De père anglais et de mère flamande, James Ensor est né dans une famille de la petite-bourgeoisie d'Ostende, rue Longue Modèle:N°<ref>Xavier Tricot, James Ensor - Catalogue raisonné des peintures (volume 1), Petraco-Pandora Modèle:ISBN, Modèle:P.</ref>. Ensor quitte peu sa ville natale ; il y mourra. Commentant sa naissance lors d'un banquet offert en son honneur, il s'exprime en ces termes :
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Maria Catherina Haegheman (la mère), peinte par l'artiste en 1882.
À treize ans, Ensor suit des cours de dessin chez deux artistes locaux, Edouard Dubar (Ostende 1803-1879) et Michel Van Cuyck (Ostende 1797-1875). Dans la biographie du catalogue raisonné James Ensor, Xavier Tricot indique qu'il montre davantage d'intérêt pour le dessin que pour les cours donnés par ses professeurs du collège de Notre-Dame.
Dans la maison familiale où, célibataire convaincu, il vivra jusqu'en 1917, Ensor s'installe un cabinet dans les combles et commence à peindre des portraits réalistes ou des paysages inspirés par l'impressionnisme. À cette époque, il écrit : « Mes concitoyens, d'éminence molluqueuse, m'accablent. On m'injurie, on m'insulte : je suis fou, je suis sot, je suis méchant, mauvais… » Il entame alors une de ses périodes les plus créatrices.
En 1883, Octave Maus fonde le cercle artistique d'avant-garde « Les XX » et Ensor peint son premier tableau de masques, et un autoportrait auquel il ajoutera plus tard le « chapeau fleuri ». En 1889, L'Entrée du Christ à Bruxelles est refusée au Salon des XX et il est question de l'exclure du Cercle dont il est pourtant l'un des membres fondateurs. Le groupe se sépare quatre ans après pour se récréer sous le nom de La Libre Esthétique.
À 33 ans, Ensor est déjà un homme du passé. Le pointillisme et le symbolisme semblent l'emporter. Les premières demeures de Victor Horta symbolisent un nouvel art de vivre. Il n'est plus le nain Hop-Frog, bouffon d'Edgar Allan Poe, moins encore le Christ martyr.
En 1898, il est l'un des instigateurs du bal du Rat mort qui a lieu à la fin du carnaval d'Ostende. Ensor doit attendre le début du siècle suivant, alors qu'il a donné le meilleur, pour assister à la reconnaissance de son œuvre : expositions internationales, visite royale, anoblissement — il est fait baron<ref>Modèle:Ouvrage</ref> —, Légion d'honneur. Il est désormais surnommé le « prince des peintres », mais il a une réaction inattendue face à cette reconnaissance trop longtemps attendue et trop tard venue à son goût : il abandonne la peinture et consacre les dernières années de sa vie exclusivement à la musique contemporaine.
Il meurt le Modèle:Date- à l'hôpital du Sacré-Cœur d'Ostende et est inhumé quatre jours plus tard dans le cimetière Notre-Dame des Dunes à Mariakerke, près d'Ostende.
Si la vie privée d'Ensor reste mal connue, c'est parce que l'artiste l'a désiré ainsi<ref>Modèle:Lien web</ref>. Le peintre s'est construit une existence de beauté, de vérité et de veine poétique.
Avec son retour chez sa mère, Ensor est fasciné par la lumière de la cité balnéaire qui lui inspire des pâleurs secrètes. Ensor sculpte la lumière et est captivé par le pouvoir de recréer les choses ou de les vider de leur contenu familier : « La lumière déforme le contour. Je vis là-dedans un monde énorme que je pouvais explorer, une nouvelle manière de voir que je pouvais représenter. » Ses tableaux, Le Nuage blanc et Les Toits d'Ostende, rappellent ceux de Turner, entre modernité et avant-garde.
Dans la Mangeuse d'huîtres (1882), une nappe immaculée éblouit l'avant-plan et tombe quasi en dehors des limites du cadre. Malgré les tableaux prestigieux que celui-là rappelle (toute la tradition flamande du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle), mais aussi Vuillard, on le refuse au Salon d'Anvers. L'année suivante, toutes ses toiles sont rejetées du salon de Bruxelles et il est mis à l'écart du Cercle des Vingt. Ulcéré, Ensor bascule dans la déraison. Désormais, seul contre tous, il couvre et balafre ses toiles de couleurs rougeoyantes symbolisant son exaspération.
C'est entre 1887 et 1893 qu'il peint ses plus beaux tableaux : la gamme chromatique prend feu au milieu des nacres translucides des ciels et des marines. Contemporaine des van Gogh et des toiles d'Edvard Munch, son œuvre contient les futures révolutions du fauvisme au mouvement Cobra.
Il va donc mettre en évidence les aspects grotesques des choses, rehaussés de manière surréelle, et s'orienter vers une vision du monde radicale, sarcastique et insolente. Comme chez Pieter Brueghel l'Ancien ou Jérôme Bosch, l'inanimé respire et crie. Ses obsessions et ses peurs jouent un rôle manifeste dans les traits menaçants qu'il attribue aux objets utilitaires, aux revenants et aux masques. Ces derniers, à partir des années 1880, dominent son inspiration et renvoient au carnaval, ce « monde à l'envers », anarchique où les rapports sociaux sont démontrés par l'absurde. La foule considérée comme une menace, un cauchemar, sera le thème de nombreuses toiles. Il entretient avec elle des rapports ambivalents : solidarité envers les revendications des défilés contre l'Église et le roi mais aussi, crainte d'un homme retiré du monde.
Artiste pluraliste, il l'est également dans son style et ses techniques : toile, bois, papier, carton, couteau à palette, pinceau fin ou spatule… : « Chaque œuvre devrait présenter un procédé nouveau », écrit-il à Modèle:Lien. Il s'est aussi lancé dans la gravure : Modèle:Citation.
Modèle:Refnec, il édite des eaux-fortes, les fameux « biftecks d'Ensor », œuvres Modèle:Refnec mais qui ont fait alors la fierté des marchands de souvenirs. Il réalise aussi des caricatures, laissant libre cours à sa verve gouailleuse, avec un trait racé, canaille et pourfendeur à la manière de Bruegel et de Bosch. Ses scènes de baigneurs fesses à l'air dans des postures hilarantes sont des chefs-d'œuvre du genre.
C’est en 1883 que le masque fait son apparition dans l’œuvre de l'artiste avec Les masques scandalisés, chef-d’œuvre de sa période sombre. En 1892, presque dix ans plus tard, Ensor réalise Les masques singuliers, jalon de sa période claire<ref>Modèle:Lien web</ref>. À travers les masques, sa peinture aborde des thématiques et des registres qui nous parlent : la mort, l'illusion, l'enfance, la mer, le rire, l'angoisse. Les masques sont pour lui une fresque de la société et de ses dérives. Ils personnifient l'hypocrisie de la bourgeoisie, la classe sociale dont est issu le peintre<ref>Modèle:Lien web</ref>. Formellement, ses motifs hypnotiques, ses compositions bancales et aux coloris violents sont formidablement novateurs. La peinture de Nolde, Kandinsky et Klee s'en ressent profondément dès les années 1910. Par sa prédilection pour les personnages masqués, les squelettes, qui, dans ses tableaux, grouillent dans une atmosphère de carnaval, Ensor est le père d'un monde imaginaire et fantastique qui annonce le surréalisme<ref>Modèle:Lien web</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Ses autoportraits tardifs (il en a peint 112) sont marqués par des sentiments négatifs, on y cherche vainement les traits volontaires et fiers, ainsi que cette lueur d’humour qui caractérisent ses travaux de jeunesse. Emile Verhaeren écrit : « Il serait surprenant qu’Ensor, aimant avant tout au monde son art et par conséquent chérissant surtout celui qui le fait, c’est-à-dire lui-même, n’eût multiplié à l’infini sa propre effigie. »
Ensor eut une grande influence sur Michel de Ghelderode qui fut inspiré pour ses œuvres théâtrales (Masques ostendais, Le Siège d'Ostende etc.) par les masques et les figures d'Ensor (la Mort, le Diable, les pêcheurs…).
La pièce de théâtre, La Passion du diable d'Adolphe Nysenholc (Éditions Lansman, 1995), s'inspire dans sa partie centrale du tableau l'Entrée du Christ à Bruxelles de James Ensor.
Un monument portant un buste de James Ensor (daté de 1930) a été érigé dans le parc Léopold à Ostende selon le projet du sculpteur bruxellois Edmond de Valeriola (1877-1956). En 1985, ce buste a été remplacé par une réplique en bronze de l'artiste Irenée Duriez. L'original a été placé dans la maison Ensor. Sur le socle, l'on peut découvrir la devise d'Ensor : PRO LUCE NOBILIS SUM ;
L'on trouve une avenue Ensor au Coq, une drève Ensor à Overijse et un institut Ensor à Ostende;
Un musée James Ensor a été créé à Ostende dans la maison de James Ensor qui ne compte pas moins de trente-huit de ses tableaux;