Synarchie
La synarchie désigne originellement une forme théorique d'organisation sociale tripartite développée à la fin du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle par l'ésotériste français Joseph Alexandre Saint-Yves d'Alveydre. Dans son œuvre, cet auteur affirme son rôle messianique en proposant un mode de gouvernance simultané des Modèle:Citation. Cette œuvre est tout sauf secrète, son auteur (qui n'appartient lui-même à aucune société occulte) essayant au contraire de la propager le plus ouvertement, mais elle a peu de succès et n’a jamais été connue que par un petit nombre avant la réutilisation du terme dans les années 1940.
Le terme devient alors la désignation d'une supposée société secrète, occulte, et dotée de gigantesques pouvoirs néfastes, qui par un mystérieux « pacte synarchique d'Empire » d'inspiration ésotérique organise un « complot synarchique » contre et au sein même du régime de Vichy. Le mythe est inventé au printemps 1941 par les tenants du collaborationnisme et de l'antisémitisme les plus frénétiques, en vue de dénoncer leurs adversaires du mouvement technocratique, au moment où ceux-ci prenaient l'ascendant au sein du gouvernement François Darlan. En juin 1941, les feuilles L'Appel et Au pilori accusent à grand fracas la synarchie, « la plus secrète des loges maçonniques », de saboter la révolution nationale de Vichy, les accords franco-allemands de Montoire et la politique antisémite<ref name=":0">Modèle:Article.</ref>. Ces polémistes, dont le plus influent est Marcel Déat, reprennent et élargissent ce mythe et en Modèle:Date- le chef de la police Chavin amplifie la rumeur avec un rapport qui circule y compris dans les ambassades étrangères.
Après la Libération le mythe perdure et refait surface périodiquement, mais évoluant en Modèle:Citation
La Synarchie des occultistes
Étymologie
Le plus ancien usage connu du mot synarchie est attribué à Thomas Stackhouse (1677-1752), un homme de clergé anglais<ref>Biographie de Thomas Stackhouse sur berkshirehistory.com</ref>, dans New History of the Holy Bible from the Beginning of the World to the Establishment of Christianity<ref>Synarchy entry on Noah Webster's 1828 American Dictionary web edition</ref>. Synarchie est composé du préfixe "syn-" (élément du grec signifiant avec) et du mot arkhê, (en grec ἀρχή, « origine », « principe », « pouvoir » ou « commandement »).
La Synarchie selon Saint-Yves d'Alveydre
La Synarchie est une forme de gouvernement exposée par Saint-Yves d'Alveydre dans ses ouvrages, notamment La France vraie (1887)<ref name="Saint-Yves">Alexandre Saint-Yves d'Alveydre, La France vraie, tome 1, chapitre 1, page 146, Calman Lévy, Paris 1887</ref>.
Synarchie nationale
Autorité et Pouvoir
Saint-Yves d'Alveydre reprend la distinction classique entre l'autorité et le pouvoir, pour la developper en une organisation politique et une forme de gouvernement, qu'il appelle la Synarchie , dans laquelle ceux qui ont le pouvoir sont subordonnés à ceux qui ont l'Autorité.
Saint-Yves d'Alveydre distingue ainsi le pouvoir de l'autorité : « L'Autorité proprement dite n'appartient jamais à la force. La politique en est essentiellement dépourvue. Pour rendre plus sensible la différence du Pouvoir et de l'Autorité, je prendrai pour milieu d'observation la Famille. Le père exerce le Pouvoir sur ses fils, la mère et le grand-père l'Autorité. Dès que cette dernière, toute intellectuelle, toute morale, emploie directement la force, soit dans la Famille, soit dans la Société, elle se perd en se confondant avec le Pouvoir. »<ref>Alexandre Saint-Yves d'Alveydre, La Mission des Souverains, Paris, 1882, p.42</ref>.
Saint-Yves d'Alveydre applique cette distinction à la société :
- L'autorité doit appartenir, selon lui, à un "Corps enseignant" réunissant toutes les institutions enseignantes du pays. Un Souverain Pontife doit être mis à la tête de ce corps enseignant. Il doit être désigné d'après ses mérites par le Corps enseignant et il ne dispose que de sa science et de l’estime générale pour asseoir son autorité.
Le chef de l’Exécutif et tous les fonctionnaires sont choisis par l'examen par le corps enseignant et lui restent subordonnés.
- Dans ce type de gouvernement les trois fonctions essentielles de l'activité collective des sociétés : l’Enseignement, la Justice et l’Économie sont représentées par trois chambres sociales non politiques élues professionnellement au suffrage universel. Ces Chambres sociales élaborent les projets de loi.
À ces trois Chambres correspondent trois corps politiques qui ont pour tâche de promulguer et d'appliquer les lois préparées avec mandat impératif par les trois Chambres sociales. Les corps politiques ne peuvent promulguer que des lois préparées à l'avance par ces Chambres sociales.
État Social et État Politique
Selon Saint-Yves d'Alveydre, l'action politique d'un gouvernement sur un peuple ne peut s’exercer sans tenir compte de ce peuple : une loi politique constitutionnelle suppose donc une loi antérieure établissant l'organisation sociale des gouvernés<ref name="Saint-Yves" />. Il distingue ainsi
- la « loi sociale » des gouvernés, qui concerne les trois pouvoirs de l’État social : Enseignement, Juridique, Économique.
- la « loi politique » des gouvernants, qui concerne les trois pouvoirs de l'État politique : pouvoir délibératif, pouvoir judiciaire, pouvoir exécutif.
La Synarchie est l'alliance de ces deux Lois. Les « Conseils sociaux » agissent sur les « Conseils politiques du gouvernement » : l'Enseignement agit sur le Délibératif, le Juridique sur le Judiciaire, l'Ordre Economique sur l'Exécutif. Ensuite, les pouvoirs des gouvernants réagissent sur ceux des gouvernés, en leur rendant en acte ce qu'il en a reçu en puissance<ref name="Saint-Yves" />.
Synarchie européenne
Modèle:... Saint-Yves d'Alveydre traite de la Synarchie européenne dans son ouvrage « La Mission des Souverains »<ref>Alexandre Saint-Yves d'Alveydre, La Mission des Souverains, Paris, 1882, chapitre 12</ref>.
Diffusion des idées synarchistes au sein des mouvements occultistes
(portrait peint en 1899).
Auteur d'ouvrages sur la franc-maçonnerie<ref>Modèle:Article.</ref>, Jean Saunier entend Modèle:Citation de Saint-Yves d'Alveydre Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Le concepteur de l'archéomètre Modèle:Citation, précise également Saunier<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Malgré les efforts déployés par Saint-Yves d'Alveydre, puis par certains de ses disciples autoproclamés pour promouvoir politiquement le projet synarchique, l'attrait pour ces conceptions utopistes est quasi-nul et s'exerce seulement sur quelques personnalités et divers petits groupes occultistes qui rêvent d'un gouvernement élitiste fondé sur des principes d'harmonie cosmique Modèle:Référence nécessaire.
À l'instar d'autres personnalités comme Éliphas Lévi, Saint-Yves d'Alveydre Modèle:Incise exerce une influence au sein du mouvement occultiste qui prend de l'ampleur dans le dernier quart du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle. Aux yeux de Modèle:Citation, toutes obédiences confondues, Modèle:Citation durant le Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle : martinistes tels Papus et Constant Chevillon, anthroposophes comme Rudolf Steiner, théosophes avec Curuppumullage Jinarajadasa et Vivian du Mas<ref name="Saunier 1973 p.94" />... Pour autant, Modèle:Citation, souligne Jean Saunier<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Celui-ci réfute donc toute Modèle:Citation de la part des Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref> représentant ostensiblement le courant synarchique tout au long de Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.
En 1887, le docteur Gérard Encausse fait la connaissance de Saint-Yves, qu'il considère rapidement comme son Modèle:Citation. Le médecin se documente particulièrement au sujet de son projet d'archéomètre<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Par la suite, Encausse, dit Modèle:Citation, fonde en 1891 l'Ordre martiniste qui se réclame de l'enseignement de Louis-Claude de Saint-Martin, dit « le Philosophe inconnu »<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. Regardant les associations occultistes avec condescendance<ref name="Saunier 1973 p.94" />, Saint-Yves n'adhère pas à l'Ordre martiniste, contrairement aux allégations qui l'en qualifient parfois de Modèle:CitationModèle:Note.
Après le décès de Saint-Yves à Pau, le Modèle:Date-, des disputes éclatent entre les disciples qui revendiquent son héritage. Papus négocie alors un accord avec les deux légataires universels de Saint-Yves, le comte et la comtesse de Keller<ref>les enfants d'un premier mariage de sa femme</ref>, puis s'emploie à diffuser les idées du Modèle:Citation en fondant une bibliothèque et un musée. Enfin, il réussit non sans mal à éditer L'Archéomètre en 1912, mais en dépit de sa lettre enthousiaste adressée à Keller (Modèle:Citation), l'œuvre demeure confidentielle. Modèle:Citation, observe Olivier Dard<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.
Face à la perspective d'une guerre prochaine, Gérard Encausse tente de promouvoir politiquement les idées synarchistes<ref name="Dard p.77">Modèle:Harvsp.</ref>,Modèle:Note. Lorsque le conflit éclate, il est mobilisé comme médecin-chef, contracte la tuberculose et meurt le Modèle:Date-<ref name="Dard p.77" />. Son successeur, [[Teder|Charles Détré, dit Modèle:Citation]], incline à penser l'Ordre martiniste Modèle:Citation et à Modèle:Citation. Teder décède en 1918<ref name="saunier173">Modèle:Harvsp.</ref>. Jean Bricaud, patriarche de l'« Église gnostique universelle », accède alors à la tête de l'Ordre et en modifie le rituel, écartant ainsi les femmes et les non-maçons. Cette ligne est maintenue par Constant Chevillon, employé de banque devenu Grand Maître de l'Ordre en 1934 jusqu'à son assassinat par la Milice le Modèle:Date-<ref name="Dard p.81">Modèle:Harvsp.</ref>.
Or les ambitions individuelles visant le titre de Grand Maître<ref>Modèle:Harvsp.</ref> ainsi que les réformes lancées après la disparition de Papus suscitent des brouilles au sein de l'Ordre martiniste durant l'entre-deux-guerres. En arguant son orthodoxie<ref name="Dard p.81" />, un martiniste dissident nommé Victor Blanchard fonde l'Modèle:Citation au début de la décennie 1920Modèle:Note,<ref name="saunier173" />. Chef du secrétariat général de la présidence de la Chambre des députés<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, ce fonctionnaire Modèle:Citation, note l'historien André Combes<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
-
Victor Blanchard.
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Vivian Postel du Mas.
Certains concepts formulés par Saint-Yves d'Alveydre sont repris par d'autres auteurs, notamment l'Agartha que l'aventurier Ferdynand Ossendowski transforme en « royaume souterrain » d'« Agarthi » dans son récit Bêtes, Hommes et Dieux en 1924<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.
La synarchie des occultistes et l'idée de complot
Pour promouvoir son système, Saint-Yves publie plusieurs ouvrages, tient des conférences, participe à la création d’un syndicatModèle:Référence nécessaire, obtient des entretiens officiels avec des hommes politiques (Jules Grévy, Sadi CarnotModèle:Référence nécessaire, etc.), etc. Il mène ainsi une campagne de propagande pour la diffusion de la Synarchie au grand jour.
Selon ses défenseurs, on ne peut donc pas utiliser la Synarchie de Saint-Yves pour justifier, même en théorie, le moindre complot, coup d’État ou révolution. L'idée de complot serait la négation de la Synarchie de Saint-Yves parce que celle-ci ne peut s’établir qu’au vu et au su de tous puisqu’elle est universelle. Tel est le sens premier que Saint-Yves lui donne dans La Mission des ouvriers l'association de tous : « Dans la Mission actuelle des Souverains, j'ai donné à ce Gouvernement nouveau ce nouveau nom : la Synarchie, comme qui dirait l'association de tous, le Totalisme, au lieu du Nihilisme. »<ref>Alexandre Saint-Yves d'Alveydre, La Mission des ouvriers, Paris, 1882, page 60</ref>.
Saint-Yves lui-même n’aurait jamais adhéré à une quelconque société secrète et n’en ayant fondé aucune.
L'historien Jean-Noël Jeanneney souligne que la Synarchie a existé mais tout autrement que ne le dit le mythe : Modèle:Citation
Le mythe du « complot synarchique »
Sous le régime de Vichy
Le terme de Synarchie a été beaucoup utilisé au début des années 1940, pour évoquer un complot cherchant à imposer à la France un gouvernement technocratique allant à l'encontre des objectifs de la Révolution nationale pétainiste. Ce thème apparaît dans des livres, journaux, notes personnelles et circulantes, etc.
Les historiens contemporanéistes s'accordent pour qualifier le complot synarchique de mytheModèle:Note,<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
Modèle:Citation blocSelon l'historien Jean-Noël Jeanneney, le complot synarchique est d'abord censé être une émanation des technocrates exécrée par les éléments les plus réactionnaires de Vichy et la presse parisienne d'orientation fasciste, donc venue de la gauche ("judéo-maçonnisme"), avant d'être présentée, par retournement, comme un impérialisme financier visant à assujettir toutes les économies, venue de la droite ("judéo-réaction"). Ce retournement favorisera sa persistance après la Libération, étant repris par des centaines d'articles de la presse de gauche et même évoqué lors des procès des collaborateurs<ref name=":0" />.
Contexte politique : le gouvernement de l'amiral Darlan
Vichy a été décrit par le politiste Stanley Hoffmann comme une "dictature pluraliste" : les différentes tendances non démocratiques s'y affrontent sans parti unique.
Après le limogeage rocambolesque de Laval par Pétain, le 13 décembre 1940, qui suscite une forte réaction des Allemands, l’intermède de Flandin au gouvernement ne dure pas. L'amiral Darlan est appelé au gouvernement en février 1941. La composition de ce gouvernement mêle, selon Henri Moisset, des "vieux Romains" (traditionnalistes proches de Pétain) et des "jeunes cyclistes" (technocrates qui ambitionnent de moderniser le pays à partir des ministères techniques)<ref name=":62">Modèle:Ouvrage</ref>.
Certains d'entre eux, comme Pucheu, Lehideux (délégué général à l'Équipement national, puis secrétaire d'État à la production industrielle), Paul Marion (secrétaire général adjoint pour l'information), Benoist-Méchin (Secrétaire d'État à la vice-présidence du Conseil) se sont connus avant guerre en fréquentant Jacques Barnaud au sein de la banque Worms.
Henry du Moulin de Labarthète, le directeur de cabinet de Pétain, aurait dit à Darlan, lors de son accession au pouvoir : "Mais vous nous amenez toute la banque Worms ! ", et se serait entendu répondre vertement : "Cela vaut toujours mieux que les puceaux de sacristie qui vous entourent ! Pas de généraux, pas de séminaristes, des types jeunes, dessalés, qui s'entendront avec les Fritz, et nous ferons bouillir la bonne marmite".
La dénonciation de la « synarchie » constitue une arme polémique employée par les adversaires de Darlan, comme Déat, pour discréditer l’amiral aux yeux des Français : le dévoilement d’un tel complot appellerait la nomination de ministres déliés de ses influences, c’est-à-dire précisément de collaborationnistes parisiens, principaux propagandistes de ce mythe<ref name=":622">Modèle:Ouvrage</ref>.
La note Martin
En mai 1941, le maréchal Pétain reçoit un dossier qui prétend exposer Modèle:Citation
Il s'agit d'une note secrète rédigée par le docteur Henri Martin, l'un des ex-dirigeants de la Cagoule qui dirige une officine de renseignements proche des autorités de Vichy. S'appuyant sur un mystérieux document, le « Pacte synarchiste révolutionnaire pour l'empire français », découvert peu de temps auparavant au domicile de l'ingénieur Jean Coutrot (qui s'est suicidé en se défenestrant le matin du 19 mai 1941<ref>Modèle:Harvsp.</ref>), la note de Martin expose en détail les sombres desseins d'un groupe secret, la "Synarchie", qui aurait été à l'origine de la chute, le 13 décembre 1940, du premier gouvernement de Pierre Laval. La note dénonce une organisation dénommée « Mouvement synarchique d’empire » (MSE), à l'origine du « Pacte synarchiste » qui aurait été voté peu auparavant, en février ou en mars, dans l'appartement de Jean Coutrot.
Une du journal collaborationniste L'Œuvre dénonçant le Modèle:Citation soi-disant orchestré par Modèle:Citation d'Modèle:Citation regroupés au sein de la Synarchie.
Cette bande aurait été composée presque exclusivement de polytechniciens et d'inspecteurs des finances se réunissant dans un local appartenant à la banque Worms. Ces rencontres auraient été organisées par Gabriel Le Roy Ladurie. Leurs buts auraient été de faire échec à la Révolution nationale mise en place par Pétain, contrôler l'industrie par le biais de groupes financiers internationaux et protéger les intérêts financiers. La note va circuler non seulement à Vichy, mais également à Washington, Londres et Berlin.
Le rapport Chavin
En juillet, le directeur de la sûreté nationale de septembre 1940 à septembre 1941, le commissaire Chavin, transmet un nouveau rapport sur le sujet. Le texte est dû probablement à la plume d'un autre personnage de coulisses, un nommé Raoul Husson, ancien collaborateur de la statistique générale de la France (Alfred Sauvy émet aussi l'hypothèse que Husson aurait rédigé lui-même le document<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>). Le « rapport Chavin » présente le complot synarchique comme une tentative du capitalisme international pour « assujettir les économies des différents pays à un contrôle unique et antidémocratique exercé par les groupes de la haute banque ». Avec ce rapport, la synarchie change de place sur l'échiquier. Elle est rejetée à l'extrême-droite<ref name=":0" />. Selon le rapport, c'est même cette secte qui aurait suscité, en 1936, l'organisation subversive d'extrême-droite dite la Cagoule, d'Eugène Deloncle.
Mettant également en cause Henry du Moulin de Labarthète, directeur du cabinet civil du maréchal Pétain<ref>Modèle:Article.</ref>, le rapport Chavin évoque le groupe X-Crise, qui réunissait dans les années 1930 des polytechniciens de tous horizons politiques intéressés par les questions de société, dont Jacques Barnaud, Louis Vallon, Pierre Pucheu, Jules Moch et Jean Coutrot. La banque Worms recrutera dans ce milieu.
Le rapport Chavin circule dans les chancelleries. Toujours en 1941, la presse collaborationniste de Paris, qui a eu vent de l'affaire, reproche à la Synarchie d'avoir voulu saboter les accords de l'entrevue de Montoire et d'être inféodée à la Grande-Bretagne et aux États-Unis. Marcel Déat, directeur de L'Œuvre, s'en prend à l'amiral François Darlan (après le changement ministériel où il remplace Pierre-Étienne Flandin), responsable selon lui de l'éviction de Laval et évoque les liens entre plusieurs membres du cabinet Darlan et la banque Worms, dont Jacques Barnaud, François Lehideux, Jacques Benoist-Méchin, Yves Bouthillier et Pierre Pucheu.
-
Yves Bouthillier, ministre de l'Économie nationale et des Finances. -
Pierre Pucheu, secrétaire d'État à la Production industrielle. -
Jacques Barnaud, Délégué général aux Relations économiques franco-allemandes. -
François Lehideux, commissaire à la lutte contre le chômage.
En dépit de leurs liens, ces hommes Modèle:Citation, soulignent les historiens contemporanéistes Henry Rousso et Michel Margairaz<ref>Modèle:Article.</ref>. Ce dernier chercheur précise que Modèle:Citation.
En août 1941, Pétain lui-même accrédite l’idée d’une puissance occulte des « trusts » et dénonce vigoureusement l’autorité excessive des grandes entreprises au sein des comités d’organisation dans son discours dit « du vent mauvais »<ref name=":622" />. Le complot synarchique est ici mobilisé par le chef de l’Etat pour se dédouaner des erreurs du régime en matière de ravitaillement. Ce faisant, il mine durablement l’autorité des comités dont il a contribué à la création. Il lui sert aussi à justifier le tour de vis autoritaire du régime, immédiatement mis en œuvre (serment personnel des fonctionnaires, jugement des anciens responsables républicains, sections spéciales, etc.).
Le mythe synarchique à la Libération
Le mythe ne disparaît pas avec les combats de la Libération.
En 1944 encore, les Renseignements généraux à Vichy incluent dans la « Synarchie » certains gaullistes, radicaux ou résistants ralliés au Général de Gaulle, dont Gaston Palewski, Henri Frenay, Louis Joxe et le colonel Passy. Modèle:Référence nécessaire
À la Libération, la « Synarchie » est désignée par certains résistants comme la cause de la défaite de l’Armée française en 1940<ref name="dard" />. Le communiste Pierre Hervé écrit dans son livre de 1945 La Libération trahie : "Des hommes avertis considèrent que la synarchie, plus forte que jamais, tiendrait par ses affiliés la plupart des leviers de commande", au service de l'anticommunisme et d'une sorte de "néo-fascisme occidental". C'est là une thèse qui est développée par des centaines d'articles de la presse de gauche. Dans les procès des collaborateurs, la synarchie est constamment évoquée, sans que les juges évidemment puissent jamais en cerner les contours<ref name=":0" />.
Dans l'immédiat après-guerre, le rapport Chavin, avec le "pacte", est publié intégralement par le statisticien Raoul Husson dans l'ouvrage Synarchie, panorama de 25 années d’activités occultes (1946). Pour l'occasion, l'auteur adopte le pseudonyme « Geoffroy de Charnay » en référence au Templier homonyme<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>,<ref>Olivier Dard, « La synarchie ou le complot imaginaire », dans Modèle:Ouvrage.</ref>. Le « Pacte synarchiste révolutionnaire pour l'empire français », qui aurait été trouvé chez Courtrot, comportant 598 propositions articulées autour de 13 principes fondamentaux<ref name="Pacte">Pacte synarchiste révolutionnaire pour l'empire français, texte intégral</ref>, aurait été destiné à amener un nouveau système politique.
Au moment où s'enfle la légende synarchique, Jean Coutrot, l'auteur présumé du pacte, n'est plus. Le 19 mai 1941, il a fait une chute mortelle à travers la fenêtre de son appartement parisien. Son moral avait été grandement atteint par la défaite et il souffrait de son amputation. Il semble que Coutrot ait bien possédé chez lui un exemplaire du "Pacte synarchique". Mais l'étude attentive que Richard Kuisel a menée des théories comparées du Pacte et de Coutrot le conduit à nier tout à fait qu'il puisse en être l'auteur ou même l'inspirateur. De vagues similitudes parcellaires - qui étaient dans l'air du temps - ne permettent en rien de conclure à une connivence<ref>Modèle:Article</ref>. Ainsi en 1933, Prélude, l'« organe mensuel du Comité central d'action régionaliste et syndicaliste », revendique le terme « synarchie » dans un encadré : Modèle:Citation Toutefois, la revue ne persiste pas à revendiquer cette appellation suggérée par le docteur Pierre Winter<ref name="Jarcy">Modèle:Ouvrage.</ref>.
Le mythe politique après-guerre
Évocations contemporaines du mythe, de l'extrême droite à l'extrême gauche
Malgré son invraisemblance, le mythe n'en réapparaît pas moins de temps en temps. La croyance en la synarchie vue comme Modèle:Citation demeure prégnante dans certains milieux politiques.
Ainsi, selon un auteur catholique et antimaçonnique adoptant le pseudonyme de A.G. Michel, le « Pacte synarchiste révolutionnaire pour l'empire français » aurait été rédigé en 1936 avant de devenir un agenda politique réel à partir de 1945 à la conférence de Yalta. Ses mots d'ordres seraient ceux qu'ont propagés en France la franc-maçonnerie laïciste et socialiste du Grand Orient de France<ref>A.G. Michel, Mondialisme maçonnique, Éditions du Trident, p. 103.</ref>.
Par ailleurs, l'ex-cagoulard et vichysto-résistant Henri Martin, auteur de la note ayant créé le mythe<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, transmet sa croyance à son gendre, l'écrivain d'extrême droite Pierre de Villemarest<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. Celui-ci considère la nouvelle politique économique (NEP) en URSS, le fascisme en Italie, le nazisme en Allemagne, le New Deal aux États-Unis et la Révolution nationale en France comme des phénomènes à l’identité foncièrement semblable, voulus et provoqués simultanément par la Synarchie, qu'il croit liée à des hautes loges de type maçonnique d’obédience martiniste<ref>Pierre de Villemarest, Les Sources financières du nazisme, éd. CEI, 1984, Modèle:P.</ref>.
Roger Mennevée soutient, quant à lui, que la Synarchie est un centre de décision unique et mondial, une des « forces occultes qui mènent le monde. » Selon cet essayiste, il y aurait un Modèle:Citation (protestant) dirigé par des anglo-saxons et des nordiques, un Modèle:Citation (Modèle:Citation) réunissant les intérêts financiers concentrés autour de l’Église et un Modèle:Citation (communiste) tendant à déposséder les deux premiers de leur prédominance<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Il y voit l'action occulte des jésuites<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. En 1955, dans la revue Contre-Courant de l'anarchiste Louis Louvet, Paul Rassinier publie un article intitulé « Le Parlement aux mains des banques », où il Modèle:Citation, selon le Maitron<ref>RASSINIER Paul [Dictionnaire des anarchistes], Le Maitron, lire en ligne.</ref>.
Le mythe politique relancé par Annie Lacroix-Riz
Conspiracy Watch qualifie la liste des participants de Modèle:Citation
Militante au Pôle de renaissance communiste en France (PRCF)<ref name="La Galaxie Dieudonné p.52">Modèle:Ouvrage.</ref>, l'historienne marxiste-léniniste Annie Lacroix-Riz tente d'accréditer la théorie du complot synarchique<ref>Modèle:Lien web.</ref> en affirmant que Modèle:Citation n'auraient pas eu pour but de ruiner la Révolution nationale du maréchal Pétain mais représenteraient les intérêts de groupes financiers et d'organismes patronaux liés à des groupes ou organismes allemands souhaitant comme leurs homologues d'outre-Rhin l'instauration d'un régime fasciste<ref name="Lacroix-Riz">Annie Lacroix-Riz, Le Choix de la défaite : les élites françaises dans les années 30, éd. Armand Colin, 2006, 671 p Modèle:ISBN</ref>. En outre, Lacroix-Riz affirme que le gouvernement d'Édouard Daladier se serait montré complaisant vis-à-vis des éléments anti-républicains en raison de Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp.</ref>,<ref>Modèle:Article.</ref>.
Or l'historien Hubert Bonin signale qu'en élargissant Modèle:Citation, Annie Lacroix-Riz Modèle:Citation. Pour sa part, l'historien Gilles Morin observe que Modèle:Citation De surcroît, Modèle:Citation conduit Lacroix-Riz à plusieurs approximations sur la Cagoule et à pratiquer Modèle:Citation au sujet de l'entourage du général de Gaulle au sein de la France libre<ref>Modèle:Article.</ref>.
L'historien Thibault Tellier souligne qu'en dépeignant un complot synarchique infiltrant l'État républicain, Annie Lacroix-Riz allègue d'une part la diversité des conspirateurs Modèle:Citation. Or Thibault Tellier ajoute que Modèle:Citation De la sorte, les considérations de Lacroix-Riz sur le personnel politique français de 1940 Modèle:Citation<ref>Modèle:Article.</ref>,<ref>T. Tellier développe le cas particulièrement aiguë d'Édouard Daladier. Tout comme son successeur à la tête du gouvernement en Modèle:Date-, Paul Reynaud, sont-ils présentés comme bienveillants à l'égard du complot. Paul Reynaud est même décrit comme un « faux républicain », ce qui est inexact au regard de sa carrière politique. Si la présence dans son entourage de financiers, favorables pour certains à un compromis avec l'Italie, est avérée, cela n'en fait pas pour autant des comploteurs contre la République, et encore moins de Reynaud un partisan, au mieux complaisant, de ces thèses.</ref>.
L'historien Olivier Dard estime que ces écrits relèvent Modèle:Citation À titre d'exemple d'un Modèle:Citation politiques, l'historien Nicolas Lebourg mentionne Modèle:Citation qui viennent Modèle:Citation.
Comme le conclut Jean-Noël Jeanneney, Modèle:Citation
Annexes
Sources primaires
Ouvrages de Saint-Yves
- Testament lyrique, 1877 [1]
- Clefs de l’Orient, 1877
- Missions
- Mission des Souverains, par l'un d'eux, Paris, Calmann Lévy, 1882, 435 p. Rééd. 1948 [2]
- Mission des Ouvriers, Paris, Calmann Lévy, 1882, Modèle:3e éd. 1884, 64 p. Rééd. Nice, Bélisane, 1979, 64 p. [3]
- Mission des Juifs, Paris, Calmann Lévy, 1884, 947 p. Rééd. Éditions traditionnelles 1973
- Mission de l’Inde en Europe, mission de l'Europe en Asie. La question du Mahatma et sa solution, 1886. Rééd. Dualpha, 2006, 222 p. [4]
- La France vraie ou la Mission des Français, 1887
- Jeanne d’Arc victorieuse, 1890
- L'Archéomètre, clef de toutes les religions et de toutes les sciences de l'Antiquité, réforme synthétique de tous les arts contemporains (1895 ss., édité après la mort de Saint-Yves), Paris, Dorbon aîné, 1911, 332 p. Rééd. Guy Trédaniel, 1990, 332 p. [5]
Bibliographie
Études sur Saint-Yves et l'ésotérisme
Études historiques sur le complot mythique de la synarchie
- Modèle:Article.
- Modèle:Ouvrage.
- Modèle:OuvrageModèle:Commentaire biblio
- Modèle:Article.
- Modèle:Ouvrage.
- Modèle:Article.
- Modèle:Ouvrage.
Mythes conspirationnistes sur la synarchie
- Modèle:Ouvrage.
- Raoul Husson (sous le pseudonyme de Geoffroy de Charnay, Synarchie, panorama de 25 années d’activités occultes, 1946.
- Modèle:Ouvrage.
- Henri Azeau et André Ulmann, Synarchie et pouvoir. Histoire véritable de la synarchie, 1968, présentation en ligne.
- Yann Moncomble, Du viol des foules à la Synarchie ou le complot permanent, Faits et Documents, 239Modèle:Nb p.
- Modèle:Ouvrage.
- Modèle:Ouvrage.
- A.G. Michel, Mondialisme maçonnique, Éditions du Trident.
- Roger Mennevée, Documents politiques et financiers.
Articles connexes
Liens externes
- Lien vers un article issu d'une revue martiniste sur la synarchie (référence à Saint-Yves d'Alveydre) et le Mouvement Synarchique d'Empire .
- Pacte synarchiste révolutionnaire pour l'empire français, texte intégral.
- « La synarchie. Le mythe du complot permanent, d'Olivier Dard », Conspiracy Watch.