l'évolution du système décrit sur un référentiel spatial mais par une pensée inséparable de son objet : Modèle:Citation, ce qui fera dire à Henri Gouhier Modèle:Citation.

Dans le temps se pense, par calcul, la différence entre des états successifs comme dans la durée pure, par intuition, leur continuité. Celle-ci est une intégration<ref>M. Schumann, Modernité de Bergson in Revue des deux Mondes, p. 92, Paris, septembre 1988.</ref> d'états successifs comme celui-là une différenciation d'un phénomène unique<ref>Maurice Schumann, Modernité de Bergson in Revue des deux Mondes, p. 90, Paris, septembre 1988.</ref>. C'est par l'appréhension du saut épistémologique qu'a représentée l'invention mathématique du calcul intégral que Bergson a eu l'intuition, entre 1883 et 1884 alors qu'il était professeur à Clermont-Ferrand, d'introduire la notion de Modèle:Citation et de faire faire à son tour à la physique, du moins à une phénoménologie (parce que la physique justement spatialise le devenir), un saut épistémologique<ref name="Schumann p89"/>.

Face au positivisme et au scientisme

Henri Bergson parvient ainsi à une refondation de la liberté, par ailleurs indéfinissable, mais aussi à une analyse novatrice de la relation de causalité. La causalité, quand elle est considérée sous l'angle purement scientifique, participe selon lui du principe logique d'identité (qui tend à nier la durée). Bergson a écrit Modèle:Citation<ref>Henri Bergon, Essai sur les données immédiates de la conscience in Henri Bergson Œuvres avec une Introduction d'Henri Gouhier, textes annotés par André Robinet, PUF, Paris, 1959, Modèle:P..</ref>. Cette conception de la causalité s'est en quelque sorte durcie dans deux courants philosophiques importants du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle (qui ne se confondent pas purement et simplement avec la science en tant que telle, mais la considèrent comme la seule façon valable de connaître), deux courants orientés par Modèle:Citation<ref>André Cresson, Bergson. Sa vie. Son œuvre. Sa philosophie, PUF, Paris, 1946, Modèle:P.</ref>.

Ces deux philosophies s'accordent sur l'idée que Modèle:Citation<ref>André Cresson, Bergson. Sa vie. Son œuvre. Sa philosophie, Modèle:P..</ref>. Ces deux philosophies ne divergent que de cette façon : pour les positivistes, nous ne connaissons pas le secret de l'origine de l'univers ni sa destinée. Pour le scientisme, Modèle:Citation<ref>André Cresson, ibidem, Modèle:P..</ref>. Pour Charles Péguy, cité par André A. Devaux, Bergson est Modèle:Citation, mais pas nécessairement seulement en contredisant Auguste Comte, mais en le dépassant car, estime-t-il, la réintroduction du spirituel Modèle:Citation<ref>Denis Huisman, Dictionnaire des philosophes, article Bergson d'André A.Devaux, Modèle:P., Modèle:P..</ref>.

Une métaphysique positive

Henri Bergson a cherché à construire une Modèle:Citation, et à faire de la philosophie une science fondée sur l'intuition comme méthode, dont les résultats proviendraient de l'expérience et qui serait aussi rigoureuse que les sciences fondées sur l'intelligence comme les mathématiques au premier chef. Contrairement à Platon et René Descartes, qui utilisaient la géométrie comme modèle pour faire de la métaphysique une science, Bergson prend pour modèles la biologie, la psychologie et la sociologie, sciences naissantes à son époque, fondées sur le mouvement et non la fixité conceptuelle, et selon Bergson non entièrement mathématisables. Henri Gouhier, spécialiste de Bergson, explique que pour ce dernier : Modèle:Citation bloc

L'intuition et l'intelligence

Fichier:Bergson.jpg
Henri Bergson par Jacques-Émile Blanche, 1891.

Bergson distingue Modèle:Citation et Modèle:Citation. L'intelligence est réglée sur la matière, c'est-à-dire qu'elle permet de connaître, ce que résume Frédéric Worms : Modèle:Citation<ref>Frédéric Worms, Le Vocabulaire de Bergson, Ellipses, Paris, 2000, Modèle:P..</ref>.

L'intuition, quant à elle, est réglée sur la durée. Modèle:Citation<ref>La Pensée et le Mouvant, in Henri Bergson. Œuvres op. cit. Modèle:P..</ref>. Elle transcende les cadres clos que l'intelligence fabrique pour s'approprier le monde, et va chercher à l'intérieur de la vie une source de connaissance. Bergson ouvre ainsi la voie à une métaphysique nouvelle, en affirmant que le réel, dans son origine, est connaissable. Modèle:Citation<ref>Frédéric Worms, Le Vocabulaire de Bergson, Modèle:P..</ref>.

Définition de l'intuition

Dans La Pensée et le Mouvant Bergson la définit comme Modèle:Citation<ref>La Pensée et le Mouvant, PUF, Paris, p. 181.</ref>.

L'intuition ne s'oppose pas à l'intelligence

Si l'intuition est différente de l'intelligence, elle ne s'y oppose pas. L'intuition n'est possible qu'au terme d'un long effort intellectuel, comme une ressaisie synthétique des données analysées par l'intelligence. Par ailleurs, l'intuition ne peut se communiquer qu'à l'aide de l'intelligence. C'est pourquoi la philosophie est bien, dans son mode d'exposition, un raisonnement<ref>Pour une lecture whiteheadienne de l'intuition bergsonienne, voir Michel Weber, La Dialectique de l’intuition chez A. N. Whitehead : sensation pure, pancréativité et contiguïsme. Préface de Jean Ladrière, Frankfurt / Paris, ontos verlag, 2005.</ref>.

L'élan vital

Pour Bergson, Modèle:Citation. Dans L'Évolution créatrice, il s'oppose tant au modèle mécaniste qu'au modèle finaliste de l'histoire de la vie, en ôtant à cette dernière à la fois toute prévisibilité et tout caractère programmé d'avance. Il définit l'élan vital, « force créant de façon imprévisible des formes toujours plus complexes », pulsion créatrice d'où surgissent les réalités vivantes. Soixante trois ans après la parution de L'Évolution créatrice et dix ans après la découverte du code génétique, la validité scientifique de la théorie de l'élan vital est contestée par le prix Nobel de médecine Jacques Monod dans son essai, Le Hasard et la Nécessité<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.

Rapports entre l'âme et le corps

Dans Matière et mémoire, Bergson soutient une conception dualiste de l'être : l'esprit existe par lui-même, ce n'est pas un produit de l'activité biologique du cerveau. Il affirme nettement et systématiquement cette dualité.Modèle:Référence nécessaire

Bergson n'aura de cesse de combattre le parallélisme. Il y a solidarité entre le corps et l'âme, mais rien de plus. « Un vêtement est solidaire du clou auquel il est accroché ; il tombe si l'on arrache le clou ; il oscille si le clou remue ; il se troue, il se déchire si la tête du clou est trop pointue ; il ne s'ensuit pas que chaque détail du clou corresponde à un détail du vêtement, ni que le clou soit l'équivalent du vêtement ; encore moins s'ensuit-il que le clou et le vêtement soient la même chose. » Cet argument combat la théorie selon laquelle le corps et l'âme sont liés en présence de certaines substances chimiques appliquées au corps : ils effectuent selon lui une « confusion d'abstractions », car, selon lui le cerveau est l'outil qui permet à l'esprit de connaître le monde physique et donc d'agir avec lui. Les substances chimiques affectent donc l'outil, mais nullement l'esprit lui-même. Ce serait comme un navigateur qui essaye de diriger son bateau de nuit sous un ciel couvert de nuages avec des outils qui lui permettent habituellement d'observer les étoiles.Modèle:Référence nécessaire

Aujourd'hui, la théorie de la localisation considère certaines fonctions dont la mémoire, les souvenirs (que Bergson attribue à l'esprit) comme des attributs du corps, localisés en des zones du cerveau. La finalité de cette théorie implique un décryptage possible du contenu physique d'un cerveau en un langage compréhensible, c'est-à-dire la probable lecture des pensées, des sentiments, etc. C'est la théorie actuelle de Jean-Pierre Changeux, qui cherche confirmation à travers des analyses effectuées au moyen de la caméra à positons. Pour Bergson, il y a effectivement localisation de zone de traitement de certaines informations, mais en aucun cas elle serait compréhensible par le discours : ce serait comme observer un théâtre de mimes et dire que l'on y comprend tout.Modèle:Référence nécessaire

La morale et la religion

Le dernier livre de Bergson, Les Deux sources de la morale et de la religion, concerne, comme l'indique le titre, les dimensions morales et religieuses de la vie humaine. Il distingue deux types de morales (ouverte et close)<ref>chapitre I</ref> et deux types de religion (dynamique et statique)<ref>chapitres II et III</ref>, et à partir de là deux types de sociétés<ref>chapitre IV</ref>.

Sociétés closes et sociétés ouvertes

La vie, entendue comme un mouvement créateur, n'est pas seulement responsable de la création des espèces biologiques. Elle est aussi créatrice de la société, parce que l'espèce humaine ne peut survivre qu'en société. Or, la vie en société suppose d'un côté un ensemble d'habitudes et de l'autre des hommes assez confiants dans l'avenir pour faire des projets collectifs et ne pas se morfondre égoïstement. La morale est le système d'habitudes qui permet la vie sociale, tandis que la religion assure la confiance des hommes vivant en société. Elle le fait contre le risque de dissolution sociale du fait de l'intelligence par des interdits et des tabous en inhibant l'homme contre des actions Modèle:Citation<ref>Les Deux Sources édition critique sous la direction de Frédéric Worms, PUF, Paris, 2008, p. 504 (Table analytique des Deux Dources de la morale et de la religion, p. 557-575.</ref>. Par la fonction fabulatrice en proposant l'idée d'immortalité (survivance de la société même à travers ses membres disparus) contre Modèle:Citation<ref>Les Deux Sources op.cit., p. 504).</ref>. Et enfin par des réactions défensives contre la perception par l'intelligence du risque d'imprévu entre Modèle:Citation et Modèle:Citation, ce que Bergson considère comme la superstition<ref>Les Deux Sources, op. cit., p. 504.</ref>.

Ce n'est pas le philosophe qui déduit la morale ouverte

Toutefois, cette morale et cette religion sociales ne sont pas les seules existantes. Elles sont closes, au sens où elles ne visent que la conservation de l'espèce humaine telle qu'elle est, et pour cela des sociétés séparées et opposées entre elles. L'existence de certaines personnalités exceptionnelles—les héros et les saints— prouve que la vie ne s'en tient pas à la conservation du créé, qu'il s'agisse de l'espèce humaine ou des sociétés. Ces personnalités exceptionnelles existent « de fait », faisant exister aussi la morale ouverte que Modèle:Citation<ref>Frédéric Worms « Le clos et l'ouvert dans Les Deux Sources de la morale et de la religion, une distinction qui change tout » dans Ghislain Waterlot (directeur), Bergson et la religion. Nouvelles perspectives sur Les Deux Sources de la morale et de la religion, PUF, Paris, 2008,p . 45-62, p. 54-55.</ref>. Pour Bergson, même si ce sont les héros et les saints qui font exister « de fait » la morale ouverte, ce qui est d'une certaine façon trancher en faveur de la religion et de l'amour, ce n'est pas Modèle:Citation<ref>Frédéric Worms, op. cuit., p. 54.</ref>. Cette morale ne sert plus à la conservation de la société mais à la création d'une humanité nouvelle, reprenant l'élan créateur. Le type de ces personnalités extraordinaires est le Christ, et leur grande faculté de création est le signe de leur contact avec le principe même de la création, qu'ils appellent Dieu. Ces créateurs de nouvelles valeurs sont donc aussi des mystiques.

Les sociétés démocratiques se fondent sur cette morale ouverte, qui sert de critère pour distinguer les « sociétés ouvertes » des « sociétés closes ». Le philosophe viennois Karl Popper reprend à Bergson cette distinction, et la reformule dans un contexte libéral et non mystique, dans son livre La Société ouverte et ses ennemis<ref name="OS314">Karl Popper, Open Society and Its Enemies : The Spell of Plato, Princeton University Press, p. 314.</ref>.

Jean-Louis Vieillard-Baron montre que cette humanité pour Bergson est illimitée. Ce sur quoi débouche la morale ouverte c'est, écrit-il, Modèle:Citation Modèle:Citation<ref>Jean-Louis Vieillard-Baron, « Un problème philosophique : la communion des saints », dans Transversalités, n° 116, 2010, p. 95-126.</ref>.

Étude expérimentale de Dieu

Un des grands apports de Bergson dans le domaine de la philosophie de la religion est sa proposition d'une étude expérimentale de Dieu. Les révélations des mystiques et notamment des mystiques chrétiens sont pour Bergson d'une importance capitale pour le philosophe et pour l'homme en général<ref>Modèle:Article</ref>. Les mystiques prétendant être en contact avec Dieu, il faut étudier le mysticisme pour pouvoir dire quoi que ce soit de Dieu qui ne se fonde pas sur la foi ni sur la connaissance discursive, telle que mise en œuvre dans la métaphysique classique, notamment thomiste consistant à introduire une chose particulière dans un ordre général en lui donnant un nom commun visant à déterminer la nature de Dieu, son quid (son quoi : ce qu'il est) : Modèle:Citation<ref>A. Feneuil, op. cit., Modèle:P..</ref>.

Influence sur la sociologie et l'ethnologie française

Dans L’Impact de Bergson sur la sociologie et l'ethnologie française paru dans L'Année sociologique en 2012, Heike Delitz parle d'un « effet repoussoir » sur l'école de Durkheim qui a fini par réorienter sa pensée : il s'est mis à étudier les phénomènes religieux<ref>Delitz H., L’Impact de Bergson sur la sociologie et l'ethnologie française L'Année sociologique 2012/1 (Vol. 62), p. 41-65.</ref>. Delitz citant Benrubi estime que Bergson voit en Durkheim un Modèle:Citation<ref>Delitz H., art. cit., p. 44.</ref>. À la fin de son célèbre ouvrage Les Formes élémentaires de la vie religieuse, Durkheim rejette la pensée de Bergson en soulignant que l'on ne peut penser que « sub specie aeternitatis », en plaçant et en ordonnant Modèle:Citation. Il met la société au-dessus de l'individu<ref>Durkheim É., Les Formes élémentaires de la vie religieuse. Le système totémique en Australie, Paris, PUF, 1968 [1912], p. 598 et 638.</ref>. L'influence repoussoir de Bergson se reflète également sur ses collaborateurs comme Henri Hubert, Maurice Halbwachs, Marcel Mauss, Albert Bayet. À gauche, poursuit Delitz, des penseurs comme Paul Nizan, Georges Politzer, Georges Friedmann et Henri Lefebvre créent en 1925 un groupe d’études contre Bergson<ref>Delitz H., art.cit., p. 48.</ref>.

L'exemple du vêtement et du clou

Fichier:Martiere et memoire.jpg

À propos d'un exemple que l'on retrouve d'abord dans Matière et mémoire : si l'on se fie à l'image du vêtement accroché au clou, il semble y avoir une incohérence.

  • L'esprit est défini comme immatériel, présent dans le temps et non pas dans l'espace.
  • Le corps est défini comme matériel, présent dans l'espace et non dans le temps.
  • Or, l'image du clou et du vêtement fonctionne uniquement pour deux objets matériels dans l'espace.

Cette apparence de contradiction résulte d'une lecture hâtive et tronquée. Tout Matière et mémoire s'efforce de penser l'articulation de l'esprit et du corps, l'image du clou et du vêtement n'intervient que comme métaphore et pour prouver uniquement que la solidarité diffère de l'identité ; en aucune façon, à aucun moment, Bergson ne donne cette image pour une explication complète et pertinente de sa théorie. Le corps est dans l'espace et dans un temps dont la perspective est une durée relâchée (chapitre IV, Matière et mémoire, à lire avec l'éclairage du chapitre III de L'Évolution créatrice). Il faut aussi signaler que pour Bergson, le concept, produit de l'intelligence, étant toujours suspect, le recours à des images métaphoriques permet de dépasser dans une certaine mesure cette suspicion. Non pas parce que ces images parleraient adéquatement de la chose, mais précisément parce qu'elles ne prétendent pas en parler adéquatement, mais manifestent leur inadéquation<ref>La Pensée et le Mouvant, II : Modèle:Citation</ref>,<ref>L'Énergie Spirituelle, soit dans son édition électronique [ESEE], Modèle:P.25, soit dans l'édition papier [ESEP], PUF, coll. Quadrige, Modèle:P.37.</ref>.

Bergson et l'art

Pour Bergson, l'art est comme Modèle:Citation ; l'artiste, un « idéaliste », un « distrait » qui par son retrait du monde a la capacité d'agir sur nos perceptions<ref>La finalité de l'art, Philolog</ref>. Bergson conçoit l'art comme une révélation. L'homme perçoit le monde à travers un espace homogène, créé par son moi superficiel, qui ne correspond pas à la complexité et au caractère hétérogène des choses. Parce qu'il est bien plus compatible avec la société et le langage, le moi superficiel domine le moi profond, qu'il faudrait rechercher pour acquérir sa liberté. L'art permet d'atteindre ce moi profond: l'art a un pouvoir révélateur qui permet à l'homme de prendre conscience du monde dans sa richesse et de se détacher, au moins temporairement, de son moi superficiel envahissant. L'artiste fait passer des sentiments personnels et nous fait « éprouver ce qu'il ne saurait nous faire comprendre »<ref>Essai sur les données immédiates de la conscience</ref>.

Bergson et la littérature de son temps

Fichier:Aktion 1914.jpg
Péguy vu par Egon Schiele sur le périodique allemand L'Action à l'occasion de sa mort en 1914 sur le front de Champagne.

J.-M. Peny écrit que l'Modèle:Citation<ref>J-M Peny, La grande renaissance de la littérature chrétienne, in Jean Duchesne [directeur], Histoire chrétienne de la littérature. L'esprit des lettres de l'Antiquité à nos jours, Flammarion, Paris, 1996, Modèle:P..</ref>. Cette influence se serait exercée aussi sur des écrivains qui ne peuvent être considérés comme relevant de la catégorie Littérature chrétienne, comme Marcel Proust. Mais en ce qui concerne Proust, la question est controversée. Pour Joyce N. Megay, Modèle:Citation<ref>The Bulletin of the Rocky Mountain Modern Language Association, Vol. 27, Modèle:N°, juin 1973, Modèle:P., Modèle:P..</ref>. Même si dans ses Chroniques, Marcel Proust donne l'impression de partager le point de vue de Bergson (Modèle:Citation<ref>Marcel Proust, Modèle:36e éd., Paris, 1927, Modèle:P..</ref>), il n'a pas la même conception que Bergson de la durée. H. Lazar considère lui aussi que Bergson et Proust n'ont pas tout à fait les mêmes conceptions du temps, et que l'influence du premier sur le second doit être nuancée<ref>Chronique. Institut catholique de Toulouse, Modèle:N°, Modèle:P., 1997, Modèle:P.</ref>. Si Proust a bien assisté à la leçon inaugurale de Bergson au Collège de France, en 1900, s'il a lu Modèle:Citation<ref>Pierre-Edmond Robert, Proust, bergsonnien malgré lui in Le Magazine littéraire, Modèle:N°, avril 2000.</ref>.

En revanche, chez Charles Péguy cette influence est clairement assumée ; d'ailleurs, la Note conjointe sur Monsieur Bergson est un commentaire (d'écrivain) de la pensée du philosophe, comme ce passage où il reprend l'opposition du « tout fait » bergsonnien au « se faisant » : Modèle:Citation<ref>Charles Péguy Note conjointe sur Monsieur Bergson in Note conjointe, Paris, Gallimard, 1935, Modèle:P..</ref>.

Dans ses longs Entretiens avec Bergson, Jacques Chevalier, ami, confident et en quelque mesure héritier spirituel de Bergson<ref>La plupart des commentateurs comme Frédéric Worms, Anthony Feneuil… citent ces entretiens sans faire état de réserves…</ref>, a souvent évoqué avec lui les écrivains qui leur étaient contemporains, parfois anecdotiquement comme Paul Claudel, ou par exemple Henry Bordeaux (qu'il apprécie) et quelques autres. Il est plus précis en ce qui concerne Paul Bourget; quand Jacques Chevalier lui demande s'il a lu cet auteur et s'il a exercé une influence sur lui, Bergson répond que non : Modèle:Citation<ref>Jacques Chevalier, Entretiens avec Bergson, Paris, Plon, 1959, Modèle:P..</ref>. Il est en revanche plus positif à l'égard de Vie de Beethoven, de Romain Rolland, où il retrouve la collaboration de la construction et de l’inspiration. Il est également enthousiaste à l'égard du roman de Joseph Malègue, Augustin ou le Maître est là que Chevalier voit sur le bureau de Bergson Modèle:Citation et dont le philosophe pense que Modèle:Citation<ref>Jacques Chevalier, op.cit., Modèle:P..</ref>.

Fernand Vial a écrit dans la revue américaine Thought : « D’une manière générale, on peut dire que, en raison de son style, de son intérêt pour les problèmes psychologiques et de son appel permanent à l’expérience commune, Bergson a comblé le fossé existant entre la philosophie et la littérature. Une étude de la littérature contemporaine montrerait aisément que les notions de temps, de durée, d’espace, de conscience et de personnalité ont pénétré le roman, la poésie et le théâtre. Il serait absurde bien entendu de dire que tout auteur qui traite de tels sujets a médité l’Essai sur les données immédiates de la conscience ou Matière et mémoire. Mais le bergsonisme a seulement créé une atmosphère intellectuelle de laquelle la création littéraire ne peut pas s’abstraire<ref group="n.">Fernand Vial, Henri Bergson: Spiritual and Literary Influence in Thought, Modèle:N°, juin 1941 : « Modèle:Langue. » Citation de Matière et Mémoire, chapitre III : Modèle:Citation à mettre en parallèle avec les deux citations de Du côté de chez Swann de Marcel Proust : Modèle:Citation.</ref>.

Disciples et critiques du bergsonisme

En France

La philosophie de Bergson a eu un effet de mode en France de 1900 à 1914. Le spécialiste Jean-Louis Vieillard-Baron écrit que Modèle:Citation<ref>Jean-Louis Vieillard-Baron, Le Secret de Bergson, Paris, Le Félin, 2013, p. 215.</ref>.

Bergson eut aussi des disciples enthousiastes comme Charles Péguy (qui admire chez Bergson la volonté de se défaire des habitudes et des pensées toutes faites, et qui le loue d'avoir valorisé le spirituel contre la puissance de l'argent<ref>Charles Péguy, Note conjointe, Paris, Gallimard, 1935, p. 20 : Modèle:Citation</ref>), Georges Sorel, le jeune Sartre (qui se rattache à la Modèle:Citation de Bergson pour penser la mobilité de l'art du cinéma<ref>Jean-Paul Sartre, Écrits de jeunesse, Paris, Gallimard, 1990, p. 388-389.</ref>). Bergson a marqué profondément des penseurs catholiques de son temps comme Étienne Gilson ou Jacques Chevalier, même après la mise à l'Index en 1914 de ses trois premiers livres principaux. Gilson écrit dans son ouvrage posthume L'Athéisme difficile, paru en 1979 : Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage. Voir aussi, du même auteur, Le Philosophe et la Théologie, Paris, Vrin, 1960, ch. VI et VIII.</ref>.

Mais le bergsonisme a aussi fait l'objet de critiques importantes. Julien Benda et Georges Politzer s'opposent à sa philosophie spiritualiste<ref>Jean-Louis Vieillard-Baron, Le Secret de Bergson, Paris, Le Félin, 2013, p. 221.</ref>, et la qualifient d'irrationaliste. Jacques Maritain, philosophe thomiste, rend hommage à Bergson pour avoir redonné ses droits à la métaphysique et à la mystique mais le range aussi dans l'irrationalisme, parce que selon lui Bergson dans les Deux Sources met l'accent sur l'émotion plutôt que sur la raison comme source de la morale<ref>Jacques Maritain, De Bergson à Thomas d'Aquin, New York, Éditions de la Maison Française, p. 63.</ref>. Son ouvrage de 1913, La philosophie bergsonienne, avait déjà fait la critique du bergsonisme l'année juste avant la mise à l'Index.

Vladimir Jankélévitch a été séduit par la pensée de Bergson. Il lui a consacré plusieurs articles<ref>Notamment: Vladimir Jankélévitch, "Deux philosophes de la vie: Bergson et Guyau" in Revue philosophique de la France et de l'étranger, n° 49, 2, 1924, pp. 402-449 (repris dans Premières et dernières pages, Seuil, Paris, 1994, ch. 1, pp. 16-63); "Prolégomènes au bergsonisme" in Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 35, n° 4, octobre-décembre 1928, pp. 437-490; "Bergsonisme et biologie" in Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 36, n° 2, avril-juin 1929, pp. 253-265; "Les Deux Sources de la morale et de la religion" in Revue de Métaphysique et de Morale, vol. 40, n° 1, janvier-mars 1933, pp. 101-117.</ref> et un livre, Henri Bergson<ref>Vladimir Jankélévitch, Henri Bergson, Alcan, Paris, 1931; rééd. PUF, Paris, 1959.</ref>, qui tous rencontrent l'approbation et les éloges de Bergson<ref>Françoise Schwab, Vladimir Jankélévitch: Le charme irrésistible du je-ne-sais-quoi, Albin Michel, Paris, 2023, pp. 72-79.</ref>.

Le phénoménologue Maurice Merleau-Ponty, qui a donné un cours sur L'union de l'âme et du corps chez Malebranche, Biran, Bergson à l'École normale supérieure, retrace le parcours de Bergson vis-à-vis de ses disciples et de ses détracteurs dans une conférence de 1959, « Bergson se faisant ». Merleau-Ponty affirme que Bergson est presque un Modèle:Citation lors des années (avant la mise à l'Index) où Charles Péguy et Georges Sorel se font ses disciples, même s'il connaît une période de gloire au Collège de France et qu'il sera bientôt académicien. Bergson devient ensuite un auteur canonique, reconnu même par les théologiens catholiques qui l'avaient condamné comme Antonin-Gilbert Sertillanges. Merleau-Ponty écrit : Modèle:Citation bloc

Bergson a également influencé Emmanuel Levinas, un autre philosophe existentiel avec Sartre et Merleau-Ponty, tourné lui vers la philosophie juive. Dans un dialogue avec Philippe Nemo, Levinas situe l’Essai sur les données immédiates de la conscience de Bergson parmi les cinq Modèle:Citation<ref>Emmanuel Levinas, Éthique et Infini, Paris, Le Livre de Poche, 1982, p. 27-28. Les quatre autres livres sont : Phèdre ; Critique de la raison pure ; Phénoménologie de l'esprit ; Être et Temps.</ref>.

À partir des années 1960, Gilles Deleuze réactualise la philosophie bergsonienne. Il est l'auteur d'une monographie sur Le Bergsonisme, et il se sert de la théorie bergsonienne de l'image dans Matière et mémoire pour penser le cinéma, dans ses cours<ref>Gilles Deleuze, « Cours du 10/11/1981 », sur La voix de Gilles Deleuze en ligne, consulté le 11 août 2016.</ref>, et ses deux ouvrages Cinéma 1 et Cinéma 2 (1983-1985).

Dans la philosophie analytique

Fichier:No 3909 Page 103, M. Henri Bergson, le jour de sa réception.jpg
Henri Bergson, le jour de sa réception à l'Académie, 1918.

Certains représentants de la philosophie analytique, contemporains de Bergson, ont fortement critiqué sa méthode et sa philosophie. C'est le cas de Bertrand Russell et Nelson Goodman notamment. Russell, dans ses Essais sceptiques, prononce le jugement suivant à propos du livre de Bergson L'Évolution créatrice : Modèle:Citation<ref>Cité dans la Lettre du Collège de France, n°22, p. 29 lire en ligne.</ref>. Il écrit aussi dans Modèle:Langue, Modèle:Citation<ref>Bertrand Russell, « The Philosophy of Bergson », The Monist, vol. 22 (1912), p. 321-347.</ref>.

Nelson Goodman, philosophe influencé par le Cercle de Vienne, reproche à Bergson son Modèle:Citation et son usage de la notion d'intuition. Pour Goodman, l'intuition est une notion fausse, on ne peut pas sortir du registre conceptuel et du langage. Les spécialistes de Goodman Jacques Morizot et Roger Pouivet résument brièvement l'opposition : Modèle:Citation<ref>Jacques Morizot et Roger Pouivet, La philosophie de Nelson Goodman. Repères, Paris, Vrin, 2011, p. 16.</ref>.

Cependant, le philosophe viennois Karl Popper lui emprunte la distinction entre Modèle:Citation et Modèle:Citation, dans son livre La Société ouverte et ses ennemis. Il en fait une interprétation non mystique<ref name="OS314"/>.

Il faut noter aussi que Bergson se sentait proche de la métaphysique d'Alfred North Whitehead, qu'il a connue grâce à l'essai de Jean Wahl, Vers le concret (1932). Bergson évoque une Modèle:Citation entre les idées de Whitehead et les siennes, dans une note de La Pensée et le Mouvant<ref>Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, Paris, PUF, 1998, p. 78.</ref>. Whitehead, de son côté, avait rendu hommage à Bergson dans Le Concept de nature (1920) et Procès et réalité (1929), mais le spécialiste Didier Debaise note une bifurcation entre les deux philosophies plus qu'une continuité<ref>Didier Debaise, « Devenirs et individuations. L’hommage de Whitehead à Bergson », Noesis, n°13, 2008, 15 décembre 2009, consulté le 10 août 2016.</ref>.

Œuvres

  • Essai sur les données immédiates de la conscience, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1889.
  • Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l'esprit, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1896.
  • Le Rire. Essai sur la signification du comique, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1900.
  • L'Évolution créatrice, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1907.
  • Le matérialisme actuel , (collectif), coll. « Bibliothèque de philosophie scientifique », Paris, Ernest Flammarion, 1913.
  • L'Énergie spirituelle. Essais et conférences, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1919.
  • Durée et Simultanéité. À propos de la théorie d'Einstein, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1922.
  • Les Deux sources de la morale et de la religion, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1932.
  • La Pensée et le Mouvant. Essais et conférences, Paris, Félix Alcan, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1934.
  • Œuvres (Édition du Centenaire), textes annotés par André Robinet, introduction par Henri Gouhier, Paris, Presses Universitaires de France, 1959 [reprend tous les ouvrages publiés du vivant de Bergson, à l'exception de la thèse latine et de Durée et Simultanéité].
  • Mélanges, textes publiés et annotés par André Robinet avec la collaboration de Rose- Marie Mossé-Bastide, Martine Robinet et Michel Gauthier, avant-propos par Henri Gouhier, Paris, Presses Universitaires de France, 1972 [contient entre autres la traduction de la thèse latine de Bergson, Quid Aristoteles de loco senserit, Durée et Simultanéité, et une section "Correspondance, pièces diverses, documents"]. Une grande partie des textes ont été repris dans le cadre de l'édition critique de Bergson aux Presses Universitaires de France: Écrits philosophiques, éd. Frédéric Worms (s. dir.), Paris, Presses Universitaires de France, coll. «Quadrige», 2011.
  • Cours, 4 vol., éd. Henri Hude (avec la collab. de Jean-Louis Dumas et Françoise Vinel), avant-propos par Henri Gouhier, Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Épiméthée", 1990-2000.
  • Correspondances, textes publiés et annotés par André Robinet avec la collaboration de Nelly Bruyère, Brigitte Sitbon-Peillon, Suzanne Stern-Gillet, Paris, Presses Universitaires de France, 2002.
  • Leçons clermontoises, 2 vol., éd. Renzo Raggianti, Paris, L’Harmattan, coll. « La philosophie en commun », 2003-2006.
  • Cours de psychologie de 1892-1893 au lycée Henri-IV, éd. Alain Panero. Paris-Milan, SÉHA-Arché, coll. «Anecdota», 2008.
  • Cours de philosophie de 1886-1887 au lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand : morale, métaphysique, histoire de la philosophie, éd. Sylvain Matton, prés. Alain Panero, Paris-Milan, SÉHA-Arché, coll. Anecdota, 2010.
  • Cours de morale, de métaphysique et d’histoire de la philosophie moderne de 1892-1893 au lycée Henri IV, éd. Sylvain Matton, prés. Alain Panero, Paris-Milan, SÉHA-Arché, coll. Anecdota, 2010.
  • Nombreux cours et extraits de cours, notamment au Collège de France, publiés dans les Annales bergsoniennes (cf. infra).

Hommages posthumes

Une rue est nommée Bergson depuis le 9 novembre 1944 sur la commune de Saint-Étienne, puis tout le quartier porte son nom.

Un collège a été construit à Montigny-le-Bretonneux grâce au don de terrain d'Henri Bergson pour l'intérêt général : le collège Bergson. Il a été détruit en 2017 pour faire place en 2022<ref>https://www.montigny78.fr/20-2461/actualites/fiche/pole-culturel-bergson-le-projet-retenu.htm</ref> à un pôle culturel et 137 logements privés. Le nom est remplacé par C. Aznavour<ref>Le Parisien, Aurélie Foulon, 28 novembre 2017 - Projet C. Aznavour remplace BERGSON https://www.leparisien.fr/yvelines-78/montigny-le-bretonneux-78180/montigny-le-bretonneux-le-college-bergson-vit-ses-dernieres-heures-28-11-2017-7420947.php</ref>.

Un collège/lycée porte son nom dans le Modèle:19e arrondissement de Paris, rue Édouard-Pailleron, près des Buttes-Chaumont.

Notes et références

Notes

Modèle:Références

Références

Modèle:Références nombreuses

Voir aussi

Modèle:Autres projets

Bibliographie

Fichier:Book signed by Roger Mauduit and offered to Henri Bergson.JPG
Envoi autographe de Roger Mauduit à Henri Bergson
conservé à la Bibliothèque de sciences humaines et sociales Paris Descartes-CNRS.
  • Une bibliographie générale dans l'ordre chronologique de 1878 à 1952 se trouve dans le "Bergson éducateur" de Rose-Marie Mossé-Bastide, Paris, Presses Universitaires de France, 1955 Modèle:P.382-450.
  • Lydie Adolphe, La philosophie religieuse de Bergson, Paris, Presses universitaires de France, 1946.
  • Lydie Adolphe, La dialectique des images chez Bergson, Paris, Presses universitaires, 1951.
  • Lydie Adolphe, L'Univers bergsonien, Paris, La Colombe, 1955.
  • Roméo Arbour, Henri Bergson et les lettres françaises, Paris, José Corti, 1956.
  • François Azouvi, La Gloire de Bergson. Essai sur le magistère philosophique, Paris, Gallimard, coll. "NRF Essais", 2007.
  • Madeleine Barthélémy-Madaule, Bergson, Paris, Seuil, coll. « Écrivains de toujours », 1967.
  • Giuseppe Bianco, Après Bergson. Portrait de groupe avec philosophe, Paris, PUF, coll. "Philosophie Française contemporaine", 2015.
  • Georges Canguilhem, « Le concept et la vie », Revue Philosophique de Louvain. Troisième série 64, 1966, Modèle:P..
  • Jacques Chevalier, Bergson, Paris, Plon, coll. "Les Maîtres de la pensée française", 1926 (réimpr. 1947).
  • Jacques Chevalier, Entretiens avec Bergson, Paris, Plon, 1959.
  • Bruno Clément, Henri Bergson, Prix Nobel de littérature, Lagrasse, Verdier, 2021.
  • Gilles Deleuze, « La conception de la différence chez Bergson », Études bergsoniennes IV, Paris, Presses Universitaires de France, 1956, Modèle:P..
  • Gilles Deleuze, Le Bergsonisme, Presses Universitaires de France, coll. "Quadrige", 1963.
  • Pierre-Alexandre Fradet, Derrida-Bergson. Sur l'immédiateté, Hermann, Paris, coll. "Hermann Philosophie", 2014. Modèle:ISBN
  • Arnaud François, Bergson, Paris, Ellipses, 2008.
  • Arnaud François, Bergson, Schopenhauer, Nietzsche. Volonté et réalité, Paris, Presses Universitaires de France, 2008.
  • Henri Gouhier, Bergson dans l'histoire de la pensée occidentale, Paris, J. Vrin, coll. Bibliothèque d'histoire de la philosophie, 1989.
  • Henri Gouhier, Bergson et le Christ des Évangiles, Paris, J. Vrin, coll. "Reprise", 1999 (Modèle:3e éd.).
  • Léon Husson, L'Intellectualisme de Bergson. Genèse et développement de la notion bergsonienne d'intuition, Paris, F. Alcan, 1947.
  • Vladimir Jankélévitch, Henri Bergson, Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Les Grands penseurs", 1959 (Modèle:2e éd.).
  • Nadia Yala Kisukidi, Bergson ou l'humanité créatrice, Paris, CNRS éditions, 2013.
  • Louis Lavelle, « Henri Bergson », dans La Philosophie française entre les deux guerres, Paris, Aubier, 1942.
  • Louis Lavelle, La pensée religieuse d'Henri Bergson, Réédition de l'article originellement paru dans la Revue Philosophique de la France et de l'Étranger t. 131, n°. 3/8, mars-août, 1941, Éditions localement transcendantes, Puyméras, 2021.
  • Michel Lefeuvre, La Réhabilitation du temps. Bergson et les sciences d'aujourd'hui, Paris, L'Harmattan, 2005.
  • Jacques Maritain, La Philosophie bergsonienne, Paris, Librairie Valois, 1930 (1913).
  • Jacques Maritain, De Bergson à Thomas d'Aquin, Flammarion, 1947.
  • Maurice Merleau-Ponty, « Bergson se faisant », dans Signes, Paris, Gallimard, 1960, Modèle:P..
  • Maurice Merleau-Ponty, L'Union de l'âme et du corps chez Malebranche, Biran et Bergson. Notes prises au cours de Maurice Merleau-Ponty à l'École normale supérieure (1947-1948), recueillies et rédigées par Jean Deprun, Paris, J. Vrin, coll. "Bibliothèque des Textes Philosophiques", 1997 (nouvelle édition revue et augmentée d'un fragment inédit).
  • Jean Milet, Bergson et le calcul infinitésimal ou la Raison et le temps, Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Bibliothèque de philosophie contemporaine", 1974.
  • Paul-Antoine Miquel, Bergson ou l'imagination métaphysique, Paris, Kimé, 2007.
  • Paul Nizan, Les Chiens de garde, Les Éditions Rieder, Paris, 1932.
  • Charles Péguy, Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne, Paris, Cahiers de la quinzaine, Modèle:15e série, cahier 8, 1915 (repris dans Œuvres en prose complètes, t. III, Paris, Gallimard, coll. "Bibliothèque de la Pléiade", 1992).
  • Alain Panero, Sylvain Matton, Mireille Delbraccio (éds), Bergson professeur, Louvain, Peeters, 2015.
  • Ioulia Podoroga, Penser en durée. Bergson au fil de ses images, Lausanne, L'Âge d'Homme, 2014.
  • Bento Prado Jr., Présence et champ transcendantal. Conscience et négativité dans la philosophie de Bergson, trad. Renaud Barbaras, Hildesheim-Zürich-New York, G. Olms, coll. " Europaea memoria. Reihe I : Studien", 2002.
  • Camille Riquier, Archéologie de Bergson, Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Épiméthée", 2009, seconde édition Coll. "Quadrige", 2022.
  • Philippe Soulez et Frédéric Worms, Bergson : biographie, Paris, Flammarion, coll. "Grandes biographies", 1997.
  • Karl Sarafidis, Bergson. La création de soi par soi, Paris, Eyrolles, 2013.
  • Albert Thibaudet, Le Bergsonisme ( Trente ans de vie française, III), 2 vol., Paris, Éditions de la Nouvelle Revue française, 1923.
  • Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson, Modèle:Coll., PUF, 1991. Rééd. 1993 et 2007.
  • Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson et le bergsonisme, Paris, A. Colin, 1999.
  • Jean-Louis Vieillard-Baron, Le Secret de Bergson, Paris, éditions du Félin, 2013.
  • Ghislain Waterlot, Bergson et la religion. Nouvelles perspectives sur Les Deux Sources de la morale et de la religion, Paris, Presses Universitaires de France, 2008.
  • Frédéric Worms, Bergson ou les deux sens de la vie , Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Quadrige", 2004.
  • Frédéric Worms, « La conception bergsonienne du temps », in Philosophie 54, Paris, Éditions de Minuit, 1997, Modèle:P..
  • Frédéric Worms (dir.), Annales bergsoniennes, Paris, Presses Universitaires de France, coll. "Épiméthée", 2002-2020 (en 9 volumes).
  • Caterina Zanfi, Bergson et la philosophie allemande : 1907-1932, Paris, Armand Colin, 2013.
  • Michel Laval, Il est cinq heures, le cours est terminé. Bergson, itinéraire. Paris, Les belles lettres, 2023.

Articles connexes

Liens externes

Bases de données et dictionnaires

Modèle:Palette Modèle:Portail