Espérance (vertu)
L'espérance est une vertu chrétienne qui trouve son origine dans le judaïsme, par laquelle les croyants attendent de Dieu, avec confiance, sa grâce en ce monde et une vie éternelle après la mort.
Il est d'usage de confondre l'espérance avec l'espoir, qui est un sentiment plus profane et peut être considéré comme sa reprise séculière.
Judaïsme
L'idée d'éternité remonte aux origines mêmes de l'humanité, elle s'exprime de façon explicite, entre autres, dans l'Égypte pharaonique. Plus tard, le zoroastrisme prédit l’avènement d'un sauveur suprême.
Mais c'est en Palestine, au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle Modèle:Av JCModèle:Vérification siècle, quand est rédigé le Livre de Daniel, que se répand l'idée de la résurrection et de la vie éternelle pour chaque membre de la communauté juive<ref>Claude Bouchot, A propos de l’espérance au temps de l’Ancien Testament, Bouquet philosophique</ref>. Raison pour laquelle la tradition chrétienne (tant du côté catholique que du côté orthodoxe) rangera ensuite Daniel parmi les quatre grands prophètes, avec Isaïe, Jérémie et Ézéchiel.
L'espérance est alors vécue comme "ce qui s'oppose à l'épreuve" et "permet de la surmonter".
Christanisme
Pour l'apôtre Paul (Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle), l’espérance chrétienne trouve son origine et son modèle chez les Hébreux, dans l’attitude d’Abraham dès lors qu'il se sent purifié par l’épreuve du sacrifice : Modèle:Citation (Rm 4, 18). Elle est décrite dès le début de la prédication de Jésus dans l’annonce des Béatitudes. Modèle:Référence nécessaire
Traditionnellement, l’espérance est considérée Modèle:Incise comme l'une des trois vertus théologales du christianisme et qui prennent source dans la Première épître aux Corinthiens (1 Co 13, 13).
Au Moyen Âge, l'Église complète les trois vertus théologales par les quatre vertus cardinales qui, elles, apparaissent chez Platon, dans La République, puis se développent dans le judaïsme hellénistique : la prudence, la tempérance, la force d'âme (ou courage) et la justice.
L'ensemble de ces sept caractéristiques forment les vertus catholiques, que l'art chrétien représente fréquemment, de façon allégorique, sous la forme de figures féminines.
Selon le Catéchisme de l'Église catholique<ref>Catéchisme de l'Église catholique, Paris : Cerf/Centurion/Fleurius, 1998, n° 1817-1821 (lire en ligne.</ref>, la vertu d’espérance répond à l’aspiration au bonheur placée par Dieu dans le cœur de tout homme. Elle assume les espoirs qui inspirent les activités des hommes et les purifie pour les ordonner au Royaume des cieux.
L’espérance est Modèle:Citation, sûre et ferme, Modèle:Citation (He 6,19-20). Elle est aussi une arme qui protège dans le combat du salut : Modèle:Citation (1 Th 5,8). Elle procure la joie, y compris dans l’épreuve même : Modèle:Citation (Rm 12,12).
Georges Bernanos fait partie des intellectuels catholiques qui s'efforcent de distinguer l'espérance de l'espoir : Modèle:Citation blocEn 2007, dans sa deuxième encyclique intitulée Spe salvi (« Sauvés dans l'espérance »), le pape Benoît XVI écrit ces mots : Modèle:Citation bloc
Tout en étant fondée sur le salut par la grâce, la théologie protestante traditionnelle concernant l'espérance diffère assez peu de la conception catholique exposée ci-dessus, témoin ce commentaire sur Romains 5/1-5<ref>"Étant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, à qui nous devons d'avoir eu par la foi accès à cette grâce, dans laquelle nous demeurons fermes, et nous nous glorifions dans l'espérance de la gloire de Dieu. Bien plus, nous nous glorifions même des afflictions, sachant que l'affliction produit la persévérance, la persévérance la victoire dans l'épreuve, et cette victoire l'espérance. Or, l'espérance ne trompe point, parce que l'amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné." Traduction Louis Segond.</ref> publié par l'Église protestante unie de France :
Modèle:Citation<ref>Modèle:Lien web, texte légèrement condensé.</ref>
Publiée en 1964, la Théologie de l'espérance de Jürgen Moltmann est influencée par l’orientation eschatologique du philosophe marxiste Ernst Bloch. Le désir de Moltmann d'axer sa théologie sur les évolutions du monde moderne, consécutivement au "progrès technique", est parfois comparée à la théologie de la libération, qui se développe à la même époque : Modèle:Citation. Mais Moltmann se défend vigoureusement d'être marxiste et estime que l'espérance de Bloch n'est qu'une reprise séculière de l'espérance chrétienne.
En 1972, dans son livre L'Espérance oubliée, Jacques Ellul estime que dans la société actuelle, le concept d'espérance n'a plus aucun sens<ref>Jacques Ellul, L'Espérance oubliée, 1972 ; réed. La Table Ronde, 2004, Modèle:P.</ref>. Selon lui, l'époque est celle de la déréliction : Dieu s'est "absenté", il ne parle plus aux hommes. Non pas parce qu'il les abandonne mais au contraire parce que, respectant leur volonté d'être libres de leurs choix, il tient à les laisser seuls responsables de leurs actes et de leurs croyances, y compris l'athéisme. Il ne leur parle plus, du fait qu'ils ne veulent pas l'entendre ni même entendre parler de lui. Certes, il ne se ferme pas à ceux qui, individuellement, croient en lui, mais il n'intervient plus dans leur histoire collective ni même dans celle de l'Église, du fait qu'elle-même se conforme aux exigences du "monde moderne". Modèle:Citation<ref>Ibid. Modèle:P.</ref>.
Bien qu'amer, le désespoir qui accompagne ce constat est, selon Ellul, salutaire dès lors qu'il repose sur la lucidité concernant l'idée de modernité. Alors que tous les idéaux vantés par les philosophies humanistes Modèle:Incise se sont révélés illusoires, estime t-il, les humains sont devenus les serviteurs des machines, et plus généralement de la technique, qui étaient censées les servir. Or, poursuit-il, il faut distinguer et même opposer les mots "espoir" et "espérance" : « c'est seulement lorsqu'il n'y a plus d'espoir que peut poindre l'espérance ». Ellul identifie en effet l'espoir à l'illusion que tout peut s'arranger sans la présence de Dieu. Or, selon lui, l'espérance n'a de place que quand tout est jugé désespéré : Modèle:Citation
À l'inverse, conclut Ellul, cultiver l'espérance, c'est, contre toute raison, croire en la promesse donnée par Dieu. Dans son commentaire sur le Livre de l'Apocalypse<ref>Jacques Ellul, L'Apocalypse, architecture en mouvement, 1975 ; rééd. Labor et Fides, 2008</ref>, il avance qu'il Modèle:Citation<ref>Jacques Ellul, L'Espérance oubliée, La Table ronde, 2004, Modèle:P.</ref>.
Pour Ellul, l'espérance ne peut advenir chez les chrétiens eux-mêmes que s'ils ressentent le silence de Dieu non pas passivement mais au contraire de façon assumée<ref>Jacques Ellul, Le foi au prix du doute, 1980. Réed. La Table Ronde, 2015</ref> : Modèle:Citation (...)Modèle:Citation<ref>Ibid. Modèle:P.</ref>. Elle repose sur un refus radical d'amalgamer le Royaume de Dieu et tout système politico-social. Ces deux domaines sont incompatibles, inassimilables. Servir l'un, c'est trahir l'autre<ref>Jacques Ellul, L'illusion politique, 1965 ; réed. La Table Ronde, 2018</ref>. L'espérance, c'est la libération de toutes les idéologies<ref>Jacques Ellul, L'idéologie marxiste chrétienne, 1979 ; rééd. La Table Ronde, 2006</ref>.
En tout cela, Ellul prolonge la réflexion de Kierkegaard, pour qui la chrétienté était « la déchéance du christianisme »<ref>Sören Kierkegaard, Vingt et un articles de Faedrelandet, Œuvres complètes XIX, Éditions de l'Orante, 1982</ref> et l'espérance « l'attente de l'impossible »<ref>Sören Kierkegaard, Crainte et tremblement, Œuvres complètes V, Éditions de l'Orante, 1972</ref>.
Représentations allégoriques
L'espérance est fréquemment représentée sous forme allégorique dans les arts, soit seule, soit associée aux deux autres vertus théologales.
Selon Cesare Ripa, l'espérance est représentée sous la forme d'une femme jeune, habillée de vert, portant une couronne de fleurs et tenant dans ses bras un Amour à qui elle donne le sein : les fleurs font espérer les fruits et l'allaitement fait vivre le petit enfant. La jeune femme peut aussi être habillée d'une robe jaune parsemée de fleurs en marchant sur la pointe des pieds, car l'espérance n'est pas ferme<ref>Modèle:Chapitre.</ref>.
L'espérance est également associée à l'ancre marine, symbole chrétien qui remonte au Nouveau Testament<ref>Modèle:Lien web.</ref>,<ref>« Cette espérance, nous la possédons comme une ancre de l’âme, sûre et solide » (Modèle:Chapitre).</ref>.
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L'Espérance selon Cesare Ripa
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L'Espérance reposant sur une ancre, par Paul Le Moyne
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La Charité, la Foi et l'Espérance, par Heinrich Maria von Hess
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
Modèle:Autres projetsClaude-Henri Rocquet, Les racines de l'espérance, 2013
- Jacques Briend, Avant Jésus, l'espérance, Desclée-Mame, 2007
- Joan Chittister, De l'épreuve à l'espérance, EFIDES, 2004
- Olivier Clément, Mémoires d'espérance. Entretiens avec Jean-Claude Noyer, Desclée de Brouwer, 2003
- Jürgen Moltmann, Théologie de l'espérance, Cerf, 1970. Réed. 1983 (édition originale : 1964)
- Gustave Desbuquois, L'Espérance, Beauchesne, 2016
- Jacques Ellul, L'Espérance oubliée, 1972. réed. La Table ronde, 2004
- France Quéré, Dénuement de l'espérance, Seuil, 1972
- André Bieler, Une politique de l'espérance, Labor et Fides, 1970
- Alphonse Maillot, L'épître aux Romains, l'épître de l'espérance, Tournon, Cahiers de Réveil, 1968
- Edmond Fleg, Nous de l'espérance, Angers, Masque d'or, 1949
- Jean-Hervé Nicolas, article « Espérance » in Dictionnaire de spiritualité, tome IV, Paris, Beauchesne, 1961, Modèle:P.
- Bernard Schumacher, article « Espérance » in Dictionnaire d’Éthique et de Morale, Paris, PUF, 1996, Modèle:P..
- Paul Schütz, Parusia. Hoffnung und Prophetie, Heidelberg 1960, Sonderausgabe, Hambourg, 1963
Articles connexes
- Spe salvi, encyclique du pape Benoît XVI sur l'espérance (2007)
- Vertu théologale
- Vie éternelle
Liens externes
- Encyclique Spe salvi de Benoît XVI sur l'espérance, sur le site du Vatican (2007)
- À propos de l’espérance au temps de l’Ancien Testament sur le site chrétien Bouquet Philosophique.
- Espoir(s) et espérance, Jean-Patrice Ake, Blogspot, 2009