Aguigui Mouna

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Modèle:Voir homonymes Modèle:Infobox Biographie2

André Dupont, dit « Aguigui Mouna »<ref name="LePoint">« Mouna aurait cent ans », Frédéric Lewino, Le Point, 31 octobre 2011.</ref>, ou simplement « Mouna », né le Modèle:Date de naissance à Meythet (Haute-Savoie), et mort le Modèle:Date de décès à Paris, est un clochard-philosophe libertaire, pacifiste, écologiste avant l'heure, qui, souvent à vélo, sillonnait les rues de Paris pour haranguer les foules<ref name="LePoint" />, dormant chez ses hôtes voire à la belle étoile<ref>L'Éphéméride anarchiste : notice biographique.</ref>. Il connut son heure de gloire en mai 68. On a vu en lui à la fois « le dernier amuseur public de Paris »<ref name="aguigui">Pierre Genève, MOUNA AGUIGUI (1911-1999), 1999.</ref> et « le sage des temps modernes »<ref name="jacquesDanois">Jacques Danois, Aguigui Mouna : l'homme intérieur ou le sage des temps modernes, Dossiers d'Aquitaine, Bordeaux, 1999 Modèle:ISBN, 69 p.</ref>.

Vie et philosophie

De son nom d'état-civil André Dupont, « Aguigui Mouna » naît dans une famille de cultivateurs modestes. Modèle:Citation Il est recueilli avec son frère par cette tante, chez qui ils seront garçons de ferme, couchant à l’étable avec les vaches<ref name="aguigui"/>. Sa mère, Adélaïde Brisgand, était originaire des Villards-sur-Thônes.

Il commence à travailler à l’âge de 13 ans. Il est tour à tour garçon de café et chômeur et, à 17 ans, s’engage dans la Marine mais s’en fait exclure pour avoir refusé les avances d'un supérieur<ref>Pierre Genève, Modèle:Opcit : Modèle:Citation</ref>.

Il se marie en 1939, juste avant d’être mobilisé pour la drôle de guerre. Il en sortira « antimilitariste convaincu »<ref> Pierre Genève, Modèle:Opcit : Modèle:Citation</ref>.

Il adhère au Parti communiste français (PCF) à la Libération et est un temps un militant Modèle:Citation<ref name="LePoint" />. Mais, n’étant fait ni pour l’obéissance passive aux consignes, ni pour la pensée unique, il déchante rapidement<ref>Pierre Genève, Modèle:Opcit : Modèle:Citation</ref>. Installé à Nice où il tient une pension de famille, il est exclu du PCF à la suite d'un épisode lié à sa vie privée, ce qui contribue à sa désillusion politique<ref name="LePoint"/>.

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Aguigui Mouna place de la Sorbonne en 1994.
Fichier:Aguigui Mouna, sur l'esplanade de Beaubourg (13-10-1977).JPG
Aguigui Mouna sur l’esplanade Beaubourg en 1977.
Fichier:Aguigui Mouna by Olivier Meyer.jpg
Mouna Aguigui dans la rue Mouffetard, à Paris, photographié en 1988 par Olivier Meyer.

En 1951, il fait la connaissance d'un client de son établissement, un peintre argentin marginal. La rencontre avec ce personnage original est pour lui une illumination, qui le convainc de dénoncer l'absurdité du monde<ref name="LePoint"/>. Las de sa vie de « caca-pipi-taliste »<ref>Modèle:Citation, nous dit Christian Godin dans La Philosophie pour les nuls, Edi8 - First Éditions, 2011, 661 p.</ref>, il commence, tout en continuant à tenir sa pension, une carrière Modèle:Citation. En mai 1952, il prend part à une manifestation communiste contre les Américains en arborant pour la première fois une tenue bariolée. Au cours des semaines suivantes, il multiplie les apparitions publiques dans Antibes, où il acquiert une réputation d'excentrique, voire de fou<ref name="LePoint"/>.

Séparé de sa femme, il monte ensuite à Paris, où il s’installe comme cafetier-restaurateur avec son frère aîné, face à la Bibliothèque nationale de France, au coin de la rue de Richelieu et du square Louvois, lieu de rencontres pittoresques au fil des années 1950<ref>Une vie sans importance, Marino Zermac, chapitre 1954-1960.</ref>. Son pseudonyme d'Modèle:Citation vient d'une exclamation, dépourvue de sens, qu'il pousse un jour alors qu'il réfléchissait sur l'absurdité de la vie : Modèle:Citation bloc Il déclare volontiers, au sujet de la société contemporaine : Modèle:Citation Par la suite, ayant fait faillite, quitté par sa nouvelle compagne qui ne supportait plus ses excentricités, il se consacre à temps plein à son activité d'imprécateur public et prend la route pour professer sa philosophie, à Paris comme sur la Côte d'Azur<ref name="LePoint"/>. Il donne libre cours à sa fantaisie, parcourt Saint-Germain-des-Prés pour répandre la bonne parole aguiguiste. Il porte une moitié de moustache et de barbe pour dénoncer un monde radioactif. Il fonde le club des aguiguistes, censé apporter gaieté, joie et optimisme. Découvrant la photographie d'Einstein tirant la langue, il lui écrit pour lui proposer la présidence d'honneur de son club. Albert Einstein accepte la présidence d'honneur et lui répond : "N'hésitez pas à accrocher dans votre restaurant mon portrait qui, du reste, illustre bien mes convictions politiques."<ref>Modèle:Lien web</ref>.

Plus tard on le verra aussi, Modèle:Citation<ref>Christian Godin, Modèle:Opcit ; sur de nombreuses photos, on le voit aussi coiffé d’un béret noir.</ref>, haranguant les foules aux festivals de Cannes et d’Avignon, au Printemps de Bourges et au Salon du livre de Paris.

En 1956, il marche à pied de Cagnes-sur-Mer à Sanremo. On le voit aussi à Golfe-Juan, où il reste perché 16 heures en haut d’un platane. Il ponctue ses déclamations par des inscriptions à la craie blanche sur le bitume en disant « Je craie ». Ses techniques de communication, telles que l’usage de pancartes accrochées à son vélo pour interpeller les passants, ont probablement influencé l’écriture blanche sur noir de l’artiste Ben<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. À Sainte-Maxime, il porte un réveil autour du cou et pique sa barbe folle de fleurs des champs.

Pendant la guerre d'Algérie, il fait partie des trente volontaires de l'Action civique non-violente qui demandent à partager le sort des Algériens internés sans jugement dans les camps du Larzac (Aveyron), du camp de Thol (Ain), de Saint-Maurice-de-l’Ardoise (Gard) et de Mourmelon (Marne)<ref>Modèle:Lien web</ref>.

En 1962, quelques réfractaires, dont Mouna, brûlent leurs livrets militaires sur la voie publique<ref>Modèle:Article</ref>.

Il crée son journal Le Mouna Frères (le Mou’Nana pour les sœurs !!! - le journal anti-robot), feuille de chou qui tient à la fois de L'Os à moelle de Pierre Dac et du tract politique, qu’il diffuse lui-même dans les manifestations<ref name="Godin">Christian Godin, Modèle:Opcit.</ref>. Il se déplace sur un vélo équipé d'un téléphone rouge factice et jette des graines aux badauds qui l'écoutent en ponctuant son geste d'un « Prenez-en de la graine ! ».

Fichier:Mouna1.jpeg
Le Mouna Frères.

En 1968, aux gauchistes qui lui lancent « Mouna, folklore ! », il rétorque « Tu préfères le chlore ? », allusion aux gaz lacrymogènes des CRS lors des manifestations estudiantines. Les mêmes le qualifient d’« amuseur débilissime, allié objectif du capitalisme » et l'accusent même d'être indicateur de la police<ref name="Godin" />.

Les prenant au mot dans l’amphithéâtre à ciel ouvert (maintenant remplacé par un bâtiment administratif) du campus de Jussieu (universités Paris 6 - Paris 7), il se fait sacrer le Modèle:Date « Empereur débilissime, Aguigui Modèle:1er », à l’aide de ses amis saltimbanques qui distribuent des nez rouges. Un autre jour, il se fait arrêter pour avoir mené une procession grotesque dont les participants scandaient en chœur : « Nous sommes heureux ! Nous sommes heureux ! » La même année, à la mort de [[Jean-Paul Ier|Jean-Paul {{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | Ier{{#if:|  }} }}]], il affiche à la porte des églises le slogan<ref name="aguigui"/> : « Si Jésus est mort sur la Croix, un pape meurt dans son lit ! ».

Toujours à Jussieu, en mars 1979, il invite les étudiants à accompagner avec lui la manifestation des sidérurgistes de Lorraine qui viennent à Paris protester contre la fermeture de leurs usines.

Il passe des heures à la bibliothèque du Muséum national d'histoire naturelle, discute avec les chercheurs, diffuse le livre de Jean Dorst Avant que nature meure, croise l’agronome René Dumont et comprend les enjeux de l’écologie bien avant l’apparition de l’écologisme politique. Il milite ensuite contre le « tout-routier », pour le « partage de la route » et pour le respect des animaux y compris domestiques sur son vélo tractant une remorque bricolée, coiffé d’un couvre-chef recouvert de badges divers, et parfois un porte-bagage au guidon, abritant de petits animaux de compagnie<ref>Mouvement de défense de la bicyclette, la dernière manif de Mouna, Libération, 15 mai 1999, texte intégral.</ref>. Il fut de tous les défilés parisiens non violents, antimilitaristes, pacifistes, libertaires ou contestataires<ref>Claude Arnaud, Qu'as tu fait de tes frères ?, Paris, Éditions Grasset et Fasquelle, lire en ligne.</ref>. Il a aussi mené campagne contre le travail des enfants dans le tiers monde et pour l’aide aux réfugiés du Chili, et il a été l’un des premiers à dénoncer les risques et les retombées négatives du programme nucléaire français, militaire et civil.

Dénonçant le « déformatage des esprits » et le « prêt-à-penser », il se présente comme candidat (ou « non-candidat » ainsi qu’il se désigne lui-même)<ref name="Godin" /> à l’élection présidentielle de 1974, ainsi qu’aux trois suivantes, sous son véritable patronyme : Dupont (« pas de Nemours ni d’Isigny », précise-t-il). Aux élections législatives de 1988 et 1993, à l’âge de 76 puis de 81 ans, il se présente dans la Modèle:2e de Paris contre Jean Tiberi, obtenant 3 % des voix en 1988<ref name="LePoint"/> et 1,8 % en 1993 (722 voix)<ref>Résultats des législatives de 1993 : Modèle:2e de Paris, Politiquemania.</ref>. Dans les candidatures de Mouna Aguigui à des fonctions électives, Pierre Laszlo voit « l’irruption, dans les campagnes électorales parisiennes, du saugrenu propre au bouffon ou au clown<ref>{{#invoke:Langue|indicationDeLangue}} Pierre Laszlo, Salt: Grain of Life, Columbia University Press, 2013, 256 p., Modèle:P. : Modèle:Citation étrangère.</ref> ».

On a vu en lui un émule de Diogène, de Socrate ou de Ferdinand Lop qui proposait de prolonger le boulevard Saint-Michel jusqu’à la mer (et dans les deux sens) afin que les étudiants puissent se baigner plus souvent. Pour beaucoup, Mouna était tout simplement un apôtre de la bonne humeur.

Son portrait où il tire la langue à la manière d’Albert Einstein, par Olivier Meyer<ref>Histoire d'une photographie sur omeyer.fr, site officiel.</ref>, publié sous forme de carte postale en 1989, puis en illustration du livre d’Anne Gallois<ref>Anne Gallois, Aguigui Mouna, geule ou crève, Les dossiers d'Aquitaine, 1997 Modèle:ISBN.</ref>, a servi de base à la réalisation d’un pochoir sur toile<ref>Modèle:Img sur flickr.com, Jef Aérosol 2006 - Mouna Aguigui.</ref> en 2006 par l’artiste Jef Aérosol, reproduit dans le livre VIP<ref>Ouvrage : Very Important Pochoirs, Éditions Alternatives, 2007 Modèle:ISBN.</ref>.

Il meurt le Modèle:Date-, à l’âge de quatre-vingt-sept ans, d’un arrêt cardiaque, à l'hôpital Bichat, à ParisModèle:Sfn.

Cavanna disait de lui : Modèle:Citation bloc

Galerie

Slogans et aphorismes

Mouna avait pour devise : Modèle:Citation

Société et politique

  • Nous sommes tous égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres (emprunté à George Orwell)<ref name="Collectif134"/>.
  • Notre siècle : arnaques, barbaques, matraque<ref name="Collectif">Collectif, L'Anthologie des deux siècles : Florilège 2000, Modèle:Opcit.</ref>.
  • Le régime est pourri !, criait-il dans la rue en agitant un régime de bananes pourries.
  • Battons-nous à coups d'éclats de rire<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • Caca, pipi, tata, capitalistes<ref name="Godin" /> !

Médias

  • Les mass-médias rendent les masses médiocres<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • La télé : je suis branché, câblé et même souvent accablé de tant de nullités<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.

Changement

  • Le monde ne tourne pas rond<ref name="Collectif"/>.
  • Tout est bien ici-bas, avec la tête en bas<ref name="Collectif"/>.
  • Ne prenez pas le métro, prenez le pouvoir<ref>Jacques Danois, Modèle:Opcit, Modèle:P..</ref>.
  • Battons le pouvoir quand il a chaud<ref>Marino Zermac, Modèle:Opcit.</ref>,<ref name="aguigui"/> !
  • Je fous la merde… pour que ça sente meilleur un jour<ref name="Collectif"/>.
  • Réveillez-vous !, criait-il avec son vélo chargé d’anciens réveils-matin.
  • Le monde est mûr, frères, il faut mûrir<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.

Antimilitarisme

  • À bas toutes les armées<ref name="CPSM">Mouna par Cabu, série de cartes postales semi-modernes.</ref> !
  • J'irai cracher sur vos bombes<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • Non à la guerre des étoiles, oui à la guerre des boutons ! Sans neutrons, la bombe à bonbons, c'est très bon<ref>Jacqueline Strahm, Montmartre : beaux jours… et belles de nuits, Collection Singulière, Éditions Cheminements, 2001 Modèle:ISBN, 300 p., Modèle:P..</ref> !
  • Tu ne tueras point en détail mais en gros<ref name="CPSM"/> !
  • Égalité : chacun sa bombe et ses généraux<ref name="CPSM"/>.

Environnement

  • Les bagnoles ras-le-bol<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • La vélorution est en marche<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • Des vélos, pas trop d'autos. Du gazon, pas de béton, des moutons, pas de canons.
  • Le jour où un vélo écrasera une auto, il y aura vraiment du nouveau. (Variante : Avec ton vélo, écrase les autos et pédale dans la choucroute<ref name="aguigui"/> !)
  • Mieux vaut être actif aujourd'hui que radioactif demain<ref name="LePoint"/>,<ref name="aguigui"/>.
  • L’énergie musculaire, l’énergie la moins chère !

Religions, sectes

  • Je préfère le vin d'ici à l'eau de là (emprunté à Francis Blanche)<ref name="Collectif134">Collectif, L'Anthologie des deux siècles : Florilège 2000, vol. 2, Les dossiers d'Aquitaine, 2000 Modèle:ISBN, 351 pages, Modèle:P..</ref>.
  • Garez-vous des gourous<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/> !
  • Priez moins, aimez plus<ref name="CPSM"/>.

Vie, mort

  • On est condamné à mort dès la naissance, c'est pas pour ça qu'on doit faire une gueule d'enterrement<ref name="Collectif"/> !
  • On vit peu mais on meurt longtemps<ref name="LePoint"/>.

Divers

  • C’est en parlant haut qu’on devient haut-parleur<ref>Collectif, Anthologie du poème bref, Modèle:Opcit, Modèle:P..</ref>,<ref name="aguigui"/>.
  • Aimez-vous les uns sur les autres<ref name="Coll., Anthol. du poème bref.">Collectif, Anthologie du poème bref, Les Dossiers d'Aquitaine, 2005 Modèle:ISBN, 285 pages.</ref>,<ref name="aguigui"/>.
  • La grossesse à 6 mois ! La retraite à 15 ans<ref name="LePoint"/> !
  • Les grands hommes d'aujourd'hui sont de plus en plus petits<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • Tous les désespoirs sont permis<ref name="Collectif"/>.
  • Les valeurs morales ne sont pas cotées en bourse<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>,<ref name="aguigui"/>.
  • Il est anormal d'être normal<ref name="Collectif"/>.
  • Aguigui, le cri de la vie !
  • L'ennui naquit un jour de l'uniforme mité.
  • Génération Marlboro : génération mal barrée<ref name="Coll., Anthol. du poème bref."/>.
  • Au pays de la barbarie, je joue de l’orgue de Barbarie !
  • Lisez le Mouna-Frères et retirez-vous dans un Mouna-stère où on boira de la li-mounade… !, déclamait-il en vendant son journal.
  • Riez et vous serez sauvé<ref name="LePoint"/> !
  • Le jour se lève dans un cadre merveilleux, disait-il, passant sa tête derrière un cadre qu’il sortait de sa valise.

Filmographie

Discographie

Notice

Notes et références

Modèle:Références

Annexes

Bibliographie

Liens externes

Modèle:Liens


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