Manifeste
Un manifeste est une déclaration écrite et publique par laquelle un gouvernement, un parti politique, une association, un collectif, un courant artistique ou une personne, expose un programme d'actions ou une position, le plus souvent politique ou esthétique<ref>Cette définition reprend, en la modifiant légèrement, celle donnée par le Trésor de la langue française informatisé.</ref>.
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, l'usage du manifeste a été intégré par le mouvement ouvrier, qui a utilisé cette forme d'intervention politique et littéraire à diverses reprises, notamment avec le Manifeste du Parti communiste de 1848. Certains courants de l'art moderne l'ont aussi utilisé, bien que ce ne soit qu'avec le Manifeste du futurisme de Marinetti que cet usage soit devenu célèbre, de même que la lettre au président d'Émile Zola avec J'accuse concernant l'affaire Dreyfus.
Histoire lexicale
Issu du latin manifestus, les premières occurrences du mot « manifeste » en français sont attestées au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, dans le vocabulaire de la théologie, où il désigne la manifestation<ref>Qui est également issu du latin manifestus, de même que manifestant, manifester (cf. Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, Paris, 1998, t. 2., p. 2122.)</ref> de Dieu ou de sa volonté. De là viendraient les deux sens qu'il a pris en français moderne : d'une part dans le sens précédemment indiqué, et d'autre part, dans le domaine commercial, pour désigner un document établi en général à l'intention des Douanes et qui récapitule tous les éléments constitutifs d'un navire ou d'un aéronef, dont sa cargaison, partant vers l'étranger ou en provenant, avant son déchargement<ref>Pour tout ce paragraphe, voir Marc Angenot et Darko Suvin, « L’implicite du manifeste : métaphores et imagerie de la démystification dans le manifeste communiste », Études françaises, vol. 16, n° 3-4, 1980, p. 46-47, note 4.</ref> (à partir de 1362)<ref>Sans doute par emprunt au Provençal manifest, qui est de même origine (cf. Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française,Le Robert, Paris, 1998, t. 2., p. 2122.)</ref>.
Dans son sens de « déclaration publique », il désignait à l'origine un texte affiché dans un lieu public pour faire connaître à la collectivité une intention, un programme. Dans cette acception, il est probablement issu de l'italien manifesto, et est attesté en français aux environs de 1575. Il est alors plus ou moins synonyme de « déclaration<ref>Daniel Chouinard, « Sur la préhistoire du manifeste littéraire (1500-1828) », Études françaises, Volume 16, numéro 3-4, octobre 1980, Montréal, p. 23.</ref>. » L'ambiguïté règne durant les deux siècles suivants sur le sens à donner à ce mot, notamment en ce qui concerne l'identité de son émetteur : il peut s'agir ou bien d'un texte émanant du pouvoir légitime, ou bien d'une déclaration provenant d'un parti ou d'une faction<ref>Daniel Chouinard, art. cit., p. 25-27.</ref>. Dans ce dernier sens, il pourra y avoir un certain flottement sémantique entre le manifeste et la pétition : même si cette dernière est censée désigner un texte collectif destiné à une autorité constituée alors que le destinataire du manifeste est difficilement localisable (sinon sous le terme générique « d'opinion publique »), l'historien Jean-François Sirinelli fait observer que dans la pratique, « la distinction est parfois ténue entre ces deux catégories de textes collectifs<ref>Jean-François Sirinelli, Intellectuels et passion françaises, Paris, Gallimard, Modèle:Coll., 1990, Modèle:P., note 1.</ref>. »
Types
Politique
C'est au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle que le terme « manifeste » commence à désigner des déclarations publiques qui ne sont plus seulement le fait de princes ou de grands seigneurs, mais dont les auteurs peuvent être de simples particuliers. Durant les deux siècles suivants, celles-ci seront suffisamment nombreuses pour que le sens originel passe au second plan<ref>Daniel Chouinard, art. cit., p. 26-27.</ref>.
À partir de la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, le terme sera largement utilisé par les porte-parole de ce qui deviendra le mouvement ouvrier, avec notamment le Manifeste des Égaux de 1796 (Conjuration des Égaux de Gracchus Babeuf), ou le Manifeste politique et social de la démocratie pacifique de Victor Considerant (1843). C'est à cette tradition que se réfère le texte de la Ligue des communistes, rédigé par Karl Marx et Friedrich Engels, le Manifeste du parti communiste de 1848<ref>Après avoir hésité sur le type d'intitulé à donner à cet opuscule : ils avaient tout d'abord pensé à le diffuser sous plusieurs titres évoquant la « Confession de foi ». Marc Angenot et Darko Suvin, art. cit., p. 43.</ref>.
Certains partis politiques, en France continuent de publier des manifestes. Le dernier recensé est le "Manifeste pour une Europe des nations", du Rassemblement national, rédigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella, rendu public le lundi Modèle:Date-, imprimé à 5000 exemplaires<ref>Modèle:Lien web</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>,<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Littératures et arts
Dans le domaine littéraire, l'un des premiers textes à avoir été qualifié de « Manifeste » est la Défense et illustration de la langue française de Joachim Du Bellay. Qualificatif donné a posteriori, puisqu'il n'apparaît qu'en 1828, sous la plume de Sainte-Beuve<ref name="chouinard-28" />. L'emploi de ce néologisme par Sainte-Beuve fait toutefois probablement écho à l'apparition récente du vocable dans le domaine esthétique, puisque quatre ans plus tôt était paru un Manifeste de la Muse française. Mais, si la pratique du manifeste existe bien chez les artistes et les écrivains, le terme lui-même reste rare jusqu'à son emploi par Marinetti pour ses Manifestes futuristes au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle (bien qu'il y ait eu, en 1886, le Manifeste du symbolisme de Jean Moreas), bientôt suivi par Tristan Tzara et les Manifestes DaDa<ref name="chouinard-28" />.
Économie et technologie
Le terme de Manifeste est utilisé dans des essais pour renforcer la dimension prospective ou politique que l'on veut donner à une réflexion. On peut ainsi citer à titre d'exemple le GNU Manifesto de Richard Stallman en 1985, le Hacker's Manifesto de Loyd Blankenship en 1986, ou encore le Cluetrain Manifesto de Rick Levine, Christopher Locke, Doc Searls et David Weinberger en 1999.
Autres domaines
Dans le domaine de la vie quotidienne ou des sujets de société, on trouve divers manifestes, comme par exemple Le manifeste du bien-manger de Véronique Richez-Lerouge, sur l'impact de l'alimentation<ref>paru en 2018 aux éditions Éric Bonnier</ref> ou Le manifeste des pauvres de Francisco Van der Hoff, ou encore Le manifeste des Arabes du politologue Hasni Abidi<ref>paru en 2011 aux éditions Éric Bonnier</ref>.
Analyse informatique
L'analyse de données textuelles des manifestes s'est développée en sciences politiques depuis le projet séminal, entamé en 1979, du Manifesto Research Group, dirigé par Ian Budge (Université de l'Essex) <ref> Budge, Ian, et al. 2001. Mapping Preferences: Parties, Electors, and Governments, 1945-1998, London: Oxford University Press.</ref> et mené dans le cadre du Consortium européen pour la recherche politique. En utilisant les NTIC, le collectif a analysé d'abord les manifestes des partis politiques (ou plateformes électorales, programmes politiques, etc.), publiés après la Seconde Guerre mondiale dans 19 démocraties (Europe de l'Ouest et États-Unis principalement), bientôt élargi à la plupart des partis politiques dans 25 démocraties. Le projet a depuis été renommé Comparative Manifestos Project, auquel participent diverses institutions, dont le Modèle:Lien, et s'étend à tous les pays de l'OCDE et quelques autres (au moins 529 pays et 781 partis sont actuellement pris en compte). En standardisant les données, cette méthode d'analyse permet notamment d'augmenter les possibilités de comparaison entre les programmes.
Ces derniers sont classés en fonction d'une cinquantaine de catégories : par exemple anti-impérialisme; catégories relative à la liberté et aux droits de l'homme ; celles relatives au régime politique (par exemple emphase sur une « réforme de l'État », etc.) ; des catégories économiques (nationalisations, etc.); des catégories relatives à la protection sociale et à la qualité de vie (environnement, etc.); des catégories sociales (multiculturalisme, minorités sociales ou ethnique, etc.). L'analyse quantitative permet déjà d'évaluer l'accent mis par chaque parti sur ces différents thèmes. À partir de ces catégories, les chercheurs ont tenté de classifier les positions selon un axe gauche-droite afin de déterminer la position idéologique des partis.
Par exemple, ont été considérées comme position de gauche les catégories : Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation et Modèle:Citation, Modèle:Citation et Modèle:Citation, Modèle:Citation et Modèle:Citation ou Modèle:Citation. Ont été considérées comme position de droite les catégories : Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation et Modèle:Citation, défense du Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation, Modèle:Citation et enfin liberté et droits de l'homme.
Ce découpage, utilisé par Kim et Fording (1998) <ref>{{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Kim, HeeMin, et Richard C. Fording. 1998. "Voter Ideology in Western Democracies, 1946-1989." European Journal of Political Research 33: 73-97.</ref>, peut bien entendu être remis en cause. Mais, à condition de ne pas remettre en cause les catégories utilisées à l'origine pour catégoriser les plateformes politiques, tout autre découpage peut être effectué. La faiblesse principale de ce programme provient en effet de son caractère pionnier : n'ayant guère eu de concurrent pendant des décennies, de nombreux chercheurs se sont appuyés sur ces données et sur le mode initial de catégorisation choisie par les concepteurs du programme pour effectuer des analyses politiques, publiées dans diverses revues internationales de sciences politiques.
Notes et références
Annexes
Articles connexes
- Manifeste des 93, ou « Appel des intellectuels allemands aux nations civilisées », le Modèle:Date-.
- Manifeste des 121, ou « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie », le Modèle:Date-.
- Manifeste des 343, pour le droit à l'avortement, le Modèle:Date-.
- Manifeste des 363, déclaration au président de la République Mac Mahon en 1877.
- Lettre ouverte (texte)
Bibliographie
- Le manifeste poétique/politique, Montréal, Études françaises, Volume 16, no 3-4, Modèle:Date- Modèle:Lire en ligne.
- Kilien Stengel, Manifeste du savoir-manger : Pour que nos enfants sachent se nourrir, Éditions Praelego, 2012 Modèle:ISBN.
- Collection Manifeste, aux éditions Autrement.
- Choisis et commentés par Antje Kramer, Les grands manifestes de l'art des {{#switch: XX
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}}, Beaux Arts Éditions, 2011 Modèle:ISBN Modèle:Présentation en ligne.
Liens externes
- À la source du manifeste - Laurent Margantin, La Revue des ressources, Modèle:Date-.