Oulipo
L'Ouvroir de littérature potentielle, généralement désigné par son acronyme Oulipo (ou OuLiPo), est un groupe de recherche littéraire fondé en 1960 par le mathématicien François Le Lionnais et l'écrivain et poète Raymond Queneau. Il a pour but de découvrir de nouvelles potentialités du langage et de moderniser l'expression à travers des jeux d’écriture. Le groupe est célèbre pour ses défis mathématiques imposés à la langue, obligeant à des astuces créatives. L'Oulipo est fondé sur le principe que la contrainte provoque et incite à la recherche de solutions originales. Il faut déjouer les habitudes pour atteindre la nouveauté. Ainsi, les membres fondateurs se plaisaient à se décrire comme des « rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir ».
L'OuLiPo se définit d'abord par ce qu'il n'est pas : Modèle:Citation bloc
Les membres de l'Oulipo se réunissent une fois par mois pour réfléchir autour des notions de « contrainte », de « littérature potentielle », et produire de nouvelles structures destinées à encourager la création.
L'Oulipo anime également des ateliers d'écriture et partage mensuellement ses créations lors des Jeudis de l'Oulipo à la BNF.
Parmi les œuvres les plus connues publiées par des oulipiens figurent Cent mille milliards de poèmes de Raymond Queneau, La Vie mode d'emploi de Georges Perec et Si par une nuit d'hiver un voyageur d'Italo Calvino. Modèle:Sommaire
Historique
Fondation
Au moment où la Seconde Guerre mondiale éclate, François Le Lionnais a lu tous les romans que Raymond Queneau a publiés à cette date. Ils se rencontrent lors de la préparation de l'édition des Grands Courants de la pensée mathématique qui paraît pour la première fois en 1948. C'est au retour de Le Lionnais, déporté à Dora, qu'ils commencent à se rencontrer régulièrement : leurs discussions sont riches en digressions, de la conjecture de Goldbach à Sei Shonagon.
En 1960, Raymond Queneau demande à François Le Lionnais de postfacer ses Cent mille milliards de poèmes<ref>rééditée dans Modèle:Harvsp</ref>. Celui-ci lui propose de « créer un atelier ou un séminaire de littérature expérimentale abordant de manière scientifique ce que n'avaient fait que pressentir les troubadours, les rhétoriqueurs, Raymond Roussel, les formalistes russes et quelques autresModèle:Sfn ».
En Modèle:Date-, une Décade Queneau est organisée à Cerisy-la-Salle : s'y retrouvent les futurs membres fondateurs du groupe. C'est le 24 novembre que le groupe prend un caractère officiel, lors d'un repas fondateur, au restaurant Le Vrai Gascon, 82 rue du Bac, organisé par François Le Lionnais — ce qui lui vaudra le titre honorifique de Fraisident-Pondateur<ref name="JL">Oulipo, La Littérature potentielle, « Petite histoire de l'OuLiPo » par Jean Lescure.</ref>.
Le Lionnais a 59 ans en 1960, Queneau 57. La moyenne d’âge est de 47 ans. Les fondateurs sont des gens d’expérience, habitués aux responsabilités comme à la pratique collective, écrivains ou hommes de lettres chevronnés, ayant déjà acquis, pour certains, une réputation et une idée très sûre de leurs goûtsModèle:Sfn.
Dénomination
L'Oulipo s'est d'abord baptisé Séminaire de Littérature Expérimentale (SELITEX). Il se renomme dès sa deuxième réunion, le 22 décembre 1960, sur proposition d'Albert-Marie Schmidt, Ouvroir de Littérature Potentielle, en abrégé Olipo. À la réunion suivante, sur une suggestion de Latis, le O est remplacé par Ou, et donne le nom définitif du groupeModèle:Sfn.
Le terme Ouvroir a plusieurs sens. Le TLFI en répertorie trois<ref>Modèle:Lien web</ref>, le Wiktionnaire cinq<ref>Modèle:Chapitre</ref>. Parmi ceux-ci, c'est l'idée d'ouvroir de broderie qui a prévalu dans l'esprit des oulipiens. Quand Albert-Marie Schmidt a proposé ce terme, il voyait avant tout un endroit isolé où l'on travaille en commun sur une tâche difficile, où l'on s'efforce d'élaborer de nouvelles techniques, sans savoir si cet effort produira des résultatsModèle:Sfn.
À la réunion du 5 mai 1961, l'Oulipo se dote d'un sigle graphique. Latis a fait deux propositions : l'un se lit du centre vers l'extérieur (Modèle:Citation), l'autre de l'extérieur vers le centre (Modèle:Citation). C'est la seconde qui est adoptéeModèle:Sfn. Le sigle figure en couverture d'Oulipo 1960-1963<ref>Voir en ligne</ref>, mais tombe rapidement en désuétude.
L'Oulipo a également son propre calendrier : Modèle:Citation
Influences
’Pataphysique
La ’Pataphysique influence fortement l'Oulipo, organisationnellement et conceptuellement – du moins à ses débuts.
Raymond Queneau, François Le Lionnais, Noël Arnaud et Latis sont des membres éminents du Collège de Pataphysique<ref group="alpha">Latis est un membre fondateur du Collège, Queneau et Arnaud en sont Satrapes, Le Lionnais en est Régent.</ref>. Dès la deuxième réunion, en décembre 1960, et malgré les réticences de Jean Lescure, le groupe va s’inclure dans l’Accommission des Compositions, chaque membre étant affecté du titre de dataire. Mi-janvier 1961, l'Oulipo est rattaché à la Sous-Commission de l’Acrote. En 1966, l'Oulipo est élevé au rang de Co-CommissionModèle:Sfn, et en 2000 au rang de CommissionModèle:Sfn.
C'est dans le numéro 17 des Dossiers Acénonètes, revue du Collège, que paraissent les premiers travaux de l'Oulipo fin 1961. Mais c'est à ce moment qu'il devient clair que les deux groupes poursuivent des buts différents : les solutions imaginaires, objet des travaux du Collège différent fortement des potentialités recherchées par l'Oulipo, qui seraient plutôt des solutions réelles à des problèmes imaginaires<ref>Paul Braffort, cité par Modèle:Harvsp</ref>.
Les relations se distendent, du fait de la mort des membres historiques, et de l'occultation du Collège, de 1975 à 2000<ref group="alpha">Période pendant laquelle sont suspendues toutes les manifestations publiques.</ref>. Modèle:Citation, résume Paul Braffort<ref>Modèle:Article</ref>.
Bourbaki
Plusieurs membres fondateurs étant mathématiciens, l'Oulipo est dès ses débuts influencé par les recherches et la méthode du groupe Bourbaki.
Plusieurs traits apparentent Oulipiens et Bourbakistes : le caractère collectif de leur travail ; la volonté d’embrasser dans sa totalité un champ donné ; l’utilisation d’un outil stratégique privilégié (pour Bourbaki : la méthode axiomatique ; pour l’Oulipo : la contrainte)<ref>Christophe Reig, Mimer, Miner, Rimer : le cycle romanesque de Jacques Roubaud, Rodopi, 2006. Cité dans Modèle:Harvsp</ref> ; l'approche consistant à construire un poème de la même manière qu'un mathématicien prouve un théorème : prudemment, méthodiquement, en respectant un ensemble de règlesModèle:Sfn. Car une structure dans la conception mathématique de Bourbaki est capable de produire une infinité de théorèmes, par déduction de ses axiomes, et une contrainte est l'équivalent oulipien d'une structure bourbakisteModèle:Sfn.
Une de leurs références communes est l'ouvrage de David Hilbert, Les Fondements de la Géométrie, paru en 1899. Queneau propose ainsi de substituer dans les axiomes d'Hilbert les termes mots, phrases, paragraphes aux termes points, droites, plans. Ce qui conduit aux axiomes : Modèle:Citation.
Chronologie
Premières années
Les premières années du groupe se veulent « secrètes », même s'il est difficile de dater la fin de cette période. Selon Paul Fournel, il fallait prendre Modèle:Citation.
La première publication du groupe, le 22 décembre 1961 dans le Modèle:N° des Dossiers acénonètes du Collège de 'Pataphysique<ref>Modèle:Lien web</ref>, est une forme de sortie de la clandestinité, mais d'une portée très limitée, son audience étant confidentielle. Même faible tirage pour la revue Temps mêlés dirigée par André Blavier, qui accueille l'Oulipo dans son numéro 66-67 en 1964. La plupart des articles sont une version écrite de conférences données au colloque de Cerisy de 1963, Pensée artificielle, pensée vécue. Jacques Duchateau y fait une communication Sur l’Oulipo, Jean Lescure présente sa Méthode S+7 et une Petite histoire pour un tricentenaire, Queneau ses premières recherches sur l’analyse matricielle du langageModèle:Sfn. Entre-temps, Queneau a évoqué l'Oulipo et ses travaux dans des entretiens avec Georges Charbonnier<ref>Gallimard, 1962. Écouter en ligne (à partir de 22' 40)</ref>.
Ce n'est qu'en 1972 que paraît le premier ouvrage sur l'Oulipo, Clés pour la littérature potentielle, de Paul Fournel, qui n'est pas encore oulipienModèle:Sfn. L'année suivante l'Oulipo se dévoile complètement avec la parution d'un volume collectif, directement en collection de poche chez GallimardModèle:Sfn.
Essoufflements
Le premier voyage de groupe a lieu à Verviers en octobre 1964, à l’invitation d’André Blavier, qui organise la célébration de l’écrivain Christian BeckModèle:Sfn.
Mais les conférences qui y sont données font apparaître que si des travaux existent bel et bien, les résultats effectifs sont plutôt maigres, et qu'il est nécessaire de faire aboutir les travaux esquissés ou envisagésModèle:Sfn. Au Congrès de 1965 est posée la question de la Modèle:Citation. En 1966 est décidée la cooptation de nouveaux membresModèle:Sfn : ce seront Jacques Roubaud en 1966 et Georges Perec en 1967.
Cependant, en 1970, Le Lionnais envoie à tous les membres un questionnaire Modèle:Citation, dont la première question est : Modèle:Citation Les réponses positives sont unanimes. La période 1970-1992 voit l'expansion du groupe, par la cooptation de nouveaux membres, l'expansion du champ d’activités, avec la place de plus en plus grande accordée aux lectures publiques et aux ateliers d’écriture, l'expansion géographique par l’ouverture naissante à l’internationalModèle:Sfn.
Cependant, après la mort de Perec en 1982, l’Oulipo se demande s'il n'a pas fait son temps. Il est décidé que non, et l’Oulipo continue à recruterModèle:Sfn.
Hors les murs
Presque 10 ans après les conférences de Verviers, Marcel Bénabou organise en 1973 une lecture-conférence à Reid Hall, le centre d'études de l'Université Columbia à ParisModèle:Sfn. En 1975, l'Oulipo intervient à la Biennale d'art Europalia de BruxellesModèle:Sfn. En 1977 est donné un « spectacle » (mot de Le Lionnais) au Centre Pompidou, dans le cadre d’une journée Écrivains, ordinateurs et algorithmes : machines mises à la disposition du public, travail sur l’oralisation des textes, lecture à plusieurs voixModèle:Sfn. En juin de la même année est organisé le premier d'une série de stages d'écriture à Villeneuve-lès-Avignon. En 1979 ont lieu, à l'initiative d'Harry Mathews, les premiers ateliers d'écriture en anglais, au Hamilton Collège, près de New-York. Ils seront suivis d'autres en Espagne en 1985, et en Italie en 1990Modèle:Sfn. En 1997 commencent les Jeudis de l'Oulipo, lectures mensuelles, d'abord à la Halle Saint Pierre, puis à Jussieu, au Forum des Images au Halles, et enfin au Grand Auditorium de la BNFModèle:Sfn.
Entre-temps, l'accueil critique de La Vie mode d'emploi de Perec, du Château des destins croisés et de Si par une nuit d'hiver un voyageur de Calvino, donne à l'Oulipo une visibilité qu'il n'avait jamais connue jusqu'alorsModèle:Sfn.
En 1994, L'Oulipo intervient sur le tramway de Strasbourg, en créant des textes inscrits sur les colonnes qui marquent les arrêts, en suivant quatre contraintes : variations homophoniques, notices toponymiques, récit en beau présent et langage cuit<ref group="alpha">Le texte est paru dans le fascicule 68 de La Bibliothèque oulipienne sous le titre Troll de Tram.</ref>,<ref>Modèle:Lien web.</ref>. En 2010 sont inaugurés à Rennes Les Clous de l'Esplanade, œuvre composée de 170 clous insérés dans le sol, leur large tête portant un mot à associer aux mots lisibles à proximité pour former des textes.
Ainsi l'Oulipo est entré dans le public, sa vie extérieure a pris une ampleur qui ne ravit pas tous les « anciens », mais que personne ne peut plus nier<ref>Paul Fournel, 50 ans d'Oulipo in Bloomfield, Lapprand, Thomas, Oulipo@50/L'Oulipo à 50 ans, Modèle:P.</ref>. Dès 1983, Noël Arnaud, dans un « rapport préjudiciel », se plaint de la dérive de l’Oulipo, qui risque selon lui de devenir petit à petit un « service supplétif de l’Éducation nationale », autrement dit une sorte d’école d’écriture pour lycéens, enseignants et amateurs de jeux de langage. Le même Arnaud demande, en 1998, que soit évitée l'expression « atelier d'écriture »Modèle:Sfn. L'Oulipo se trouve en situation de contradiction : Modèle:Citation Cette évolution constitue une déviation par rapport au projet initial de « mettre à la disposition de l’écrivain (poète, romancier, dramaturge, etc.) des moyens d’expression nouveaux et valables<ref>Qu’est-ce que l’Oulipo, entretien avec R. Queneau et F. Le Lionnais, L’Éducation, Modèle:N°, 25 avril 1974</ref>. Ce type de débat pose la délicate question de la stratégie collective : faut-il consacrer du temps à sa promotion et à sa diffusion, et si oui, selon quelles proportions par rapport au temps dévolu à la « Création »Modèle:Sfn ?
Un Oulipo à double face se profile : un « Ouvroir extraverti », tourné vers tout type de public et prêt à répondre aux sollicitations diverses ; et un « Oulipo introverti », fleurissant dans l’ombre du premier, constitué par quelques membres qu’on ne voit jamais aux événements publics, mais dont les noms sur les publications, ainsi que sur les comptes rendus, attestent d’une présence active et régulière. Ainsi Anne Garréta, Bernard Cerquiglini, Valérie Beaudouin, Michelle Grangaud ne participent pas aux apparitions publiquesModèle:Sfn.
Par ailleurs, du point de vue de la littérature, ces lectures publiques sont des occasions de créations qui répondent à des logiques orales et spectaculaires sensiblement différentes de celles de l'écrit<ref>Paul Fournel, Cinquante ans d'Oulipo in Bloomfield, Lapprand, Thomas, Oulipo@50/L'Oulipo à 50 ans, p.20</ref>. Aux réflexions initiales sur la contrainte, puis à la production de textes reflétant cette contrainte, ont succédé des textes dont la contrainte est la production<ref group="alpha">« First came thinking about constraint, then the actual production of texts reflecting that constraint, then the actual production of texts whose constraint is their production. »</ref>,Modèle:Sfn.
Même si Modèle:Citation, l'Oulipo n'en est pas à l'abri. Ainsi l'éloignement de Jean Lescure après la mort de Queneau, celui de Luc Étienne en 1984 du fait de « l'institutionnalisation » du groupe, la demande de mise en congé « pour 6 mois renouvelables » de Jacques Bens en 1988, « l'occultation » en novembre 1996 de Paul Braffort, qui met en cause un manque de rigueur et une perte de l'esprit des fondateurs, la « séparation sans douleur et sans regret » de Michèle Métail en 1998. Mais contrairement à d'autres groupes littéraires, ces départs se font Modèle:Citation.
Archives
En 2005, les archives de l'Oulipo quittent l'appartement de Marcel Bénabou pour être déposées à la Bibliothèque de l'Arsenal<ref>Une longue description du fonds figure dans Modèle:Harvsp. Un inventaire est en ligne sur le site de la BNF</ref>. Les dossiers mensuels de réunion sont en ligne sur Gallica<ref name=":1">Modèle:Lien web</ref>.
Organisation
Statuts
Des statuts très précis, adoptés le 7 mai 1962, après une version présentée le 29 décembre 1961, déterminent de manière explicite la position de chacun (membres actifs, membres associés, membres correspondants). La cohésion est protégée pour longtemps, aucun membre ne pouvant agir sans le consentement de tous, et personne ne pouvant acquérir les mêmes droits que les fondateursModèle:Sfn.
Les décisions sont prises à l’unanimité, principalement les cooptations. Un principe important est défini lors des premières interventions radiophoniques de Queneau : l’obligation d’avertir le groupe avant de parler en son nom, en tant qu’oulipienModèle:Sfn.
Réunions
L'Oulipo se réunit une fois par mois en privé. L'ordre du jour est immuable : Création ; Rumination ; Érudition ; Actions ; Menus proposModèle:Sfn. Un compte-rendu est systématiquement dressé.
Ceux des séances de 1961 à 1963 ont été réunis en volumeModèle:Sfn, ceux jusqu'en 1990 sont en ligne sur Gallica<ref name=":1" />, celui du 21 décembre 2004 a été publié dans l'AnthologieModèle:Sfn.
Membres
Membres fondateurs
Devenir membre
On devient membre de l'Oulipo par cooptation. Un nouveau membre doit être élu à l'unanimité, à la condition de ne jamais avoir demandé à faire partie de l'Oulipo. Chaque coopté est évidemment libre de refuser (son refus est dès lors définitif), mais une fois élu, il ne peut en démissionner qu'en se suicidant devant huissier<ref>Documentaire Oulipo mode d'emploi de Jean-Claude Guidicelli et Frédéric Forte, 2010.</ref>.
Les membres restent oulipiens même après leur décès : ils sont alors, selon la formule consacrée, Modèle:Citation.
Membres cooptés
Modèle:ColonnesJulio Cortázar, Eugen Helmlé, Régine Detambel et Valérie Mréjen ont décliné l'invitation à rejoindre l'OulipoModèle:Sfn.
Présidents
Secrétaires
L'Oulipo dispose de deux secrétaires, l'un Modèle:Citation, le second Modèle:Citation.
Oulipiennes
L'Oulipo a été pendant quinze ans un groupe uniquement masculin. Puis Michèle Métail, cooptée en 1975, est restée la seule membre féminine pendant 20 ans, jusqu'à l'arrivée en 1995 de Michelle Grangaud. Les recrutements féminins deviennent ensuite un peu plus fréquents : Anne Garréta en 2000, Valérie Beaudouin en 2003, Michèle Audin en 2009, Clémentine Mélois en 2017.
Virginie Tahar a fait les comptes : six femmes sur un total de quarante et un membres (en comptant les membres décédés), soit une proportion de 14,6 % (mais 25% des vivants et 5 entrées sur 13 entre 1995 et 2017 soit 38,5 % des cooptations)Modèle:Sfn. Cependant, sur ces six oulipiennes, deux se sont éloignées du groupe : Michèle Métail, première femme cooptée, est également la première membre à prendre ouvertement ses distances, ce que fera à son tour Anne Garréta quelques années plus tardModèle:Sfn.
Si Michèle Métail explique son éloignement par des raisons purement littéraires<ref group="alpha">Modèle:Citation Camille Bloomfield, Femme, Oulipo, poésie sonore et musique contemporaine... Entretien avec Michèle Métail. Lire en ligne.</ref>, ce n'est pas le cas d'Anne Garréta. En 2006, lors d'un des Jeudis de l'Oulipo, où, à son initiative, seules des oulipiennes étaient présentes, elle ouvre la séance en lisant un texte moitié humoristique, moitié polémique, Moment oulipien pour la Fin des temps<ref group="alpha">Texte paru ensuite dans le fascicule 148 de la Bibliothèque oulipienne et disponible en ligne.</ref>. Elle y calcule que la probabilité que la scène ne soit composée que d'oulipiens est de 0,51 tandis que celle d'une composition uniquement féminine est de 0,003. En novembre 2016, dans un article d'El País, elle reproche au groupe d’être une institution vieillissante qui tend à se scléroser et ne parvient pas à se réformer. Selon elle, le faible nombre de femmes dans le groupe participerait de ce processus de sclérose. Elle pose aussi clairement la question d’un engagement en faveur de la parité qui s’avère à ses yeux nécessaire pour que le groupe ne devienne pas « une monoculture masculine »Modèle:Sfn. Cette position est vivement critiquée par Jacques Roubaud dans Peut-être ou la nuit de dimanche<ref>Seuil, 2018 Modèle:ISBN</ref>.
Lauren Elkin, quant à elle, considère l'Oulipo comme une institution sexiste Modèle:Incise. Elle relève l'une des significations du terme Ouvroir, celle qui se réfère à une institution dans laquelle les hommes organisent la charité envers les femmes, et critique fortement la misogynie et le sexisme supposés d'Hervé Le Tellier, l'actuel présidentModèle:Sfn.
Les explications à cette faible représentation féminine sont considérées par la critique comme principalement historiques. Virginie Tahar fait remarquer que Modèle:Citation. Elle ne nie cependant pas les tensions et résistances engendrées par la présence minoritaire de femmes dans un groupe majoritairement constitué d’hommes, et dont les traditions se sont ancrées dans une culture plutôt masculineModèle:Sfn.
D'autres vont plus loin. Ainsi Christelle Reggiani considère que Modèle:Citation.
Activités
Définitions
Potentialité
Dès sa fondation, L'Oulipo a rejeté le terme expérimental au profit de potentialité. Cette notion Modèle:Citation.
Pour les fondateurs, Modèle:Citation.
Aucune définition stable de la potentialité n'a jamais été donnée. Ce dont se réjouit Daniel Levin Becker : Modèle:Citation<ref group=alpha>Modèle:Citation</ref>,Modèle:Sfn.
Rats et labyrinthe
L'auto-définition, posée dès la réunion du 17 avril 1961Modèle:Sfn : Modèle:Citation a donné lieu à précisions et commentaires, parfois légèrement contradictoires.
Marcel Bénabou : Modèle:Citation.
Marc Lapprand : Modèle:Citation.
Positions littéraires
L'Oulipo revendique de n'être pas une école littéraire. Modèle:Citation. Mais, au début des années 1960, le fait de se préoccuper de tester des hypothèses est une position nouvelle et radicaleModèle:Sfn.
Il n'y a pas non plus de frontière entre les disciplines, entre mathématiques et littérature. Pour Levin Becker, Modèle:Citation est la clé du projet oulipien. Pour Christophe Reig, Modèle:Citation.
Il a été reproché à l'Oulipo de ne pas théoriser sa pratique. Claude Burgelin considère qu'au contraire il Modèle:Citation.
L'Oulipo n'a pas non plus défini d'esthétique et se désintéresse de la question, car il ne saurait y avoir de Modèle:Citation oulipien<ref>Hervé Le Tellier, Esthétique de l'Oulipo, Le Castor astral, 2006, p.9. Cité dans Modèle:Harvsp</ref>, et la texture artisanale importe plus que la valeur esthétiqueModèle:Sfn.
Le positionnement de l'Oulipo par rapport à la politique est unique : la règle, tacite mais respectée depuis le début est de ne jamais évoquer le sujet en tant qu'oulipien, ce qui n'empêche pas des engagements individuels<ref>Bloomfield, Lapprand, Thomas, Oulipo@50/L'Oulipo à 50 ans, Modèle:P.</ref>, par exemple le texte de Roubaud, Le Pen est-il français ?<ref>Jacques Roubaud, Le Pen est-il français ?, Action Poétique, Modèle:N°, 1991.</ref>.
Manifestes
L'Oulipo, sous la plume de François Le Lionnais, a publié deux Manifestes et préparé un troisième. Des Prolégomènes à un éventuel quatrième, écrits par Noël Arnaud, alors Président, sont parus en anglaisModèle:Sfn.
Le premier manifeste paraît en décembre 1961 dans le Modèle:N° des Dossiers du Collège de ’Pataphysique, intitulé Exercices de littérature potentielle. Son titre est simplement La Lipo, sans le mot Manifeste, qui sera rajouté entre parenthèses lors de la parution du volume intitulé La Littérature potentielle chez Gallimard en 1973. Ce court texte expose quelques principes de la littérature potentielle, en refusant explicitement d'en donner une définition, insiste sur l'existence de contraintes littéraires que doit, plus ou moins malgré lui, respecter tout auteur, même se prétendant inspiré, et définit les travaux futurs de l'Oulipo comme une recherche Modèle:Citation de nouvelles formules littéraires, afin Modèle:Citation, tout en revendiquant un aspect ludique.
Camille Bloomfield fait remarquer que dans ce texte qui ignore le ton tapageur et autopromotionnel d'autres Manifestes du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, pondération et modestie remplacent exaltation et conviction habituellement omniprésents. Il s'agit là de convaincre, mais sans emphaseModèle:Sfn.
Le second manifeste, non daté, paraît également dans La Littérature potentielle en 1973. Il s'agit non seulement d'Modèle:Citation les principes fondateurs, mais aussi d'esquisser de nouvelles directions de recherches, en ajoutant à la perspective syntaxique une perspective sémantique, tout en se posant le problème de l'efficacité et de la viabilité de structures littéraires artificielles. L'Oulipo est également plus clairement positionné dans le champ littéraire : loin du structuralisme, et à mi-chemin des écrivains qui considèrent la contrainte comme seule acrobatie amusante, et de ceux qui refusent toute contrainteModèle:Sfn. Avant une définition inédite du plagiat par anticipation se trouve esquissé un projet qui fera long feu, l'Institut de Prothèse Littéraire<ref group="alpha">« Qui n'a senti en lisant un texte – et quelle qu'en soit la qualité – l'intérêt qu'il y aurait à l'améliorer par quelques retouches pertinentes. Aucune œuvre à cette n'échappe à cette nécessité. C'est la littérature mondiale dans son entier qui devrait faire l'objet de prothèses nombreuses et judicieusement conçues. (Oulipo, 1973, p.26)</ref>.
Ce qui aurait dû être le troisième manifeste a maturé jusqu'à la mort de Le Lionnais en 1984, sans être jamais achevé. Retrouvée dans ses papiers, son introduction a été publiée en 2009 dans l'Anthologie de l'OulipoModèle:Sfn. Il devait s'agir d'un Modèle:Citation. Lui était réservé le fascicule 30 de La Bibliothèque oulipienne, qui de ce fait ne parut jamais. Soit parce que ce projet n'était tout simplement pas réalisableModèle:Sfn,Modèle:Sfn, soit parce qu'il s'était transformé en réflexions personnelles de Le Lionnais : Modèle:Citation.
Noël Arnaud donne en 1986 une Introduction à une anthologie en langue anglaise des principaux textes de l'OulipoModèle:Sfn. Il l'intitule Prolégomènes à un quatrième manifeste de l'Oulipo – ou non. Après quelques rappels historiques, centrés sur la signification du mot Ouvroir, il évoque un Oulipo Modèle:Citation Car Modèle:Citation. Ce texte n'a pas été traduit en français.
Programme de travail
Jeu
L'aspect ludique préside à toutes les activités de l'Oulipo. À la Biennale d'art Europalia de Bruxelles en 1975, Perec décrit les activités de l'Oulipo comme des Modèle:Citation et des Modèle:Citation pour lesquelles l'oulipien est figuré en Modèle:Citation. Pour François Caradec Modèle:Citation.
Dominique Durand, dans Le Canard enchainé résume la chose : Modèle:Citation.
Synthoulipisme et anoulipisme
Le premier Manifeste assigne à l'Oulipo deux objets principaux de recherches Modèle:Citation bloc
Pour Jacques Bens, l'anoulipisme consiste à Modèle:Citation.
De son côté, Claude Berge précise la définition du synthoulipisme, en définissant trois catégories :
- la recherche de structures nouvelles, où l'on substitue aux contraintes classiques comme le sonnet, d'autres contraintes linguistiques : alphabétiques (poèmes sans e de Perec), phonétiques (rimes hétérosexuelles de Noël Arnaud), syntaxiques (romans isosyntaxiques de Jean Queval), numériques (sonnets irrationnels de Jacques Bens) ;
- la recherche de méthodes de transformations automatiques de textes (S+7 de Jean Lescure) ;
- la transposition dans le domaine des mots des concepts existants dans les différentes branches des mathématiques : géométrie (poèmes tangents entre eux de Le Lionnais), algèbre de Boole (intersection de deux romans de Jacques Duchateau), algèbre matricielle (multiplication de textes de Raymond Queneau), combinatoire (bi-carré latin utilisé par Perec dans La Vie mode d'emploi)Modèle:Sfn.
Ces deux tendances commencent à diverger après l'arrivée de nouveaux membres, hors du cercle des fondateurs. Pour Le Lionnais, la mise à disposition de structures littéraire nouvelles est le plus important, et le texte en résultant un bonus non essentiel. Mais Perec, Calvino et Mathews sont plus intéressés par la création que par la spéculation. Il vaut mieux écrire un texte que de spéculer sur ce qu'il pourrait être si quelqu'un d'autre s'en chargeait. Et pour Perec en particulier, il s'agit d'épuiser le potentielModèle:Sfn.
Plagiat par anticipation
Le principal axe de recherche de l'anoulipisme est d'identifier les Plagiaires par anticipation. Modèle:Citation.
L'expression apparaît pour la première fois en 1964 dans la revue belge Temps mêlés. Le caractère oxymorique et loufoque de la formule est totalement volontaire. Cette autodérision fonctionne comme un pied-de-nez à une certaine posture d’écrivain – ceux qui se targuent de la primeur absolue de leurs idéesModèle:Sfn. Mais si le geste a fonction d’hommage, plus que de réappropriation ou réécriture d’une histoire littéraire à valeur de distinction, c'est un échange à double sens qui se fait entre les oulipiens et leurs plagiaires : valorisation et hommage d’une part, légitimation par le poids de l’histoire de l’autreModèle:Sfn. Ainsi, Modèle:Citation.
Les plagiaires par anticipation sont très nombreux. Dès le premier Manifeste sont identifiés Villon, Le Psalmiste, Herbin. Puis Swift, les Grands Rhétoriqueurs (surtout Jean Molinet, Guillaume Crétin et Jean Meschinot), Cocteau, Rabelais, Lewis Caroll<ref>Une longue liste annotée est donnée dans Modèle:Harvsp</ref>.
Marc Lapprand fait remarquer que Modèle:Citation.
Pierre Bayard a critiqué ce concept : Modèle:Citation.
Oulipo et informatique
Dès son premier Manifeste, l'Oulipo évoque le recours Modèle:Citation. La technologie de l'époque ne permet pas d'aller plus loin que des souhaits. Des années plus tard, en 1975, Paul Braffort, informaticien de son état, réalise dans le cadre de l'Atelier de Recherches sur les Techniques Avancées (ARTA) une version paramétrable des Cent mille milliards de poèmes, qui est présentée au festival Europalia, puis en 1977 au Centre Pompidou<ref>Camille Bloomfield, Hélène Campaignolle-Catel. Machines littéraires, machines numériques: l’Oulipo et l’informatique. Alain Schaffner; Christelle Reggiani. Oulipo, mode d’emploi, 2016, 978-2-7453- 3078-9. hal-03184437</ref>. Paul Fournel en rédige un Compte-rendu qui est publié dans l'Atlas de littérature potentielle, dans lequel figurent également des communications sur Poésie et combinatoire, Prose et combinatoire, Prose en anticombinatoireModèle:Sfn.
En juin 1981, l'activité purement informatique de l'Oulipo quitte le groupe avec la création de l'Atelier de Littérature Assistée par la Mathématique et les Ordinateurs (ALAMO)<ref>Modèle:Lien web</ref>, fondé par Paul Braffort et Jacques Roubaud. L'Atelier se dissout en janvier 2020<ref>http://www.alamo.free.fr/archives/AG2020.pdf</ref>.
Seule membre actuelle travaillant ce sujet, Valérie Beaudouin a développé un logiciel appelé le « métromètre » permettant de mesurer de manière automatique le rythme des vers classiquesModèle:Sfn.
Contraintes
De nombreuses discussions ont lieu entre 1960 et 1964 sur les différences entre méthode, procédé, structure et contrainte. Le procédé déboucherait sur une solution unique, tandis que la méthode serait la généralisation d’un procédé dont les résultats peuvent être multiples. Mais ces mots sont déjà employés pour désigner des démarches aussi nombreuses que variées. Le mot contrainte s’impose vers 1964Modèle:Sfn.
Cependant, déclare Jacques Roubaud, Modèle:Citation.
En résumé, Modèle:Citation.
Philosophie de la contrainte
Une contrainte est différente d'une règle : Modèle:Citation bloc Pour Jacques Jouet, la contrainte est systématique et altruiste : Modèle:Citation bloc Quant à l’auteur oulipien, écrit Roubaud, il « gouverne le hasard » au lieu d’être gouverné par lui. La contrainte, loin de déclencher une écriture libre, voire sauvage, circonscrit le matériau et le mode d’une construction littéraire consciente et contrôléeModèle:Sfn.
Clinamen
Le clinamen est Modèle:Citation.
Il y a consensus sur l'aspect volontaire du clinamen. Pour Harry Mathews Modèle:Citation.
Pour Jacques Roubaud, le clinamen est Modèle:Citation.
Visibilité de la contrainte
Roubaud avait défini un principe : Modèle:Citation, mais en précisant qu'il n'était que Modèle:Citation.
Le débat sur l'affichage ou le masquage de la contrainte est aussi ancien que l'Oulipo, et a connu son paroxysme dans les années 1970 et 1980. Il n'a jamais été clairement tranché. Modèle:Citation.
Ainsi Jacques Jouet Modèle:Citation.
Perec a adopté une position médiane. Il a utilisé pour La Vie mode d'emploi un réseau serré de contraintes, dont la plupart n'ont été découvertes qu'à la publication du Cahier des charges du roman, mais en a présenté quelques-unes dans un texte séparé<ref>Quatre figures pour La Vie mode d'emploi, L'Arc, Modèle:N°, 1979. Repris dans Modèle:Harvsp.</ref>.
Classification
Si l'Oulipo répugne à théoriser, il se préoccupe de classifier ses travaux, réalisés ou potentiels, tout en n'ayant jamais dépassé le stade des tentatives.
La première est une table proposée par Raymond Queneau à la réunion du 28 novembre 1974, publiée en 1981 dans l'Atlas de littérature potentielleModèle:Sfn. Créée selon le modèle du Tableau périodique des éléments chimiques de Mendeleïev, elle est aussitôt rebaptisée Table de Queneleiev et comporte trois parties. Les lignes de la première, sans titre, répertorient des unités de langage (lettre, syllabe, mot, phrase, etc.), tandis que les colonnes indiquent le type de manipulation susceptible d'être apportée à ces unités. Ainsi, au croisement lettre/nature se trouvent le lipogramme, le tautogramme, le palindrome vertical<ref group="alpha">andın basnoda a une epouse quı pue, de Georges Perec. Voir en ligne.</ref> et le drame alphabétique<ref group="alpha">Un drame alphabétique, en trois actes et trois tableaux, Les Horreurs de la guerre, a été publié par Perec dans Oulipo, La Littérature potentielle, 1973, Modèle:P..</ref>. La deuxième partie, intitulée, Contraintes d'ordre sémantique comporte les mêmes colonnes, mais les lignes indiquent des éléments de construction d'un récit, personnages, objets, événements, finalité, lieu, durée. Au croisement de personnages/nombre se trouve la tragédie grecque, à la jonction événements/nombre figure la tragédie classique (unité d'action). De nombreuses cases vides indiquent les travaux potentiels à imaginer et réaliser<ref group="alpha"> François Le Lionnais reprendra la même démarche lors de la création de l'Oupeinpo. Les lignes horizontales listent les Modèle:Citation : le support, le matériau, le matériel, la surface, le dessin, la couleur, etc. Les verticales indiquent les opérations logico-mathématiques à effectuer : addition, réunion, intersection, translation, rotation, etc. Les cases donnent des structures simples ou nouvelles. Au carrefour de la couleur et de la division se trouvent l'impressionnisme et le divisionnisme, et à celui du matériel et de la symétrie le Très Grand Digrapheur de Jack Vanarsky<ref>Thieri Foulc, cité dans Olivier Salon, Le disparate, François Le Lionnais, tentative de recollement d'un puzzle biographique, Le Nouvel Attila, 2016 Modèle:ISBN, p. 285-286</ref>.. </ref>. Une troisième partie, associant à chaque manipulation un symbole (choisir, unir, enlever, permuter, substituer) n'a pas été publiée, car inachevéeModèle:Sfn. Les réactions sont enthousiastes : Modèle:Citation déclare PerecModèle:Sfn.
François Le Lionnais émet cependant quelques réserves. Son grief porte sur l’idée de remplir des cases vides, ce qui risque de passer pour une clôture. « La Table des contraintes doit être elle-même potentielleModèle:Sfn ». Dans le cadre de la rédaction du Troisième Manifeste de l'Oulipo<ref group="alpha">Sous-titré Prolégomènes à toute littérature future, incomplet et resté inédit jusqu'à sa parution en 2009 dans l'Anthologie de l'Oulipo, p. 798.</ref>, il travaille jusqu'à sa mort à un Grand Tableau : Modèle:Citation Dans ses archives a été retrouvé un brouillon de table des matières, qui introduit le concept d’armature, sorte d’alternative à structure. Seraient ainsi traités : « 1. Ébauche d’une heuristique des Armatures », dont « Invention et découverte d’une armature », « Construction d’une Armature avec des contraintes », « Classification scientifique des Armatures » ; « 2. Ébauche d’une métrologie des « qualités » d’une Armature » ; « 3. L’œuvre ». Mais Modèle:Citation.
Marcel Bénabou, de son côté, propose en 1983 Modèle:Citation
Exemples
S+7
Inventée par Jean Lescure en février 1961, la méthode S+7 permet la création de textes littéraires nouveaux en remplaçant dans un texte source chaque substantif par le septième substantif qui le suit dans un dictionnaire donné.
Raymond Queneau transforme ainsi La Cigale et la fourmi en La Cimaise et la fraction. Selon le dictionnaire choisi, le premier vers du poème de Nerval El Desdichado Je suis le ténébreux, le veuf, l'inconsolé peut devenir Je suis le tenu, le vibrant, l'incontrôlable ou bien Je suis le tensoriel, le vieux, l'inconsomméModèle:Sfn.
Lipogramme
Le lipogramme est un texte dans lequel l’auteur s’impose de ne jamais employer une lettre, parfois plusieurs. Se trouvent ainsi proscrits les mots qui contiennent cette lettre ou ces lettres<ref group="alpha">Une Histoire du lipogramme par Georges Perec figure dans La Littérature potentielle, p. 77-93.</ref>. Le roman de Georges Perec La Disparition est ainsi entièrement écrit sans la lettre e.
Boule de neige
Une boule de neige est un poème dont le premier vers est fait d’un mot d'une lettre, le second d’un mot de deux lettres, le troisième d'un mot de trois lettres, le nième d'un mot de n lettres.
Contrainte du prisonnier
Un prisonnier, ne disposant que de peu de papier, s'interdit d'utiliser des lettres à jambages, celles qui "dépassent" de la ligne. Il s'interdit donc les lettres b, d, f, g, h, i, j, k, l, p, q, t, y.
Publications
Publications collectives
En signant des ouvrages collectivement, en travaillant ensemble à leur élaboration, en instituant des règles de fonctionnement précises et solides, et en constituant une mémoire collective par l’archive, l’Oulipo a fait reculer la notion d’auteur au sens de figure unique et sacraliséeModèle:Sfn. Car Modèle:Citation.
S'il ne s'agit pas à proprement parler d'un ouvrage collectif, le livre de Jacques Bens, Oulipo 1960-1963, est écrit à plusieurs mains. Il s'agit d'une compilation des comptes rendus des premières réunion du groupe et des interventions de chacun, donc en quelque sorte un texte collectifModèle:Sfn. Raymond Queneau avait relu le manuscrit dans le sens d'un lissage évacuant plaisanteries, sarcasmes, marques de dissensions, mais Bens n'a retenu que 15% de ses retouchesModèle:Sfn.
La Littérature potentielle, parait chez Gallimard en 1973, Ses prémisses datent de 1964, contact est pris en 1967 avec l'éditeur londonien Jonathan Cape, mais la difficulté à rassembler des textes, le changement de coordinateur (Le Lionnais, puis Braffort, puis Perec en 1970, assisté de Paul Fournel en 1971) conduisent à l'abandon du projet. Queneau soumet le manuscrit à Gallimard en 1971. L'ouvrage paraît en 1973, directement dans la collection de poche IdéesModèle:Sfn.
L'Atlas de littérature potentielle est publié en 1981. La table des matières est établie conjointement par Paul Fournel, Marcel Bénabou, Georges Perec, Jacques Roubaud, Harry Mathews et Paul BraffortModèle:Sfn. L'Anthologie de l'Oulipo, procurée par Marcel Bénabou et Paul Fournel, paraît en 2009, toujours chez Gallimard, mais cette fois dans la collection Poésie. En 2014 Michèle Audin et Paul Fournel coordonnent l'Abécédaire provisoirement définitif chez Larousse.
S'ils sont publiés sous le nom « Oulipo », ces quatre ouvrages, ainsi que les fascicules collectifs de La Bibliothèque oulipienne, contiennent des textes signés par les initiales de chacun. Il en est de même pour le recueil de souvenirs Moments Oulipiens, dont le contenu a été qualifié d'Modèle:Citation, mais il en va différemment pour le volume Le Voyage d'hiver et ses suites, qui est signé « Georges Perec / Oulipo » et comprend les suites données à la nouvelle initiale entre 1992 à 2013.
En fait, la signature véritablement collective d’une œuvre oulipienne, derrière laquelle s’effaceraient entièrement les auteurs, n’a pas encore eu lieuModèle:Sfn.
Cependant circule une forte Modèle:Citation, par exemple la présence mutuelle d'oulipiens au sein d’œuvres d'autres oulipiens : références aux ouvrages de Queneau ; mentions cryptées, comme le chapitre 59 de La Vie mode d'emploi, où les vingt-quatre portraits imaginaires d'Hutting se réfèrent chacun à un membre de l'Ouvroir ; Portrait-Roubaud de Michèle Métail dans sa série des Portraits-Robots ; Vie de Jean Queval par un témoin de Noël Arnaud<ref group=alpha>Nombreux exemples dans Modèle:Harvsp</ref>.
Perec, de son côté déclara : Modèle:Citation
Bibliothèque oulipienne
Modèle:Article détailléEn 1970, Perec soulève la question de la diffusion des travaux. La réflexion qui s'ensuit aboutira à la création de La Bibliothèque oulipienne, série de fascicules tirés à 150 exemplaires, dont 240 numéros ont paru de 1974 à 2019.
Publications individuelles
Modèle:Article détaillé Parmi les œuvres d'auteurs oulipiens : Modèle:Colonnes
Réception
Si la réception des œuvres oulipiennes relève souvent de la Modèle:Citation, si l'Oulipo apparaît comme un label, reporté sur les quatrièmes de couvertures, sans que ce soit de facto un label de qualitéModèle:Sfn, un discours plus explicitement critique, plus rare, existe néanmoins.
Critiques
Il s'agit parfois de remarques générales, plus ou moins étayées. Ainsi Jean Ricardou parle d’un « certain folklore » qui, « tout ironique qu’il soit », l’a « retenu d’étudier de plus près le travail de l’OulipoModèle:Sfn ». Jean Rouaud compare « l’Oulipo et les jeux littéraires » à des « ouvriers occupant leur usine et entretenant le matériel pour éviter qu’il ne rouille dans l’attente d’un éventuel repreneurModèle:Sfn ».
L'une des premières critiques structurées des travaux de l'Oulipo provient de Gérard Genette qui, dans Palimpsestes<ref>Modèle:Ouvrage</ref>, classe les travaux de l'Oulipo parmi Modèle:Citation Pour lui, le transformationnel de l’Oulipo : traduction (lipogramme), translation lexicale (S+7), réduction (haïku tirés des poèmes de Mallarmé), amplification (PALF : substitution à chaque mot de sa définition), contamination (centon, alexandrin greffé), ne font que s'en remettre à un principe « machinal » pour tirer de leur hypotexte (baptisé par Perec « texte-souche ») un texte lexicalement tout différent. Il considère donc que si la parodie est un jeu d'adresse, Modèle:Citation Noël Arnaud répond fort poliment dans le fascicule 63 de La Bibliothèque oulipienne, en évoquant des lacunes bibliographiques<ref group="alpha">L'Atlas de littérature potentielle et les premiers fascicules de La Bibliothèque oulipienne.</ref> qui conduisent à une image inexacte et incomplète de l'Oulipo, en particulier l'assimilation de ses travaux au cadavre exquis du surrréalisme. Modèle:Citation
D'autres critiques de fond proviennent de poètes. Michel Deguy dénonce « le caractère « menaçant » de ces écrits vis-à-vis de la poésie, et souligne combien le caractère de répétition à la base de bien des productions oulipiennes dévalue toute tentative d’entreprise littéraireModèle:Sfn ». Henri Meschonnic regrette que Modèle:Citation. Terme que reprend Marc Lapprand : Modèle:Citation.
L'Oulipo et son lecteur
Alors que Jacques Roubaud annonce en 1997 une Modèle:Citation, la question se pose d'une lecture univoque de la production oulipienne, une centaine d’œuvres publiées par une quarantaine d'auteurs<ref group="alpha">Sans compter les fascicules de La Bibliothèque oulipienne.</ref>. Marcel Bénabou refuse une conception généraliste : Modèle:Citation
Claude Burgelin insiste sur la liberté donné au lecteur d’œuvres oulipiennes : Modèle:Citation. Position optimiste que ne partage pas William Marx : Modèle:Citation.
Quoi qu'il en soit, les textes oulipiens provoquent de curieux phénomènes chez leurs lecteurs : Modèle:Citation.
Filiation
Les ou-X-po
Le Lionnais a très tôt rêvé d'un Modèle:Citation, l'ou-X-Po, regroupement d'ouvroirs explorant chacun un domaine particulier.
Il est à l'origine en 1973 de l'Ouvroir de Littérature Policière Potentielle (OuLiPoPo), puis en 1980 avec Thierry Foulc, de l'Ouvroir de Peinture Potentielle (OuPeinPo). En 1991, Stanley Chapman fonde l'Ouvroir de tragécomédie potentielle (OuTraPo). En 1992 est créé l'Ouvroir de Bande dessinée Potentielle (OuBaPo), dont l'un des membres, Étienne Lécroart, est coopté à l'Oulipo en 2012. En 2015 apparaît l'Ouvroir de photographie potentielle (OuPhoPo).
D'autres Ouvroirs, comme l'Ouvroir de Musique Potentielle (OuMuPO), l'Ouvroir de Cuisine Potentielle (OuCuiPO) ou l'Ouvroir de Mathématiques Potentielles (OuMaPo) ont eu des existences éphémères.
Le Collège de ’Pataphysique revendique la coordination des ou-X-po<ref>Modèle:Lien web</ref>.
Inspiration pour les autres écrivains
L'ambition initiale de Le Lionnais était que l'Oulipo propose des structures aux écrivains qui désireraient s'en servirModèle:Sfn. Mais peu d’écrivains confirmés se sont inspirés des travaux de l’Oulipo, ou de leurs stages d’écriture créative, du moins pour composer des œuvres de réelle envergure. L’explication se trouve peut-être du côté du formalisme qui en général effraie, car la notion de procédure éloigne plus souvent qu’elle n’attireModèle:Sfn.
Par contre, certains écrivains ont adopté une démarche proche ou similaire. Ainsi Édouard Levé qui épuise non pas des choses ou des lieux, comme Perec, mais des concepts<ref name=":0">Scott Esposito, The end of Oulipo ? John Hunt Publishing, Modèle:Coll. « Zero Books », 2013.</ref>. Ou Christian Bök qui, dans Crystallography, se sert des propriétés du cristal comme base des propriétés de chaque poème. Dans son Eunoia, chacune des cinq parties n'utilise qu'une seule voyelle<ref name=":0" />.
Futur de l'Oulipo
Le futur du groupe est incertain.
Du côté des oulipiens, Jacques Jouet a déclaré en février 2019 qu’à son avis l’Oulipo était en fin de phase : il a connu une phase secrète, puis théorique, puis publique, et enfin internationale. Il appelait de tous ses vœux un retour à une phase théoriqueModèle:Sfn. François Caradec regrette qu'une société de littérature se soit transformé en société de spectacleModèle:Sfn. Daniel Levin Becker constate qu'au fur et à mesure que les apparitions publiques ont de plus en plus de succès, l'énergie du groupe se déplace vers la performance, vers la production de textes destinés à un auditeur plus qu'à un lecteur, et il s'interroge sur la capacité de l'Oulipo à Modèle:Citation.
Du côté de la critique, Claude Burgelin a le même questionnement : Modèle:Citation
Marc Lapprand émet trois remarques :
- La configuration de l’Oulipo ayant complètement changé par rapport à celle de la cellule mère, les objectifs du groupe actuel n’ont plus grand-chose à voir avec ceux du groupe fondateur. L’Oulipo est devenu une manufacture de contraintes.
- La raréfaction des mathématiciens et mathématiciennes à l’Oulipo a transformé l’apport fondamental de la mathématique au sein du groupe, de telle sorte que ce qui était auparavant un modus operandi est devenu un élément qui ressortit davantage à l’esthétique et l’ornementation.
- La transformation de la partie la plus visible et la plus vocale du groupe en star system infléchit encore davantage les visées du groupe. On est passé du laboratoire expérimental aux performances des Jeudis de l’Oulipo et autres formes de spectaclesModèle:Sfn.
Lauren Elkin et Scott Esposito concluent : Modèle:Citation.
Bibliographie
Principales publications de l'Oulipo
- Modèle:Ouvrage Modèle:Commentaire biblio SRLModèle:Commentaire biblio SRL
- Modèle:OuvrageModèle:Commentaire biblio SRL
- Modèle:OuvrageModèle:Commentaire biblio SRL
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Ouvrages critiques
- Modèle:Ouvrage Modèle:Commentaire biblio SRL
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Articles critiques
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