Symphonie Manfred (Tchaïkovski)
Modèle:Voir homonymes Modèle:Titre en italique Modèle:Infobox Musique classique (œuvre)
La Symphonie Manfred en si mineur (en Modèle:Lang-ru ; Modèle:Ru-17-18), Modèle:Op., est une œuvre de Piotr Ilitch Tchaïkovski en quatre scènes, d’après le poème dramatique Manfred de Lord Byron. Composée entre mai et septembre 1885, elle est créée à Moscou, le 11 (23)<ref name="CIS">La première date est celle du calendrier julien, utilisé en Russie jusqu'à la révolution d’Octobre, et qui avait quelques jours d’avances sur le calendrier grégorien.</ref> mars 1886, sous la direction de Max Erdmannsdörfer.
La symphonie est dédiée à Mili Balakirev, qui en proposa le thème à Tchaïkovski et s’efforça de diriger son travail.
Structure
- Lento lugubre (si mineur)
- Vivace con spirito (si mineur)
- Andante con moto (sol majeur)
- Allegro con fuoco (si mineur)
Orchestration
Bois |
---|
3 flûtes (la Modèle:3e prend le piccolo), 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes (en la), 1 clarinette basse (en si bémol), 3 bassons |
Cuivres |
4 cors (en fa), 2 cornets (en la), 2 trompettes (en ré), 3 trombones (2 ténors et 1 basse), 1 tuba |
Percussions |
timbales, cymbales, grosse caisse, cloches, tambourin, triangle, tam-tam |
Clavier |
orgue (dernier mouvement) |
Cordes |
2 harpes, premiers violons, seconds violons, altos, violoncelles, contrebasses |
Genèse
Proposition de Balakirev à Berlioz
C’est en 1867–1868 qu’Hector Berlioz effectue son dernier voyage en Russie. À cette occasion, il reçoit une lettre de Mili Balakirev qui a entendu son Harold en Italie. Balakirev lui-même a été sollicité par son ami Vladimir Stasov pour écrire une vaste symphonie à programme d’après Byron ; il écrit à Berlioz :
Balakirev, qui comme à son habitude se comporte en chef de groupe, décrit à Berlioz la symphonie idéale qu’il aurait pu composer, sorte de mélange de la Symphonie fantastique, de Harold en Italie et de Roméo et Juliette. Mais Berlioz devait mourir l’année suivante et Balakirev attendra quatorze ans avant de repenser à ce projet.
Proposition du projet à Tchaïkovski
En 1881, Tchaïkovski dédie à Balakirev sa fantaisie-ouverture Roméo et Juliette. Ce n’est qu'un an plus tard qu’il reçoit une réponse du dédicataire, datée du Modèle:Date- (Modèle:Date-)<ref name="CIS"/> 1882 :
Tchaïkovski remercie Balakirev des compliments qui lui sont faits, mais s’excuse de ne pouvoir pour le moment le rencontrer :
Balakirev lui répond le Modèle:Date- (Modèle:Date-)<ref name="CIS"/> :
Balakirev reproduit à nouveau le programme de Stasov, effectuant au passage quelques petites modifications, et il schématise entièrement la symphonie : Modèle:Citation bloc
Balakirev conseille ensuite à Tchaïkovski d’écrire les deux parties de flûte sur la même portée et de n’utiliser qu’une seule ligne pour les percussions au lieu d’une portée complète<ref>Ce que fait d’ailleurs toujours Tchaïkovski : chez lui, les percussions sont écrites sur une simple ligne.</ref> car : Modèle:Citation bloc
L’impression de malaise qu'il évoque sera immédiatement perceptible dès les premières mesures de Manfred, dans les dissonances des cordes. Mais à ce moment-là, l’œuvre n’est encore qu’un très vague projet et la réponse de Tchaïkovski, datée du 12 (24) novembre<ref name="CIS"/> 1882 est tout sauf enthousiaste :
Tchaïkovski continue sa lettre en critiquant ses œuvres précédentes, dont Francesca et la Tempête, et la termine sur ces mots :
En Modèle:Date-, Tchaïkovski rencontre Balakirev à l’occasion de la première d’Eugène Onéguine. Balakirev lui remet alors le programme original de Stasov dont le schéma musical a été considérablement revu par lui. La tonalité principale devrait être si-bémol mineur ; le second thème du premier mouvement devait être écrit en ré majeur, et ré-bémol majeur lors de la réexposition. Balakirev donne la tonalité de sol-bémol majeur pour le larghetto et s’en tient à ré majeur pour le scherzo. Il voit le final écrit en si-bémol mineur, l’ombre d’Astarté en ré-bémol majeur (con sordini) et enfin le requiem conclusif en si-bémol majeur. Il indique pour chaque mouvement des œuvres d’autres compositeurs, destinées à aider Tchaïkovski à trouver l’inspiration : parmi elles, Hamlet de Liszt et les préludes de Chopin.
À cette époque, rien n'assure que Tchaïkovski va entreprendre le projet, mais les conversations théologiques et philosophiques qu’il a eues avec Balakirev ont commencé à le convaincre. En outre, il est décidé à rendre hommage au chef de file du groupe des Cinq.
Le Modèle:Date- (Modèle:Date-)<ref name="CIS"/> 1884, Tchaïkovski, qui s’apprête à partir pour Davos où un de ses amis est en train de mourir, écrit à nouveau à Balakirev :
De Davos, le 17 (29) novembre, il lui écrit : Modèle:Citation bloc
Composition
En fait, il faut attendre Modèle:Date- pour que les premières esquisses soient achevées. Pendant tout l’été 1885, Tchaïkovski travaille avec ardeur sur le projet ; le premier mouvement est terminé en juin, le scherzo lui prend un mois entier (juillet-août), la pastorale arrive à son terme le 11 (23)<ref name="CIS"/> septembre tandis qu’il ne lui faut qu’un seul jour pour mettre un terme au finale (officiellement), c’est-à-dire qu’il l’achève le 12 (24) septembre. Le 13 (25), il écrit à Balakirev:
Illustration pour le Manfred de Byron par Gustave Doré (1853)
En fait, la symphonie n’est pas encore achevée totalement, comme Tchaïkovski l’explique à son frère Modeste quelques jours après.
Ses sentiments à l’égard de l’œuvre ne cessent d’évoluer, allant de la franche hostilité à l’enthousiasme. Alors qu’il débutait la composition de Manfred, il avait écrit à Sergueï Taneiev, l’un de ses élèves préférés : Modèle:Citation bloc
Tchaïkovski rejoint les désillusions de Claude Debussy sur la musique à programme. Jamais il ne s’est plaint autant à propos d’une œuvre, mais ces plaintes finissent par le convaincre du bien-fondé de la réalisation. En Modèle:Date-, alors qu’il n’en est encore qu’au deuxième mouvement, il écrit à Emiliya Pavlovskaïa : Modèle:Citation bloc
À sa cousine Anna Merkling, il écrit en septembre : Modèle:Citation bloc
Création et jugement de Tchaïkovski sur Manfred
La symphonie est créée à Moscou le 11 mars (Modèle:Date-)<ref name="CIS"/> 1886 sous la direction de Max Erdmannsdörfer. Tchaïkovski est enthousiaste, tout comme le public qui lui a fait bon accueil. À cette occasion, il écrit à sa protectrice, Nadejda von Meck, que cette œuvre est la meilleure de toutes les symphonies qu’il a écrites.
Ce jugement ne dure qu’un temps ; le compositeur traverse des moments d'abattement et une profonde crise d’inspiration au cours des années 1888–1890. En 1888, il écrit au grand-duc Constantin : Modèle:Citation bloc
La partition est cependant restée telle qu’elle était à sa création, l’auteur ayant été absorbé par de nouveaux projets, dont la Cinquième Symphonie et La Dame de pique.
Analyse
Plusieurs thématiques Modèle:Référence nécessaire dans Manfred :
- la relation amour-haine que Tchaïkovski noue avec Balakirev, chef du groupe des Cinq, créateur lui aussi d’une musique à programme avec le poème symphonique Tamara ;
- la conception platonicienne de la création, émanation d’une puissance supérieure, la voix intérieure ;
- l’affirmation d’un nouvel orchestre : Manfred est la seule symphonie de Tchaïkovski à requérir un orchestre élargi, c’est-à-dire avec cor anglais, clarinette basse, deux cornets en plus des trompettes et deux harpes. En cela, l’on retrouve l'instrumentation des ballets ou des derniers opéras : le prélude Yolande débute avec la même combinaison de bois graves).
Manfred Modèle:Référence nécessaire une œuvre vraiment contemporaine pour son époque. Tout en détestant le programme de Balakirev, Tchaïkovski s’est soumis au jeu proposé par son mentor, en mettant en scène ses propres sentiments déguisés et en s’obligeant à aller bien plus loin qu'il n'était allé dans sa Quatrième Symphonie : les dissonances et les fanfares de l'introduction — de simples accords mineurs de cuivres, très lourds — Modèle:Référence nécessaire que celles de sa Quatrième.
Transcriptions et utilisations
- Tchaïkovski et Aleksandra Hubert, arrangèrent cette symphonie pour deux pianos (4 mains) entre juin (?) et novembre 1885.
- Le premier et le quatrième mouvement ont été utilisés dans une série d’animation japonaise, Gankutsuō (2005).
Enregistrements
- Arturo Toscanini enregistra l’œuvre plusieurs fois avec son orchestre symphonique de la NBC, en 1940, en 1949 et en 1953. La version de 1953 (Music & Arts), particulièrement réputée, est bien représentative de la vision qu’avait Toscanini de cette œuvre. Le chef a fait d’importantes coupures dans la partition, principalement dans le dernier mouvement<ref>Tchaikovsky Forum : Toscanini's "Manfred"</ref>.
- Igor Markevitch, à la tête de l’orchestre symphonique de Londres, enregistra l’œuvre en 1963.
- Evgueni Svetlanov enregistra trois fois Manfred : en 1967 avec l’orchestre symphonique d’État de l’URSS (Melodiya) et en 1992 avec l’orchestre symphonique d’État de Russie (Canyon Classics). Dans cette deuxième version, aux tempos caractéristiques, le chef prend un maximum de risques dans les passages enfiévrés ; le passage du final avec le choral d’orgue est absent. Il l'enregistra également en 1989 lors d'un concert avec l'Orchestre philharmonique de Berlin. Cet enregistrement est particulier dans la mesure où il fit plusieurs coupures dans le final (mesures 141 à 257, soit un tiers de l'exposition, la première section lente Andante, puis la fugue centrale), et réintroduisant la coda du premier mouvement (Andante con duolo), et supprimant le choral d'orgue et la coda écrits à l'origine.
- Lorin Maazel enregistra l’œuvre en 1972 avec l’orchestre philharmonique de Vienne, et Riccardo Muti en 1981 à la tête de l’orchestre Philharmonia (label EMI). Cette dernière version (sans aucune coupure) est une des plus réputées.
- En 2008, Vasily Petrenko enregistre la Symphonie Manfred et la ballade symphonique Le Voïévode, avec l'Orchestre philharmonique royal de Liverpool chez (Naxos<ref>Le disque obtient plusieurs prix, dont le Orchestral Award of the Year de la revue britannique Gramophone</ref>.
Notes et références
Bibliographie
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- {{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Enregistrement par le BBC Philharmonic dirigé par Vassili Sinaïski sur le site de BBC Radio 3, avec commentaires sur l'œuvre
- {{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} La symphonie Manfred sur Tchaikovsky Research
- Modèle:IMSLP2
- Partition pour orchestre sur sheetmusicfox.com