Organisation révolutionnaire anarchiste

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Modèle:Infobox/Début Modèle:Infobox Parti politique Modèle:Infobox/FinL’Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA) est une organisation ayant existé de 1967 à 1976. D'abord tendance interne de la Fédération anarchiste, elle prit son indépendance en 1970, et s'inscrivit dans les luttes emblématiques des années 1970. En 1976, elle éclata en deux : une minorité forma l'Union des travailleurs communistes libertaires ; la majorité se rebaptisa Organisation communiste libertaire.

1967-1970 : l’ORA, tendance de la FA

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Le numéro spécial de L'Insurgé en Mai 68, le premier à mentionner « journal de l'ORA ».

En mai 1967, le congrès de la Fédération anarchiste à Bordeaux fut le théâtre d’une crise violente opposant un courant « pro-situationniste », un courant traditionaliste derrière Maurice Joyeux et un courant communiste libertaire derrière Maurice Fayolle. Au terme du congrès, une douzaine de groupes quittèrent la FA<ref name=":0">Sylvain Boulouque, Guillaume Davranche, Rolf Dupuy, notice de Maurice Fayolle dans Le Maitron. Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et social. </ref>.

Les communistes libertaires se maintinrent dans la FA, mais décidèrent d’y former une tendance sous le nom Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA) – sa constitution fut présentée dans le Bulletin intérieur de la FA de septembre 1967.

La tendance ORA eut son adresse au 7, rue du Moulin-des-Prés, à Paris 13e, et se structura autour d’un bulletin interne, L’Organisation libertaire, dont le premier numéro, en janvier 1968, se référait à la Plate-forme de Makhno et Archinov. Maurice Fayolle en rédigea l’éditorial. « Autour de ce bulletin, écrivit-il, une équipe s’est constituée, qui s’est donnée pour objectif la création en ce pays d’une organisation anarchiste révolutionnaire. »<ref name=":0" /> Mai 68 allait lui donner l’occasion de passer à l’acte.

Durant les événements parisiens, les militants de l’ORA agirent pour la première fois sous leur propre sigle. A la Sorbonne, l'ORA eut notamment son « quartier général » dans l'escalier E<ref name=":1">Rolf Dupuy et Guy Malouvier : « Chacun de ces mots comptait : organisation ; révolutionnaire ; anarchiste », entretien dans Alternative libertaire de mai 2008.</ref>. Le journal du groupe FA de Paris 13e, L'Insurgé, se transforma alors officiellement en organe de l'ORA<ref>Notice de L'Insurgé dans René Bianco, « Répertoire des périodiques anarchistes de langue française : un siècle de presse anarchiste d’expression française, 1880-1983 », Aix-Marseille, 1987.</ref>. Durant les événements de mai-juin, les anarchistes furent très présents, tenant notamment plusieurs rues durant la nuit des barricades<ref>« Carte : le 10 mai, nuit des barricades », Alternative libertaire, mai 2008. </ref>. Bon nombre de jeunes rejoignirent l’ORA, tout en refusant, selon le témoignage de Rolf Dupuy, d’adhérer à la FA<ref name=":1" />. Cette situation ambiguë poussa les responsables de l'ORA à se dissocier de la FA par étapes.

Dès septembre 1968, au congrès anarchiste international de Carrare, l’ORA eut sa propre délégation. En novembre 1968, au congrès FA de Marseille, ses militants furent accusés de fractionnisme et démis de leurs mandats au sein de la FA<ref name=":0" />.

1970-1972 : effervescence et débats centrifuges

Fichier:"Front libertaire" n°17 (mai-juin 1972).jpg
Front libertaire n°17 (mai-juin 1972). A partir de ce numéro, le drapeau noir disparaît du logo-titre.

En mars 1970, une réunion nationale décida la séparation définitive d'avec la FA. L'ORA exista dès lors comme organisation à part entière. Elle transféra son adresse au siège de la CNT espagnole en exil, 24, rue Sainte-Marthe, à Paris 10e, puis suivit les Espagnols dans un lieu plus vaste, au 33, rue des Vignoles, à Paris 20e.

En octobre 1970, son périodique L’Insurgé fut remplacé par un mensuel grand format (28x44,5 cm), Front libertaire des luttes de classes, placé en kiosque et dont le tirage devait culminer à 10.000 exemplaires en 1974<ref>Notice de Front libertaire dans René Bianco, « Répertoire des périodiques anarchistes de langue française : un siècle de presse anarchiste d’expression française, 1880-1983 », Aix-Marseille, 1987.</ref>.

Les années 1970-1971 furent marquées par de vigoureux débats d’orientation. L'ORA naissante avait certes adopté le modèle organisationnel plateformiste mais, au-delà, c'était le flou. L’anarchisme traditionnel tel que véhiculé par la FA étant désormais rejeté, la réflexion était ouverte sur le marxisme, le féminisme, l’écologie, le syndicalisme révolutionnaire, le conseillisme et toutes les thématiques montantes dans l’après-Mai 68<ref name=":2">Roland Biard, Histoire du mouvement anarchiste en France 1945-1975, Galilée, 1976, page 235.</ref>...

Constamment traversée de débats et de remises en question, l'ORA passa donc par une phase de forte instabilité. Dans son mémoire de sociologie sur l'ORA, Philippe Dubacq devait même parler de « crise perpétuelle » pour caractériser toute la période 1969-1974<ref>Philippe Dubacq, « Anarchisme et marxisme dans l'après-68. Le cas de l'Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA) », mémoire de sociologie politique, université Paris-X Nanterre, 1992.</ref>.

En 1971, une tentative d’unification échoua entre l’ORA et le Mouvement communiste libertaire de Daniel Guérin et Georges Fontenis. La même année, quelques militants dont Guy Malouvier quittèrent l’ORA pour fonder la Fédération communiste anarchiste d’Occitanie (Faco). Son camarade Michel Cavallier et plusieurs autres adhérèrent à un groupe maoïste (l’UCF-ML). D’autres encore, exclus en 1972, rejoignirent la Ligue communiste.

Les départs de ces militantes et militants issus de la FA furent compensés par la montée de la génération issue de Mai 68<ref name=":2" />.

1972-1974 : consolidation inachevée

Cortège ORA en manifestation
Cortège de l'ORA en manifestation (non datée).

En lançant Front libertaire à l'automne 1970, l'ORA avait invité sa mouvance sympathisante à former des groupes autour de ce journal. Ces groupes, bientôt nommés cercles Front libertaire (CFL), servirent de « sas d’entrée » et de formation avant une adhésion pleine et entière à l’ORA. Le but était d'éviter que l'organisation soit déstabilisé par l’afflux permanent de nouvelles recrues parfois velléitaires.

Les CFL connurent une expansion entre 1971 et 1973, passant d’une dizaine à 130 selon le témoignage de leur coordinateur, Bernard Gaboriau<ref>Guillaume Davranche, notice de Bernard Gaboriau dans Le Maitron. Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et social.</ref>. L'existence des CFL créa cependant un nouveau type de déséquilibre pour l'ORA, en drainant quantité de gens qui militaient de facto pour l'ORA, voire participaient couramment à ses réunions, mais sans cotisation ni droit de vote dans l'organisation. Pour cette raison, en 1973, il fut décidé d'intégrer directement l'ensemble des CFL à l'ORA.

L'organisation fit à cette période un intense effort de formation interne, en éditant de nombreux cahiers estampillées « Textes de référence » et « Documents »<ref>Tous ces cahiers de formation sont conservés au Fonds d'archives communistes libertaires, à Montreuil.</ref>, dont Roland Biard (alias Julien Stern) fut en bonne partie le maître d’œuvre<ref>Rolf Dupuy, Marianne Enckell, notice de Roland Biard dans Le Maitron. Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et social.</ref>.

Alors que les membres de la FA se retrouvaient plutôt à la CGT-Force ouvrière, celles et ceux de l’ORA militaient en priorité à la CFDT, qui se réclamait alors du socialisme autogestionnaire. Cependant, au sein de l'ORA cet engagement majoritaire dans l'action syndicale coexista jusquà la fin avec une frange ultra-gauche antisyndicaliste.

Fichier:"Astérix et la hiérarchix".jpg
Une célèbre affiche de l'ORA : « Astérix et la hiérarchix ».

Fin 1973, l'historien et militant révolutionnaire historique Daniel Guérin donna son adhésion à l’ORA.

L'ORA participa aux grandes luttes de l'époque : le mouvement lycéen de 1973, LIP, le Larzac, et développa la solidarité avec le mouvement libertaire clandestin au Portugal<ref>Théo Roumier, « Portugal libertário ! », Mediapart, 5 mars 2018.</ref>  et en Espagne. Dans la foulée de l'assassinat de Salvador Puig-Antich par l’État franquiste, des équipes de l'ORA commirent par exemple plusieurs attentats contre les intérêts espagnols en France<ref>Théo Rival, « 1974 : l’État franquiste assassine Puig-Antich », Alternative libertaire, mars 2014. </ref>.

L'ORA tâcha aussi de développer son action ouvrière, et une série de bulletins d'entreprise fleurirent à l'époque : Le Postier affranchi, Taupe libertaire PTT, L'Aller-r'tour, La Pause (aux PTT) ; Le Rail enchaîné (à la SNCF) ; L'Écho libertaire des luttes de classes (Thomson-CSF) ; Autogestion et luttes de classes (Dassault) ; Banqueroute, Émancipation, Le Tranchant (Crédit lyonnais)...<ref>Bulletins conservés au Fonds d'archives communistes libertaires, à Montreuil.</ref> ; Taupe libertaire-Chenesseau (fonderie orléanaise Chenesseau)<ref name=":3">Théo Roumier, « Être anarchistes et révolutionnaires à Orléans dans les années 68 », Mediapart, 1er février 2018. </ref> ; Chiens de garde (éducateurs)…<ref name=":4">Roland Biard, Histoire du mouvement anarchiste 1945-1975, Galilée, 1976, page 235.</ref>

Un groupe de l'ORA fut précurseur dans la lutte antivalidiste, avec le bulletin Handicapés méchants<ref>Bulletin conservé au Fonds d'archives communistes libertaires, à Montreuil.</ref>.

Dans les années 1974-1975, l'organisation encouragea également la création de journaux de quartier non estampillés ORA, mais véhiculant des thèmes anticapitalistes et anti-autoritaires : Le Canard du 13e (Paris 13e), Le Cri du 5e (Paris 5e), Le Cri du Boulonnais (Boulogne-sur-Mer)<ref name=":4" />, La Biscotte du Val-d'Oise,  Klapperstei 68 (Mulhouse), L’Anti-brouillard (Besançon), Le Clampin libéré (Lille), La Commune (Orléans)<ref name=":3" />...

1974-1976 : vers la scission OCL-UTCL

Fichier:Affiche en soutien aux comités de soldats.jpg
Affiche de l'ORA en soutien aux comités de soldats (décembre 1975).

Lors de la Rencontre nationale de la Pentecôte 1974, l’ORA adopta l’orientation « Pour qu’une force s’assemble », qui visait à rassembler largement la « gauche ouvrière et syndicale ». Mais cette orientation fut peu mise en œuvre dans l'organisation, et cela mécontenta un groupe de jeunes ouvriers, très marqués par les grèves de 1974 dans le rail, les PTT et les banques<ref>Table ronde avec 12 anciennes et anciens : « L'UTCL, un ouvriérisme à visage humain ! », in Théo Rival, Syndicalistes et libertaires. Une histoire de l'UTCL, Alternative libertaire, 2013, page 234.</ref>.

Les tendances étant interdites à l'ORA, ces jeunes militants décidèrent de se coordonner au sein d'une fraction syndicaliste révolutionnaire, plutôt ouvriériste, qui se nomma Union des travailleurs communistes libertaires (UTCL) et édita un bulletin interne, Les Malheurs de Lucie.

Durant l'année 1975, le fossé se creusa entre la minorité UTCL et la majorité de l'ORA, de plus en plus travaillée par une sensibilité antisyndicaliste et prônant l'action « hors entreprise », notamment via les comités de quartiers<ref>Entretien avec Thierry Renard et Patrice Spadoni, « Il y avait toute une mythologie qui entourait l'ORA », in Théo Rival, Syndicalistes et libertaires. Une histoire de l'UTCL, Alternative libertaire, 2013, pages 225-226.</ref>.

Finalement, à l'approche du congrès de Pâques 1976, à Orléans, deux motions d'orientation antagoniques furent déposées, dont une avait été rédigée par la fraction UTCL. Cette motion fut battue dès le début du congrès, mais les débats ensuite furent si houleux que le congrès décida d'exclure toutes et tous les délégués qui avaient soutenu le texte de l'UTCL<ref>Entretien avec Thierry Renard et Patrice Spadoni, « Il y avait toute une mythologie qui entourait l'ORA », in Théo Rival, Syndicalistes et libertaires. Une histoire de l'UTCL, Alternative libertaire, 2013, pages 226-227.</ref>.

Ce fut la scission. Dès le 1er mai 1976, la minorité publia un nouveau journal, Tout le pouvoir aux travailleurs, et œuvra à constituer l'UTCL en organisation à part entière. Quant à la majorité, elle conserva le titre Front libertaire et se rebaptisa Organisation communiste libertaire. L'ORA avait vécu.

Réseau international de l'ORA

Fichier:1er congrès de l'IFA à Paris, août 1971.jpg
1er congrès de l'IFA à Paris, août 1971. Les thèses plateformistes de l'ORA y furent minoritaires, et l'ORA se retira. Au centre : Federica Montseny, dans la délégation espagnole.

En septembre 1968 se tint le congrès anarchiste international de Carrare, en Italie. La FA française n'ayant pas su décider si elle souhaitait ou non participer à ce congrès, c'est la tendance ORA qui y représenta la France.

Le congrès donna naissance à l'Internationale des fédérations anarchistes et, en raison du défaut de la FA, c'est l'ORA qui en fut adhérente. Guy Malouvier, qui avait été un des organisateurs de Carrare, fut ensuite un des responsables de l'IFA.

A ce titre, l'ORA organisa le congrès international de l'IFA tenu à Paris en août 1971. Mais les thèses communistes libertaires qu'elle y présenta furent rejetées par une majorité anarchiste plus traditionnelle<ref name=":4" />.

Cela conduisit l'ORA à quitter l'IFA, et à nouer des liens avec d'autres organisations communistes libertaires, comme l'ORA italienne ou l'ORA britannique. Une ORA se créa également en Belgique, autour du titre Journal libertaire<ref>Journal conservé au Fonds d'archives communistes libertaires, à Montreuil. </ref>.

Au sein de l'ORA, le secrétariat aux relations internationales (SARI), animé entre autres par Rolf Dupuy, investit notamment le suivi des luttes en Italie, Espagne et Portugal<ref>Archives du SARI conservées au Fonds d'archives communistes libertaires, à Montreuil.</ref>.

Publications de l'ORA

Les publications nationales de l'ORA ont été numérisées et sont consultables en ligne sur le site Archives Autonomie.

Parmi les membres de l'ORA

Bibliographie et sources

Notices

Articles connexes

Notes et références

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