Valeur de la biodiversité
Plusieurs types et modes d'estimation sont utilisées depuis les années 1980/1990 par les économistes pour estimer la valeur économique de la biodiversité ou des services écosystémiques fournis par la biodiversité, la valeur de la biodiversité en tant que bien public ou bien commun, ou pour la comparer avec des indices tels que le PIB (produit intérieur brut) ou la richesse d'un pays ou d'une région.
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Dans le monde, l'estimation demandée par la commission européenne et l'office national de l'environnement allemand à un groupe de travail piloté par l'économiste Pavan Sukhdev pour le Sommet de la Terre de Nagoya (2010), a montré que les services actuellement mesurables fournis par la biodiversité représentaient environ 23 500 milliards d'euros par an (50 % du PIB mondial)<ref>Marielle Court, article intitulé 23.500 milliards d'euros par an grâce à la biodiversité, publié le 20/10/2010 par Le Figaro (Voir aussi le rapport de synthèse (PDF, 49 p)</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>.
En France, la FRB a publié en 2012 un rapport<ref name="FRB2012">FRB, Les valeurs de la biodiversité : un état des lieux de la recherche française, FRB, 2012 ; Modèle:ISBN (imprimé) : Modèle:ISBN (PDF) PDF, 52p</ref> sur l'état et la dynamique de la recherche française autour des valeurs de la biodiversité, qui précise les dynamiques en cours d’Modèle:Citation. Ce travail sera suivi d'un second volet sur les Modèle:Citation<ref name=FRB2012/>. La Caisse des dépôts et consignations a créé en 2012 une « Mission économie de la biodiversité » dont le pilotage a été confié à sa filiale, la Société forestière <ref name=CDC2012> CDC, Communiqué de presse du 28 novembre 2012, Paris</ref>, dotée d'un budget de 3 millions d’euros pour trois ans, pour soutenir des recherches, études et prototypes<ref name=CDC2012/>.
Les principes et les enjeux
La perte de ressources naturelles et de certains services rendus par les écosystèmes (ressources halieutiques surexploitées, érosion et salinisation des sols suivant certaines déforestations, diminution de la pollinisation et de la fertilité des sols…) a un coût économique, social et sanitaire qui est difficile à quantifier. Compte tenu de l’évolution du Droit de l'environnement (européen notamment avec par exemple la directive 2004/35/CE relative à la responsabilité environnementale), et en raison des obligations de plus en plus fréquentes d'éviter, réduire et compenser les impacts négatifs de nos actions sur la biodiversité, ou de payer pour les limiter ou dédommager (écotaxes), la biodiversité (autrefois res nullius) apparait peu à peu comme ayant des valeurs aménitaires, éthiques également traductibles en équivalent-monétaires.
Les services rendus par la biodiversité et les écosystèmes commencent à être mieux, bien qu'imparfaitement, compris.
Ils restent néanmoins difficiles à quantifier et monétariser (prix de la nature).
De nombreux économistes cherchent à appliquer à la biodiversité des méthodes utilisées pour estimer la valeur économique d'un bien (ou d'un service), que l'on mesure souvent selon des critères d'utilité, et plus difficilement d'aménités (contribution au bien-être, à la santé globale) qu'il procure aux individus.
L'évaluation économique de la biodiversité est nécessairement multi-critères<ref>Dubus-DeWarnaffe, G. et Devillez, F. (2002). « Quantifier la valeur écologique des milieux pour intégrer la conservation de la nature dans l’aménagement des forêts : une démarche multicritères » Annals of Forest Science 59(4): 369- 387.</ref> ; on distingue généralement les valeurs suivantes :
- des valeurs d'usage directes : la production de denrées alimentaires, de bois pour le feu, de matières premières pour les médicaments, de cadre paysager et touristique…
- des valeurs d'usage indirectes : dérivées des fonctions écologiques, protection du sol contre l'érosion, filtrage de l'eau, pollinisation des plantes, équilibre des écosystèmes ;
- des prix d'option : prix accordés à la conservation d'un actif en vue d'un usage futur (par exemple, la préservation d'une plante connue pour son intérêt médical ou alimentaire) ;
- des prix de quasi-option : relatifs à la conservation d'un actif, dont l'intérêt n'est pas encore démontré, en vue d'un usage futur (par exemple, la préservation de plantes inconnues pour des usages encore inconnus);
- des valeurs de non-usage ou valeurs intrinsèques : relatives à la satisfaction de savoir qu'un actif ou un état de fait désirable existe. Ces valeurs sont souvent liées aux notions de justice, de droit des générations futures ou de respect de la Nature et permettent de justifier la protection d'espèces ou de sites naturels connus. On parle de valeur de legs lorsqu'elle est liée au fait de transmettre un patrimoine aux générations futures et de valeur d'existence lorsqu'elle est simplement liée au fait d'exister.
Une analyse de la FRB (2012) a trouvé dans la littérature scientifique et économique les types de valeurs suivants :
Dans une approche de type Croissance verte, une autre estimation indirecte passe par la valeur des métiers de la biodiversité, par exemple définis en France dans le cadre du Grenelle de l'environnement comme Modèle:Citation
Les engagements internationaux, sous l'égide de l'ONU
Le deuxième Objectifs d'Aichi (objectif A2) pour la diversité biologique vise Modèle:Citation<ref name=PrepaCop11CDB-2012>COP 11, Point 13.11 de l’ordre du jour provisoire, Mesures d'incitation (article 11) Rapport sur les activités entreprises par les Parties, les autres gouvernements, les organisations et initiatives concernées, et le Secrétaire exécutif : analyse actualisée des informations reçues ; Note du Secrétaire exécutif, UNEP/CBD/COP/11/34 15 juillet 2012 </ref>.
Début 2012, selon les documents envoyés à l'ONU en préparation de la conférence<ref name=PrepaCop11CDB-2012/> :
- seul le Royaume-Uni évoque Modèle:Citation<ref name=PrepaCop11CDB-2012/>.
- un bureau de l'initiative sur l'Économie des écosystèmes et de la diversité biologique du Programme des Nations unies pour l’environnement a pour mission de Modèle:Citation<ref name=PrepaCop11CDB-2012/> ;
- le PNUE aide cinq pays en développement (Afrique du Sud, Chili, Lesotho, Trinité-et-Tobago et Vietnam) à Modèle:Citation (Proecoserv)<ref name=PrepaCop11CDB-2012/> ;
- le mécanisme d'application de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification accompagne quelques évaluation économiques et travaux théoriques visant à évaluer la valeur des ressources foncières et services fournis par les écosystèmes, via un Consortium dit OSLO (« Offering Sustainable Land-Use Options »)<ref name=PrepaCop11CDB-2012/> ;
- un « Partenariat mondial pour la comptabilisation du patrimoine et la valorisation des services d’écosystèmes » (WAVES) a été lancé par la Banque mondiale, promouvant la comptabilité environnementale en incluant la valeur du capital naturel. Le Botswana, la Colombie, le Costa Rica, Madagascar, et les Philippines sont impliqués en 2012<ref name=PrepaCop11CDB-2012/> ;
- Une initiative The Natural Capital Project associe l’Université Stanford, le WWF, l’organisation The Nature Conservancy et l’Université du Minnesota à quelques pays pilotes utilisant le logiciel InVEST pour Modèle:Citation<ref name=PrepaCop11CDB-2012/>.
Les limites
En attribuant une valeur monétaire à la biodiversité, le risque est la mise en place un système de privatisation du vivant autorisant les plus riches (individus, sociétés, États…) à détruire ou acheter de la biodiversité par une contrepartie financière<ref>Aubertin, C., et al. (2007). Les marchés de la biodiversité. Paris IRD.</ref>, sa rareté croissante due à sa dégradation pouvant même contribuer à alimenter une certaine spéculation financière<ref>Barbault, R. (2002). La biodiversité: un patrimoine menacé, des ressources convoitées et l’essence même de la vie. Johannesburg. Sommet Mondial du Développement Durable. Barbault, R. Paris, Ministère des Affaires Étrangères.</ref>.
À ce propos, en 2010, Jean-Michel Salles (CNRS, et Vice-président du Groupe de travail sur l’étude « Approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes - Contribution à la décision publique. » rappelait que Modèle:Citation <ref name=Reverse2010>Source : Jean-Michel Salles, Chargé de recherche au CNRS, lors de la Réunion de lancement du programme Reverse (European project to preserve biodiversity) (Voir Synthèse de la conférence REVERSE : La Biodiversité : un enjeu environnemental et économique pour les territoires ; 25 juin 2010 à bordeaux, voir Modèle:P.</ref>.
La FRB note<ref name=FRB2012/> que certains auteurs signalent Modèle:Citation, en particulier quand Modèle:Citation.
Voir aussi
Articles connexes
- Biodiversité
- Service écosystémique
- Évaluation économique de la biodiversité
- Stratégie d'investissement durable
- Biodiversité marine
- Perte de la biodiversité
Bibliographie
- Amigues, J.-P., et al. (1996). « L’évaluation contingente : controverses et perspectives » Cahier d’économie et sociologie rurales 39-40: 123-150
- Du Bus de Warnaffe G., Devillez F., 2002, "Quantifier la valeur écologique des milieux pour intégrer la conservation de la nature dans l’aménagement des forêts : une démarche multicritère". Annals of Forest Science, Vol. 59, 369-387 | résumé
- Roche P., Chauvet M. ; Stratégie mondiale de la biodiversité ; Lavoisier, Modèle:Date-, 260 pages env. (traduction française de travaux ayant abouti à la Stratégie mondiale de la biodiversité, publiée en anglais en 1992, à partir de recherches et enquêtes initiées en 1989, six consultations et six ateliers de travail, ayant impliqué plus de 500 personnes et traduit dans de nombreuses langues) ;
- Bernard Chevassus-au-Louis (Président du groupe de travail (Composition du groupe de travail) Rapport Biodiversité : L’approche économique de la biodiversité et des services liés aux éco systèmes ; Contribution à la décision publique (rapport du Centre d’analyse stratégique) et Résumé du rapport {{#invoke:Langue|indicationDeLangue}});
- Frédéric Denhez (Écrivain et journaliste vulgarisateur français) ; '« La Nature, combien ça coûte ? Pourquoi l'écologie n'est pas l'ennemie de l'économie » ; Éditeur : Delachaux & Niestle, 27/9/2007.
- Boisvert, V. et Vivien, F. (1998). « Un prix pour la biodiversité. L’évaluation économique entre différentes légitimités : La biodiversité : un problème d’environnement global » Natures Sciences et Sociétés 6(2): 17-26.
- Bontems, P. et Rotillon, G. (2007). L’économie de l’environnement. Paris Éditions La Découverte.
- CGDD, Conservation et utilisation durable de la biodiversité et des services écosystémiques : analyse des outils économiques ; Modèle:Date- - Développement durable ; Commissariat général au Développement durable
Liens externes
- Enquête d'opinion sur biodiversité (Eurobaromètre/Commission européenne) Attitudes of Europeans towards the issue of biodiversity, Analytical Report (71 pages) {{#invoke:Langue|indicationDeLangue}}
- Hotspot 12/2005: La valeur de la biodiversité. Editorial de Bernhard Schmid (Directeur de l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université de Zurich), Forum Biodiversité Suisse ; Académie suisse des sciences naturelles scnat.
- Hotspot 23/2011: Biodiversité & économie. Forum Biodiversité Suisse; Académie suisse des sciences naturelles scnat.