Maurice Leenhardt

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Modèle:Infobox Biographie2 Jean Henri Maurice Leenhardt, né le Modèle:Date de naissance à Montauban et mort le Modèle:Date de décès à Paris, est un pasteur, ethnologue et missiologue français. Spécialiste du peuple kanak, il est missionnaire en Nouvelle-Calédonie de 1902 à 1926, puis ethnologue et universitaire de 1942 à sa mort.

Biographie

Années de formation

Son père Franz Leenhardt, pasteur protestant et géologue<ref>Page sur l'enseignement de Franz Leenhardt à la Faculté de théologie protestante de Montauban, site d'André Gounelle, consulté en ligne le 8 février 2015.</ref>, avait mis en place et assuré un cours de sciences physiques et naturelles à la faculté de théologie protestante de Montauban<ref name="DIC">Pierre Bonte et Michel Izard (dir.), « Maurice Leenhardt », in Dictionnaire de l'ethnologie et de l'anthropologie, PUF, Paris, 2008 (Modèle:1re éd. 1991), Modèle:P. Modèle:ISBN</ref>. Maurice Leenhardt s'inscrit dans cette même faculté et y soutient en 1902 une thèse de baccalauréat sur Le mouvement éthiopien au sud de l'Afrique de 1896 à 1899<ref>SUDOC [1]</ref>. Selon lui, il s'agit d'un mouvement de revendication sociale issu des réactions légitimes des Africains contre les discriminations raciales<ref name="DIC"/>.

Il a pour maîtres Alfred Boegner et Hermann Kruger.

1902-1920 : mission en Nouvelle-Calédonie Do Néva

Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, les autorités protestantes se préoccupent de l'évangélisation des Kanaks et Maurice Leenhardt est envoyé comme missionnaire par la Société des missions évangéliques de Paris en 1902 en Nouvelle-Calédonie, où il fonde la mission de « Dö nèvâ », vallée de Houaïlou. Comme peu de missionnaires, et surtout comme certains missionnaires anglicans plus anciens, il s'attache à comprendre la mentalité de ce peuple que l'on pensait être en voie d'extinction, et qui pouvaient lui rappeler les camisards cévenols<ref>http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/pleins_textes_5/b_fdi_16-17/22929.pdf</ref>. Il vient également après le pasteur Mathaïa, arrivé de Lifou avec treize natas (catéchistes ou catéchumènes indigènes) en 1884, et il remplace le pasteur loyaltien Haxen.

Quand il arrive en Nouvelle-Calédonie,il est accueilli par ces mots du maire de Nouméa : Modèle:Citation. S'attachant à lutter contre ce génocide lent, il combat l'alcoolisme qui ravage le peuple kanak. Il traduit le Nouveau Testament en langue houaïlou avec l'aide de ses premiers étudiants. Surtout, du point de vue scientifique, il obtient que ses élèves canaques écrivent, en langue de la vallée de Houaïlou, ou même en langue paci plus au nord, soit des mythes soit une description des institutions traditionnelles, textes qu'il publie sous leurs noms. Le principal et le plus prolifique de ces auteurs, le pasteur Bwesou Eurijisi ou Boesou Eripisi (1866-1947), un des premiers pasteurs protestants indigènes consacrés à Do Neva, laisse des dizaines de cahiers bien informés. Son nom est cité parmi les quinze auteurs des Documents, tout comme celui d'Eleisha Nabayes, de Yené Bwêêrhexau (René Boréréou) et Joané Nigoth.

Do Néva, le vrai pays, est le centre missionnaire et scolaire, qu'il fonde, le Modèle:Date-, sur une étroite bande de quelques kilomètres de long et que la communauté développe avec :

  • écoles, temple, maisons missionnaires ;
  • prairie : rassemblements, sports ;
  • village des étudiants, Guilgal, dans un amphithéâtre de montagnes rocheuses ;
  • cultures, pour une relative autosuffisance alimentaire, de tous, visiteurs compris.

Les missionnaires sont nécessairement compétents, ou le deviennent, en charpenterie, maçonnerie, agronomie, élevage, médecine, obstétrique, et bien sûr en éducation, en catéchèse… Le pasteur s'astreint à de très nombreuses visites à l'extérieur, pour suivre l'action des natas, comprendre le monde kanak et régler les problèmes.

La conversion au christianisme protestant est l'objectif, mais Leenhardt constate surtout des « adhésions de groupes ou d'individus », en réponse à un « besoin de réagir contre le souffle mortel de la civilisation ». En principe, l'école pastorale de Lifou (îles Loyauté) envoie ses postulants à l'école normale de Do Néva. En 1902, à la première conférence des natas avec Leenhardt, Delord compte Modèle:Unité, tous loyaltiens. En 1908, ils sont Modèle:Unité, dont six de la Grande-Terre. En 1926, ils sont 49, dont quinze Calédoniens non-loyaltiens.

« On nous a montré un peuple s'élançant dans les bras d'un bon Jésus, mais je ne trouve guère que le fier canaque de l'Insurrection qui, vaincu, préfère ne pas avoir d'enfants que de les voir exploités par les "blancs". » (Lettre à son père, 1903).

Il joue un rôle difficile et ambigu pendant la guerre 1914-1918. La relation de confiance établie avec la population kanak (principalement protestante) fait que le premier contingent indigène de 1915 est de 450 protestants (sur un total de 650). L'arrêt du recrutement en 1916 est bienvenu. Leenhardt informe en 1916 le gouverneur Jules Repiquet des risques liés au recrutement forcé. La reprise maladroite du recrutement en 1917 amène la révolte kanak de 1917. Le procès vise particulièrement le chef Néa (Wanas, Wéava), et le protestantisme. Leenhardt, grâce aux natas et à la population, retrouve l'origine de la monnaie noire reçue par Kaféat Cidopwaan ma Juat : Philippo Bwaxat est accusé par la veuve de Kaféat, et se suicide par pendaison, Néa est acquitté. Le devin Paétou, inspirateur du mouvement, se rend à Leenhardt, qui l'accompagne chez le Gouverneur pour sa reddition. (Source : Jean Guiart 2001:159).

1920-1939

En Modèle:Date-, chez son beau-père André-Michel, Leenhardt fait la connaissance de Lucien Lévy-Bruhl. Il fréquente les milieux de l'anthropologie et de l'ethnologie, rencontre Marcel Mauss, Paul Rivet. En 1923-1924, pendant dix-sept mois, il mène un voyage d'enquête sur les missions chrétiennes protestantes en Afrique noire, cinq pays et Modèle:Unité :

  • Gabon : Libreville, Baraka, Lambaréné, Talagouga, Samkita, N'Gomo, Port-Gentil, Cap Lopez,
  • Cameroun : Douala, Kribi, Bibia, Batanga, Elat (Ebowola),
  • Mozambique : Lourenço Marquez,
  • Lesotho ou Lessouto : Morija, Thaba Bossiou (Basutoland, François Colliard), (puis Buluwagu),
  • Madagascar : Tamatave, Tananarive, Ambatolampy, Antsirabé, Mangarano, Ambositra, Fwianarantsoa, Manankavaly, Miarinnarivo,
  • Zambèze : Lealni (1892), Lweneka, Secheké, Séfula (1891), Livingstone (1893)…

Il revient en Nouvelle-Calédonie, en 1925-1926, pour vingt-trois mois, sans être lié à Do Neva, repris par le pasteur Paul Pasteur, et se concentre sur l'ethnologie, les relevés généalogiques, la religion traditionnelle, puis rentre en métropole en 1927. Il enseigne à la section de l'École pratique des hautes études (Sciences religieuses), où il succède à Marcel Mauss en 1940, et fonde la Société des océanistes (au Musée de l'Homme) en 1945, et qu'il préside de 1945 à 1952. Il y connaît aussi Claude Lévi-Strauss. Un de ses premiers étudiants est Michel Leiris.

Les tensions sont fortes également dans la grande famille du protestantisme français : un certain nombre de choix de Leenhardt sont remis en cause, dont la séparation du travail de pastorat et de missionnariat. Son neveu, Rey-Lescure, nommé pour le remplacer en 1925, encore moins souple, est envoyé ou renvoyé à Tahiti, dès 1932. Leenhardt est amené à se détacher du monde missionnaire protestant, à la suite de sérieux dysfonctionnements dans l'équipe de direction parisienne. Il participe toujours à la formation (Hermann Kruger) des futurs missionnaires, veut croire à une science missionnaire, et lance encore la revue Propos missionnaires.

Il participe avec Paul Rivet et Lucien Lévy-Bruhl à l'organisation de l'Exposition coloniale internationale de 1931. Avec d'autres, il proteste contre le zoo humain, principalement composé de kanak, et participe à sa dénonciation à la Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen.

De 1926 à 1938, les relations de Leenhardt avec la Nouvelle-Calédonie se font uniquement par lettres et par visiteurs.

Il revient en Nouvelle-Calédonie, en 1938-1939, avec son épouse, comme responsable d'un projet de recherche ethnographique et linguistique de l'Institut d'Ethnologie (EPHE), dans le cadre d'une mission du tout nouveau CNRS. Il s'y trouve confronté à Pwagatch, devin traditionnel païen (jau), représentatif d'un ancien clan Diyô Janu (de Waèn), exilé au Vanuatu puis rapatrié à Bondé (côté Ohot), devenu d'une incontestable autorité spirituelle, formulant une réponse de la tradition au nouvel état des choses dans le milieu kanak et la colonie, et donc considéré comme un dangereux agitateur (néopaganisme, messianisme, sédition). Leur rencontre mène à une conversion de Pwagatch au protestantisme, manifestée dans des cérémonies d'une semaine à Coulna (district coutumier de la commune de Hienghène), fin Modèle:Date-. La conversion n'entraîne pas durablement les conséquences que peut attendre Pwagatch : prestige, protection, sympathie et issue de secours. Pwagatch est rapidement exilé aux Nouvelles-Hébrides (Vanuatu).

1939-1954

En France, il met en place, à partir de 1944, des enseignements de langues océaniennes à l'École des langues orientales (INALCO), surtout des langues kanak, principalement du houaïlou (ajië).

Il publie en 1947, Do Kamo. La personne et le mythe dans le monde mélanésien.

Il revient en Nouvelle-Calédonie en 1947-1948 comme premier directeur de l'Institut Français d'Océanie (IFO), à l'époque du gouverneur Georges Parisot. Les membres sont Pierre Routhier, André Arnould, Jacques Avias, Cohic, Legand, Dadant, Jean Guiart

Les apports à l’ethnologie

Les apports de Maurice Leenhardt à l'ethnologie sont considérables.

Avant Bronislaw Malinowski, il pratique l'ethnologie de terrain préconisée par Marcel Mauss du fond de leur bureau parisien. Pendant vingt-cinq ans, il pratique l'observation proche et la recherche active. Maurice Leenhardt n'a pas cherché à faire école. Il est l'un des premiers à envisager le phénomène social dans sa globalité, en étudiant aussi bien la linguistique, l'art, les mythes ou les activités traditionnelles du peuple kanak. Il est le premier auteur français à théoriser l'existence de la pensée mythique. Claude Lévi-Strauss a repris ce terme.

La structure de la personne dans le monde mélanésien, chapitre XI de Do Kamo : le personnage se définit par le jeu de ses relations complexes. Le centre de ces relations est vide, « un soi continuellement engagé en autrui » (Clifford). Chacun des nombreux noms de l'individu le représente dans une de ses relations parentale ou mythique, ses virtualités. Aucun de ses noms ne recouvre la personne tout entière : être social, sans être individuel, un vide.

Dans cette anticipation du structuralisme, la pensée mythique en Mélanésie est corporelle autant que mentale. La Parole ou le Verbe sont constitutifs de la subjectivité. Modèle:Citation, (Do Kamo, 271).

Communion, surabondance, plénitude. « Go do kamo : je suis vraie personne » (Do Kamo, 271).

Publications

Ouvrages

Modèle:Colonnes

Articles

Distinctions et postérité

Critiques

Critiques anciennes

Le pasteur a été très bien accueilli à son arrivée. La société coloniale locale l'a de moins en moins apprécié, jusqu'à ce qu'on cherche et parvienne (provisoirement) à s'en débarrasser.

Il a enseigné et fait enseigner à lire, écrire et compter, à de jeunes Mélanésiens confiés par leurs parents. Les enfants ont été ensuite capables de les remplacer pour une relative émancipation économique : vendre et acheter à meilleur prix, se passer d'intermédiaires coloniaux (avec commissions et culbutes), contrôler poids, mesures, décomptes…

Briser l'échange inégal a également consisté à vendre des marchandises à prix coûtant aux indigènes, et à exiger que les fournisseurs, employeurs et autres colons, paient régulièrement leur dû, ne serait-ce que pour assurer la nourriture quotidienne des Modèle:Unité de la communauté, chaque année.

Sa propre église lui a également reproché d'avoir rééquilibré la station ou mission de Do Néva, en mettant en place dans chaque village une école de proximité, avec un moniteur, en plus d'un pasteur.

Critiques récentes

La distinction (1937, pp. 171-185) entre rhe(e) (totem) et bao-bâö (dieux) est discutée : les bao sont autant les génies de la nature que les ancêtres décédés déifiés.

Alban Bensa considère la notion de conscience mythique comme partie d'une sorte de théologie ethnologique missionnaire dépassée : Modèle:Citation, (Chroniques kanak, 1995:152).

Éric Wittersheim, Des sociétés dans l'état (2006:42) : Modèle:Citation.

Michel Naepels, (Histoires de terres kanakes. Conflits fonciers et rapports sociaux dans la région de Houaïlou (1998:73-86), et Conjurer la guerre. Pouvoir et violence à Houaïlou (2013), écorne Leenhardt dans le premier ouvrage, ce qui lui vaut une forte réaction de Jean Guiart dans Maurice Leenhardt, le lien d'un homme avec un peuple qui ne voulait pas mourir (2003).

Notes et références

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Voir aussi

Bibliographie

(Classement effectué en ordre croissant d'années d'éditions).

Articles connexes

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Liens externes

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