Fantasia (cavalerie)

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Fantasia exécutée à َAïn El Arbaa, dans la wilaya d'Aïn Témouchent, par un groupe de cavaliers photographiés au moment du tir de la salve de fusils.
Fantasia à Aïn El Arbaa (wilaya de Aïn Témouchent).
Fichier:Tbourida from Moroccan Eastern 2.jpg
Festival de Modèle:Langue au Maroc.

La fantasia est une tradition équestre pratiquée essentiellement au Maghreb, se manifestant par la simulation d'assauts militaires. Cet art est notamment appelé « jeu de la poudre » ou « jeu des chevaux », et aussi Modèle:Langue localement (au Maroc). L'inscription de la Modèle:Langue sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité est annoncée par le Comité du patrimoine culturel immatériel de l'Unesco en décembre 2021 au nom du Maroc, faisant suite au classement en décembre 2013 du pèlerinage annuel au mausolée Sidi Abdelkader au nom de l'Algérie, qui se caractérise par ses compétitions équestres.

Pratique très ancienne en Afrique du Nord, elle prend le plus souvent la forme d'évolutions équestres au cours desquelles des cavaliers, munis de fusils à poudre noire et chevauchant des montures richement harnachées, simulent une charge de cavalerie dont l'apothéose est le tir coordonné d'une salve de leurs armes à feu. Elle peut en outre, selon les régions, être exécutée à dos de dromadaire ou à pied.

La fantasia relève indirectement d'une tradition équestre berbère très ancienne, à mettre en rapport avec l'introduction du cheval barbe, qui fut notamment utilisé chez les Libyens orientaux pour tracter des chars, dès le Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle Modèle:Av JCModèle:Vérification siècle, puis, pendant le millénaire suivant, adapté en tant que monture par les Paléo-Berbères, avec, plus tard, les chevauchées de la célèbre cavalerie numide du roi Massinissa<ref name="peyron"/>. Signalée à la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle par les témoignages de voyageurs au Maghreb, elle sera formellement connue, et prendra ce nom de fantasia, dès 1832, grâce au peintre français Eugène Delacroix et aux tableaux qu'il en fait. Elle deviendra ensuite l'un des sujets de prédilection des peintres orientalistes les plus illustres, tels qu'Eugène Fromentin ou Marià Fortuny.

La fantasia accompagne le plus souvent les fêtes importantes (mariages, naissances, fêtes religieuses, etc.), même si l'aspect touristique l'emporte largement de nos jours.

Une pratique en partie semblable Modèle:Incise existe également au Japon, dans le cadre du festival annuel Soma Nomaoi créé par le clan Sōma et pratiqué par les clans samouraïs.

Étymologie

Fichier:Jeune cavalier au fusil.jpg
Jeune cavalier au fusil ou La fantasia, Étienne Dinet (vers 1900).
Fichier:Biskra fantasia 1892.jpg
Fantasia à Biskra en 1892.

En langue berbère, la fantasia est connue et citée par plusieurs auteurs sous le nom de tafrawt (en tifinagh : ⵜⴰⴼⵔⴰⵡⵜ), mot qualifiant plus largement une course de chevaux, et dans lequel la racine « FRW » évoque le phénomène d'envolée, de décollage<ref name="peyron">Modèle:Encyclopédie berbère.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

En dialecte maghrébin, la fantasia est le plus communément appelée fantazya ou tburida, dont la racine « BRD » dérive de « poudre ».

Les spectacles désignés au Maghreb sous les vocables de Modèle:Langue ou Modèle:Langue<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Margueritte">Modèle:Ouvrage.</ref> (Modèle:Langue en arabe, soit « jeu de la poudre »<ref name="baroud">Du mot arabe « baroud », signifiant « poudre noire » ; on retrouve ce mot dans l'expression « baroud d'honneur ».</ref>), ou Modèle:Langue ou Modèle:Langue<ref name="Archives marocaines">Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref> (Modèle:Langue en arabe, soit « jeu des chevaux »), héritent du nom de Modèle:Langue à la suite d'une méprise.

Le terme « fantasia » vient, selon une première version, du mot grec Modèle:Langue (Modèle:Grec ancien), passé par le bas latin et l'italien, désignant un « spectacle imaginaire » et une « faculté de concevoir des images »<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref> ou, selon une autre version, du mot d'origine espagnole Modèle:Langue signifiant « imagination », mais aussi « vanité, arrogance »<ref>Modèle:Lien brisé.</ref>,<ref name="TLFi">Modèle:Lien web.</ref>. Il entre dans les parlers maghrébins, où il prend le sens de « panache, gloire ».

C'est le peintre français Eugène Delacroix qui donne par erreur le sens de « spectacle équestre » à ce terme<ref name="Lanly">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="TLFi"/>. André Lanly avance l'hypothèse que Modèle:Citation<ref name="Lanly"/>.

Selon une autre version, l'utilisation du mot fantasia viendrait d'une confusion entre deux mots en arabe classique construits sur la même racine verbale trilittérale Modèle:Langue, Modèle:Langue (signifiant « imagination ») et Modèle:Langue (signifiant « cavaliers »)<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Le mot a un temps été écrit fantazia<ref>Modèle:Ouvrage.</ref> ou phantasia<ref name="TLFi"/>,<ref name="scipion.marin">Modèle:Ouvrage.</ref> ; à propos de ce dernier terme, on peut noter une occurrence de son usage par un voyageur français en Oranie, en 1838, pour des jeux équestres distincts de la fantasia (que ce voyageur nomme par ailleurs « joutes militaires »)<ref>Modèle:Ouvrage. Après avoir décrit sous le terme de « joutes militaires », ce que l'on appellerait aujourd'hui une « fantasia » à Boutlélis, près d'Oran, J.-A. Bolle poursuit : Modèle:Citation.</ref>.

Histoire

Gravure rupestre du sud orantes représentant un cheval parmi d'autres animaux
Gravure préhistorique du sud oranais représentant un cheval, ancêtre du barbe.

L'histoire de la fantasia est celle de la rencontre en terre nord-africaine de l'Homme et du cheval. Les restes osseux d'Modèle:Langue datant d'il y a Modèle:Nombre, aux temps préhistoriques, ou plus récemment, les dessins rupestres de l'Atlas saharien datant de Modèle:Nombre av. J.-C., attestent de la présence du cheval au Maghreb, un ancêtre de l'actuelle race chevaline indigène, le barbe<ref name="Rahal-Guedioura-Oumouna">Modèle:Article.</ref>.

Docile, rustique, endurant, mais surtout rapide, ce cheval fera la gloire des cavaliers numides, considérés à l'époque des guerres puniques comme les meilleurs cavaliers du monde<ref name="Briand-Ponsart">Modèle:Ouvrage.</ref>, grâce notamment à la technique de combat par harcèlement à base de charges et de replis rapides qu'ils ont développée<ref name="Digard">Modèle:Ouvrage.</ref>. On retrouve plus tard cette même tactique d'attaque et de fuite (appelée Modèle:Langue<ref name="Digard"/>) chez les Arabes, dont Modèle:Citation<ref name="Frisch-Henri">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Goupil">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Dessin de jan Cornelisz Vermeyen, représentant une arène dans laquelle des cavaliers effectuent des exercices équestres
Une fantasia à Tunis, par Jan Cornelisz Vermeyen, vers 1535.

De là découle la fantasia. Qualifiée tour à tour d'image de la guerre<ref name="Frisch-Henri"/>, de démonstration rituelle de force et de courage<ref name="Yelles-Chaouche">Modèle:Ouvrage.</ref> ou même de métaphore de l'affrontement érotique<ref name="Yelles-Chaouche"/>, elle représente surtout les vestiges, la version édulcorée moderne, de l'art militaire de l'équitation arabo-turco-berbère d'Afrique du Nord<ref name="Digard"/>,<ref name="Pereira">Modèle:Ouvrage.</ref>.

La toute première représentation d'une fantasia est le dessin du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle attribué au peintre flamand Jan Cornelisz Vermeyen (1500-1559), intitulé a posteriori Une fantasia à Tunis<ref name="Vermeyen-fantasia-1">Modèle:Lien web. Dessin à la plume et lavé, musée du Louvre, inv. 19191, Recto, Modèle:Unité × Modèle:Unité.</ref>, et éventuellement ses deux autres dessins<ref name="del Mármol Carvajal">Modèle:Ouvrage.</ref> intitulés Tournoi militaire à Tunis<ref name="Vermeyen-fantasia-2">Modèle:Lien web.</ref>,<ref name="Vermeyen-fantasia-3">Modèle:Lien web.</ref>, les trois exécutés lors de la conquête de Tunis en 1535 par l'empereur Charles Quint.

Il faut cependant attendre la fin du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle pour que soient publiées les premières descriptions de ce qui s'appellera plus tard la fantasia<ref name="Revue de linguistique romane">Modèle:Article.</ref> : par Louis de Chénier en 1787<ref name="Chénier">Modèle:Ouvrage.</ref>, par l'abbé Poiret en 1789<ref name="Poiret">Modèle:Ouvrage.</ref> ou dans l'Encyclopædia Britannica en 1797<ref name="Macfarquhar">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Tableau d'Eugène Delacroix, représentant des cavalier exécutant une fantasia
Fantasia ou Jeu de la poudre, devant la porte d'entrée de la ville de Méquinez, par Eugène Delacroix, 1832.

Le 6 mars 1832, Eugène Delacroix, accompagnant le comte Charles-Édgar de Mornay dans son ambassade auprès du sultan marocain, assiste à Garbia, sur la route de Meknès, à ses premiers « jeux de poudre ». Il en verra d'autres à Alcassar-El-Kebir (actuelle Ksar El Kébir), puis à Méquinez (actuelle Meknès) ; il en note la splendeur dans son journal<ref name="Delacroix-1">Modèle:Ouvrage.</ref> : Modèle:Citation bloc De retour en France, Delacroix exécute une aquarelle (actuellement au musée du Louvre), restituant les scènes auxquelles il a assisté, et intitulée Fantasia ou Jeu de la poudre, devant la porte d'entrée de la ville de Méquinez. Il exécute par la suite trois autres « fantasias » : toujours en 1832, Exercices militaires des Marocains ou Fantasia marocaine, actuellement au musée Fabre à Montpellier ; en 1833, Fantasia arabe, actuellement à l'Institut d'art Städel de Francfort ; et enfin, en 1847, Fantasia marocaine, actuellement au musée Oskar Reinhart « Am Römerholz » de Winterthour<ref name="Faré-Baderou">Modèle:Ouvrage.</ref>. C'est ainsi que le mot fantasia devient synonyme de « jeu de la poudre ».

L'époque est alors à la mode de l'orientalisme ; comme le résume Victor Hugo<ref name="Hugo">Modèle:Ouvrage.</ref> : Modèle:Citation. Nombreux seront les artistes qui composeront d'admirables tableaux de fantasias : Eugène Fromentin<ref name="Fromentin">Modèle:Lien web.</ref>, Aimé Morot<ref name="Larcher">Modèle:Article.</ref>, Théo Van Rysselberghe<ref name="Feltkamp">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref> entre autres.

Loin d'être limitée aux seuls pays du Maghreb, la pratique de la fantasia est au contraire attestée au Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle dans toute l'Afrique du Nord, s'étendant d'une part de l'Égypte<ref name="Schoelcher">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Merruau">Modèle:Ouvrage.</ref> à l'est au Maroc à l'ouest, et d'autre part de la Tunisie au nord au Sénégal<ref name="Mage">Modèle:Ouvrage.</ref> ou au Tchad<ref name="Brussaux">Modèle:Article.</ref> au sud. Mais le plus surprenant est la pratique de la fantasia en Nouvelle-Calédonie ; arrivée avec les déportés algériens, elle s'y perpétue depuis la fin du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle<ref name="Ouennoughi">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Lien brisé.</ref>.

Une fantasia remarquable est celle organisée en l'honneur de Napoléon III, le Modèle:Date, à Maison-Carrée, dans les environs d'Alger, dans laquelle on a pu compter entre six et dix mille cavaliers<ref name="Giraudeau">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Dulaurier">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Caractéristiques et description

Fantasia exécutée à Bni Drir, Maroc, par un groupe de cavaliers, photographiées au moment du tir de la salve de fusils.
Fantasia à Bni Drar (Maroc, juillet 2010).

Dénominations vernaculaires

Fichier:Maroc - Fantasia-berbère - 1901.jpg
Berbères faisant la fantasia en l'honneur de leurs visiteurs — Région de Meknès (Maroc, 1901).

Au Maghreb, la fantasia porte généralement le nom de Modèle:Langue (« jeu de la poudre ») ou Modèle:Langue (soit « jeu des chevaux ») ; des noms plus locaux existent également : Modèle:Langue<ref name="Gaultier-Kurhan">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref> (au Maroc), Modèle:Langue<ref name="Benzakour-Gaadi-Queffélec"/>,<ref name="Queffélec"/>, Modèle:Langue<ref name="Delheure">Modèle:Ouvrage.</ref>, etc.

En Tunisie, la charge militaire en plein galop ponctuée de tirs de poudre (correspondant au jeu de la poudre marocain) est appelé le Modèle:Langue (basé sur la racine dialectale Modèle:Langue signifiant « regarder ») tandis que le deuxième type d'exercices (proche du jeu des chevaux marocain) constitué de figures équestres que le cavalier impose à son cheval sur une musique populaire au son de la tabla (tambour) et la Modèle:Langue (flûte) est appelé Modèle:Langue (basé sur la racine dialectale Modèle:Langue signifiant « tourner en rond »)<ref name="ftse">Modèle:Lien web.</ref>.

Célébration

La fantasia est traditionnellement liée à la fête, dont elle constitue le suprême ornement<ref name="Frisch-Henri"/>,<ref name="BenHounet">Modèle:Ouvrage.</ref>. Elle est célébrée à l'occasion de certains rites (moussem — ou waada —, zerda ou taam, fêtes annuelles dédiées à un saint pour certaines, au cours desquelles sont sacrifiées des bêtes et organisés de grands festins<ref name="Hermassi">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Rahal">Modèle:Ouvrage.</ref>), ou de certaines fêtes religieuses (l'Aïd el-Fitr<ref name="Gastineau">Modèle:Ouvrage.</ref>, marquant la fin du ramadan ou le Mouled<ref name="ecpad.fr">Modèle:Lien brisé.</ref>, qui commémore la naissance du Prophète de l'islam, Mahomet) ; elle accompagne la célébration des mariages (notamment pour escorter la mariée à son nouveau domicile)<ref name="Mornand">Modèle:Ouvrage.</ref>, des naissances ou des pèlerinages<ref name="Medjeber">Modèle:Ouvrage.</ref> ; on l'organise en signe de considération à un chef ou un notable que l'on désire honorer<ref name="Rahal"/>,<ref name="Margueritte"/>.

Cependant, de nos jours, la pratique de la fantasia a pris un aspect plus touristique, en tant que démonstration folklorique<ref name="Valensi">Modèle:Article.</ref>,<ref name="Kilani">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Apparat

Fichier:Cavalier arabe en costume de Fantasia - Tunisie.jpg
Cavalier arabe en costume de fantasia (Tunisie, vers 1900).
Fichier:El faress.jpg
Cavalier algérien en costume de fantasia (El Kharrouba, près d'Alger).

Synonyme d'apparence extérieure, de parade, d'éclat de la tenue et de luxe du vêtement<ref name="Bard">Modèle:Ouvrage.</ref>, la fantasia se caractérise d'abord par l'importance de son apparat, de la richesse et de la splendeur de l'habillement du cavalier<ref name="Thierry-Mieg">Modèle:Ouvrage.</ref>, de son équipement et du harnachement de son cheval. L'équipement du cavalier comprend principalement le Modèle:Langue, fusil à poudre noire maghrébin, arme de petit calibre à canon très long, si caractéristique avec ses nombreuses capucines étincelantes et ses incrustations d'os, d'ivoire, de nacre ou de métal, aux gravures colorées<ref name="Clergeau">Modèle:Article.</ref> ; le cavalier peut s'équiper également d'un yatagan<ref name="Gastineau"/>,<ref name="Guérin-t1">Modèle:Ouvrage.</ref>. Le faste du harnachement se traduit, par exemple, par des selles de maroquin rouge, brodées avec art ou damasquinées et poinçonnées d'or ; des housses en soie de Tunis ; des étriers argentés<ref name="Revue savoisienne">Modèle:Article.</ref>,<ref name="Gastineau"/>,<ref name="Guérin-t1"/>.

Déroulement

Fichier:Fantasia by Gabriel Veyre.jpg
Fantasia au Maroc, par Gabriel Veyre (début du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle).

La fantasia est la répétition théâtralisée des deux mouvements de la cavalerie en guerre : la charge rapide (el kerr) et la retraite subite (el ferr)<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.

Alignés à une extrémité de l'arène — ou de ce qui en tient lieu —, les cavaliers lancent leurs montures ventre à terre et, la bride tenue d'une seule main, font tournoyer leurs fusils au-dessus de leurs têtes ; arrivés à hauteur du gros de la foule de spectateurs, ils se lèvent comme un seul homme, saisissent leurs moukhalas des deux mains, la bride abandonné, arment et tirent de concert, à l'avant ou à l'arrière, en direction de la terre ou encore en l'air, puis font une volte courte et rapide et s'en retournent tout aussi vite qu'ils sont venus à leur point de départ pour recommencer leur course échevelée<ref name="Thierry-Mieg"/>,<ref name="de Segonzac">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Les salves ainsi tirées par les cavaliers portent le nom de baroud<ref name="Benzakour-Gaadi-Queffélec">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="Queffélec">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Selon les régions et selon leur adresse ou leur hardiesse, les cavaliers peuvent agrémenter leurs évolutions de postures ou de gestes acrobatiques, lançant en l'air leurs armes pour les rattraper en pleine course<ref name="Thierry-Mieg"/>,<ref name="Frisch-Henri"/>, se couchant sur les croupes<ref name="Reysoo">Modèle:Ouvrage.</ref> ou se mettant debout sur leurs selles, et certains même se tenant sur leurs têtes, le cheval toujours lancé au galop<ref name="Loti">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Les femmes répondent à ces performances par de stridents youyous d'encouragement et de satisfaction<ref name="Frisch-Henri"/>,<ref name="GénéralDaumas">Modèle:Article.</ref>.

Variantes

Fichier:Tuinisia djerba midoun fantasia-8.jpg
Fantasia acrobatique à Djerba (Tunisie, 2007).

Au-delà des différences cosmétiques qui peuvent exister entre une région et une autre, la pratique de la fantasia peut prendre certaines formes particulières.

La fantasia à pied<ref name="de Segonzac"/>,<ref name="Mornand"/>, rencontrée par exemple au Mzab<ref name="Amat">Modèle:Ouvrage.</ref>, est une forme dans laquelle les cavalcades équestres sont remplacées par des danses où les hommes, alignés en rang ou en cercle, effectuent des allers-retours au rythme de la musique.

La fantasia à dromadaire<ref name="Duveyrier">Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref name="cirad.fr">Modèle:Lien brisé.</ref>, à ne pas confondre avec les méharées, utilise le dromadaire à la place du cheval comme monture de joute. En langue berbère touareg, cette fantasia est appelée « asebrer »<ref name="Prasse">Modèle:Ouvrage.</ref>.

La fantasia féminine, brisant la coutume des fantasias exclusivement masculines<ref name="Tauzin">Modèle:Article.</ref>, est attestée en particulier au Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle à Constantine, où elle est exécutée à pied<ref name="Rozet">Modèle:Ouvrage.</ref> ; elle revit au cours des années 2000 au Maroc, d'abord sous la forme de groupes de cavaliers mixtes avant que n'apparaisse à Mohammédia, au Maroc, un groupe exclusivement féminin<ref name="Tauzin"/>.

On trouve également un événement similaire au Japon, le festival Soma Nomaoi, constitué de courses de chevaux avec des étendards ainsi que de démonstrations d'arts martiaux (au lieu de l'utilisation d'armes à feu). Comme la formule maghrébine, c'est la noblesse qui est à la base de ces démonstrations ; ici ce sont les descendants de samouraïs qui sont à l'œuvre<ref name="japantravel">Modèle:Lien web.</ref>,<ref name="depeche">Modèle:Lien web.</ref>.

Exercice périlleux

Jouer à la fantasia n'est pas exempt de danger. En dehors des risques inhérents à la pratique de l'équitation, l'usage des armes, la fougue et l'excitation qui font prendre des risques aux jouteurs, les maladresses peuvent être à l'origine d'accidents à l'issue parfois fatale.

Les chroniques relatent ainsi l'histoire d'Ahmed Bey, dernier bey de Constantine qui, participant en 1820 à une fantasia donnée en son honneur, est gravement blessé à la main par une balle perdue<ref name="Vayssettes">Modèle:Article.</ref> ; cette fantasia organisée en 1859, au cours de laquelle « un cheikh fut emporté mort, tombé avec son cheval », « un autre Arabe eut la jambe cassée » et « un troisième une profonde blessure à la tête »<ref name="Thierry-Mieg"/>, ou encore ce mariage en 1862 en Tunisie, qui tourne au drame, un accident mortel emportant le marié au cours de la fantasia célébrée en son honneur<ref name="Guérin-t2">Modèle:Ouvrage.</ref>.

Fantasia moderne

Fichier:Horse fantasia Algeria.jpg
Fantasia dans l'Ouest de l'Algérie.

La Fédération mondiale du cheval barbe a établi un règlement classant la fantasia collective en deux catégories, la temerad et la guelba<ref name="abcb.be">Modèle:Lien brisé.</ref>. Dans les deux cas, l'objectif de l'exercice, réalisé sous la conduite d'un chef de groupe, est la réussite d'un baroud<ref name="baroud2">Autrement dit la décharge des fusils.</ref> coordonné, ne faisant entendre qu'une seule déflagration.

Au cours de la fantasia temerad, les cavaliers, alignés à une extrémité du parcours d'exhibition, doivent partir au galop au cri du chef de groupe, en respectant un alignement en épaule contre épaule, et au commandement de leur chef, se lever comme un seul homme, épauler leurs armes et sitôt l'ordre donné, décharger enfin leurs fusils tous en même temps. Puis vient le retour au calme, et le retour au point de départ<ref name="abcb.be"/>.

La fantasia guelba se distingue de la fantasia temerad par son départ : les cavaliers doivent se présenter au trot et sans ordre au point de départ, tourner bride et s'élancer chacun dans son galop ; ils doivent durant leur course retrouver un alignement au coude à coude avant de pouvoir tirer leur salve<ref name="abcb.be"/>.

Situation actuelle

Algérie

Fichier:Fantasia Mostaganem 28-05-2008 (25)a.jpg
Spectacle de fantasia à Mostaganem (Algérie, 2008).

La Fédération équestre algérienne est l'organisme chargé de l'organisation et du développement de la pratique équestre moderne et traditionnelle en Algérie, y compris la fantasia<ref name="fea.org.dz">Modèle:Lien brisé.</ref>. 140 associations équestres<ref name="abcb.be"/>, organisées en neuf ligues régionales (Aurès, Hodna, Oasis, Dahra, Titteri, Sersou, Saoura, Tafna et Sahara)<ref name="Rahal"/>, y sont affiliées.

Le pèlerinage annuel au mausolée Sidi Abdelkader (également connu sous le nom de Rakb Sidi Cheikh<ref name="cnrpah1">Modèle:Lien web</ref>), organisé par les communautés nomades et sédentaires à El Abiodh Sidi Cheikh, est classé sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité en Algérie en 2013. S'il comporte des compétitions équestres mobilisant plus de 300 cavaliers<ref>Modèle:Lien web.</ref>,<ref name="cnrpah1"/>, le directeur du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques affirme que c'est la fantasia elle-même qui est classée à cette occasion<ref>Modèle:Article.</ref>.

Maroc

Modèle:Infobox Patrimoine culturel immatériel de l'humanité

De nos jours, la pratique de la fantasia reste très vivace au Maroc et concerne aussi les femmes<ref>Modèle:Article.</ref>. Son organisation et son développement sont du ressort de la Fédération royale marocaine de sports équestres<ref name="frmse.ma">Modèle:Lien brisé.</ref>. Près de Modèle:Unité, dites sorbas<ref name="equestre.ma">Modèle:Lien archive.</ref>, comptant près de Modèle:Unité, sont engagées dans l'exercice de la fantasia<ref name="abcb.be"/>. En 2008 est créé le Complexe royal des sports équestres et tbourida Dar Es-Salam, une structure consacrée à la pratique équestre et comprenant notamment une école de fantasia et des ateliers de confection des habits des cavaliers et de fabrication des harnachements<ref name="lematin.ma">Modèle:Lien brisé.</ref>.

Ce complexe accueille également, tous les ans, les épreuves du Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels (tbourida), concours national de fantasia, comprenant trois catégories : seniors hommes, seniors femmes et juniors garçons. Le trophée comprend deux épreuves : la harda (le salut), évaluant l'apparat des équipes (habillement des cavaliers, harnachement des chevaux, maniement des armes), et la talqa, évaluant l'alignement des cavaliers et la synchronisation des tirs des fusils<ref name="map.ma-tbourida">Modèle:Lien brisé.</ref>.

Les fantasias sont essentiellement organisées dans les campagnes pendant des fêtes, à l'occasion de mariages, de naissances et d'aïds ou lors de moussems comme le Moussem Moulay Abdellah Amghar, dans la région d'El Jadida, et ceux de Had Dra, dans la région d'Essaouira, et de Sidi Brahim Boualaajoul, dans la région de Kénitra.

Tunisie

En Tunisie, la Fédération tunisienne des sports équestres encourage la pratique de la fantasia dans ses différentes catégories : jeu de poudre par équipe (Modèle:Langue) ou jeu de cheval en individuel ou par équipe (Modèle:Langue), etc<ref name="ftse"/>. Un Festival de la fantasia se déroule dans la ville de Kairouan en novembre<ref>Modèle:Article.</ref> et des fantasias sont généralement programmées en début d'été lors du Festival national du cheval pur-sang arabe à Meknassy<ref>Modèle:Lien web.</ref> (gouvernorat de Sidi Bouzid), haut lieu d'élevage et de sélection de chevaux spécialisés dans la fantasia<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref>, ainsi qu'à Agareb (gouvernorat de Sfax), lors de son festival annuel des jeux équestres<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref>. De plus, des spectacles moins formels se produisent aussi lors de mariages et fêtes en l'honneur de saints locaux (moussem et zerda).

Japon

De nos jours, le festival Soma Nomaoi continue d'attirer beaucoup d'attention dans le pays et fait partie intégrante de l'économie locale ; le festival a d'ailleurs été désigné comme un bien culturel immatériel<ref name="japantravel"/>.

Le festival n'a pu avoir lieu en 2011 en raison de la catastrophe de Fukushima, proche du lieu des festivités<ref name="depeche"/>.

Fantasia dans l'art

Le Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle connaît la vogue d'un important courant littéraire et artistique en Europe : l'orientalisme. Et la fantasia sera le sujet de prédilection des peintres les plus illustres.

Eugène Delacroix

Modèle:Article détaillé

Fichier:Fantasia arabe.png
Fantasia arabe, par Eugène Delacroix, 1833.
Fichier:Delacroix - Exercices militaires des Marocains.jpg
Exercices militaires des Marocains ou Fantasia marocaine, par Eugène Delacroix, 1832.

Eugène Delacroix est le premier à représenter en peinture la fantasia ; il en fait le sujet de plusieurs de ses tableaux, réalisés d'après les esquisses rapportées de son voyage au Maroc en 1832, en particulier lors des spectacles de Sidi Kacem, de Ksar El Kébir et de Meknès. La fantasia, traitée par Delacroix en peinture d'histoire et de bataille, sera pour l'artiste un nouveau sujet de représentation en 1833 et en 1847<ref name="Exercices militaires des Marocains">Modèle:Lien brisé.</ref>.

Dans l'esquisse Fantasia (1832), le mouvement du cheval est l'objet du regard du peintre<ref>Fantasia, 1832, esquisse, mine de plomb et aquarelle, Modèle:Dunité, Inv. RF3372, Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques.</ref>. Dans le tableau Exercices militaires des Marocains, sous-titré Fantasia, (1832)<ref>Exercices militaires des Marocains ou Fantasia, 1832, Huile sur toile, Modèle:Dunité. Inv. 868.1.37, Montpellier, musée Fabre, don Bruyas 1868.</ref>, l'artiste joue sur la composition et le mouvement ; il joue également sur ces couleurs chaudes par lesquelles il restitue l'apparat de la charge.

Eugène Fromentin

Fichier:Fromentin - Fantasia.jpg
Fantasia : Algérie, par Eugène Fromentin, 1869.

Dans la continuité de Delacroix, Eugène Fromentin, en disciple-continuateur, réussit à conjuguer l'écriture et la peinture<ref name="Christin">Modèle:Chapitre.</ref>, et il déploie dans ces arts une force qui s'épanouit non pas dans la représentation de l'action, mais au contraire dans l'immobile évocation des lieux et des atmosphères<ref name="Jane Turner">Modèle:Ouvrage.</ref>. Il sublime d'abord la fantasia dans son ouvrage Une Année dans le Sahel, y invite son lecteur à imaginer « ce qu'il y a de plus impétueux dans le désordre, de plus insaisissable dans la vitesse, de plus rayonnant dans des couleurs crues frappées de soleil » ; il y parle des cris des coureurs, des clameurs des femmes, du tapage de la poudre, du terrible galop des chevaux lancés à toute volée, du tintement, du cliquetis de mille et mille choses sonores.

Il invite surtout dans ce même ouvrage, Delacroix, seul homme selon lui à avoir la fantaisie ingénieuse et la puissance, l'audace et le droit de comprendre et traduire ce spectacle, à en faire autant en peinture<ref name="Fromentin-Une année au Sahel">Modèle:Ouvrage.</ref>. Delacroix n'ayant pas donné suite à cette invite, Fromentin s'y attelle lui-même et présente, en 1869, la traduction picturale qu'il en fait dans son tableau Une fantasia : Algérie<ref name="Thompson-Wright">Modèle:Ouvrage.</ref>, exposé au musée Sainte-Croix de Poitiers<ref>Une fantasia : Algérie (1869). Huile sur toile, Modèle:Unité × Modèle:Unité. Musée des beaux-Arts, Poitiers.</ref>.

Autres

Fichier:Fortuny Fantasia àrab.jpg
Fantasia arabe, par Marià Fortuny (1867).

La Fantasia arabe<ref>La Fantasia arabe, 1867. Huile sur toile. Modèle:Nobr. Walters Art Museum, Baltimore.</ref> de Marià Fortuny est l'un des tableaux les plus originaux qui soient, représentant non pas une classique charge équestre, mais un groupe de guerriers marocains exécutant leur spectacle rituel à pied, plongés dans une lumière crue, donnant force et détails aux couleurs et aux contours, dans un dramatique contraste avec l'arrière-plan flou et sombre<ref name="art.thewalters.org">Modèle:Lien brisé.</ref>.

L'Allemand Otto von Faber du Faur, considéré comme le peintre des batailles, est fasciné par l'éclat de la lumière d'été en Afrique, le désert et les tribus bédouines, les cavaliers. Il peint sa Fantasia lors de son voyage au Maroc, en 1883. Il peint ensuite sa Fantasia à la rencontre de deux tribus en 1885.

Bien d'autres peintres encore représentent des sujets de fantasia, dès le milieu du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle. La colonisation de l'Afrique par la France va donner au genre une place d'importance au sein de la peinture française. Eugène Péchaubès a par exemple peint de nombreux sujets de fantasia.

Notes et références

Modèle:Références

Annexes

Bibliographie indicative

Articles connexes

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Liens externes

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