Sœurs Goadec
Modèle:Infobox Musique (artiste)
Les sœurs Goadec (Modèle:En langue) sont un trio de chanteuses bretonnes originaires de Treffrin (Côtes-d'Armor).
Trois sœurs constituent le trio : Maryvonne (1900-1983), Eugénie (1909-2003) et Anastasie Goadec (1913-1998). Elles commencent à animer des festoù-noz en 1956, parmi les couples de sonneurs et les chanteurs. Accompagnées jusqu'en 1964 de leurs deux autres sœurs, Louise (1903-1964) et Ernestine (1911-1964), leur répertoire est principalement constitué de gwerzioù. En trio, elles tentent d'intégrer le chant à danser et développent une nouvelle technique de kan ha diskan.
La vague « pop celtic » et l'engouement pour la musique folk les propulsent en 1972 et 1973 sur le devant de la scène, à la suite d’Alan Stivell, un de leurs grands admirateurs. Les trois sœurs ont beaucoup apporté à la culture bretonne et à sa pérennisation<ref>Anarvorig.com « Les légendaires voix des sœurs Goadec »</ref>.
Biographie
Nées au début du Modèle:Lien siècleModèle:Vérification siècle vers Carhaix (le Poher en Centre-Bretagne), les trois sœurs Goadec sont initiées dès leur plus jeune âge à l'art du chant traditionnel breton : gwerz, kan ha diskan… Né à Nantes puis sacristain à Treffrin, leur père Jean-Louis Goadec ne connaissait pas le répertoire des paysans<ref name=":0">Modèle:Article</ref> mais devient un chanteur réputé et transmet naturellement sa passion à ses treize enfants<ref>Modèle:Harvsp</ref>. Leur mère Victorine Claude et leur tante sont couturières et chantent à la maison, dans l'église ou au travail<ref name=":0" />. Elles ont deux autres sœurs et huit frères, dont un de leurs frères, très bon chanteur, est tué lors de la guerre de 14-18<ref name=Vassal61>Modèle:Harvsp</ref>. Plus tard, le travail, les mariages et les contraintes familiales les séparent en tant que famille chantante<ref>Jacques Vassal, livret de l'album Enregistrement public à Bobino.</ref>.
Une carrière de chanteuses traditionnelles dans les festoù-noz
En 1956, les festoù-noz (fêtes de nuit) modernisés « réapparaissent » et reprennent de l'ampleur. Les futures « soeurs Goadec » (sous le nom de leurs conjoints : Maryvonne L'Hôpital, Eugénie Ebrel et Anastasie Le Bras) animent alors, avec leurs sœurs Ernestine (Ernestine Gouesnou dite Tine) et Louise (Louise Le Bournot) les festoù-noz de la région du Centre-Bretagne. La première de ces soirées a lieu en Modèle:Date- à Châteauneuf-du-Faou où vit Louise <ref>Fanch Postic, Aux origines du fest-noz, ArMen Modèle:N°, avril 1998</ref>. Dès 1958, elles accompagnent également dans ses déplacements le cercle celtique Ahès de Carhaix, cela à la demande d’Albert Trévidic, premier président de ce cercle<ref name="Troadec p40">Modèle:Harvsp</ref>. Par ailleurs, elles participent à plusieurs concours de chant mis en place lors du renouveau du fest-noz ; au concours organisé à Gourin par Loeiz Ropars le Modèle:Date-, elles remportent un prix pour leur interprétation de Gousperoù ar raned<ref name="Troadec p40" />.
Le chant à écouter est leur domaine, à la base, mais il est fréquemment sollicité par les organisateurs en Haute Cornouaille afin de ménager une pause pour le public dans la soirée de danse. Cela fait qu'elles partagent l’affiche des festoù-noz avec des chanteurs à danser et des sonneurs pendant toute la décennie 1960<ref name="Troadec p40"/>. Mais en 1964, Louise et Ernestine meurent. Les trois sœurs restantes forment un trio, les Soeurs Goadec, et animent de nouvelles nuits dansantes. Leur renommée, tout comme celle des Frères Morvan, est telle qu'elles se rendent presque chaque week-end à une fête de nuit. Chanteuses de mélodies et de gwerz à l'origine, elles s'essaient avec succès au chant à danser, créant dans une version personnelle du Kan ha diskan, à trois voix.
Un statut de “vedettes” sur scène parmi les groupes électrifiés
Chanteuses traditionnelles, elles sont remises à l'honneur au moment du revival breton (fin des années 1960 et début des années 1970), notamment par Alan Stivell, qui s'inspire de leur répertoire pour le bagad Bleimor. Une complicité naît entre eux<ref>Stivell « Sœurs Goadec », sur Dailymotion</ref>. Il les accompagne plusieurs fois sur scène. Comme le souligne Jacques Vassal dans son ouvrage sur la chanson bretonne, Modèle:Citation<ref>Modèle:Harvsp</ref>.
Lorsque l'engouement pour la musique bretonne pointe, au tout début des années 1970, les sœurs Goadec ont déjà une bonne expérience de la scène. Elles se produisent en Modèle:Date- à La Mutualité à Paris, en compagnie de Glenmor, des Leprechauns et du Bagad Bleimor. En 1972 et 1973, elles sont invitées à se produire au Festival de Kertalg à Moëlan-sur-Mer, où sont présents plusieurs groupes des années 1960, comme Les Leprechauns, Happy Traum, Alan Stivell, entre autres ; les deux concerts donnent lieu à des enregistrements<ref group="n">L'organisatrice du premier festival Pop Celtic de Kertalg, Gwen Ar Goarnig, une admiratrice des Goadec, écrit à leur sujet : Modèle:Citation. Dans un dossier du magazine Best, consacré à la deuxième édition du festival Pop Celtic, Christian Lebrun dira à leur propos : Modèle:Citation, Christian Lebrun, Best, n°62, septembre 1973, « Le second festival de Kertalg », p. 28</ref>. Lors de la deuxième édition, elles interprètent Elysa – dérivée de la chanson de Jean-Pierre Le Scour Plac'hig Eusa (La Fille de Ouessant) –, accompagnées par Alan Stivell à la harpe.
Cette même année, elles chantent à Bobino, mythique « temple du music-hall » de Paris Montparnasse, pour un récital exceptionnel, bénéficiant d'un enregistrement reflétant l'ambiance apportée par les danseurs qui remplissent les allées<ref name=Vassal61 />. Elles se produisent trois soirs de suite dans une salle plus habituée à recevoir Georges Brassens mais le succès est au rendez-vous, malgré le scepticisme de certains<ref>Armel Morgant, « Eugénie Goadec », Musique bretonne, n°177, mars-avril 2003, Modèle:P.</ref>. Pour René Abjean, dans un article paru dans la revue Autrement en 1979, cette mise en spectacle du fest-noz touche à l'absurde et en faisant venir à Paris « les trois vieilles paysannes de Carhaix [...] le folk est redevenu folklore ». Pour Yann Le Meur, Modèle:Citation<ref>« Quand les cinq sœurs Goadec chantaient », Ar Soner, n°345, octobre-décembre 1997, p.14</ref>.
Un patrimoine culturel en héritage familial
Leur popularité n'a pas affecté leur vie quotidienne, refusant le statut de « vedettes »<ref>Jean-Yves Quemener, « Sœurs Goadec : vers un « panthéon breton » ? », Ouest-France, 14 juillet 2014</ref>. Elles poursuivent leur carrière et animent une quantité de festoù-noz jusqu'à l'arrêt du trio en 1983, à la mort de Maryvonne, l'aînée des trois sœurs. Thasie décède à son tour en 1998. Les chanteuses laissent derrière elles une discographie très importante à l'époque pour des chanteurs traditionnels : trois 33 tours enregistrés dans la collection Mouez Breiz en 1967 et 1972, un 33 tours enregistré lors de leur passage à Bobino en 1973, un autre édité par Keltia III (label de Alan Stivell) en 1975 et un disque 45 tours édité chez Barclay en 1975, sans compter de nombreuses présences sur des albums collectifs ou des compilations ainsi que les nombreuses archives sonores rassemblées par les collecteurs<ref>Modèle:Harvsp</ref>.
Eugénie rechante sur scène au CLC du Guilvinec lors de son quatre-vingt-cinquième anniversaire en trio avec sa fille à l'initiative de la cérémonie et Denez Prigent un grand admirateur des sœurs Goadec (c'est notamment Eugènie Goadec qui, lors d'une visite chez elle à Carhaix, lui transmet oralement la célèbre Gwerz E ti Eliz Iza qu'il chantera par la suite dans de nombreux concerts à travers le monde).
La chanteuse ré-enregistre un disque en compagnie de sa fille en 1994 (Gwerzioù)<ref>Modèle:Harvsp</ref>. En Modèle:Date-, Eugénie et Louise participent aux vingt-cinq ans de scène de Yann-Fañch Kemener. Le Modèle:Date-, Eugénie Goadec décède à son tour, à l'âge de 93 ans, laissant son trio familial entrer définitivement dans la légende<ref>« Mort de la dernière sœur Goadec », Libération, 20 janvier 2003</ref>. Denez Prigent composera la même année en leur hommage un kan-ha-diskan ayant pour titre Gavotenn an Aeled (La gavotte des anges) qu’interprétera par la suite Louise Ebrel sur son dernier album Tre Tavrin ha Sant Voran.
Répertoire et caractéristiques musicales
Les sœurs Goadec interprètent des gwerzioù, des complaintes qui évoquent des faits historiques le plus souvent tragiques ou tristes et parfois mythologiques. Parmi les plus célèbres de leur répertoire, il y a Gousperou ar raned (Les vêpres des grenouilles), E Ti Eliz Iza (La maison d'Eliz Iza), Ar sorserez, Ar gornadonez, Janedig ar Rouz... Certains de leurs chants seront repris et largement diffusés par divers artistes ou bagadoù, comme E ti Eliz Iza et Deus ganin-me plac’h yaouank<ref name="Troadec p42">Modèle:Harvsp</ref>.
Le chercheur Donatien Laurent remarque qu'au fil des années, leur répertoire s'étoffe : « Chants enfantins, chants à danser, chants satiriques et lyriques, chants dialogués, gwerzioù de tous âges ». Il les a lui-même enregistré chantant des chants de circonstance comme Igenane et Boked eured. Elles pratiquent également le chant à danser, rythmé pour les danses, en animant à cappella des festoù-noz avec la technique du kan-ha-diskan, chant tuilé pour lequel la fin de phrase est reprise par un ou plusieurs autres chanteurs<ref>« Le kan-ha-diskan atypique des sœurs Goadec », Ouest-France, 12 décembre 2012</ref>.
Le spécialiste René Abjean met en avant les particularités qui constituent leur façon de chanter : Modèle:Citation<ref>René Abjean, La musique bretonne, Ed. Jos Le Doaré, Châteaulin, 1975, Modèle:P.</ref>. Et le physicien acousticien Emile Leipp explique : Modèle:Citation<ref>Acoustique et musique, Emile Leipp, 1971, Ed. Masson, Paris</ref>.
Discographie
- 1967 : Les sœurs Goadec de Carhaix, Mouez Breiz, 33523, 33 tours / Réédition Keltia Musique, CD 33523, 2014
- 1967 : Les sœurs Goadec de Carhaix, Mouez Breiz, 522, 33 tours-17 cm
- 1972 : Ar c'hoarezed Goadec, Mouez Breiz 30370, 33 tours / Réédition Keltia Musique, CD 303370, 2014
- 1973 : Ha Bobino, A Bobino, Chant du Monde LDX 74 535, 33 tours / Réédition en 1997 Enregistrement public, Chant du Monde CD 2741081
- 1975 : Elysa, Barclay, 71480, 45 tours
- 1975 : Ar c'hoarezed Goadec, Kanerezed deus Treffrin, Kernew-Uhel, Keltia III KEL 03 / Réédition en 1990, Moueziou bruded a Vreiz, Les voix légendaires de Bretagne, Keltia musique <ref>Ar c'hoarezed Goadec, Musique bretonne (revue), n°105, septembre 1990, Modèle:P.</ref>, KMCD 11
- 2012 : Les sœurs Goadec : Chanteuses du Centre-Bretagne, coll. Grands interprètes de Bretagne vol. 5, Coop Breizh, 2 x CD + livret, 10052
Participations
- 1961 : En passant par la Bretagne, Vega, F 35 S 3015, 33 tours - 25 cm, enregistré le 25/11/1961, aussi sous Ricordi 25 S 041 / Réédition, Fest-noz Cadoudal, en 1975, Arion, ARN 3314, 33 tours
- 1964 : Le pardon des Kan ha diskan, Mouez Breiz, 33 tours, 30347 / Réédition en 2015, CD Keltia Musique
- 1972 : Premier Festival Kertalg de Pop Celtic' 72, Chant du Monde, 33 tours, LDX 74513
- 1973 : Deuxième Festival Kertalg 73, Barclay, 2 x 33 tours, 920453
- 1976 : Skoazell Vreizh, Soutien aux familles des détenus politiques bretons, HLB 7612, 33 tours / Réédition en CD en 2013
- 1978 : Ils se meurent nos oiseaux (Konskried Sant Nikolas), MN 04, 33 tours
- 1994 : Gwerzioù, Eugénie Goadec avec Louise Ebrel, Coop Breizh, CD 429
Filmographie
- 1974 : apparaissent dans leur propre rôle dans le film Vos gueules les mouettes ! chantant l'air traditionnel « E Garnison ».
Compilations, hommages...
- 1989 : Les sources du Barzaz Breiz aujourd'hui (2 titres : An aotrou kont har ar gornandonez et Ar marc'hadour bihan), ArMen / Dastum, 2 x CD
- 1991 : Les musiques de Bretagne (Ar Plac'h Diw Wech Eureujet)
- 1994 : Tradition vivante de Bretagne 2 (Son Ar Patatez)
- 1997 : L'âme Celte de Bretagne et d'Irlande (Konskried Sant Nikolaz)
- 1998 : Fest Vraz - Musiques bretonnes (Ar verjelenn)
- 1998 : Alan Stivell, 1 Douar (La mémoire de l'humain)
- 2000 : Roland Becker, Er roue Morvan
- 2007 : Les ramoneurs de menhirs et Louise Ebrel, Dañs An Diaoul (Dañs Gwadek 1, Dañs Gwadek 2)
- 2008 : Red Cardell, les Frères Guichen et Louise Ebrel, Le Banquet de cristal (Fich fich Logodenn)
- 2009 : Alan Stivell, Emerald (Goadec Rock)
- 2009 : Bretagne, Enregistrements réalisés entre 1900 et 2006 (D'omp d'an un)
- 2009 : La musique bretonne pour les nuls (Ar martolod farw)
- 2012 : DJ Miss Blue, Breizh'n Bass (Remix : Breizh Roots, Amzer 'zo gant ma pado, Burzhudus, Ingarniboom)
- 2012 : Pat O'May, Celtic Wings (Eliz Iza)
- 2012 : Red Cardell et Bagad Kemper, Falling in Love (Ar sorcerez)
- 2014 : The Celtic Social Club, IC Will et Louise Ebrel, The Celtic Social Club (Ar martolod farw, Goadec in Da Club)
Hommages
Nombreux sont les artistes à avoir bénéficié comme exemple du patrimoine oral des sœurs. Les sœurs Goadec, mémoire vive de toute une culture, « princesses de la mémoire », sont « parmi les trésors importants à sauvegarder si on veut que l'expression musicale de la nouvelle Bretagne soit vraiment bretonne » assure Alan Stivell<ref>André-Georges Hamon, Chantres de Toutes les Bretagnes : 20 ans de chanson bretonne, Jean Picollec, Paris, 1981, Modèle:P.</ref>. Pour le sonneur Roland Becker, elles ont Modèle:Citation<ref>« Entretien avec Roland Becker », Ar Soner, Modèle:N°, septembre-octobre 1994, Modèle:P.</ref>. En 2016, il concrétise son projet de rejouer les mélodies de leur répertoire en quatuor sur scène<ref name=":0" />.
En 1994, un hommage leur est rendu par la Kevrenn Alré, dirigée par Roland Becker, au stade du Moustoir, lors du Festival interceltique de Lorient<ref>Modèle:ArticleModèle:Commentaire biblio SRL.</ref>. Denez Prigent a écrit Gavotenn an Aeled, la « gavotte des Anges », air créé dans sa voiture, alors qu'il traversait les monts d'Arrée au retour de l'enterrement d'Eugénie, partie rejoindre ses sœurs<ref>Jean-Luc Padellec, Musique : Louise et Ifig captent l'air bigouden, Le Télégramme, 10 avril 2004</ref>. Alan Stivell leur rend un hommage avec le titre Goadec Rock, figurant sur son album Emerald.
En 2012, Dastum leur consacre un double CD de sa collection « Grands interprètes de Bretagne » coédité par Coop Breizh. Les deux CD sont accompagnés d'un ample livret de 145 pages, abondamment illustré de photos pour la plupart prises lors de leur forte médiatisation après 1972, par des photographes professionnels tels que Hervé Antoine et Claude Jarroir. Il comporte l'ensemble des textes des chants et leur traduction française, une biographie, un hommage de Donatien Laurent à « Marivon Goadeg et ses sœurs » datant de 1986, les témoignages de Louise et Renée Ebrel, filles d'Eugénie Goadec, ou encore de Jeannot Le Coz, qui les côtoya régulièrement en fest-noz<ref name="Troadec p42"/>.
Plusieurs rues en Bretagne portent aujourd'hui leur nom, comme à Quimper (Allée des Sœurs Goadeg) ou à Pontivy (rue des Sœurs Goadec - Straed ar C'hoarezed Gwadeg). La ville de Carhaix a fait sculpter par l'artiste rennaise Annick Leroy les effigies des trois chanteuses dans du bronze à l'échelle 1,25. L’œuvre statuaire, installée sur la place du Champ-de Foire, est inaugurée le Modèle:Date-<ref>Patrimoine culturel breton. Les sœurs Goadec immortalisées à Carhaix, Ouest-France, 12 juin 2014</ref>. Un poème, signé Garlonn, leur est dédié (An Eured, 1975).
Notes et références
Notes
Références
Voir aussi
Bibliographie
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Articles connexes
- Chanson bretonne - Kan ha diskan, Gwerz
- Musique bretonne - Danse bretonne
- Les Frères Morvan, Louise Ebrel
Liens externes
- Hommage aux Sœurs Goadec, par la Kevrenn Alré en 1995
- Modèle:Bases musique
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