En géomorphologie, l’érosion est le processus de dégradation et de transformation du relief, et donc des sols, roches, berges et littoraux qui est causé par tout agent externe (donc autre que la tectonique).
Un relief dont le modelé s'explique principalement par l'érosion est dit « relief d'érosion ». Les facteurs d'érosion sont :
L'érosion agit à différents rythmes et peut, sur plusieurs dizaines de millions d'années, araser des montagnes, creuser des vallées, faire reculer des falaises.
Des phénomènes naturels violents tels qu'une avalanche, un jökulhlaup, un lahar ou un orage peuvent modifier considérablement le paysage en quelques heures, voire en quelques minutes.
L'« érosion totale » se calcule au niveau d'une section donnée d'un cours d'eau, en mesurant la quantité totale des produits transportés (y compris les particules fines idéalement). Puis on rapporte cette mesure à la superficie développée (réelle) du bassin-versant (et non celle qui est cartographiée en 2D). On obtient alors une quantité (en tonnes/km2/an) qui divisée par la densité (2,5 en moyenne) permet d'évaluer le volume initial de roche en place enlevée (en réalité il faudrait aussi tenir compte de l'érosion éolienne et chimique). La quantité en m3/km²/an équivaut à Modèle:Citation<ref>Corbel J. Érosion et grands cours d'eau en France. In: L'information géographique. Volume 26 no 3, 1962. pp. 113-117. doi:10.3406/ingeo.1962.2153</ref>.
Quelle que soit la cause de leur formation, les reliefs aussitôt formés sont la proie de l'érosion qui les détruit en moyenne au rythme de quelques centimètres par siècle, soit quelques dixièmes de mm par an<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. L'érosion des chaînes de montagnes jeunes est de l'ordre de 200 m/Ma, celle de l'ensemble des continents serait en moyenne de 50 m/Ma<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
Taux moyen d'érosion à l'échelle du globe terrestre
« À l'échelle du globe, une érosion moyenne totale (substances dissoutes et solides) de 20 mm/1 000 ans sur les plaines et 200 mm/1 000 ans en montagne semble raisonnable. Rapportée à la surface de la Terre, l'érosion serait de 50 ± 20 m3/km2/an, soit 50 mm par millénaire ou 50 m par million d'années. En l'absence d'orogenèse, et compte tenu du réajustement isostatique, on peut estimer que l'altitude moyenne des continents, actuellement de 840 m serait en 100 Ma réduite à moins de 2 m »<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
L'érosion implique une désagrégation superficielle de la roche ou du sol et le transport de ces matériaux, ce qui la distingue de la météorisation<ref name="Derruau">Modèle:Ouvrage</ref>. Elle se produit sur place, et produit des débris .
Le degré d'érosion dépend des caractéristiques de la roche :
usure par frottement : glacier, écoulement d'eau (Modèle:Référence nécessaire) ou vent ; ce sont les débris charriés par ces facteurs (rochers, graviers, quartz ou sable) qui sont efficaces dans le processus d'érosion. L'érosion mécanique est particulièrement active dans les milieux froids (gels et dégels) et/ou arides.
Si un fluide comme l'eau coule, il peut se charger de particules en suspension. La vitesse de sédimentation est la vitesse minimale qu'un flot doit avoir pour transporter, plutôt que déposer, des sédiments et est donnée par la loi de Stokes :
<math>w=\frac{(\rho_p-\rho_f)gr^2}{4.5\mu}</math>
où w est la vitesse de sédimentation, ρ est la masse volumique (les indices p et f indiquent particule et fluide respectivement), g est l'accélération due à la gravité, r est le rayon de la particule et μ est la viscosité dynamique du fluide.
Si la vitesse de l'écoulement est plus grande que celle de dépôt, le granulat continue vers l'aval. Comme il y a toujours des diamètres différents dans le flot, les plus gros se déposent (décantation) tout en pouvant continuer à descendre par des mécanismes comme la saltation (collisions particules-paroi), roulant et glissant, dont les traces sont souvent conservées dans les rochers solides, et peuvent être utilisées pour estimer la vitesse du courant.
Le ruissellement est le type d'érosion le plus fréquent sur terre. Il peut être concentré (torrents, oueds) ou diffus (films d'eau issus de la fonte des neiges, érosion littorale).
L'érosion éolienne attaque les roches en enlevant des particules, abrasion ou en polissant la surface. Elle est d'autant plus efficace que les obstacles sont inexistants et que le vent est puissant, régulier et chargé de poussières
Dans les régions de forte amplitude thermique (climat continental, polaire, déserts, haute montagne, etc), les chocs thermiques répétés par la succession des cycles jour/nuit, fend puis fait éclater certaines roches, à différentes échelles micro et/ou macroscopique ; c'est la thermoclastie.
L'érosion liée à la température fait également intervenir l'eau comme agent d'érosion en présence de roches poreuses et/ou de fissures qui éclatent en cas de gel. La cryoclastie est un exemple d'érosion par thermoclastie : la roche éclate à cause de l'alternance gel-dégel de l'eau qui s’infiltre, lorsque l'eau gèle, elle occupe plus de volume et exerce une force capable de faire exploser une roche. Les morceaux libérés par le gel sont appelés gélifracts<ref>Paysages et érosion. La Terre à visage découvert, page 10</ref>. Le cycle gel/dégel est saisonnier (en Sibérie par exemple) ou quotidien en haute montagne.
Ce sont les processus de la gélifraction ou gélivation<ref>Le terme « gélifraction » est un anglicisme ; le terme approprié en français est « gélivation » ; lire Modèle:Ouvrage</ref>. En montagne, la cryoclastie produit des phénomènes de chute de bloc(s) ou parfois, collectivement, des éboulements, qui peuvent former des éboulis en pied de pente.
Érosion liée à la glace
Modèle:Article détaillé
Les mouvements des glaciers, principalement gravitaires provoquent d'importantes contraintes sur le substratum rocheux essentiellement causées par les blocs de roches prisonniers dans la base de la tranche de glace, contraint d'avancer avec l'écoulement du glacier. Ces blocs "grattent" donc le substrat rocheux de la vallée, lissant les reliefs et creusant des stries glaciaires et à long terme générant les morphologies des vallées glaciaires. Lors de périodes de déglaciation, des blocs de glace auparavant fixes sur le plancher océanique peuvent se déplacer avec les courants de marées et géostrophiques, imprimant sur le plancher océanique des spirale d'iceberg.
La décomposition chimique des roches donne naissance à des modelés de désagrégation.
Un processus important est la dissolution, en particulier des calcaires par la pluie plus ou moins acide, on parle alors de karst.
La dissolution est une forme de météorisation qui affecte essentiellement les massifs calcaires. Elle donne lieu à des paysages de karst. L'eau, chargée en acides organiques et en dioxyde de carbone, s'infiltre par les fissures et modèle les roches carbonatées ; elle constitue un « complexe d'altération »<ref name="Derruau"/>. Elle libère les éléments chimiques de la roche sous forme d'ions dissous dans l'eau. En effet, contrairement au grès siliceux, les calcaires sont particulièrement vulnérables à la dissolution<ref>Paysages et érosion. La Terre à visage découvert, p. 9</ref>. Aussi, d'autres roches et minéraux sont solubles<ref>Pierre Pech, Hervé Regnauld, Géographie physique p. 247 ; Paysages et érosion. La Terre à visage découvert, page 10</ref> :
la silice, relativement peu soluble
les carbonates, d'autant plus soluble que l'eau est acide
le gypse, d'autant plus soluble que l'eau est chaude
Dans la zone intertropicale, l'altération des roches feldspathiques par lessivage permet la formation de latérites, roches rouges ou brunes constituées d'hydroxydes d'aluminium et de fer et qui forment une véritable cuirasse à la surface des plateaux des régions chaudes et humides.
Le transport des matériaux issus de la désagrégation de la roche s'effectue soit sous forme dissoute dans la circulation des eaux continentales, soit sous forme solide. Dans ce dernier cas, il peut s'agir de processus gravitaires agissant à faible distance par des processus gravitaires ou de transport à plus longue distance quand les matériaux sont pris en charge par un agent de transport : glacier, eau, vent. Les matériaux transportés peuvent éventuellement être stockés, créant des accumulations sédimentaires, avant d'être de nouveau mis en mouvement. À long terme, ils aboutissent dans les mers et les océans.
La terminologie pour les différents types de sable est
sable de plage Émoussé luisant (EL)
sable fluratif Non usé (NU)
sable désertif Rond mat(RM).
La masse de matériaux transportés sous forme dissoute par les eaux continentales est importante. C'est le processus essentiel des régions karstiques.
Sur le long terme, la sédimentation des débris donne naissance à des roches détritiques. Le vent constitue un formidable agent de transport, en particulier dans les régions désertiques. Le vent peut aussi transporter des graviers et du sable (par saltation) et des limons (par suspension) à partir de zones de déflation. Ils emportent et déposent les lœss parfois à des milliers de kilomètres de leur lieu d'origine.
Dans les régions anthropisées, l'érosion des sols augmente dans les bassins versants, mais les barrages artificiels peuvent aussi bloquer le transit sédimentaire normal jusqu'en mer<ref>A poirel, ONEMA, Transports solides, consulté 2012-11-14</ref>.
Modèles
L'érosion use le matériel rocheux et façonne des formes très diverses.
Le ravinement affecte les paysages nommés badlands. Les précipitations, en coulant sur les pentes constituées de matériaux meubles (argile, sédiments), creusent des rigoles et des sillons.
L’érosion des sols agricoles produit des croûtes (gypseuses ou calcaires), des cuirasses ferrugineuses et latéritiques. Cette érosion est due en grande partie à l'action de l'humain :
les méthodes agricoles intensives, la monoculture, la culture en rang espacés, la mécanisation, le labour, le sol nu en période hivernale, le défrichage, les sillons dans le sens de la pente, etc ;
les aménagements routiers et urbains augmentent les surfaces de ruissellement ;
le remembrement des années 1960, en France, a abouti à l'augmentation de la taille des parcelles et corrélativement à la suppression des haies, des talus et des fossés. Les surfaces en cultures de printemps, encouragées par les subventions, augmentent (tournesol, maïs, betterave) et laissent la terre à nu en hiver. Les terrains pentus sont progressivement colonisés par la vigne. Enfin, la destruction des plantes adventices par les herbicides laisse le sol à nu entre les plants cultivés.
les zones détruites par les incendies sont particulièrement exposées à l'érosion.
La mesure de l'érosion, dans le Spécial érosion des Cahiers ORSTOM, série "Pédologie", 1987
Pech P & Regnauld H (1992) Géographie physique, PUF, Paris.
Brunet R (dir.), Les mots de la géographie. Dictionnaire critique., Reclus, La Documentation Française, Paris, 1993.
Schmittner Karl-Erich and Giresse Pierre, 1999. The impact of atmospheric sodium on erodibility of clay in a coastal Mediterranean region. Environmental Geology: 37/3: 195-206.
Monique Mainguet (dir.), Le vent : mécanisme d'érosion, de dégradation, de désertification : notion d'échelle, de budget sédimentaire, de vulnérabilité des paysages, Reims : UER Lettres et sciences humaines Institut de géographie, 1984.