Géorgiques
Modèle:En-tête label Modèle:Voir homonymes Modèle:Infobox Livre
Les Géorgiques (« les travaux de la terre ») sont la deuxième œuvre majeure de Virgile, écrite entre 37 et Modèle:Date. Ce long poème didactique de quelque Modèle:Nombre, qui s'inspire du poème d'Hésiode Les Travaux et les Jours, est une commande de son ami et protecteur Mécène. Dédié à Octavien, il se présente en quatre livres, les deux premiers consacrés à l'agriculture (céréales, vigne), les deux suivants à l'élevage (animaux, abeilles). Mais loin d'être un simple traité d'agriculture, comme le De re rustica de Varron (publié en 37), il aborde des thèmes beaucoup plus profonds : guerre, paix, mort, résurrection. En effet, composé dans une période trouble et sanglante dont il garde des traces, il s'élargit à une vaste réflexion sur la beauté mais aussi la fragilité du monde.
Pour Virgile, il ne s'agit plus, comme dans les Bucoliques, son œuvre précédente, de chanter la terre pastorale des origines, mais en détaillant les soins à donner à la terre contemporaine, trop délaissée et malmenée pendant les guerres civiles, d'en célébrer la beauté profonde, de retisser les liens qui unissent les hommes aux végétaux et aux animaux, malgré l'instabilité du monde et le passage inexorable du temps, dans l'espoir de retrouver, avec le retour de la paix, la prospérité sous la conduite de celui qui, sous le nom d'Auguste, va installer la Pax Romana.
Comme dans ses autres œuvres majeures, Virgile utilise l'hexamètre dactylique, dont il a contribué à fixer les règles et qu'il maîtrise à la perfection. Son œuvre précédente a été écrite dans le style dit « humble » (Modèle:Latin), bien adapté à l'églogue, mais pour les Géorgiques, il emploie généralement le style dit « moyen » (Modèle:Latin) qui convient aux œuvres didactiques, déjouant les pièges du prosaïsme grâce à la variété des registres utilisés, avec des élans épiques et lyriques qui préfigurent l'Énéide.
Selon des témoignages antiques, le poème a fait l'objet d'une lecture publique par Virgile lui-même devant Octavien au printemps 29. Cantique à la terre vivante et méditation sur la beauté autant qu'œuvre morale et politique, il est considéré comme l'un des sommets de la création poétique occidentale. L'auteur y atteint une forme de perfection artistique qui lui vaut de mériter, de l'avis de Paul Claudel, le titre de Modèle:Citation. Modèle:Sommaire
Conditions de rédaction
Modèle:Méta bandeau de section
Contexte historique
Publius Vergilius Maro a grandi dans un monde en crise, ponctué de guerres civiles qui n'allaient s'achever qu'en Modèle:Date, avec la victoire à Actium d'Octave<ref group="N">Les historiens modernes le nomment Octavien (Modèle:Latin) pour la période allant de son adoption par Jules César à l'attribution du titre d'Auguste (en -27), mais son nom complet est Modèle:Latin et il se présente dans sa propagande comme « fils du divin César ». Virgile l'appelle toujours Modèle:Latin dans les Géorgiques.</ref> sur Marc Antoine. César est assassiné en -44, les parents de Marc-Antoine s'opposent en Étrurie à Octave entre -41 et -40. Après cette date ces guerres fratricides ne se déroulent plus sur le sol italien, mais elles nourrissent l'incertitude, prolongent l'instabilité politique et soulèvent de multiples interrogations : morales, sociales, philosophiques, religieuses, dont les Géorgiques se feront l'échoModèle:Sfn.
En -37, lorsqu'il commence l'écriture de son poème, Virgile a trente-trois ans et vient de s'installer en Campanie<ref name="Perret-EU">Jacques Perret, « VIRGILE (70-19 av. J.-C.)», Encyclopædia Universalis.</ref>, une terre d'exil pour ce Mantouan. Il est déjà un poète reconnu, voire célèbreModèle:Note : le recueil des Bucoliques est paru l'année précédente, et certaines églogues, la sixième en particulier, ont un tel succès qu'elles sont déclamées sur scèneModèle:Sfn. Virgile est même assez influent pour pouvoir présenter Horace à son protecteur et ami Mécène<ref>Horace, Satires, I, vi, v. 54-55.</ref>. C'est, de son propre aveu, une œuvre de circonstance. Il entreprend, écrit-t-il, la rédaction de ce poème didactique à l'invitation pressante de MécèneModèle:Note, lui-même poussé par Octave ; il s'est laissé embrigader de bonne grâce dans la campagne de propagande pour le retour à la terreModèle:Sfn, lancée au moment d'une accalmie dans la lutte entre Octave et Marc Antoine, dans le but avoué de remettre l'agriculture en honneur dans un monde épuisé et ravagé par ces années de guerres civiles, et de ramener les Romains à la simplicité des mœurs de leurs ancêtres paysans. Plus prosaïquement, il s'agit aussi de régler la situation des vétérans démobilisés, qui se retrouvaient sans ressources et pouvaient devenir une masse manœuvrable et dangereuseModèle:Sfn.
En effet, une paix éphémère a été signée en -39 entre Sextus Pompée et les membres du second triumvirat ; de plus, au printemps -37, Octave parvient à conclure avec Marc Antoine un accord qui allonge la durée de leur triumvirat de cinq années supplémentaires. Mais la guerre contre Pompée reprend en -36 et le conflit entre Octave, Lépide et Marc Antoine se ravive dès -35. Ces événements tragiques sont évoqués plusieurs fois dans l'œuvre par des digressions rapides et violentesModèle:Sfn,Modèle:Note. La paix n'est assurée qu'en Modèle:Date avec l'annexion de l'Égypte, après la bataille d'Actium et le suicide d'Antoine. Ces derniers événements apparaissent en filigrane dans le livre quatre des Géorgiques avec l'apologue de la destruction de la ruche et de la renaissance des abeillesModèle:Note :
Parution du poème
Virgile achève l'écriture des Géorgiques au moment où la paix s'installe enfin, sept ans après avoir commencé leur rédaction. Selon le témoignage des commentateurs anciens, cités par Donat, un de ses biographes<ref group="N">Donat est un grammairien qui vécut au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle. Sa Vie de Virgile est probablement inspirée par un ouvrage de Suétone (De viris illustribus), dont la partie consacrée aux poètes illustres a disparu, lui-même inspiré d'une biographie perdue de Varius, l'éditeur de l'Énéide. C'est la plus développée de celles qui nous sont parvenues.</ref>, il a fait à Atella<ref group="N">Ville osque, berceau de l'atellane, à mi-chemin entre Naples et Capoue, dont les ruines se trouvent près d'Orta di Atella.</ref>, en Campanie, au printemps ou à l'été -29, une lecture publique Modèle:Incise des quatre livres durant quatre soirées consécutives, Modèle:CitationModèle:Note, en présence d'Octave venu y soigner des maux de gorgeModèle:Sfn. Cette date est généralement reconnue comme la date de parution.
Cependant, si l'on en croit les commentaires de Servius Honoratus<ref group="N">Ce grammairien, auteur de Modèle:Latin, signale dans son commentaire du premier vers de la dixième Bucolique que ce Gallus était un ami de Virgile, au point d'occuper le livre IV des Georgiques du milieu jusqu'à la fin (Modèle:Citation étrangère), mais que, par la suite, Virgile le remplaça par l'histoire d'Aristée, à la demande d'Auguste (Modèle:Citation étrangère) ; il note brièvement, dans le commentaire du premier vers du livre IV des Georgiques, le remplacement de l'éloge de Gallus par l'histoire d'Aristée et d'Orphée (Modèle:Citation étrangère).</ref>, le poème s'achevait initialement par l'éloge d'un ami de Virgile, C. Cornelius Gallus, évoqué dans la sixième Bucolique (v. 64)Modèle:Sfn et dédicataire de la dixièmeModèle:Note, qui a participé à la conquête de l'Égypte et a été choisi par Octave pour en être le premier préfetModèle:Sfn. Mais, trop ambitieux semble-t-il<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, il est tombé en disgrâce. Condamné par le Sénat, privé de ses droits, il s'est suicidé en -26, victime probable d'une damnatio memoriae<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, ce qui aurait contraint Virgile, cette même année, à s'auto-censurer et à remanier la fin du quatrième livre des GéorgiquesModèle:Sfn.
Supprimant l'éloge direct d'un homme qui a perdu Modèle:Incise l'amitié et la confiance d'Auguste<ref group="N">Le sénat a donné à Octave le titre d'Augustus le Modèle:Date, au début de son consulat.</ref>, il développe à la place une petite épopée, l'histoire d'Orphée Modèle:Incise, osant ainsi rester fidèle à l'amiModèle:Sfn tout en satisfaisant son goût pour les mythes<ref name="préfaceDion"/>. Suétone rapporte dans De vita duodecim Caesarum<ref>Vie des douze Césars, « Vie d'Auguste », XLVI.</ref> qu'Auguste pleura à la mort de Gallus et ne demanda pas à Virgile de retoucher cet hommage indirect<ref name="préfaceDion">Modèle:Harvsp, préface.</ref>. S'il y a eu remaniement, le travail a été fait avec tant de soin qu'il est pratiquement impossible d'en détecter les tracesModèle:Note : aussi certains commentateurs modernes doutent-ils de son existence, notamment Jacques PerretModèle:Sfn et Nicholas Horsfall<ref>Modèle:Ouvrage (Modèle:2e édition).</ref>.
Présentation
Le poème des Géorgiques est composé au total de Modèle:Nombre. Le terme Modèle:Cita (Modèle:Latin) est une latinisation du mot grec Modèle:Grec ancien (composé de Modèle:Grec ancien, Modèle:Cita, et de Modèle:Grec ancien, Modèle:Cita).
Avant le Res rusticae de Varron<ref group="N">Lorsque Varron le publie, en 37, compilant et résumant les ouvrages existants, il a quatre-vingts ans.</ref>, le seul ouvrage de référence en latin sur l'agriculture était le De agri cultura de Caton l'Ancien, écrit quelque cent trente ans plus tôt. Il en existait cependant plusieurs en grec, en vers (Les Travaux et les Jours d'Hésiode et un ouvrage de Ménécrate d'Éphèse) et surtout en prose : le monumental traité (en punique) du Carthaginois Magon en 28 livres, traduit en grec par Cassius Dionysus d'Utique au Modèle:Lien siècle av JCModèle:Vérification siècle (en 20 livres) puis condensé en six livres par Diophane de Nicée au Modèle:Lien siècle av JCModèle:Vérification siècle<ref name="Préface3">Modèle:Harvsp, préface de Jane Dion.</ref>. Varron résume le tout en trois livres (agriculture ; bétail ; volailles, gibier et viviers).
Plan d'ensemble
Virgile reprend le plan de Varron, avec quelques différences : il développe l'agriculture sur deux volumes et, en éliminant volailles, gibier et viviers, ne garde que les abeilles dans le dernier<ref name="Préface3"/>.
L'œuvre est divisée en quatre livres, de tailles à peu près égales, qui, suivant une progression du matériel vers le spirituel, traitent :
- dans le livre I, du travail de la terre, essentiellement de la culture du blé et les conditions dans lesquelles la terre produit ;
- dans le livre II, de la vie végétale, en particulier des soins à la vigne ;
- dans le livre III, de la vie animale puis de l'élevage, chaque partie se concluant par une méditation, l'une sur l'amour, l'autre sur l'épidémie et la maladie mortelle ;
- dans le livre IV, des abeilles, métaphore de la cité humaine idéale et image de l'inspiration poétiqueModèle:Sfn.
Virgile y combine un exposé didactique, objectif et technique avec l'expression subjective de ses sentiments, en faisant alterner les descriptions et les digressions morales ou pathétiquesModèle:Sfn, pour composer finalement le grand poème du monde à habiter, à ordonner, à cultiver, mais aussi à contempler, à décrire et à chanterModèle:Sfn. Il passe volontairement sous silence certains thèmes, tels les jardins, l'art botanique ou la chasse : le but des Géorgiques, qui célèbrent une vie de soins et de labeur, est bien d'inciter les hommes à cultiver utilement la terre plutôt que leurs conflits<ref>Marie Soyeux, L'été d'un écrivain, La Croix, Modèle:Date.</ref>.
Livre I (514 vers)
Virgile commence par donner, en 4 vers et demi, le sujet de chaque chant des Géorgiques (céréales, vignes, bétail et abeilles), puis invoque les diverses divinités agricoles (18 vers et demi), et enfin Octave (qu'il appelle César)Modèle:Note. Il présente ensuite, vers 50 à 53, les cinq parties qu'il va développer dans le livre 1, en commençant par la fin : les vents, l'aspect du ciel, les modes de culture ancestraux, la nature des sols, la spécificité de chaque région<ref>Modèle:Harvsp, Jeanne Dion.</ref>, développant immédiatement ce premier thème. Dans chaque partie, les développements à caractère agricole sont suivis par des réflexions à caractère philosophique.
- Les travaux agricoles proprement dits
- Vers 54-63 : une rapide évocation de produits spécifiques de chaque région d'Italie, d'Orient, de Grèce (v. 54-59) est suivie d'une évocation (v. 60-63) de Deucalion et de l'humanité, cette « race dure » née après le déluge.
- Vers 63-159 : la qualité des terrains détermine les techniques d'entretien (jachère, écobuage). La terre, nourricière, est personnifiée : c'est la terre-mère ; et si le paysan maîtrise maintenant le drainage, il doit prier pour que le temps soit favorable. Sa première vertu est la tempérance (v. 63-121). La pénibilité du travail de la terre (Modèle:Latin) n'est pas une punition, c'est une sage nécessité voulue par Jupiter : la constance dans l'effort, deuxième vertu, empêche de retourner sous la domination de Cronos/Saturne, car la culture (au double sens d'agriculture et de civilisation) est maîtrise du monde, source de création (v. 121-159)Modèle:Sfn.
- Vers 160-203 : présentation des modes de culture ancestraux et des « armes » que doit soigneusement préparer le paysan : l'araire courbée, les herses et les houes. Non seulement elles lui permettent de maîtriser la nature, mais, confinant au sacré, elles lui apportent la Modèle:Citation. Virgile termine cette partie par la description de l'aire<ref>Modèle:CNRTL</ref> et des diverses semences (v. 160-198), avant de conclure par une réflexion philosophique (v. 199-203) dans laquelle il oppose la force humaine (Modèle:Latin) au principe de dégénérescence communément admis<ref group="N">Le mythe des âges de l'humanité, rapporté par Hésiode dans Les Travaux et les Jours, présente cinq races successives, ou âges successifs dans lesquels l'existence, d'abord idéale, se dégrade progressivement : âge d'or, d'argent, de bronze, des héros et, finalement l'époque contemporaine, l'âge de fer.</ref>, et à l'idée de décadence la troisième qualité du paysan, la [[Virtus (Rome antique)|Modèle:Latin]]Modèle:Sfn.
- Les phénomènes atmosphériquesModèle:Note
- Vers 204-350 : une première recommandation, l'observation du ciel Modèle:Incise est suivie d'une méditation sur la providence divine, qui donne à la fragilité humaine la chance de vivre en zone tempérée, puis sur l'immensité verticale du monde, du firmament au Tartare. La seconde recommandation, la prévision, concerne aussi le ciel (v. 252-337). La liste des travaux à prévoir s'accompagne de l'évocation des Titans en lutte contre le ciel et punis de leur orgueil. La quatrième vertu nécessaire au paysan est la piété ; les fêtes de printemps en l'honneur de Cérès verront son triomphe ; à celles des moissons, ovationné et couronné de chêne, il entonnera des chantsModèle:Sfn.
- Vers 351-514 : le dernier mouvement est consacré aux phénomènes météorologiques, en particulier les vents (v. 351-488). Virgile, s'inspirant d'Aratos de Soles, expose d'abord les signes qui permettent de prévoir le mauvais temps (v. 351-392), puis ceux qui annoncent le retour du soleil (v. 392-423), en insistant sur l'observation des oiseaux, enfin ceux qui ne trompent jamais, venant des dieux eux-mêmes, Soleil et Lune (v. 438-488). Les avertissements du dieu Soleil sont aussi politiques : son éclipse et d'autres prodiges survenus à la mort de César disent sa plainte face au malheur des guerres civilesModèle:Sfn. La dernière méditation (v. 489-514) revient sur les deux sanglantes batailles de Philippes, remportées par Octave. Virgile demande aux dieux de Modèle:CitationModèle:Note, et les interroge : pourquoi ont-ils permis ces batailles fratricides ? Rome n'a-t-elle pas assez payé les parjures de la Troie de LaomédonModèle:Note ? Le poète se désole : tant de guerres par tout l'univers ! Les champs sont en friche et Modèle:Citation.
Livre II (542 vers)
Ce livre est consacré aux arbres, sous la protection de Bacchus, dieu de la croissance et de la fécondité. Signalant d'abord leur mode de reproduction naturel, il détaille ensuite le bouturage et le greffage Modèle:Incise et précise les terres qui leur conviennent. Parmi les cultures arbustives, celle de la vigne, exigeante, dont Virgile énumère seize cépages en détaillant leurs qualitésModèle:Sfn, est la plus longuement développée (v. 259-419). Viennent ensuite (v. 420-457) le rustique olivier, dont le fruit Modèle:Citation (Modèle:Latin), et les autres arbres, utiles, même les plus humbles, pour leurs fruits ou leur bois (pin, cèdre, saule, myrte, cornouiller, buis…). Cette longue énumération se termine par une mise en garde (v. 454-457) contre les « dons de Bacchus », qui Modèle:Citation (Modèle:Latin)Modèle:Note.
Apparemment moins structuré que les autres, le livre II est traité « sous la forme d'une effusion lyrique »Modèle:Sfn. Son thème unique, semble-t-il, est celui d'une surabondance si foisonnante, que le poète se sent impuissant à la décrireModèle:Sfn. Il est ponctué par trois digressions, véritables hymnes à la joieModèle:Sfn : d'abord, un éloge solennel de l'Italie, sa patrie, (v. 136-176), suivi d'un éloge dithyrambique du printemps et du réveil de la nature (v. 323-345), et, en conclusion, un long hymne au bonheur et aux vertus de la vie paysanne (v. 458-542)Modèle:Sfn, Modèle:Citation, dont le début est particulièrement fameuxModèle:Sfn :
Le poète y insère une ardente prière aux Muses (v. 475-492)Modèle:Sfn, dans laquelle il leur déclare l'« immense amour » qu'il leur porteModèle:Sfn,Modèle:Note :
Le livre II déroule ainsi les éléments du bonheur que la Nature offre aux humbles paysansModèle:Sfn. Non la joie pure des philosophes, car la peine (le Modèle:Latin), et l'effort sont bien présents, mais un bonheur simple, qui a un triple caractère : le « doux » amour de la patrie où se mêle l'opulence de la terre, l'héroïsme des hommes et la vertu des citoyens ; la joie du printemps, de la fécondation universelle, des arbres qui relient la terre au ciel et au monde souterrainModèle:Note ; mais surtout ces « biens » inestimables que sont la vie au rythme des saisons, la chance de Modèle:Citation et de toucher au sacré, en respectant les divinités champêtresModèle:Sfn, loin des troubles politiques, Modèle:Citation.
Livre III (566 vers)
Introduit par un véritable prologue de 51 vers Modèle:Incise il a pour thème l'élevage. Mais, à la différence des agronomes, Virgile ne se soucie guère de ses aspects économiques et ne s'occupe pas de tous les animaux domestiques (il ne cite ni les porcs, ni les bêtes de basse-cour)Modèle:Sfn. Au-delà de l'élevage et du dressage, il s'intéresse aux liens entre les hommes et les animaux, sauvages et domestiques, soulignant la fraternité qui existe entre tous les êtres vivants, capables de communiquer, d'aimer, de souffrir, de mourir, ce que les stoïciens appelaient sympathie universelleModèle:Sfn.
Il est découpé en deux parts égales Modèle:Incise conclues chacune par un épisode brillant : le premier (v. 242-283) célébrant la puissance de l'amour, le second (v. 474-566), qui sert aussi de conclusion au livre entier, évoquant la mort à travers l'épizootie du Norique. La position symétrique du désir sexuel et de la mort (Éros et Thanatos) est traditionnelleModèle:Sfn.
La première partie, alternant les références au bœuf et au cheval, suit les étapes du développement des deux espèces Modèle:Incise puis met l'accent sur les soins à donner aux animaux reproducteurs et décrit le patient dressage du bouvillon et du poulainModèle:Sfn. Virgile admire la beauté et la virtus des taureaux et cavalesModèle:Sfn, mais son admiration va surtout aux fiers chevaux, élevés soit pour la course (la gloire) soit pour la guerre (l'honneur et le courage)Modèle:Sfn. L'épisode final, au-delà des amours animales, illustre une maxime qui concerne tous les vivants : Modèle:Latin (« l'amour est le même pour tous », v. 245), soulignant surtout ce que la passion amoureuse (Modèle:Latin) peut avoir de douloureux et de violentModèle:Sfn,Modèle:Note.
La deuxième partie a une construction moins savanteModèle:Sfn. Passant au petit bétail, Virgile évoque les soins que les divers peuples fournissent aux brebis dans la touffeur de l'été et le gel hivernal, pour profiter au mieux de leur laine et de leur laitModèle:Sfn, mais il a un faible pour les chèvres indépendantes et attirées par les hauteursModèle:Sfn. Il poursuit par l'évocation des maladies, et de leurs soins, puis des prédateurs comme les serpentsModèle:Note. Le livre s'achève sur la description apocalyptique de la « peste » qui, un automne, a exterminé non seulement les troupeaux mais toute la faune sauvage du Norique, soulignant l'injustice du sort réservé à des bêtes innocentes et mettant en question la ProvidenceModèle:Sfn.
Livre IV (566 vers)
Encadré par une introduction de 7 vers et une conclusion de longueur similaire (8 vers), il se compose de deux grandes parties à peu près égales, chaque moitié avec des subdivisions en correspondance avec celles de l'autre, selon une architecture à la fois simple et savante, qui contribue à la parfaite unité du livre entierModèle:Sfn.
S'adressant à nouveau à Mécène, Virgile annonce son sujet (v. 1-5) : Modèle:Citation ; ajoutant (v. 6-7) qu'il va sublimer cet humble sujetModèle:Note.
- Première partie
Elle se compose de deux mouvements.
- Vers 8-148 : description des abeilles et de leur milieu de vieModèle:Sfn ; choix de l'emplacement idéal du rucher, fabrication des ruches, observation de l'essaimageModèle:Note, sélection du meilleur « roi », celui qui « sera étincelant, tacheté d'or » (Modèle:Latin, v. 91)Modèle:Note. L'épisode du « vieillard corycien » cultivant son jardin près du Galèse « sous les tours de l'acropole œbaldienne »<ref group="N">C'est-à-dire Tarente, qui passe pour avoir été fondée par des exilés venus de Sparte dont Œbalos est un roi légendaire.</ref>, qui clôt ce passage (vers 125-148), permet d'introduire brièvement l'horticulture, qui fait l'objet d'un traitement spécifique chez les agronomes comme Varron ou Columelle. Sous l'apparence d'une digression, ce récit présente l'idéal de l'auteur : il n'est pas favorable aux grands domaines, préférant le « jardin des abeilles », exploitation à taille humaine, qui permet de trouver le bonheur, dans une vie pauvre peut-être et laborieuse, mais naturelle, équilibrée et sereineModèle:Sfn.
- Vers 149-280 : amplification et spiritualisation du premier mouvement, car les abeilles, qui Modèle:Citation, sont porteuses de parcelles divines. De façon très anthropomorphique sont présentées les conditions de vie, dans la ruche/cité, de cette collectivité laborieuse, vertueuse et chasteModèle:Note, humble et héroïque, dévouée à son roi et à sa patrie. Les abeilles sont menacées de mort si elles piquent, ont froid, sont attaquées par des ennemis, des maladies, une épidémie, mais des remèdes adaptés sont chaque fois proposésModèle:Sfn. À travers elles, Virgile médite sur la situation de la Rome contemporaine, le comportement de ses chefs et l'amorce de la monarchieModèle:Sfn.
- Deuxième partie
À travers le mythe du « Maître arcadien », elle présente une réflexion sur la mort et la renaissanceModèle:Sfn, matériellement, pour les abeilles, par la technique de la Modèle:LatinModèle:Note, et symboliquement pour Rome Modèle:Incise à travers le sacrifice expiatoire d'AristéeModèle:Sfn.
- Vers 281-424 : deuil d'Aristée. Après une rapide présentation (v. 281-314) du procédé utilisé jadis en Égypte pour ressusciter les abeilles Modèle:Incise vient l'histoire du berger Aristée, le premier à l'avoir utilisé. Pleurant la mort brutale de ses abeilles, il va se plaindre à sa mère, la nymphe Cyrène, qui l'envoie consulter le dieu des métamorphoses, Protée.
- Vers 425-558 : restauration de l'essaim. Ses sortilèges neutralisés, Protée accepte de parler (v. 453-527) : révélant à Aristée que la destruction de ses abeilles est le châtiment suscité par Orphée pour la mort d'Eurydice, il raconte sa descente aux EnfersModèle:Note, son imprudence, son deuil inconsolable, sa mort. Cyrène explique alors à son fils les rituels à suivre pour obtenir le pardon des nymphes des bois, compagnes d'Eurydice, et celui des mânes d'Orphée (v. 528-553). Ceux-ci accomplis, il vit s'échapper des cadavres de bovins en décomposition des nuées d'abeilles : après la souffrance et la mort renaît l'espéranceModèle:Sfn.
La conclusion du dernier livre (vers 559-566) sert de conclusion d'ensemble aux Géorgiques. Virgile y signe son nom (vers 563)<ref group="N">Cette signature interne s'appelle la sphragis, du grec Modèle:Lang, sceau.</ref>. Le dernier vers : Modèle:Citation étrangère (Tityre, je t'ai chanté sous le vaste couvert d'un hêtre) est une citation presque exacte du premier vers de la première Bucolique : Modèle:Citation étrangère (Toi, Tityre, étendu sous le vaste couvert d'un hêtre), ce qui crée un lien entre ces deux œuvres, soulignant, dans l'esprit de leur auteur, leur profonde unitéModèle:Sfn.
Les connaissances agricoles
On peut lire les deux premiers vers : Modèle:Latin
Les Géorgiques se présentent comme un poème didactique, un traité d'agricultureModèle:Sfn. Virgile s'est donc solidement documenté.
Les sources
Les auteurs anciens
Il avait à sa disposition un certain nombre d'ouvrages en grec : ceux concernant l'agriculture, comme Les Travaux et les Jours d'Hésiode, les Géorgiques de Diophane de Nicée, mais aussi l'astronomie (les Phénomènes d'Aratos de Soles, les ouvrages d'Ératosthène), la médecine (les Thériaques de Nicandre de Colophon), les travaux sur les plantes de Théophraste, et sur les animaux d'Aristote, dont il s'inspire souvent, tout en se montrant plus intéressé par la pratique que lui, ainsi que des traductions de l'Encyclopédie agricole de Magon le CarthaginoisModèle:Sfn.
Parmi les auteurs latins, il pouvait consulter le De agri cultura de Caton l'Ancien, mais Virgile, au rebours des agronomes passés ou contemporains, n'est pas favorable aux grandes exploitations dotées de nombreux esclavesModèle:Sfn, il le dit lui-même au livre II, v. 412-413 : Modèle:Citation (Modèle:Latin). Alain Michel pense en outre cet ouvrage trop ancien pour son propos, trouvant plus vraisemblable Modèle:Citation, comme Varron de l'Atax (les Phénomènes) ou Cicéron (qui évoque les plaisirs bucoliques de l'agriculture et de la viticulture dans le Modèle:Latin)Modèle:Note.
Les contemporains
Il connaissait Hygin, auteur de traités d'agriculture (De agricultura), d'apiculture (De apibus) et d'astronomie (De astronomia)Modèle:Sfn.
Quant au Res rusticae de Varron de Réate qui vient de paraître lorsqu'il commence à écrire les Géorgiques Modèle:Incise, il a pu en connaître directement les protagonistesModèle:Sfn. Il en reprend le plan mais écrit plus en poète qu'en technicienModèle:Sfn, se refusant à ne traiter que de l'efficacité et de l'utilité, sans tomber dans l'idéalisation comme le feront plus tard les néo-classiquesModèle:Sfn : il n'hésite pas à parler de « gras fumier » (Modèle:Latin)Modèle:Sfn,Modèle:Sfn, de pourriture, de maladiesModèle:Sfn, mais ne s'intéresse qu'aux animaux « nobles », bovins et équidés, alors que Varron parle aussi de la basse-cour et des porcs, Modèle:Citation, souligne Alain MichelModèle:Sfn.
Compte-tenu de la quantité et la variété des sources auxquelles il avait potentiellement accès mais dont la plupart ont aujourd'hui disparu, il n'est pas possible de dire s'il a toujours eu le souci de l'exactitude ; mais il est certain qu'il a dû plus souvent élaguer que broder et Modèle:CitationModèle:Sfn. D'ailleurs, Columelle, dans le tome IX de son traité d'agriculture, consacré à l'apiculture, s'appuie explicitement sur Virgile, dont il reprend en grande partie de ce qu'il dit des abeilles. Pline aussi, dans Naturalis Historia, parue en 77, se réfère souvent à Virgile, dont il allègue ou discute les affirmationsModèle:Sfn.
Place et rôle de l'astrologie
La vision du monde qui prévalait à l'époque de Virgile intégrait spontanément les concepts de l'astrologieModèle:Sfn : cette « science » faisait partie de la tradition savante, au même titre que l'astronomie, l'alchimie, la météorologie, la médecine et la pensée métaphysique, et en étroite relation avec elles. Les néo-pythagoriciens en étaient férus et l'on connait l'influence du milieu pythagoricien sur la pensée de Virgile. Il avait étudié l'astrologie scientifique (la mathematica), dès sa jeunesse, si l'on en croit son biographe Donat, et dans les Géorgiques il se montre à la fois connaisseur, spécialiste et passionné d'astrologieModèle:Sfn.
Or la période historique où vit Virgile est traversée par une petite révolution dans le monde des astrologues : l'ajout d'un douzième signe du zodiaque, obtenu en distinguant la Balance du Scorpion, alors que les « Chaldéens » n'y voyaient qu'un seul signe, celui du Scorpion (dont les pinces forment la Balance). Il s'est passionné pour le problème, d'autant plus qu'Octave, né le 23 (ou 22) septembre 63 av. J.-C., était né, comme lui-même, précisément sous le nouveau signe de la BalanceModèle:Sfn.
Virgile y fait très précisément allusion dans le prologue des Géorgiques (livre 1, v. 24 à 40) : la louange d'Octave commence par l'évocation de sa prochaine immortalité astrale (Modèle:Citation)Modèle:Sfn, et se poursuit par l'association de la divinisation d'Octave avec le signe de la BalanceModèle:Sfn.
La suite du livre premier est consacrée pour une grande part (à partir du vers 204) à l'observation des astres et à l'interprétation des signes du ciel Modèle:Incise mais aussi à la divination et l'étude des présages, ce qui relève d'une astrologie « prédictionnelle »Modèle:Sfn. Ces deux domaines sont inséparables pour Virgile, qui ne fait pas de distinction entre les signes annonciateurs de beau ou de mauvais temps (v. 424-437) et les prodiges annonçant la guerre civile à la mort de César (v. 464-497)Modèle:Sfn, car cela relève pour lui d'un même système relationnel dans lequel l'homme est intégré. Pour vivre authentiquement il faut être capable de lire les signes qu'envoie l'univers, donc l'astrologie est aussi utile à faire pousser les plantes nécessaires à notre survie qu'à trouver le sens véritable de l'existence, tant matérielle que spirituelle, des êtres vivantsModèle:Sfn.
Dans le livre IV sa pensée devient plus métaphysique, voire mystique : il rappelle que les abeilles Modèle:Citation (partem divinæ mentisModèle:Sfn), et ajoute que tout être vivant emprunte en naissant les subtils éléments de la vie à ce principe divin auquel il retournera naturellement après sa dissolutionModèle:Sfn.
Compétences et limites
Virgile a manifestement des connaissances vastes et précises, mais dans l'ensemble, ses indications techniques sur l'agriculture et l'élevage des troupeaux sont trop incomplètes et dispersées pour être utiles à un agriculteur. Ses lecteurs ne sont d'ailleurs pas les paysans, mais ces riches citadins cultivés qui vivent une partie de l'année sur leurs terres, pour leur faire estimer la campagneModèle:Sfn, et prendre conscience de la précarité de la vie des paysans<ref name="Boyer-Culture">Modèle:Lien web.</ref>.
Dans le premier livre (v. 160-175), il emprunte à Varron le vocabulaire technique pour décrire les outils du paysan : tribula, des planches hérissées de pointes pour séparer le grain de l'épi, trahea, sorte de traineau pour fouler le blé sur l'aire, rastri, les houesModèle:Sfn. Sa célèbre description de l'araire, rapide et précise, doit beaucoup à Hésiode, mais celle qu'il présente est plus perfectionnéeModèle:Sfn. C'est l'araire « rapide » (aratrum auritum) italique, avec ses orillons à l'arrière du soc pour rejeter la terre de part et d'autre, son age courbe et son sep divisé à la partie postérieureModèle:Sfn.
Au début du livre II (v. 22-82) Virgile évoque le bouturage et la greffe, qui lui semble la parfaite illustration de la nécessaire collaboration de l'homme et de la nature pour que les propositions de celle-ci trouvent leur achèvementModèle:Sfn, admirant les « invraisemblables merveilles de la greffe »Modèle:Sfn qui semble permettre de croiser des espèces sans tenir compte de leurs affinitésModèle:Sfn. Il poursuit son exposé par une liste d'innombrables cépages et les soins méticuleux que réclame la vigne, l'indispensable taille pour Modèle:Citation (v. 367-370), car sans la taille, la luxuriance des jeunes pousses les ferait retourner au chaos, à l'état sauvageModèle:Sfn. Mais son paysan a aussi recours au tressage, au tuteurage Modèle:Citation (v. 359-360)<ref group="N">Dans l'antiquité, on cultivait la vigne en hautain, divers arbres pouvant servir de tuteurs vivants.</ref>, « guidages » comparables au dressage des animauxModèle:Sfn.
Selon Donat, il avait fait des études de médecine et de mathématiquesModèle:Sfn, et, chez les Anciens, il avait la réputation d'avoir reçu une formation de vétérinaireModèle:Sfn. Il s'y connait visiblement en chevaux, même s'il parle plus en poète qu'en savant des Modèle:Citation (Modèle:Latin)Modèle:Note. Sa compétence médicale et ses limites apparaissent dans sa description de l'épizootie du Norique qui conclut le livre III. Bien qu'elle s'inspire beaucoup de la peste d'Athènes relatée par Lucrèce à la fin du De natura rerum (VI, v. 1138-1286)Modèle:Note, il y montre non des hommes, mais des animaux victimes de maladies. Déchiré entre sa foi en une Providence et la réalité du mal, il accuse les dieux de les avoir laissés souffrir, alors qu'ils sont innocentsModèle:Sfn. En ne décrivant pas une maladie épidémique, mais des animaux frappés simultanément de diverses sortes de maux en fonction de leurs espèces, il pose le problème du mal en généralModèle:Sfn.
Quant à ses lacunes, il les assume :
ou il les justifie avec un peu d'humour, voire une certaine coquetterieModèle:Sfn :
Sa principale lacune, qu'il partage avec les autres auteurs antiques, concerne la reproduction des abeillesModèle:Sfn. S'il présente correctement les règles de l'apiculture et le travail des ouvrièresModèle:Note, il ignore tout du processus d'élaboration du miel, du vol nuptial de la reine et de la raison d'être de l'essaimage. Guidé par les préjugés politiques et sociaux de son temps, il croit que les ruches sont dirigées par un roiModèle:Sfn, faisant de la colonie d'abeilles une sorte de communisme monarchique<ref name="Boyer-Culture"/>.
Étude littéraire
Modèle:Citation explique Frédéric Boyer<ref name="Boyer-Culture"/>. Il y pousse à la perfection le principe de l'adéquation entre le fond et la forme, créant un modèle fondateur qui va devenir pendant des siècles une référenceModèle:Sfn.
Dans sa Vie de Virgile, Donat décrit le processus de création artistique à l'œuvre dans les Géorgiques : Modèle:Citation. C'est un phénomène de sublimation, qui fait de la poésie un élixirModèle:Sfn. Il y a là toute une alchimie de la mémoire et de l'écriture, reposant sur une savante utilisation des rythmes et du vocabulaire pour conférer aux mots épaisseur, pouvoir évocateur, charge, d'abord dans la contrainte formelle du vers scandé puis au niveau de la structure même du poèmeModèle:Sfn.
L'art poétique virgilien
La poésie antique utilise une métrique quantitative, qui joue sur l'alternance de syllabes brèves ou légères (U) et de syllabes longues ou lourdes (–)<ref group="N">Une syllabe est lourde Modèle:Souligner, quand elle contient une voyelle lourde, comme le « ā » de l'ablatif, ou Modèle:Souligner, quand elle contient une voyelle brève suivie de plusieurs consonnes, dans le même mot ou en comptant celles qui commencent le mot suivant.</ref>.
Maitrise de la versification
Virgile n'emploie que le très formel hexamètre dactylique, le vers épique homérique qu'Ennius (239 – 169 av. J.-C.), le « père de la poésie latine<ref>Modèle:Latin pour (Properce (Élégies, III, 3, v. 6) ; Modèle:Latin pour Horace, Épîtres, II, 1, v. 50).</ref> », a « acclimaté » à la poésie en latin. Maitriser l'hexamètre dactylique requiert une grande virtuosité, car, trop exigeant en syllabes brèves, il est mal adapté à la langue latine. Lucrèce, dans son De rerum natura, l'a utilisé avec « beaucoup d'éclats de génie et beaucoup d'art »<ref>Cicéron, Ad Quintum Fratrem, II, 9, § 3. Modèle:Citation étrangère</ref>, faisant de sa traduction d'Épicure, un « beau poème scientifique »<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, cosmique et épiqueModèle:Sfn.
Mais Virgile dépasse LucrèceModèle:Sfn. Maitrisant parfaitement l'hexamètre, il le décline dans les registres les plus variés et utilise finement ses contraintes pour créer une polyphonie complexe qui structure toute l'architecture du poèmeModèle:Sfn. Sa technique de composition évite à ce long poème la lourdeur de l'exposé didactique en jouant sur les rappels, les échos, les allusions, les symétries, les correspondances entre tonalités, rythmes et climats affectifsModèle:Sfn, sans jamais céder à la tentation d'être agréableModèle:Note. Modèle:Citation, explique Roger Lesueur, il entremêle habilement conseils, descriptions, tableaux, exposés, échappées lyriques (comme dans l'épilogue du livre II), voire confidences (comme dans le prologue du livre III)Modèle:Sfn. En accumulant Modèle:Citation les digressions, minuscules fragments descriptifs insérés au milieu de considérations techniquesModèle:Note, Virgile crée Modèle:Citation, renchérit Frédéric Boyer : Modèle:CitationModèle:Sfn. Et son Modèle:Citation lui permet de dominer Modèle:CitationModèle:Sfn.
La recitatio
On ne pratiquait pas la lecture silencieuse à l'époque de Virgile<ref>Modèle:Lien web.</ref> : les manuscrits anciens sont écrits en scriptio continua, sans espaces entre les mots ni ponctuation, et nécessitent donc d'être oralisés pour être intelligibles.
Modèle:Citation, le poème est essentiellement un carmen Modèle:Incise un texte fait pour être psalmodié, déclaméModèle:Sfn. Pour scander correctement, il faut non seulement tenir compte de la quantité des syllabes mais aussi de la place de la ou des césures et des élisions.
Les commentaires antiques insistent d'ailleurs tous sur la nécessité de bien scander pour exprimer toute la musicalité du vers, de découper le texte en unités de sens, la distinctio, sorte de ponctuation orale plus ou moins longueModèle:Sfn. Virgile était réputé déclamer ses œuvres Modèle:Citation<ref name="recitatio"/>.
La poésie des Géorgiques
Le terme qui qualifie la poésie de Virgile depuis l'Antiquité est « suavitas » (« grâce »). Dans son Virgile, Sainte-Beuve évoquait sa Modèle:CitationModèle:Sfn, ajoutant qu'il allait Modèle:CitationModèle:Sfn.
Temporellement les Géorgiques sont régies par le déroulement des saisons et les révolutions du Zodiaque : Modèle:Citation (II, 402)Modèle:Sfn. Mais Virgile y exprime une mélancolie devant la fuite du temps fort admirée par ChateaubriandModèle:Sfn : Modèle:Citation (I, v. 200) ; Modèle:Citation (III, v. 285). Sentimentalement elles sont baignées par la nostalgie diffuse de sa terre natale, Modèle:Citation (« Modèle:Latin »)Modèle:Sfn.
Confronté au problème du Mal et de la souffrance à l'œuvre dans le monde et dans l'histoire, Virgile montre sa compassion. Il se plaint dans le livre premier que Modèle:Citation et que Modèle:Citation (v. 506-507)Modèle:Sfn. Il oppose dans le livre II les « vraies valeurs » de la campagne, en harmonie avec la nature, aux fausses valeurs de la vie urbaine. Et si cette opposition est aujourd'hui devenue un lieu commun, c'est justement parce que Virgile l'a si magnifiquement mise en scèneModèle:Sfn.
Dans cette poésie de la nature, l'affection et la chaleur humaine animent et humanisent l'univers végétal et animalModèle:Sfn. Ses paysages sont des états d'âmeModèle:Sfn où se manifestent émotion, lyrisme contenu, mais aussi envol épique pour décrire, par exemple, le spectacle terrifiant des orages et des tempêtesModèle:Sfn. Passant avec une facilité déconcertante de la grandeur de quelque chose à sa petitesse, chez lui le sublime se joint à la plus grande simplicitéModèle:Sfn. L'expression qu'il utilise au début du livre IV : « mince est la matière, mais pas mince la gloire » (« Modèle:Latin »Modèle:Sfn) pourrait qualifier tout le poème : comme il a glorifié le travail de l'humble paysan, Virgile contemple celui de l'insecte minusculeModèle:Sfn et fait l'expérience de la grandeur, qui se trouve autant dans l'humilité du travail agricole et la petitesse de l'insecte que dans l'infini cosmiqueModèle:Sfn.
Jacques Perret compare le livre IV à une « architecture lumineuse presque immatérielle » de temple grec et le livre III à Modèle:CitationModèle:Sfn. La musicalité et l'harmonie des vers ne sont jamais aussi grandes que lorsque Virgile est profondément émuModèle:Sfn, comme dans les dernières paroles d'Eurydice.
Analyse de l'œuvre
Pour Joël Thomas, Modèle:Citation commencée avec les Bucoliques et dont l'Énéide est l'aboutissementModèle:Sfn : de la nostalgie d'une Arcadie heureuse à la refondation attendue de Rome Modèle:InciseModèle:Sfn grâce à l'enracinement dans le présent de la « terre de Saturne » (« Modèle:LatinModèle:Sfn). Virgile a donc très tôt le pressentiment de ce que sera à terme son œuvre dans son unitéModèle:Sfn. D'ailleurs, les commentateurs anciens ont toujours considéré les trois poèmes comme faisant un tout ; les manuscrits, dès les plus anciens codices connus, contiennent l'ensemble. Et, de même que Virgile a explicitement lié les Bucoliques et les Géorgiques dans la conclusion de ces dernièresModèle:Sfn, il existe une tradition, signalée par Donat Modèle:Incise et confirmée par Servius, qui affirme que l'Énéide commençait initialement par quatre vers qui la reliaient aux ouvrages précédents :
Cet incipit, qui constitue une signature Modèle:InciseModèle:Sfn, montre une montée en palier de l'aimable pastorale aux Modèle:CitationModèle:Sfn. Est-il de Virgile ? Et si oui, est-ce une ébauche ou un choix définitifModèle:Sfn ? Il aura été jugé superflu et supprimé par Varius et Plotius Tucca, qu'Auguste avait chargés d'« amender le texte de l'Énéide et de l'éditer », en -27, deux ans après la mort de Virgile<ref>Modèle:Harvsp, note 1.</ref>,Modèle:Note.
Une œuvre « totale »
Techniquement, les Bucoliques, les Géorgiques et l'Énéide exploitent successivement les trois « styles » de l'hexamètre : « léger » (tenuis), bien adapté à l'églogue, « moyen » (moderatus) pour les Géorgiques, et « élevé » (gravis) pour l'Énéide. Mais s'en tenir à une simple analyse diachronique, comme le fait Jean de Garlande au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, est trop schématique et réducteurModèle:Sfn. Le poète lui-même, attiré par la poésie épique avant même d'écrire les Bucoliques Modèle:Incise, a très tôt souligné son désir de chanter les grands sujetsModèle:Sfn, et toujours refusé de s'enfermer dans un genre, comme il le dit très clairement à plusieurs reprisesModèle:Sfn.
D'abord au début de la {{#ifeq: | s | Modèle:Siècle | IVe{{#if:| }} }} églogue : « Modèle:Latin » ( Muses de Sicile, élevons un peu la voix) ; puis deux fois dans le livre III des Géorgiques : aux vers 8-9, « Modèle:Latin » (Il me faut tenter une voie par où je puisse moi aussi m'élever de terre et faire voler mon nom victorieux de bouche en bouche parmi les hommes) et aux vers 292-293, « Modèle:Latin » (Il me plaît d'aller sur les cimes où jusqu'ici aucune roue n'a laissé sa trace sur la pente douce qui descend à Castalie)Modèle:Sfn, sans compter la longue description du temple qu'il veut construire et orner, et du triomphe qu'il envisage d'organiser pour Octave/César sacralisé, allégorie de son œuvreModèle:Sfn et sorte d'esquisse du projet de l'Énéide, des vers 16 à 48Modèle:Sfn.
Pour Joël Thomas, Virgile est le seul poète latin à avoir su vraiment Modèle:Citation, à avoir, en particulier dans les Géorgiques, fondu le didactique, l'épique et l'élégiaque dans une réalité poétique unique et plus complexeModèle:Sfn ; aux frontières des genres, explorant poétiquement la relation de l'homme au monde et à la nature, ajoute Frédéric BoyerModèle:Sfn. Il montre une attention extrême et bienveillante aux détails, ponctuant de brefs fragments descriptifs les considérations techniques (ce qui relève de l'hypotypose), admirant par exemple l'âne au pas lent qui revient lourdement chargé de la ville, ou la minuscule fourmi qui ramène ses œufs tous les soirs par la même petite route perdueModèle:Sfn.
Dans les Géorgiques, donc, Modèle:Citation dont Virgile compare l'activité fiévreuse aux efforts gigantesques des CyclopesModèle:Sfn et les querelles lilliputiennes aux combats des armées romaines, perfectionnant un genre littéraire aimé des poètes alexandrins, l'ekphrasisModèle:Sfn, sur un mode héroï-comique et avec un certain humour, puisqu'il ajoute « s'il est permis de comparer le petit au grand »Modèle:Sfn (Modèle:LatinModèle:Sfn).
Aussi, pour Alain Michel, les Géorgiques sont-elles probablement le chef-d'œuvre de Virgile, car le poème y rassemble toutes les formes de son talent et de son inspirationModèle:Sfn : depuis la tradition pastorale des Bucoliques, jusqu'aux accents épiques qui préfigurent l'Énéide. À la fois écho d'Hésiode et annonce des Métamorphoses d'Ovide, il fait le lien entre la poésie grecque la plus antique et la tradition « moderne », c'est-à-dire celle de son temps, soit la fin de l'époque hellénistique et le début de l'empire romainModèle:Sfn, donnant à la « grande » poésie en langue latine un éclat inégalé. Œuvre « totale », elle marie poésie et didactisme, subjectivité des sentiments et expression objective, réflexion philosophique et inspiration religieuseModèle:Sfn.
Programme des Géorgiques
Modèle:Citation<ref name="Perret-EU"/>, mais moins l'éloge du travail, qui est présenté comme une nécessité pénible, que celui du Modèle:CitationModèle:Sfn.
Alors que le petit monde pastoral des Bucoliques est clos sur lui-même, les bergers de l'Arcadie vivant dans une sorte de bulle, protégés tant bien que mal, mais toujours menacés d'être écrasés par la résistance du monde et voulant avant tout ignorer sa dure réalitéModèle:Sfn, les Géorgiques s'ouvrent à des préoccupations sociales, proposant de construire un nouvel espace : l'espace social de la petite propriété à échelle humaine (en opposition aux latifundiaModèle:Note) en même temps qu'un espace spirituel de relation aux autres et à la Nature, qui permettra de retrouver l'harmonie et la force fondatrice des originesModèle:Sfn. Elles mettent en scène la disparition du monde « édénique » des Bucoliques où le berger se contentait, Modèle:Latin, (« nonchalant à l'ombre ») de ce que la nature lui offraitModèle:Sfn, montrant, à travers le travail pénible<ref group="N">Le mot Modèle:Latin a une connotation d'effort pénible, de fatigue, qu'a gardé en français le mot « labeur ».</ref>, facteur même et condition de l'évolution de l'homme, la mise en ordre de la nature : le passage à une récolte et un élevage maîtrisésModèle:Sfn. Sans doute le programme des Géorgiques reste-t-il largement utopiqueModèle:Note, mais on y voit les hommes se confronter, avec courage et détermination, à l'expérience de la résistance des contingences naturelles Modèle:Incise condition première de l'agriculture.
Ainsi, par la contrainte d'un travail lent, dur, opiniâtre, répétitif, la nature passe de l'état sauvage à un ordre harmonieux, un équilibre : une culture, une civilisationModèle:Note. Cette contrainte est ferme mais jamais brutale : le paysan (Modèle:Latin) assume un rôle paternel aussi bien vis-à-vis des animaux domestiquesModèle:Note, que de la nature ambiante en généralModèle:Sfn.
Le travail, conséquence de l'héritage prométhéenModèle:Note, est à la fois une malédiction et une force, un vecteur potentiel d'asservissement et de liberté. Si la majorité des écoles de pensée voyaient surtout l'aspect négatif du travail (la fatigue, la dispersion), Virgile, sans dénier la dureté et les risques de la vie du paysan, admire ce qu'elle requiert d'inventivité et d'ingéniosité<ref name="Perret-EU"/>. Comme Lucrèce avant lui<ref>Dans De rerum natura livre V.</ref>, il exalte la notion de progrès, mais il est conscient que les perversions qui l'accompagnent peuvent largement contrebalancer et anéantir ses avancéesModèle:Sfn.
Le cycle de la vie et de la mort
Dans les Géorgiques est très présent le sentiment de la fragilité de notre condition de vivants, à la merci de toutes sortes de catastrophes<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Les quatre livres se closent sur des évènements tragiques et potentiellement mortels : guerres, cataclysmes (livre I), épizootie (livre III), disparition des abeilles (livre IV), montrant que tout à terme se corrompt, que la nature ne se laisse pas totalement maîtriser ; s'y ajoutent, relevant du mythe, la double mort d'Eurydice et le dépeçage d'OrphéeModèle:Sfn ; même le livre II, qui exalte la terre vivante et généreuse, si on prend soin d'elle, fait mention récurrente du royaume des morts Modèle:Incise et se termine par des allusions aux violences des guerres civiles (v. 501-512) : Modèle:Citation, l'exil qui Modèle:Citation ; et la nostalgie du temps de « Saturne d'or » (Modèle:Latin), où :
Au début du livre premier (v. 24 - 40) Virgile oppose la royauté de la terre vivante à l'empire fantasmé de la mort<ref name="chronique FB">Modèle:Lien web.</ref>. Il supplie Octave, identifié à une véritable divinité tutélaireModèle:Note, de ne pas se laisser tenter par le destin de Proserpine, devenue reine, certesModèle:Note, mais du Royaume des Ombres<ref>Modèle:Lien web.</ref>, et l'invite à se soucier de rendre la prospérité à la terre malmenée des vivantsModèle:Sfn :
Et le livre IV s'achève sur l'échec d'Orphée : pas de retour possible, pas de victoire sur la mort, car Modèle:Citation : Modèle:Latin (il n'est pas d'espace, pas de lieu dans la mort), écrit-ilModèle:Sfn. Orphée a, certes, charmé les puissances infernales, mais, Modèle:Citation (Modèle:LatinModèle:Sfn), il s'est montré incapable de maitriser ses pulsionsModèle:Sfn. Et si les abeilles d'Aristée « ressuscitent », il n'y a pas de re-naissance individuelle, pas de réelle palingénésie : quand elles sont mortes, c'est la naissance d'un nouvel essaim qui permet la survie de la rucheModèle:Sfn.
Les abeilles, d'ailleurs, évoquent le mystère de la mort et de la vie par leur existence même et par leurs productions : disparaissant en hiver et réapparaissant au printemps, comme les plantes germinatives, elles fournissent le miel, nourriture alchimique par excellence. Cette « rosée céleste », comme l'appelait AristoteModèle:Sfn, est une substance dont la consistance, le goût, la longue durée de conservation sont sur terre ce qui évoque le mieux la nourriture d'immortalité des dieux, le nectar et l'ambroisieModèle:Sfn.
Les Géorgiques démontrent enfin que tout, même la production des nourritures humaines de base, comme le pain et le vin, passe par un cycle de « vie » et de « mort »Modèle:Sfn : la fermentation du raisin, la levée de la pâte font passer les grains pressés et les grains moulus d'une mort symbolique à une « résurrection » sous les formes plus hautes que sont le vin et le pain, aboutissement du travail de l'homme et des cycles végétatifs symbolisés par Dionysos, divinité de la végétation arborescente, et Déméter, déesse de l'agriculture et des moissonsModèle:Sfn. Virgile établit même un lien subtil entre l'activité du paysan qui travaille à faire émerger une vie ordonnée du jaillissement désordonné d'une nature sauvage, et l'alchimie des abeilles qui créent le miel à partir des fleurs : en latin le mot uva désigne à la fois la grappe de raisin et l'essaim d'abeillesModèle:Sfn.
Le vieillard de Tarente, Aristée et Orphée
Trois figures individuelles mises en scène dans le livre IV permettent à Virgile de méditer sur la condition humaine et de terminer son poème sur une note d'espoir : un vieux jardinier de Tarente (v. 125-146), et deux personnages mythologiques, le berger-paysan Aristée et le poète-musicien Orphée.
L'épisode du « vieillard corycien »
C'est une sorte de digression (excursus) bien détachée de l'ensembleModèle:Sfn, mais dont la place dans le livre IV souligne l'importanceModèle:Sfn,Modèle:Note. Virgile s'implique personnellement dans l'histoire du vieux jardinier : « je me souviens… que j'ai vu » (memini… vidisse) écrit-il (v. 125-127)Modèle:Sfn.
Pourquoi un Corycien et à Tarente ? Si les Ciliciens avaient la réputation d'être d'excellents jardiniersModèle:Sfn, c'est surtout une « personne déplacée »Modèle:Note, qui a connu la souffrance et l'exilModèle:Sfn comme Virgile, ce qui en fait une image du poèteModèle:Sfn ; et Tarente est la capitale du néopythagorismeModèle:Sfn,Modèle:Note. Pourquoi un vieillard ? Le sage vieillard vivant modestement, comme Philémon et Baucis, est un type littéraireModèle:Sfn, mais il rappelle aussi la personnalité de Siron, le maître à penser du jeune VirgileModèle:Sfn. Son domaine est exigu, la terre en est ingrate, et il la travaille lui-mêmeModèle:Sfn. Couché tard, levé tôt, à force de travail incessant et de soin, il obtient une récolte opulente, mariant l'utile et l'agréable : fleurs mellifères, légumes et fruitsModèle:Sfn. Cette autarcie heureuse où le travail acharné donne une récolte surabondante est une image du travail du poèteModèle:Sfn. Le premier, insiste VirgileModèle:Note, il obtient une abondante récolte de miel « écumant », don fourni avec une apparente spontanéité par une nature bienveillante, mais en réalité fruit du travail intense en amont Modèle:Incise. Or le jardinier ne se contente pas de son hortus conclusus. Il se met à transplanter des arbres, réorganisant en démiurge le paysage autour de luiModèle:Note. Le dernier arbre, un platane, symbole de régénération, n'est pas utilitaire : il offre une ombre généreuse Modèle:Incise à des « buveurs » (potantibus), évoquant une réunion d'amis épicuriens comme chez Horace<ref>Odes (livre II, 11, v. 13-17).</ref>, ou peut-être chez Virgile lui-mêmeModèle:Sfn.
À la différence du simple paysan anonyme décrit dans les trois autres livres, le jardinier vise autant la beauté que l'utilitéModèle:Sfn. Sans être poète comme les bergers des Bucoliques, il est créateur de beauté par son travail, l'équivalent du poète dans le monde paysan, l'image du poète « agro-pastoral » qu'est Virgile dans les Géorgiques, figure s'inscrivant entre Aristée, terre à terre, étranger à tout esthétisme, et Orphée, symbole de la poésie élégiaque, celle qu'écrivait justement Gallus et que Virgile admire mais ne pratique pasModèle:Sfn.
Aristée et Orphée
Avec le vieux jardinier, on restait dans le monde des hommes, invités à trouver le bonheur dans la vie pauvre mais équilibrée, harmonieuse et sereine de celui qui « cultive son jardin ». Avec Aristée et Orphée on entre dans le registre des mythes eschatologiquesModèle:Sfn. Aristée, que Virgile appelle le « Maître d'Arcadie » au v. 283, est expert en divination, en médecine, en astronomie, en élevage, en agriculture, en apicultureModèle:Sfn. Il est ici au centre d'un mythe de mort et de résurrection, affirmation que la vie renaît du cœur même de la mort.
Alors que l'entreprise d'Orphée, dans la version choisie par Virgile, s'est terminée par un échecModèle:Note, celle d'Aristée a une conclusion heureuseModèle:Sfn. C'est lui qui devient l'Initiateur, le Grand Instructeur de l'humanitéModèle:Sfn. Virgile l'avait déjà brièvement évoqué par une périphrase au tout début du livre premier parmi les autres divinitésModèle:Sfn :
- Aristée
D'ascendance divine mais menant une vie de simple mortel<ref>Géorgiques, livre IV, v. 326.</ref>, Aristée est lui aussi une sorte d'exilé : il a fui « Tempé la Pénéenne », c'est-à-dire la Thessalie, après avoir perdu ses chères abeilles, ce dont il cherche la raisonModèle:Note. Virgile le présente comme un très jeune homme qui va se plaindre à sa mère des injustes malheurs qui lui arriventModèle:Sfn. Mais si son essaim est mort, il en porte la responsabilité : c'est le châtiment de son agression contre Eurydice. Peut-être la « faute » d'Aristée a-t-elle des résonances politiques dans l'actualité immédiateModèle:Sfn. Il est possible que Virgile suggère là, à mots couverts, une culpabilité d'Octave que certains contemporains ont cru reconnaître sous le personnage d'AristéeModèle:Sfn.
Mais l'ascèse d'Aristée et son sacrifice aux nymphes, narrés en un rythme rapide, Modèle:Incise conduisent à son pardon et au retour de ses abeillesModèle:Note. Virgile clôt son poème sur un miracle : l'image joyeuse de la reformation d'un lourd essaim, pendu en grappe à une branche qui plie sous son poids, note d'optimisme et de joie dans un bonheur retrouvé, promesse pour Rome de lendemains heureuxModèle:Sfn.
- Orphée
La Modèle:Citation est mise en abyme dans celle des abeilles d'AristéeModèle:Sfn. C'est un épyllion de soixante-quatorze vers, une petite épopée de goût alexandrinModèle:Sfn, bonne introduction à l'Énéide qui va suivreModèle:Sfn. Et qui n'a cessé d'inspirer, depuis, poètes et musiciens<ref group="N">Voir la liste des évocations artistiques après l'Antiquité.</ref>.
L'idée de relier ces deux histoires est probablement une invention de VirgileModèle:Sfn, à moins qu'il ne reprenne une source inconnueModèle:Sfn. L'épisode, dans un livre consacré à l'élevage des abeilles, peut surprendre, mais c'est un procédé littéraire (la varietas) remontant à Homère : une parenthèse, une digression pour surprendre et charmer le lecteurModèle:Sfn, avec une portée philosophique<ref name="AM-1129">Modèle:Harvsp, Notice.</ref>.
À première vue, Modèle:Citation, remarque Joël ThomasModèle:Sfn, et les interprétations sont nombreusesModèle:Sfn. Ainsi, pour Jacqueline Fabre-Serris, avec l’histoire du poète Orphée, Virgile dénonce la Modèle:Latin érotique en évoquant Modèle:Citation<ref>Modèle:Lien web, § 5 et 8.</ref>. Pour Joël Thomas, le mythe d'Orphée tel que le traite Virgile Modèle:Citation. Orphée, le Chanteur, tombe pour avoir douté, pour avoir manqué de foi en l'amourModèle:Sfn. Malgré son aura particulière Modèle:Incise il chute, en perdant deux fois Eurydice et en mourant lui-mêmeModèle:Note, incapable de faire entendre sa plainte et impuissant à émouvoir les vivants, alors qu'il avait su charmer les puissances infernalesModèle:Sfn. Pour Xavier Darcos, Virgile met en parallèle l'homme des champs, celui qui est à l'œuvre pour faire l'histoire, et l'homme des chants<ref>Modèle:Lien web, dans Répliques d'Alain Finkielkraut sur France Culture (vers min. 45).</ref> : Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage. Phrase citée dans l'émission.</ref>.
Et si cet épyllion a remplacé un éloge direct de Gallus, c'est une discrète façon de magnifier l'ami malgré sa disgrâceModèle:Sfn.
Conclusion en point d'orgue
Le court épilogue (v. 559-566), conclusion du poème entier, évoque, avec un soupçon d'ironieModèle:Sfn, César (Octavien) triomphant en Orient, « travaillant » à se frayer un chemin vers l'OlympeModèle:Note, tandis que le poète se retire dans son jardin napolitain, chez la douce Parthénope, heureux d'étudier dans l'« obscur loisir» (Modèle:Latin)Modèle:Note, ce temps « divin » consacré à « être », par opposition au temps utilitaire de l'« avoir »Modèle:Sfn. Virgile s'est toujours fixé l'ambition la plus hauteModèle:Note, celle d'être le Vates, le Poète sacré Modèle:CitationModèle:Sfn. Malgré tout son pouvoir, Octave, au bout du compte, n'est qu'un guerrier et le gestionnaire d'une société et d'une économie : il a besoin du poète-démiurge<ref>Modèle:Lien web</ref> pour régénérer le système, conclut Joël Thomas : Modèle:CitationModèle:Sfn.
Postérité de l'œuvre
Rayonnement
Virgile est l'un des rares auteurs antiques dont l'œuvre intégrale, maintes fois recopiée, est parvenue jusqu'à nos jours. Il devient un auteur « classique » de son vivant : dès -26, soit à peine trois ans après la première publication des Géorgiques, Quintus Caecilius Epirota le met au programme de son enseignement en remplacement d'Ennius<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Désormais, tout petit Romain apprend ses lettres dans Virgile. Sauf pendant les temps troublés du Haut Moyen Âge ({{#switch: VII
| e | er | = {{#switch: VII
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini siècles
| Modèle:S mini{{#ifeq: VII|-| – | VII }}Modèle:S mini siècle
}}
| {{#switch: et
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: VII|-| – | VII }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini siècles
}}
}}), Virgile ne cessera jamais d'être enseigné, admiré, imitéModèle:Sfn.
En littérature
De l'Antiquité au Moyen Âge
- Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle
Hautement admiré sous le règne d'AugusteModèle:Note, Virgile subit cependant la concurrence des Poetae novi à la mode pendant la première moitié du siècle : on lui reproche d'écrire avec mollesse, d'avoir un vocabulaire inexpressif, de n'être pas assez « artiste »Modèle:Sfn. Mais Ovide, qui a choisi le vers épique pour écrire ses Métamorphoses, développe dans les tomes X et XI l'histoire d'Orphée telle que Virgile l'avait brièvement chantée dans le livre IVModèle:Note.
Sa véritable glorification commence dans la deuxième moitié du siècleModèle:Sfn : tous les auteurs d'épopée (Stace, Valérius Flacus, Silius Italicus) l'imitentModèle:Sfn ; le poète satirique Martial dédicace un Virgile sur parchemin avec ces mots : Modèle:Citation<ref group="N">Dans Epigrammes, XIV, 126 :Modèle:Citation étrangère.</ref>. Et elle déborde largement le domaine de la poésieModèle:Sfn : le philosophe Sénèque, qui l'appelle « notre Virgile » et le cite abondamment, en particulier dans les Lettres à Lucilius, en nourrit sa pensée philosophiqueModèle:Sfn ; le naturaliste Pline l'Ancien le considère comme une autoritéModèle:Sfn ; l'agronome Columelle écrit en vers le livre X (consacré au jardinage) de son grand traité d'agronomie De re rustica en douze volumes, répondant au vœu formulé par Virgile de voir un jour comblée l'absence de ce thème dans ses Géorgiques<ref>Élizabeth BINE, « Columelle, lat. Lucius Junius Moderatus Caius (Ier s.) », Encyclopædia Universalis.</ref>,<ref group="N">Dans Géorgiques IV, du vers 116 (Modèle:Citation) au vers 148 (Modèle:Citation), encadrant l'épisode du vieillard de Tarente.</ref> ; le grand pédagogue et théoricien du langage Quintilien, dans l'Institution oratoire, lui emprunte nombre de ses exemples et conseille vivement à l'apprenti orateur de lire ses œuvresModèle:Sfn. Dès la fin du siècle se bâtit sa légende : désormais l'influence de Virgile sera universelle, continue, et extraordinairement variéeModèle:Sfn.
- Aux {{#switch
- IV
| e | er | = {{#switch: IV
| e | er | = Modèle:S mini-{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini- siècles
| Modèle:S mini-{{#ifeq: IV|-| – | IV }}Modèle:S mini- siècle{{{3}}}
}}
| {{#switch: et
| e | er | = Modèle:S mini-{{#ifeq: IV|-| – | IV }}Modèle:S mini- siècle
| Modèle:S mini-{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini- siècles
}}
}} et dans l'Antiquité tardive Les grammairiens s'emparent de son œuvre pour la gloser avec sérieux et respectModèle:Sfn : le commentaire vers à vers de ses trois poèmes que fait Servius Honoratus a été conservé ; il nous renseigne sur la façon dont Virgile était compris à son époque.
On pratique le genre virtuose du centonModèle:Sfn, véritable démembrement (diasparagmos) et « formidable désintégration »Modèle:Sfn, dont l'un des plus célèbres, le Virgiliocento de Proba, utilise les vers de Virgile pour écrire une Histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament, un « Virgile amélioré » (Modèle:Latin) comme le dit sa préface<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. On le consulte aussi pour connaître son avenir par la pratique des Modèle:Latin<ref group="N">Il s'agit de bibliomancie. On ouvre le livre au hasard et on pointe un groupe de vers (cf. La consultation des sorts virgiliens par Pantagruel dans Le Tiers Livre au chapitre XIII, pour déterminer les chances de mariage de Panurge).</ref>.
Le succès continu de Virgile est en grande partie lié à la christianisation de son œuvre, en particulier l'interprétation prophétique christianisante de la quatrième bucoliqueModèle:Sfn par LactanceModèle:Sfn et de l'Énéide par Fulgence le MythographeModèle:Sfn.
- Au Moyen Âge
Malgré la réhabilitation du rôle du travail manuel et agricole dans la vie monastique aux {{#switch: et
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: XIII|-| – | XIII }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini siècle
}}, le mythe du laboureur heureux, plombé par la malédiction biblique du paysan Caïn, a disparu de la tradition médiévale dont l'horizon idéal était urbain. Il ne se reformera qu'à la fin du Moyen ÂgeModèle:Sfn.
Ainsi, dans la Divine Comédie, c'est Virgile, « le poète le plus sage de l'antiquité classique », qui conduit Dante à travers les sept cercles de l'Enfer puis les sept du Purgatoire. À l'entrée du Paradis<ref group="N">Au chant XXX du Purgatoire (tercets 15-18), quand Béatrice les rejoint.</ref>, Dante déplore sa disparition Modèle:Citation, écrit Philippe HeuzéModèle:Sfn.
Pétrarque, qui l'admire passionnément et le cite constammentModèle:Sfn, a longuement annoté le manuscrit des œuvres de Virgile qu'il possédait.
===== Du {{#switch: au
| e | er | = Modèle:S mini-{{#ifeq: XVIII|-| – | XVIII }}Modèle:S mini- siècle
| Modèle:S mini-{{#ifeq: au|-| – | au }}Modèle:S mini- siècle
}} =====
À la Renaissance
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, Jules César Scaliger considère que la poésie de Virgile donne l'image la plus pure de la beauté en littérature. Ronsard et Du Bellay admirent la musicalité de sa langue qu'ils cherchent et réussissent souvent à transposer dans leurs sonnetsModèle:Sfn. En Italie, l'humaniste néo-platonicien Ange Politien, auteur d'une Fabula di Orfeo en 1480, écrit un Rusticus en vers latins afin de préparer ses élèves à suivre son cours de 1483-1484 sur Hésiode et les GéorgiquesModèle:Sfn. Dans Manto, la présentation de son cours précédent (sur les Bucoliques), il avait écrit : Modèle:Citation bloc En Espagne, les Géorgiques nourrissent le courant qui se développe autour du « Modèle:Lang » (« Mépris de cour et éloge de la campagne »)Modèle:Sfn. En France, Rabelais ou Montaigne citent spontanément Virgile, en relation avec leur propre œuvreModèle:Sfn : ainsi, dans Le Tiers Livre Modèle:Incise Rabelais cite le vers 168 du livre IV des Géorgiques (Modèle:Latin) qu'il traduit Modèle:Citation, à propos des moines, qu'il considère comme des parasites de l'ÉgliseModèle:Sfn ; Montaigne, qui le mentionne explicitement treize fois, admire Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
À l'époque classique
Même en pleine querelle des Anciens et des Modernes, Charles Perrault ne conteste pas le génie de Virgile et Boileau, dans la Satire IX, v. 175, tance les auteurs baroques qui, selon lui, préfèrent Modèle:CitationModèle:Sfn. Toutefois, signale Antoine Adam dans son Histoire de la littérature française au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, l'un d'eux au moins a Modèle:Citation Virgile, c'est Jean-François Sarrasin, dont les Églogues fourmillent de réminiscences virgiliennesModèle:Sfn. Dans la deuxième partie de son Églogue titrée « Orphée »<ref>Modèle:Lien web, p. 133-135, sur Gallica.</ref>, il traduit les soixante-quatorze vers de l'histoire d'Orphée dans le chant IV des Géorgiques, en supprimant seulement l'allusion à Aristée. Pour Antoine Adam, Sarrasin a, Modèle:CitationModèle:Sfn. Comme preuve de ces réussites il cite les adieux d'Eurydice, Modèle:Citation que l'éditeur de Sarrasin avait déjà relevésModèle:Sfn : Modèle:Vers
La Fontaine à son tour en imprègne nombre de ses Fables, en particulier Le Songe d'un habitant du Mongol<ref>Fables, XI, 4.</ref>,<ref>Le songe d'un habitant du Mogol (orthographe d'époque) sur Wikisource.</ref>, qui, à partir du vers 22 (Modèle:Citation) est une paraphrase du finale du livre II des Géorgiques : Modèle:Citation étrangèreModèle:Sfn,Modèle:Note.
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, pourtant peu tourné vers la poésie, Virgile reste une référence incontestée : une traduction parait en moyenne tous les sept ansModèle:Sfn. Celles des Géorgiques sont sans doute liées au même phénomène de mode que les « bergeries » de Marie-AntoinetteModèle:Sfn. Après celle, en 1649, de l'abbé de Marolles qui « traduisait encore plus mal en vers qu'en prose »Modèle:Sfn, une de l'abbé Desfontaines (en prose) parait en 1743 suivie, dans les années 1760, d'une Modèle:Citation par Lefranc de Pompignan<ref>Jacques Delille, L'Homme des champs, préface p. XVIII et XXI.</ref>.
En revanche, la traduction des Géorgiques par l'abbé Delille, publiée en 1770, connaît un succès extraordinaire. Delille (qui n'a que 27 ans) est encensé comme un nouveau Virgile. Surtout, la pensée du poète latin fait écho au goût du public, qui se passionne pour l'agriculture, et aux préoccupations des physiocrates, pour qui elle est la seule activité réellement productiveModèle:Sfn. Sous le Consulat, en exil entre la Suisse et l'Angleterre, Delille écrit ses propres Géorgiques Modèle:Citation ; elles paraissent en 1800 sous le titre : L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises. Comparant dans sa préface sa situation de « traducteur des Géorgiques de Virgile » à celle du poète latin Modèle:Citation<ref name="Delille"/>, il y croque des scènes champêtres (chant 1)<ref>L'Homme des champs, préface, p. XXII.</ref> ; par contraste avec l'époque de Virgile, fait l'éloge des innovations agricoles (chant 2)<ref>L'Homme des champs, préface, p. XXIII.</ref> ; présente l'observateur naturaliste en promenade (chant 3)<ref>L'Homme des champs, préface, p. XXIV.</ref> ; célèbre enfin, Modèle:Citation (chant 4)<ref name="Delille">L'Homme des champs, préface, p. XXV.</ref>.
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle
Virgile est une référence importante pour Chateaubriand, en particulier dans le Génie du christianisme, mais, plus inspiré par l'auteur de l'Énéide que celui des Géorgiques, il a contribué à répandre l'image du « tendre Virgile »Modèle:Sfn : il imagine ainsi un Virgile mélancolique Modèle:Citation, se renvoyant sa propre image préromantique à travers VirgileModèle:Sfn.
Victor Hugo est tout imprégné de Virgile<ref>Voir l'étude d'Modèle:Lien web (218 p.) sur Internet Archive.</ref>,Modèle:Note. Jeune, il vénère le « maître divin »<ref>Les Voix intérieures, VII « À Virgile ».</ref>, partage ses méditations et lui emprunte maintes expressions : en 1856, dans Les Contemplations, il intitule « Mugitusque boum » (Et le mugissement des bœufs)Modèle:Sfn le poème XVII dans lequel, Modèle:Citation<ref>Modèle:Lien web [PDF].</ref>. Mais pendant l'exil, son admiration se change presque en aversion : le proscrit de Guernesey rejette le poète bien en cour, l'ami du prince Modèle:CitationModèle:Sfn, et traite de « flatterie abjecte » le début du premier livre des Géorgiques, mais, même lorsqu'il condamne l'homme, il reconnaît au poète Modèle:CitationModèle:Sfn,<ref group="N">Hugo écrit dans Post-scriptum de ma vie, Utilité du beau : Modèle:Citation.</ref>. À la fin de sa vie, il se sent l'étoffe d'être le Virgile français », dans l'épopée et dans l'églogueModèle:Sfn.
L'imitation de Virgile court tout au long du siècle : Lamartine (Jocelin, 1836), George Sand (dans ses « romans rustiques ») et Frédéric Mistral (Les Îles d'or<ref group="N">Par exemple :Modèle:Citation étrangère (Fais briller ta blonde lampe, Chasse l'ombre et les fléaux ! Montre-toi, beau soleil ! Pour te voir, les peupliers Montent de plus en plus haut).</ref>) s'en inspirent, témoignant d'un moment heureux dans l'histoire de la paysannerie françaiseModèle:Sfn.
Cependant l'admiration tourne parfois au rejet ou à la dérision : dans À rebours, Huysmans déclare Virgile Modèle:Citation et accuse son hexamètre de sonner Modèle:CitationModèle:Sfn, tandis qu'Alphonse Allais se permet un calembour dans un texte daté du 7 janvier 1900 sur le célèbre Felix qui potuit rerum cognoscere causas.
À l'époque contemporaine
Dans une époque contemporaine moins nourrie de culture classique, l'influence de Virgile devient plus individuelle.
- Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle
Claudel, qui l'admire, invoque l'auteur des Géorgiques dans « Les Muses », première de ses Cinq grandes Odes (publiées en 1911) : Modèle:Vers
Entre 1911 et 1912 le Mercure de France publie les trois volumes des Géorgiques chrétiennes de Francis Jammes, salués par le premier article de critique littéraire de Claudel<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>. Ce poème lyrique, composé de sept chants, s'appuie sur l'ouvrage de VirgileModèle:Note. Une édition de luxe, illustrée de bois gravés de Jean-Baptiste Vettiner avec une reliure de René Kieffer parait en 1920.
En 1922, les Sonnets à Orphée de Rainer Maria Rilke Modèle:Citation sur la mort d'Orphée que Virgile décrit dans le livre IV des Géorgiques : Modèle:Citation.
Giono, Modèle:CitationModèle:Sfn, lui consacre un ouvrage en 1960<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>, et voit en lui un « prophète » et un « guide »Modèle:Sfn ; comme lui, il prône un monde en contact avec la nature, particulièrement dans sa « première veine » (Colline, Regain) et, dans ses derniers ouvrages, met l'accent sur la Modèle:CitationModèle:Sfn, comme dans le premier récit de Ennemonde et autres caractères où il décrit la « fureur » des abeilles sauvages « qui chargent », en suivant les Géorgiques de très près<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
Gide confie à son Journal son ravissement à lire et relire (quotidiennement à la fin de sa vie) tout VirgileModèle:Sfn. En 1944 T. S. Eliot conclut une conférence sur la notion d'auteur classique en affirmant que Modèle:CitationModèle:Sfn.
Claude Simon met sous le patronage de Virgile, auquel il emprunte son titre, le roman qui lui valut le prix Nobel de littérature en 1985, Les Géorgiques, œuvre où, selon Jérôme Lindon, Modèle:Citation
- Au début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle
La prise de conscience du dérèglement climatique redonne aux Géorgiques un regain d'actualité.
Interviewé après sa conférence inaugurale des Rendez-vous de l'histoire de Blois, le 12 octobre 2018, Michel Pastoureau s'écrie : Modèle:Citation
En 2019, Frédéric Boyer titre Le Souci de la terre sa nouvelle traduction. Les Géorgiques lui semblent un poème empreint de gravité et de mélancolie sur la fragilité de notre condition de vivant : Modèle:CitationModèle:Sfn. Considérant Virgile comme un précurseur du « retour à la terre » Modèle:Incise, il remarque aussi combien Modèle:Citation, a des traits étrangement familiers et actuels. Évoquant la mort des abeilles d'Aristée, dans le chant IV, il se demande Modèle:Citation<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
Dans les autres arts
Les Géorgiques, comme les Bucoliques ou l'Énéide, quoique dans une moindre mesure, ont inspiré les peintres et les musiciensModèle:Sfn.
Arts plastiques
- Peinture
Sans illustrer spécifiquement Virgile, mais dans la tradition ornementale préconisée par Vitruve d'utiliser des motifs paysagers, des fresques murales dans les demeures patriciennes, à Rome ou à PompéiModèle:Note, mettent en valeur l'harmonie, la quiétude de la vie à la campagne, permettant à leurs propriétaires de retrouver en ville une image de la nature qu'ils pouvaient admirer dans leurs grands domaines fonciers<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
À partir du Quattrocento, le locus amoenus et le paysage pastoral avec une approche morale relative au bon gouvernement de l'humanité et de la nature sont des thèmes fréquents Modèle:Incise déclinés en fresques murales dans les palais italiens, comme l'Allégorie et effets du Bon et du Mauvais Gouvernement (à la ville et à la campagne) d'Ambrogio Lorenzetti qui orne la salle des Neuf du Palazzo Pubblico de Sienne<ref>Modèle:Lien web.</ref>, ou la grande fresque de la « Salle des Mois » (Modèle:Lang) du Palais Schifanoia à Ferrare, témoin de l'imaginaire culturel de la famille d'Este au début de la RenaissanceModèle:Sfn : elle illustre la vision du monde qui sous-tend les Travaux et les Jours d'Hésiode et le livre premier des Géorgiques Modèle:Incise en présentant les travaux agricoles en fonction du déroulement des saisons et des révolutions du zodiaque (avec les allégories des saisons et les divinités qui leur sont associées)Modèle:Sfn. À la fin du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, en Pologne, dans le Palais de Wilanów, sont peintes par Jerzy Siemiginowski-Eleuter quatre fresques courant le long du plafond de l'antichambre du roi, illustrant chacune un des livres des Géorgiques.
Du {{#switch: au
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: XIX|-| – | XIX }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: au|-| – | au }}Modèle:S mini siècle
}} la peinture de paysage avec figures devient un genre pictural à part entière. Plutôt « arcadien » en Italie et en France, plus réaliste en Flandre<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Dans Les Saisons, Nicolas Poussin illustre le cycle annuel de la nature, les travaux et les joursModèle:Note. En Angleterre, au tout début du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, John Constable, dans ses paysages champêtres, cherche à restituer la nature sur la toile avec réalisme et un souci constant de vérité<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
- Sculpture
Le groupe « Aristée entravant Protée » de Sébastien Slodtz est un élément de la demi-lune du bassin du Char d'Apollon au château de Versailles.
Le groupe « Orphée et Eurydice », œuvre du jeune Canova, représente les deux époux au moment où Orphée se retourne. Sur le socle d'Orphée est écrit Modèle:Citation étrangère et sous celui d'Eurydice Modèle:Citation étrangèreModèle:Note.
En 1862 Ernest Hiolle et Jules Fesquet ont été premier et second prix de Rome pour leur interprétation d'« Aristée pleurant la perte de ses abeilles », et en 1863 Joseph-Michel Caillé expose au salon le plâtre « Aristée pleurant la mort de ses abeilles » qu'il exécutera en marbre en 1866.
Musique
Dans la Symphonie Pastorale, Beethoven s'inspire du livre III dans lequel le thème de la tempête est récurrent, alternant avec l'évocation de la douceur, mais, à la différence de Virgile, il choisit de terminer sur une note apaisée, un calme lumineux après le trouble des élémentsModèle:Sfn.
Cependant, c'est la quête d'Orphée pour ramener Eurydice des Enfers qui a le plus inspiré les musiciens. Toutefois, ils se réfèrent plus souvent aux Métamorphoses d'Ovide, où le mythe est très développé<ref group="N">Les quatre-vingt-dix premiers vers du tome X racontent l'histoire malheureuse d'Orphée et d'Euridice, le long veuvage du poète éploré qui « fuit tout commerce d'amour avec les femmes » (Modèle:Citation étrangère) (v. 79-80) et ne charme plus que les arbres et les bêtes sauvages ; le début du livre XI raconte longuement son supplice en 64 vers, et le retour de son ombre aux Enfers où « il peut enfin se retourner sans crainte pour regarder son Eurydice » (Modèle:Citation étrangère) (v. 66).</ref>, qu'à Virgile dont le récit concentré en 74 vers s'arrête à l'évocation de sa mort, « sa voix et sa langue glacée » continuant à appeler « Eurydice ! » tandis que « le long du fleuve, le rivage en écho redisait « Eurydice » » (v. 525-527).
Leur interprétation du mythe et de sa conclusion sont souvent très libres. Ainsi, dans L'Orfeo de Monteverdi, Orphée se retourne parce qu'il doute de la présence de son épouse. Il ne meurt pas démembré par les Ménades Modèle:Incise mais est tout de suite divinisé. Dans Orphée et Eurydice de Gluck, Eurydice reproche son indifférence à Orphée parce qu'il refuse de la regarder, jusqu'à ce qu'il se retourne. Pour empêcher Orphée de se suicider par désespoir, Amour lui rend Eurydice. Hector Berlioz, qui adapte l'opéra de Gluck aux goûts de son époque en 1859, avec Modèle:Citation, avait composé pour le concours de Rome de 1827 une cantate pour ténor, double chœur de sopranos et orchestre<ref>Modèle:Ouvrage</ref>, La Mort d'Orphée<ref>Modèle:Lien web.</ref>, sur un texte d'Henri Berton, où les derniers mots d'Orphée Modèle:Citation paraphrasent les accents plaintifs de Virgile.
Le très irrévérencieux opéra bouffe Orphée aux Enfers, créé par Offenbach en 1858, est une satire de la mythologie. Dans cette parodie où Orphée et Eurydice ne s'aiment pas, elle flirte avec Aristée qui se révélera être Pluton<ref>Modèle:Note discographique Modèle:P.</ref> :Modèle:Vers
Le mimodrame Orphée de Jean Roger-Ducasse, composé entre 1910 et 1914, mais créé à l'Opéra de Paris le Modèle:Date, met en musique un texte du compositeur établi d'après les poèmes latins<ref>Modèle:Ouvrage</ref>. Alors qu'il travaille sur le livret, l'auteur écrit à son ami André Lambinet, le 16 mars 1912 : Modèle:Citation. Mais il préférerait Orphée déchiré par les Bacchantes<ref group="N">C'est-à-dire la version choisie par Ovide.</ref> que par les femmes de Thrace Modèle:Citation<ref>Modèle:Ouvrage.</ref>.
L'opéra de Pascal Dusapin, Passion<ref>Modèle:Lien web.</ref>, créé en 2008 dans le cadre du Modèle:60e anniversaire du festival d'Aix-en-Provence<ref>Modèle:Lien web.</ref>, est une libre relecture du mythe, inspirée par L'Orfeo de Monteverdi<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Le livret (en italien) reprend le mythe essentiellement à travers le regard d'Eurydice, appelée ici « Elle », alors qu'Orphée est « Lui »<ref>Modèle:Lien web.</ref>. Plus récemment, en 2016, Christina Pluhar propose une relecture personnelle du drame d'Orphée, avec de multiples références au livre IV des Géorgiques, dans Orfeo Chamán qui fait la fusion entre musiques baroques et folkloriques d'Amérique latine<ref>Modèle:Note discographique Modèle:P.</ref>.
Éditions et illustrations des Géorgiques
Les manuscrits
Il existe très tôt des copies de l'œuvre de Virgile : des fragments de papyrus datant du {{#switch: er
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: au|-| – | au }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: er|-| – | er }}Modèle:S mini siècleIV
}} ont été découverts en Égypte et en Palestine<ref>Modèle:Harvsp.</ref>. Le poète Martial (~40 – ~104) évoque Modèle:Citation à son époqueModèle:Sfn. Huit codices remarquables existent encore, plus ou moins complets, écrits en « capitale rustique » (sans espace entre les mots ni ponctuation). Parmi les plus anciens codices majores encore existants le Mediceus Laurentianus (Florence, Laur. 39.1), du milieu du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, est le plus completModèle:Note ; les sept feuillets subsistant du Vergilius Augusteus, écrit en quadrata, sont ornés de lettrines en début de page ; le Vergilius Vaticanus (Cod. Vat. Lat. 3225), du {{#switch: -
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: V|-| – | V }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: -|-| – | - }}Modèle:S mini siècle
}}, qui contient les deux derniers livres des Géorgiques, et le Vergilius Romanus (Cod. Vat. lat. 3867), du {{#switch: -
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: VI|-| – | VI }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: -|-| – | - }}Modèle:S mini siècle
}}, qui contient le texte complet des Géorgiques, sont tous deux abondamment illustrés de vignettes<ref>Modèle:Harvsp.</ref>.
Après le creux des {{#switch: VII
| e | er | = {{#switch: VII
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini siècles
| Modèle:S mini{{#ifeq: VII|-| – | VII }}Modèle:S mini siècle
}}
| {{#switch: et
| e | er | = Modèle:S mini{{#ifeq: VII|-| – | VII }}Modèle:S mini siècle
| Modèle:S mini{{#ifeq: et|-| – | et }}Modèle:S mini siècles
}}
}}, durant tout le Moyen Âge et jusqu'au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, les poèmes virgiliens sont constamment recopiés et diffusés, mais les premiers manuscrits sont très sobres : on connait ainsi une quarantaine de manuscrits du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle non décorés à l'usage des écoles carolingiennesModèle:Sfn. À partir du Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, ils deviennent très nombreux, en particulier en France, en Allemagne, en Italie. Les lettrines font leur première apparition dans les manuscrits bénéventins au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle)Modèle:Sfn, dont l'un, conservé à la bibliothèque nationale de Naples, possède des initiales très décoréesModèle:Note.
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle le nombre de manuscrits ornés de miniatures augmente dans toute l'Europe, lié au regain d'intérêt de l'époque pour les auteurs classiquesModèle:Note. Cela est encore plus net au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, en Flandre, en France et surtout en Italie, où ont été réalisés la majorité des manuscrits qu'on possède encoreModèle:Sfn. Ils portent parfois une date et la signature du copiste, mais le nom de l'enlumineur est rarement connu<ref>Modèle:Harvsp</ref>,Modèle:Note. En général les manuscrits, comme les textes imprimés par la suite, contiennent la succession des trois poèmes de Virgile, reproduits dans le texte original. Certains, cependant, comme le Virgile de Pétrarque, reproduisent la version commentée par ServiusModèle:Sfn. Le nombre et la taille des illustrations sont variables : un frontispice général, comme dans l'exemplaire de PétrarqueModèle:Note ; une illustration à l'incipit de chacun des trois poèmesModèle:Note ; une illustration au début chacun des quatre livres des Géorgiques. L'initiale est souvent historiéeModèle:Sfn et les enluminures des exemplaires les plus luxueux sont en pleine page. La plupart du temps elles illustrent les travaux décrits par VirgileModèle:Note, mais peuvent aussi présenter des portraits de Virgile, de Mécène, parfois associés au travail des paysans, voire de Servius, ou diverses références mythologiques, comme Cérès (Géorgiques I), Bacchus (Géorgiques II), ou Orphée (Géorgiques IV)Modèle:Sfn.
La décoration dépend probablement des exigences des commanditaires. Peu ont été identifiés, à part ceux qui ont apposé leurs armoiries sur leur exemplaire, ou avaient une bibliothèque dont on possède encore l'inventaire. Grands dignitaires nobles ou ecclésiastiques, humanistes érudits, bibliophiles éclairés, ils faisaient partie des hautes couches de la société, voire de familles royalesModèle:Sfn.
Les ouvrages imprimés
Près de cent incunables, illustrés de bois gravés, sortent de presse à partir de 1459Modèle:Sfn.
L'édition princeps est imprimée à Rome en 1469 (chez Arnold Pannartz et Konrad Sweynheim, avec une présentation de Virgile par Giovanni Andrea Bussi, bibliothécaire de Paul II), d'autres sortent à Venise, en 1472 (chez Bartholomeus Cremonensis, avec la Vie de Virgile de Donat)Modèle:Sfn, en 1491 (chez Bartholomeus de Zanis de Portesio). En 1501 Alde Manuce crée l'édition aldine : ce sont des ouvrages in-octavo moins coûteux, utilisant les caractères italiques que Francesco Griffo a créés pour l'occasion. En 1502 parait à Strasbourg un incunable illustré de bois gravés de Johann Grüninger, que reprendra l'édition lyonnaise de Jean Crespin en 1529<ref>Modèle:Lien web.</ref>,Modèle:Sfn.
Par la suite, la plupart des éditions imprimées sont sobres, dépourvues d'illustrations, sauf, au mieux, un « portrait » de Virgile en frontispice. Il existe cependant des éditions luxueuses, comme le Virgile in-folio imprimé à 250 exemplaires par Pierre Didot en 1798, avec vingt-trois gravures signées Girodet, Gérard et David<ref>Modèle:Lien web.</ref>.
Au Modèle:S mini- siècleModèle:Vérification siècle, une traduction des Géorgiques publiée par l'Imprimerie nationale (1944-1947) est illustrée par des eaux-fortes de Dunoyer de Segonzac.
En 2010, Gilles Sacksick publie des estampes inspirées des GéorgiquesModèle:Sfn.
Traductions de l'œuvre
Traduire Virgile est une gageure. Voltaire estimait déjà qu'Modèle:Citation.
Les premières traductions en français datent de la RenaissanceModèle:Sfn :
- Traduction en décasyllabes de Guillaume Michel dit de Tours, en 1519
- Traduction adaptée en décasyllabes de Le Blanc, en 1555
- Traduction des frères Le Chevalier d'Agneaux en 1582.
Mais la première traduction à connaître un retentissement considérable est celle de Jacques Delille en 1769<ref group="N">Disponible sur Gallica : Modèle:Lien web</ref>. Cette traduction assez académique en alexandrins rimés, souvent fidèle et, à défaut, élégamment inventiveModèle:Sfn, connut un énorme succès. Voltaire écrit, à propos de celui qu'il surnomme « Virgilius Delille » : Modèle:Citation ; il propose à l'Académie de réserver à l'auteur une place vacante (il y sera élu en 1774)<ref>Page:Audiat - Un poète abbé, Jacques Delille, 1738-1813.djvu/22 (Biographie par Louis Audiat, page 22).</ref>. C'est cette traduction qu'utilise Julien Sorel pour obtenir un renseignement d'un académicien sans paraître ridicule : Modèle:Citation bloc
Par la suite l'œuvre fut régulièrement traduite, en vers ou en prose (liste non exhaustive) :
- Modèle:Ouvrage Modèle:Pdf Double traduction « l'une littérale et juxtalinéaire présentant le mot à mot français en regard des mots latins correspondants, l'autre correcte et précédée du texte latin, avec des sommaires et des notes par une société de professeurs et de latinistes », rééditée en 1874<ref>Modèle:Ouvrage</ref>.
- Traduction de A. Gentil, Paris, 1900.
- Traduction de Henry Antoine, Paris, 1911, prix Jules Janin<ref>Modèle:Lien web.</ref>
- Modèle:Ouvrage, édition savante, bilingue, plusieurs fois rééditée
- Traduction de Maurice Rat, 1932.
- Traduction en alexandrins non rimés de Hubaux et A. Tomsin, Liège, 1947
- Traduction en vers libres du R.P. A. Nicolas, Paris, Lettres d'Humanité, VII, 1948
- Traduction de fragments des Bucoliques et des Géorgiques par Jacques Perret, dans Modèle:Ouvrage
- Traduction d'Alain Michel, Imprimerie nationale, 1997
- Traduction de Jeanne Dion (livre premier et livre IV, v.198-386), Philippe Heuzé (livre II et fin du livre IV, v.387-566) et Alain Michel (livre III et début du livre IV, v.1-197), (Gallimard, 2015, Bibliothèque de la Pléiade, édition bilingue)
- Modèle:Ouvrage, traduction en versets libres<ref>Modèle:Lien web.</ref>
Notes et références
Notes
Références
Bibliographie
Cette bibliographie contient uniquement les ouvrages qui ont servi à écrire l'article. Un aperçu de l'énorme bibliographie existante sur le sujet est accessible en ligne dans le n°189-190 de Via Latina, sur Persée.fr : Modèle:Lien web et dans l'ouvrage de Joël Thomas, ci-dessous, p. 174-176.
Bibliographie primaire
- Modèle:Ouvrage. Édition bilingue, précédée d'une introduction (pages X à LXXXIX, contenant un Avant-Propos de Philippe Heuzé ; une préface de Jeanne Dion ; La Fortune de Virgile de Philippe Heuzé ; une chronologie et une Note sur la présente édition de Jeanne Dion). Cette édition intégrale reprend en partie la traduction et l'appareil critique des Géorgiques, par Alain Michel, qui datent de 1997.
- Modèle:Ouvrage. Préface de Frédéric Boyer « Faire Virgile » p. 11 à 46.
Bibliographie secondaire
Ouvrages généraux
- Modèle:Ouvrage
- Modèle:Ouvrage
- Modèle:Ouvrage
- Modèle:Ouvrage Modèle:Pdf sur LATIN, GREC, JUXTA
Sur les Géorgiques
- Modèle:Ouvrage, Modèle:Pdf sur HAL/archives ouvertes, avril 2018
- Modèle:Article sur Persée.fr.* Modèle:Article sur Persée.fr.
- Modèle:Ouvrage, Modèle:P., sur Persée.fr.
Divers
- Modèle:Ouvrage, Modèle:P., sur Persée.fr.
- Modèle:Ouvrage, Modèle:P., sur Persée.fr.
- Modèle:Ouvrage, Modèle:P., sur Persée.fr.
Voir aussi
Articles connexes
- Traités antiques sur l'agriculture
- Citations célèbres : Tempus fugit ; Labor omnia vincit improbus ; Felix qui potuit rerum cognoscere causas ; O fortunatos nimium, sua si bona norint, agricolas
- Modèle:Voir référence
- Les Géorgiques (Claude Simon, 1981, prix Nobel de littérature, 1985)
Liens externes
- Modèle:Lien web (Université catholique de Louvain)
- Texte latin :
Modèle:Palette Virgile Modèle:Portail Modèle:Méta bandeau{{#ifeq:|| {{#if:||}} |}}{{#if:||{{#switch:172748432
|oldid= |XXXXXX= |XXXXXXX= |XXXXXXXX= |#default={{#if:172748432||}} }}
}}